Les aspects cliniques et thérapeutiques des psycho-traumatismes de guerre

L’état de stress post-traumatique (ESPT) est la pathologie la plus grave et la plus spécifique qui peut résulter de la confrontation d’un individu à un événement traumatique. Ainsi, cette confrontation peut être à l’origine d’un ébranlement des trois convictions personnelles, à savoir : invulnérabilité, environnement protecteur, autrui secourable (Crocq, 2007). De ce fait, les événements traumatiques génèrent potentiellement chez l’individu un état de fragilité extrême dans lequel l’ensemble de son équilibre (psychologique, familial, socioprofessionnel) peut être totalement perturbé, de façon immédiate et pour une durée indéterminée (court, moyen, ou long terme). Ces conséquences, lourdes, peuvent l’être à la fois pour le traumatisé, pour son entourage, mais aussi pour la société. L’état de stress post-traumatique a suscité ces dernières années de nombreux travaux de recherches dans les populations générales ou spécifiques (militaires), tant sur les plans épidémiologique, que neurobiologique ou encore thérapeutique. Les résultats de ces différentes études ont indiqué, entre autre, que l’état de stress post-traumatique constituait un véritable enjeu de santé publique (Ducrocq, 2009). Pour l’individu, l’impact du développement d’un état de stress posttraumatique est souvent important au quotidien. Ce trouble est en règle générale associé à une grande comorbidité, son évolution fluctuante peut être chronique et enfin, il constitue un facteur de risque de suicidabilité. Dans ce travail, nous nous sommes intéressés aux psycho-taumatisés de guerre marocains : Le MAROC était en conflit pendant les années 80, avec un groupe indépendantiste nommé POLISARIO qui réclamait la scission des territoires sahraouis et la proclamation d’un état indépendant.

Définitions

Selon le DMS IV-TR, le Stress Post Traumatique est un trouble du à l’exposition à un évènement traumatique qui provoque chez l’individu de la peur, de la détresse ou de l’horreur. Ce trouble se manifeste par une répétition de l’expérience persistante de l’évènement traumatique, des comportements d’évitement des stimuli associés au traumatisme, un émoussement de la réactivité générale et un état d’hyperactivité neurovégétative.[DSM IV-TR 1994] Louis CROCQ définit le psycho-traumatisme comme ceci : « phénomène d’effraction du psychisme et de débordement de ses défenses par les excitations violentes afférentes à la survenue d’un évènement agressant ou menaçant pour la vie ou pour l’intégrité (physique ou psychique) d’un individu qui y est exposé comme victime, témoin ou acteur. »[CROCQ L. 1999] Le trauma psychique est une expérience ressentie dans l’horreur et l’absence de secours. Il est issu du vocabulaire chirurgical et il reprend l’idée de solution de continuité, de brèche et d’irruption d’un corps étranger dans l’appareil psychique. Dans son ouvrage « Les névroses traumatiques », Claude Barrois définit le trauma comme une rupture des liens avec le monde, une césure de sens, une intériorité envahie par l’angoisse de néantisation, et un bris de l’unité de l’individu. [Barrois. 1988] Un évènement à potentiel traumatisant est un évènement répondant aux critères suivants:
– Il est soudain et inattendu ;
– Il donne un sentiment d’extrême impuissance, d’affolement et/ou de colère ;
– Il est lié à des émotions fortes (anxiété, honte, culpabilité, chagrin) et des sentiments de peur intense voire d’effroi.
– Il confronte les victimes de façon directe ou indirecte avec le monde des morts voire même au réel de la mort, dont ils n’avaient jusque-là qu’une représentation; ou une atteinte sérieuse à l’intégrité physique et psychique de soi-même ou d’autrui.

Le Stress est la réaction bio-physio-psychologique immédiate, d’alarme, de mobilisation et de défense de l’individu face à une agression ou une menace. C’est une réaction réflexe qui met en œuvre un processus neurobiologique complexe, utile et adaptatif bien qu’accompagné de manifestations neurovégétatives gênantes (sudation, tachycardie, tremblements, pâleur). Par ailleurs, il peut affecter non seulement les victimes de tels évènements, mais aussi des victimes secondaires c’est-a-dire toute personne exposée à un agent stressant intense, comme par exemple : les médecins, les infirmiers, les pompiers, les secouristes, les policiers, les militaires, les travailleurs humanitaires…

Historique

Selon CROCQ, la réflexion sur le traumatisme a toujours accompagné la violence de l’Homme et sa rencontre avec l’incompréhensible de la mort. [CROCQ .2003] Déjà dans l’Antiquité, on a retrouvé plusieurs récits sur des cas en rapport avec des combats : Hérodote est l’un des premiers à décrire dans son « Livre VII Polymnie », le cas d’un militaire atteint de cécité à la suite d’une réaction d’effroi en plein combat. En 1572, Ambroise PARE chirurgien français, recueille les plaintes d’hallucinations et de cauchemars terrifiants du jeune roi CHARLES IX au lendemain du massacre de la Saint Barthélémy. Sous la Révolution française et les guerres de l’Empire, Philippe Pinel établit un inventaire des troubles psychiques provoqués par la violence des combats et les «émotions morales» de la terreur de guerre dans sa « Nosographie philosophique » [PINEL .1808]. Ces troubles préfigurent les névroses de guerre. Les chirurgiens des armées napoléoniennes, Desgenettes, Larrey, Percy créent le terme imagé de « syndrome du vent du boulet » pour désigner les états aigus de sidération déterminés par la seule frayeur chez les soldats qui avaient senti les projectiles de près sans être blessés. Larrey cite le cas d’un grenadier qui, effleuré par un boulet à Wagram, tombe au sol privé de parole et demeure ensuite complètement muet [Clervoy. 2008] En 1863, Henri DUNANT rapporte les « yeux hagards, la prostration et les convulsions » lors de la bataille de Solferino. Pendant la guerre de Sécession américaine, le neuropsychiatre Silas Weir Mitchell comptabilise un grand nombre de «blessés nerveux».

Il doit improviser à la hâte un hôpital de 400 lits, près de Philadelphie, pour traiter des soldats hystériques qui ont emprunté leurs symptômes à des pathologies nerveuses ou épileptiques. En Allemagne, H. Oppenheim en collaboration avec Thomsen dans les « Archives médicales de Westphalie » en 1884, puis dans son ouvrage « Die TraumatischenNeurosen », publié en 1888, propose le terme de « névrose traumatique ». Son étude porte sur 42 cas de névrose consécutifs à des accidents du travail ou à des accidents de chemin de fer. [Oppenheim.1884/1888] Il crée le terme de «traumatisme psychologique» : Pour lui, c’est l’effroi qui provoque un ébranlement psychique ou affectif «tellement intense qu’il en résulte une altération psychique durable» [Oppenheim.1892]. Dès les premières publications d’Oppenheim, Charcot ouvre un débat et soutient que la prétendue «névrose traumatique» n’est qu’une variété de l’hystérie ou de l’«hystéro- neurasthénie». [Birmes, Escande & coll. 2005] JANET, dans sa thèse « l’Automatisme psychologique », défendit l’origine traumatique de certaines hystéries : « quand une personne, tourmentée par un mauvais souvenir, part en voyage pour l’oublier, le chagrin monte en croupe et galope avec elle».[Janet. 1889] FREUD, dans « les études sur l’hystérie », écrit : «dans la névrose traumatique, la maladie n’est pas vraiment déterminée par une passagère blessure du corps, mais bien par une émotion : la frayeur, par un traumatisme psychique. » ; et confère ainsi au traumatisme psychique un rôle déterminant dans l’étiologie de l’hystérie ; c’est la théorie pan-traumatique. [Freud. 1895] KRAEPLIN dans son livre « Introduction à la psychiatrie clinique », utilise le terme de « Névrose d’effroi ». [ Kraeplin.1901].

HONNIGMAN, psychiatre allemand volontaire de la croix rouge et participant à ce qu’on appelait « la psychiatrie de l’avant » (triage des blessés psychiques sur le front de la guerre russo-japonaise 1904-1905), invente « la névrose de guerre », au congrès allemand de médecine interne de 1907. La pathologie décrite comporte des états confusionnels ou anxioconfusionnels initiaux, dus à la violence des combats, à l’épuisement, à l’effroi, mais aussi, des neurasthénies et des hystéries durables. La première guerre mondiale, outre le nombre encore jamais atteint de tués (huit millions et demi) et de blessés (trente deux millions), provoque un afflux massif de «blessés psychiques». Les psychiatres des armées, confrontés à ces cas, étudient cette pathologie qui devient leur préoccupation majeure. Les publications scientifiques sur la question se multiplient : c’est ainsi que le médecin-Major MILLIAN, l’un des premiers à décrire des cas de psychonévrose, rédige en janvier 1915 un article intitulé « l’hypnose des batailles » paru dans la revue Paris Médical. [Millian .1915] A l’«hypnose des batailles» succède les «syndromes du vent des obus» ou «shell-shocks» puis les anxiétés, les neurasthénies et surtout les hystéries de guerre sous le vocable de «névrose de guerre» et «psychonévroses de guerre». Les psychiatres décrivent de véritables «épidémies» de conversion hystérique : surdités hystériques, aphasie et comportements hystériques (ricanements, hoquets, aboiements..).[Rodier & Fribourg.1930]. La Seconde Guerre Mondiale, encore plus meurtrière que la Première (38 millions de morts dont 20 millions de civils) a été une grande pourvoyeuse de «chocs psychiques». Après leur libération, beaucoup de déportés surprennent les médecins par leur anesthésie affective. Ils racontent sans aucun signe d’émotion, la mimique figée, la voix monocorde, les horreurs qu’ils ont vu et les sévices auxquels ils ont été soumis. Ce n’est que plusieurs mois ou plusieurs années après qu’ils développent une forme de névrose traumatique appelée «syndrome des déportés» ou «asthénie des déportés». [Chidiac & Crocq. 2010] Les guerres postcoloniales telles que les guerres d’Indochine et d’Algérie voient apparaître des troubles à expression particulière, nommés «névrose de guérilla». Ces névroses sont dominées par l’appréhension du monde extérieur, l’état d’alerte, la méfiance, le sentiment d’échec, le remords, la tristesse et la culpabilité. Elles s’accompagnent de troubles caractériels, assez souvent de recours à l’alcool et, plus rarement, à la drogue.[Argeles. 2010] La guerre du VIETNAM (1964-1973) particulièrement éprouvante pour les soldats américains qui avaient l’impression de se battre pour rien ,surtout avec une opinion publique défavorable, développaient le POST-VIETNAM SYNDROM qui comporte des sentiments de culpabilité vis à vis des camarades morts au front, le sentiment d’être des boucs émissaires de cette guerre, des accès d’agressivité, l’impression d’être devenus des machines à haïr et à tuer, la perte de toute humanité et de tout sentiment de compassion, et enfin l’incapacité à aimer ou être aimé par les autres. [Clervoy. 2008] En 1977, SHATAN constitue le «Groupe de travail des vétérans du Vietnam» composé des psychiatres qui travaillaient dans ces structures officieuses. Ils observaient les cas cliniques, et collectaient leurs expériences ce qui a abouti à la première formulation de ce qui devient en 1980 le «Post -Traumatic Stress Disorder» ou PTSD dans le DSM III (Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorders) de l’American Psychiatric Association. La dixième révision de la Classification Internationale des Maladies mentales (CIM-10), parue en 1992, a emboîté le pas aux Américains, et propose les trois diagnostics de «réaction aiguë à un facteur de stress », côté F43.0 (réaction immédiate du premier jour), d’ «état de stress posttraumatique », côté F43.1(calqué sur le PTSD américain) et de «modification durable de la personnalité après une expérience de catastrophe », côté F62.0,  diagnostic qui a le mérite de souligner l’altération de la personnalité conséquence de l’expérience traumatique.

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Table des matières

Introduction
Première partie : Revue de la littérature
1- Définitions
2- Historique
3- Epidémiologie
a/ prévalence
b/ facteurs de risque
c/ facteurs protecteurs
4- Clinique
a/ signes
b/ critères diagnostiques
c/ évaluation par les échelles psychométriques
d/ pronostic & évolution
5- Modèles théoriques
a/ modèles neurocognitifs
b/ modèles neurobiologiques
6- Traitements
Deuxième partie : Matériel & méthode
Observations
Discussions
Conclusion
Bibliographie

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