Le phosphate dans le sol
Le phosphate est le nutriment majeur limitant la croissance et le développement des plantes terrestres après l’azote (Viruel et al, 2014 ; Shakeela et al, 2017). Il est essentiel à toutes les formes de vie connue et s’implique dans plusieurs processus physiologiques et biochimiques clés tels que : le métabolisme énergétique (ATP), la photosynthèse, la dégradation des glucides, la respiration, la fixation d’N, la régulation des enzymes, le mouvement des nutriments dans la plante et le transport des caractéristiques génétiques d’une génération à la suivante (Johnston et Steén, 2000 ; Viruel et al, 2014).
Le phosphate est également l’élément majeur de la matière organique du sol et des écosystèmes terrestres naturels, il provient de l’altération des roches mères (Lajtha et al, 1999), des apports de P sous forme d’engrais, de résidus végétaux, de déchets agricoles et/ou biosolides (Mullins, 2009). Les sols peuvent contenir de grandes réserves de phosphate total (entre 400 et 1200mg/kg de sol), mais les quantités disponibles pour les plantes ne représentent habituellement qu’une infime proportion de ce total (Glick, 2012 ; Apostu et al, 2010), parce qu’il est facilement converti en complexes insolubles tels que les oxydes de fer et d’aluminium et les complexes de phosphates de calcium (Sandilya et al, 2016).
Le P se trouve dans les sols sous différentes formes (Fig 7) physico-chimiques (Lajtha et al, 1999) y compris le phosphate inorganique et organique. Ces formes de P différent par leur comportement et leur devenir dans les sols (Shen et al, 2011).
Selon le FAO (2005) le phosphate se trouve dans le sol sous trois formes :
➤Une forme accessible : lié au complexe argilo-humique par le calcium et le magnésium ;
➤Une forme combinée : immobilisé en partie par les hydroxydes d’aluminium et de fer dans les sols acides ;
➤Une forme insoluble : en sol calcaire sous forme de phosphates de calcium.
Les bactéries solubilisatrices du phosphate (BSP)
Ce sont des bactéries hétérotrophes qui jouent un rôle primordial dans la dynamique du P dans les sols et la disponibilité subséquente de phosphate pour les plantes (Shakeela et al, 2017), en convertissant les P insolubles en formes solubles (Walpola et Yoon, 2013). Les plantes ne peuvent absorber le P que sous deux formes solubles, l’anion orthophosphate primaire (H2PO4) et de plus petite quantité de l’orthophosphate secondaire (HPO4²⁻ ) (Mullins, 2009). Les BSP appartiennent à plusieurs genres y compris : Burkholderia, Enterobacter, Rhizobium, Serratia, Arthrobacter, Acinetobacter, Flavobacterium (Apostu et al, 2010), Azospirillum, Azotobacter, Pseudomonas, Bacillus (Sandilya et al, 2016), Achromobacter, Agrobacterium, Aerobacter, Escherichia, Micrococcus, Peanibacillus (Viruel et al, 2014), Beijerinckia, Microbacterium, Rhodococcus (Gupta et al, 2015).
Ces PSB solubilisent les P inorganiques par acidification, chélation, réactions d’échange et par la production d’acides organiques (A.O) (Viruel et al, 2014).
Mécanismes d’action de la solubilisation/minéralisation des phosphates
La plupart des sols contiennent des réserves considérables de phosphate total, qui est considéré comme l’élément clé pour la croissance des plantes, mais une grande partie de ce phosphate reste relativement immobile et seulement moins de 10% du phosphore du sol entre dans le cycle végétal-animal (Jain et Singh, 2015). Plusieurs mécanismes sont utilisés par les BSP pour rendre le phosphate du sol assimilable et disponible par les plantes (Fig 8).
Solubilisation des phosphates inorganiques
Le P inorganique représente 35 à 70% du P total dans les sols (Shen et al, 2011). Les BSP utilisent plusieurs mécanismes pour rendre le phosphate présent dans la rhizosphère utilisable par la plante. Le principal mécanisme de solubilisation de phosphate est la production de composés de complexation ou de dissolution minérale tels que : les acides organiques (AO), sidérophores, protons, les ions hydroxyles et le CO2 (Alori et al, 2017 ; Ingle et Padole, 2017).
Par la production d’acides organiques (AO)
Parmi les diverses stratégies adoptées par les bactéries, l’implication des AO de faibles poids moléculaire sécrétés par les BSP a été une théorie bien reconnue et largement acceptée comme le principal moyen de solubilisation de P, et plusieurs études ont identifié et quantifié les AO et confirmer leurs rôles dans le processus de solubilisation (Khan et al, 2014). Les AO sont produits dans l’espace périplasmique et sont le produit du métabolisme microbien principalement par la respiration oxydative ou par la fermentation de source de carbone organique (Sharma et al, 2013 ; Alori et al, 2017). Plusieurs AO sont impliqués dans la solubilisation des phosphates inorganiques y compris : fumarique, lactique, citrique, glycolique, malonique, tartrique et succinique (Thakur et al, 2014). Plusieurs études ont déterminé que : Pseudomonas spp., Enterobacter sp., Arthrobacter sp., Azotobacter, Rhodococcus erythropolis, Bacillus megaterium, Agrobacterium tumefaciens, Serratia marcescens, Delftia, Chryseobacterium, Phyllobacterium myrsinacearum produisent des acides organiques pour solubiliser les phosphates inorganiques (Khan et al, 2014).
Par la production de dioxyde de carbone (CO2)
Le dioxyde de carbone est également responsable de la solubilisation de P inorganique et augmente ainsi la disponibilité de phosphore pour les plantes en abaissant le pH dû à la formation d’acide carboxylique dans la rhizosphére (Thakur et al, 2014). Ce type d’acidification a été observé dans la solubilisation des P de calcium (Walpola et Yoon, 2013).
Minéralisation biologique des phosphates organiques
Le phosphate organique peut constituer 30 à 65% du P total du sol (shen et al, 2011), la forme organique des composés phosphatés est transformée en une forme utilisable par les BSP via un processus de minéralisation médié par les enzymes en particulier les phosphatases et les phytases (Khan et al, 2014).
Les phosphatases
Il existe deux types de phosphatases ; acide et alcaline, qui sont libérées à l’extérieur de la cellule. Les phosphatases acides sont de nature non spécifique et utilisent le P organique comme substrat pour le transformer en P inorganique, en déphosphorylant les liaisons phosphorester et/ou phosphoanhydride dans la matière organique (Khan et al, 2014 ; Dash et Dangar, 2017).
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Table des matières
INTRODUCTION GENERALE
PARTIE I : SYNTHESE BIBLIOGRAPHIQUE
CHAPITRE I : LES LEGUMINEUSES ET LE GENRE LATHYRUS
1. Généralités sur les légumineuses
2. Associations légumineuses-rhizobia
3. La légumineuse Lathyrus
3.1. Généralités
3.2. Phylogénie du genre Lathyrus
3.3. Phylogénie des rhizobia symbiotiques du genre Lathyrus
3.4. L’espèce Lathyrus ochrus L
3.4.1. Caractéristiques morphologiques de l’espèce Lathyrus ochrus L
3.4.2. Classification botanique de l’espèce Lathyrus ochrus L
CHAPITRE II : LES PHOSPHATES
1. Le phosphate dans le sol
2. Les bactéries solubilisatrices du phosphate (BSP)
3. Mécanismes d’action de la solubilisation/minéralisation des phosphates
3.1. Solubilisation des phosphates inorganiques
3.1.1. Par la production d’acides organiques (AO)
3.1.2. Par la production de dioxyde de carbone (CO2)
3.2. Minéralisation biologique des phosphates organiques
3.2.1. Les phosphatases
3.2.2. Les phytases
3.2.3. Les C-P lyases
4. Le phosphate roche (PR)
4.1. Mécanismes de solubilisation du PR
4.1.1. Excrétion des protons H+
4.1.2. Production des acides organiques
4.1.2.1. Par acidification
4.1.2.2. Par chélation
4.1.2.3. Par réaction d’échange de ligands
CHAPITRE III : RHIZOBACTERIES FAVORISANT LA CROISSANCE DES PLANTES
1. La rhizosphère
2. Les rhizobactéries favorisant la croissance des plantes (RFCP)
3. Les activités RFCP des BSP
3.1. La fixation symbiotique de l’azote
3.1.1. Pré-infection
3.1.2. Infection
3.1.3. Fixation biologique de l’azote
3.2. La résistance des bactéries aux métaux lourds
3.2.1. Généralités
3.2.2. Mécanismes de résistance aux métaux lourds
3.2.2.1. Perméabilité membranaire
3.2.2.2. Séquestration intra et extracellulaire
3.2.2.3. Transport actif
3.2.3. Production de sidérophores
3.2.4. Production de l’acide indolacétique (IAA)
3.2.5. Production d’ACC
3.3. Les bio-fertilisants
PARTIE II : MATERIEL ET METHODES
CHAPITRE I : PIEGEAGE DES RHIZOBACTERIES SUR SUBSTRAT SOLMINERAI DE FER
1. But du piégeage
2. Protocole de piégeage des rhizobia
CHAPITRE II : ISOLEMENT ET PURIFICATION DES RHIZOBACTERIES PIEGEES
1. Isolement sélectif des rhizobia à partir des nodules de Lathyrus ochrus
1.1. Milieux de culture pour isolement
1.2. Préparation des nodules
1.3. Croissance et purification des rhizobia piégés
CHAPITRE III : CARACTERISATION CULTURALE ET MORPHOLOGIQUE DES ISOLATS
1. Caractérisation culturale et morphologique des isolats
1.1. Croissance des isolats sur milieu YEMA additionné de rouge Congo (RC)
1.2. Croissance des isolats sur milieu YEMA additionné de bleu de Bromothymol (BBT)
1.3. Croissance des isolats sur milieu Glucose Peptone Agar (GPA)
1.4. Croissance des isolats sur milieu YMFP et milieu YEMA classique
1.5. Test au cétolactose
1.6. Coloration de Gram
1.7. Tests de la catalase et de l’oxydase
CHAPITRE IV : CARACTERISATION BIOCHIMIQUE DES ISOLATS
1. Identification phénotypique par les galeries Api 20 E
2. Identification phénotypique par les galeries Api 20 NE
CHAPITRE V : SOLUBILISATION DES PHOSPHATES INORGANIQUES PAR LES ISOLATS PIEGES
1. Tests de solubilisation des phosphates inorganiques sur milieu solide
1.1. Test de solubilisation du phosphate tricalcique sur différents milieux solides
1.2. Solubilisation du Phosphate tricalcique, Phosphate monocalcique et Phosphate roche (PR)
1.3. Effets de la variation de la concentration en extrait de levure, glucose et MgCl2
2. Tests de solubilisation du phosphate roche (PR) sur milieu liquide
2.1. Suivi de l’évolution des valeurs de pH durant la solubilisation
2.2. Dosage des phosphates
CHAPITRE VI : ESSAIS DE NODULATION DE LA PLANTE HOTE
1. Germination des graines
2. Préparation des pots
3. Solution d’arrosage
4. Inoculation des plantes de Lathyrus ochrus et vérification de la nodulation
5. Détermination du poids sec de la partie végétative
CHAPITRE VII : LA RESISTANCE DES ISOLATS AUX STRESS METALLIQUE ET SALIN
1. Tests de résistance à différentes concentrations en métaux lourds
2. Tests de résistance à la salinité
CHAPITRE VIII : CARACTERISATION DE L’ISOLAT-LEVURE LNPF38
1. Etude morphologique et physiologique de l’isolat LnPF38
2. Test de sporulation
3. Tests de fermentation des glucides
4. Tests de résistance aux métaux lourds
4.1. Résistance aux métaux lourds sur milieu de culture solide
4.2. Résistance aux métaux lourds sur milieu de culture liquide
5. Solubilisation des phosphates inorganiques
5.1. Solubilisation des phosphates inorganiques sur milieu de culture solide
5.2. Quantification du phosphate libéré par l’isolat LnPF38 sur milieu liquide
PARTIE III : RESULTATS ET DISCUSSION
CHAPITRE I : PIEGEAGE DES RHIZOBACTERIES SUR SUBSTRAT SOLMINERAI DE FER
1. Région d’étude
2. Résultats du piégeage des rhizobactéries par la légumineuse Lathyrus ochrus
3. Discussion
CHAPITRE II : ISOLEMENT ET CARACTERISATION CULTURALE DES RHIZOBACTERIES PIEGEES
1. Résultats
1.1. Isolement des rhizobia nodulaires
1.2. Caractérisation culturale et morphologique des isolats
1.2.1. Temps de croissance
1.2.2. Observation macroscopique et microscopique des isolats
1.2.3. Croissance des isolats sur milieu YEMA additionné de rouge Congo (RC)
1.2.4. Croissance des isolats sur milieu YEMA additionné de bleu de Bromothymol (BBT)
1.2.5. Croissance des isolats sur milieu GPA
1.2.6. Croissance des isolats sur milieu YMFP et sur milieu YEMA
1.2.7. Test au cétolactose
1.2.8. Coloration de Gram et la recherche de la catalase et de l’oxydase
2. Discussion
CHAPITRE III : CARACTERISATION BIOCHIMIQUE DES ISOLATS
1. Résultats de l’identification phénotypique Api 20E
2. Résultats de l’identification phénotypique API 20NE
3. Discussion
CHAPITRE IV. SOLUBILISATION DES PHOSPHATES INORGANIQUES
1. Résultats
1.1. Solubilisation des phosphates sur milieu solide
1.1.1. Solubilisation du phosphate tricalcique sur différents milieux solides
1.1.2. Solubilisation du phosphate tricalcique, monocalcique et phosphate roche (PR)
1.1.3. Effets de l’extrait de levure, glucose et MgCl2 sur la solubilisation du phosphate
1.1.3.1. Effet de l’ajout de l’extrait de levure
1.1.3.2. Effet de l’augmentation de la concentration de glucose et de MgCl2
1.2. Solubilisation du phosphate roche (PR) sur milieu liquide
1.2.1. Cinétiques de solubilisation du phosphate
1.2.2. Relation entre l’acidification du milieu et la solubilisation des phosphates
2. Discussion
CHAPITRE V : NODULATION DES ISOLATS SOLUBILISATEUR DE PHOSPHATE
1. Présentation des résultats
2. Discussion
CONCLUSION GENERALE