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Les examens complémentaires
L’Echographie-doppler veineuse des membres pelviens mettait en évidence une absence de la VCC sous-rénale, des varices mal systématisées et une absence de reflux ostio-tronculaire des petite et grande veines saphènes mais aussi des veines profondes, à gauche.
L’angio-scanner abdominal : elle montrait une agénésie complète de la VCC sous rénale avec une dilatation du système azygos (Fig 2, 3, 4, 5,6). Les veines spléniques, portes et hépatiques étaient de calibres normaux. On notait une absence de thrombose veineuse profonde.
EMBRYOLOGIE
La complexité du développement embryologique du système veineux cave explique la fréquence des variations et anomalies de cet axe veineux.
En effet, le développement embryonnaire de la veine cave inférieure et des veines rénales résulte d’un processus complexe survenant entre les 6ème et 9ème semaines impliquant différents systèmes primitifs.
La veine cave caudale définitive étant formée de différentes parties provenant chacune de ces systèmes embryonnaires, il nous a semblé intéressant de rappeler ici les notions embryologiques nécessaires à sa compréhension.
Vers la 5ème semaine, la circulation veineuse primitive embryonnaire est divisée en trois grands axes doubles qui remplissent différentes fonctions (Fig 7):
• le système vitellin qui initialement draine la vésicule vitelline puis le tractus gastro-intestinal et les dérivés de l’intestin ;
• le système ombilical qui se développe dans le cordon ombilical et qui amène le sang oxygéné du placenta à l’embryon ;
• le système cardinal constitué de deux doubles paires de veines qui recueillent le sang de la tête, du cou, des parois du tronc et des membres.
A l’origine, ces trois systèmes pairs et symétriques convergent vers les cornes droites et gauches du sinus veineux embryonnaire (ébauche cardiaque).
La veine cave caudale
Le système vitellin
Les veines vitellines sont les premières à apparaître. Elles proviennent d’un plexus capillaire de la vésicule vitelline et forment une partie de l’appareil circulatoire de l’intestin en voie de développement. Le système vitellin est ainsi à l’origine des sinusoïdes hépatiques, du système porte, et d’une portion de la veine cave inférieure.
Initialement, les veines vitellines permettent au système vitellin de se vider dans les cornes sinusales du coeur.
Vers la 5ème semaine, elles prolifèrent au voisinage des cordons hépatiques et se ramifient, pour aboutir à un plexus veineux complexe englobé par la masse hépatique: les sinusoïdes intra-hépatiques.
La portion proximale des veines vitellines forme à ce stade les canaux hépato- cardiaques droit et gauche (Fig 7).
La veine vitelline gauche va ensuite régresser progressivement pour disparaître vers le troisième mois. La veine vitelline droite draine le sang provenant du côté gauche des viscères abdominaux grâce à une série d’anastomoses transversales présentes dans le parenchyme hépatique et autour de l’intestin primitif (Fig 8).
Ainsi, au troisième mois, la totalité du sang du système vitellin retourne au coeur par la veine vitelline droite qui s’est, dans le même temps, élargie. Sa portion supérieure deviendra la future portion sus-hépatique de la VCC tandis que sa portion sus-hépatique va partiellement régresser pour devenir, avec quelques anastomoses, les futures veines portes, mésentérique et splénique (Figure 8).
Le système ombilical
Passant initialement en dehors du foie, les veines ombilicales vont progressivement établir des connexions avec les sinusoïdes intra-hépatiques. Leurs portions proximales vont régresser ; obligeant le sang du cordon ombilical à transiter par le foie à travers ces anastomoses [10,11].
La veine ombilicale droite va alors régresser (à l’inverse du système vitellin qui voit régresser la veine vitelline gauche) laissant ainsi la veine ombilicale gauche transporter le sang placentaire oxygéné.
Ce sang drainé par la veine ombilicale gauche gagne ensuite le canal hépato-cardiaque droit grâce à une volumineuse anastomose intra-hépatique: le canal veineux d’Arantius. Ce canal permet donc au sang placentaire de shunter le foie pour gagner la circulation foetale.
Notons ici qu’il s’oblitèrera à la naissance pour former le ligament falciforme tandis que la veine ombilicale (extra-hépatique) formera le ligament rond (Fig 9).
Le système cardinal postérieur
Au cours de la 4ème semaine, les veines cardinales postérieures drainent le sang de l’extrémité caudale du corps de l’embryon. Elles se réunissent, à la 6éme semaine, avec les veines cardinales antérieures (drainant la tête, le cou, et l’extrémité supérieure de l’embryon) pour former les canaux de Cuvier (ou veines cardinales moyennes) qui se jettent dans le sinus veineux (Fig11).
Au cours de la 8ème semaine, il se développe dans la région pelvienne une anastomose inter-cardinale postérieure représentant la future veine iliaque primitive gauche.
La partie caudale de la veine cardinale postérieure droite donnera ensuite la veine iliaque primitive droite et le segment initial de la VCC (segment distal).
Au cours de la 9ème semaine, la veine cardinale postérieure gauche ainsi que la partie intermédiaire de son homologue droite vont s’atrophier puis disparaître.
Le système sous-cardinal (Fig 10, 11)
Au cours de la 6ème semaine, les veines sous-cardinales, apparues en position antérieure et médiane par rapport aux veines cardinales postérieures, deviennent fonctionnelles. Elles participent, alors, au drainage du mésonéphros, devenu volumineux.
Elles développent, à ce stade de l’embryogenèse, des anastomoses latérales avec les veines cardinales postérieures (anastomoses cardino-sous-cardinales).
Le système cave supérieur
Entre la 4e et la 7e semaine de vie intra-utérine, les veines sous-clavières vont se développer à partir des veines cardinales antérieures.
Vers la 7e semaine, les futures veines jugulaires externes bourgeonnent depuis les veines cardinales antérieures de façon latérale. Dans le même temps, une anastomose médiane inter-cardinale antérieure se développe à partir des veines thymiques et thyroïdiennes.
A la fin du 2e mois, l’achèvement de l’anastomose inter-cardinale antérieure aboutit au futur tronc veineux brachio-céphalique gauche. Les portions des veines cardinales antérieures situées au-dessus de cette anastomose formeront les veines jugulaires internes (Fig 14).
Rappelons qu’à ce stade du développement embryonnaire, les veines supracardinales sont apparues sur les veines cardinales postérieures (orientation dorsale).
La veine cardinale commune gauche régresse ensuite, dans sa partie distale, ne laissant persister que sa partie proximale, pour constituer le sinus coronaire. On assiste également à une involution des veines cardinales postérieures à partir de l’abouchement des veines supra-cardinales.
Ainsi, la veine Azygos est issue, dans sa partie proximale, de la veine cardinale postérieure droite et, dans sa partie plus distale, de la veine supra-cardinale droite.
Enfin, le segment de la veine cardinale antérieure droite, situé entre la réunion des veines brachio-céphaliques droite et gauche et de l’oreillette droite, devient la veine cave supérieure [11,14]
LES ANOMALIES CONGENITALES DE LA VEINE CAVE CAUDALE (VCC)
Nous nous référons à une classification basée sur les différentes anomalies anatomiques de chaque segment de la VCC, en évoquant pour chacune le déterminisme embryologique responsable [10, 11, 30].
Les anomalies congénitales du segment sous-rénal de la VCC
La veine cave caudale gauche
Elle peut être décrite comme une « image en miroir » de la VCC normale. La portion sous-rénale de la VCC se situe à gauche de l’aorte abdominale. Cette anomalie est le résultat d’une régression anormale de la veine supra-cardinale droite au profit d’une persistance anormale de la veine supra-cardinale gauche (Fig 20).
La veine cave caudale double
Dans ce type de malformation, la veine iliaque commune droite se poursuit par la VCC en position normale (à droite de l’aorte abdominale) mais une VCC gauche sous-rénale surnuméraire prolonge la veine iliaque commune gauche pour se jeter dans la veine rénale gauche (Fig 21).
L’agénésie de la veine cave caudale sous-rénale (Fig 22).
Dans cette configuration anatomique, les veines iliaques internes et externes se rejoignent pour former, ainsi, les veines lombaires ascendantes élargies. Ces veines lombaires assurent alors le retour veineux des membres inférieurs et du bassin grâce à des collatérales para-vertébrales antérieures qui rejoignent ensuite les systèmes azygos et hémi-azygos.
Ce type de malformation du segment sous-rénal nécessite une anomalie de développement du système supra-cardinal mais aussi une anomalie de développement du système sous-cardinal du fait de l’agénésie d’une partie du segment rénal et de la persistance de l’anastomose supra-sous-cardinale droite [12,30].
Les anomalies congénitales du segment supra-rénal de la VCC
L’agénésie du segment rétro-hépatique de la VCC
La continuation par la veine azygos d’une VCC droite
Cette anomalie est également nommée agénésie du segment hépatique de la VCC avec continuation azygos.
Les portions sous-rénales de la VCC ont ici un développement normal mais la VCC sus-rénale va se drainer dans la veine azygos, avant de pénétrer dans le thorax. Puis la veine azygos rejoint la VCS en respectant son trajet habituel.
Le segment hépatique n’est pas forcément absent, mais plutôt atrophique et se jette directement dans l’atrium droit (Fig 23).
Les veines hépatiques se jettent ; soit directement dans l’oreillette droite ; soit dans le segment inter-hépato-cardiaque de la VCC.
D’un point de vue embryologique, cette anomalie résulte d’un défaut de formation de l’anastomose entre la veine sous-cardinale droite et la veine vitelline (à l’origine du segment V de la VCC habituellement). Il s’ensuit une atrophie de la veine sous-cardinale droite et la formation d’une anastomose supra-sous-cardinale droite permettant le retour veineux par l’intermédiaire de la veine azygos (elle-même dérivée de la veine supra-cardinale droite) [13,23].
La continuation par la veine hémi-azygos d’une VCC droite
Comme pour l’anomalie du segment sous-rénal de la VCC avec VCC gauche, la continuation hémi-azygos peut être décrite comme l’image en miroir de la continuation azygos d’une agénésie du segment rétro-hépatique de la VCC.
Les segments sous-rénal et rénal de la VCC se situent en position normale, à droite de l’aorte abdominale. La VCC rejoint la veine hémi-azygos, qui se drainera au niveau thoracique dans le reliquat de la veine azygos [Fig 24].
Cette particularité anatomique résulte d’une anomalie de développement de l’anastomose entre les veines sous-cardinales droites et vitellines droites, (aboutissant à une agénésie du segment rétro-hépatique de la VCC) et ou d’un défaut de formation de l’anastomose sous-supra-cardinale droite [23,29]. Il s’ensuit une déviation du sang vers la veine sous-cardinale gauche puis vers la veine supra-cardinale gauche (à l’origine de la veine hémi-azygos).
Les implications anatomiques et cliniques
Les anomalies congénitales de la VCI restent le plus souvent asymptomatiques et peuvent parfois n’être découvertes qu’en post-mortem [10,11]. La découverte d’un cas d’agénésie de la VCI chez notre patient présentant des varices des membres pelviens constitue un fait clinique important. Nous avons trouvé, chez lui, une agénésie de la VCI infra-rénale responsable des varices du membre pelvien par hyperpression veineuse.
Les anomalies de la VCI peuvent se manifester par la survenue d’événements thromboemboliques qui peuvent s’exprimer cliniquement de façons différentes et atypiques [23].
Face à une agénésie de la VCI, le système azygos peut compenser le blocage circulatoire en assurant le retour veineux. Les veines azygos et hémi-azygos vont ainsi apparaître très dilatées comme chez notre patient. Par ailleurs, les afférences veineuses lombaires, les plexus veineux para-vertébraux internes et les veines de la paroi abdominale peuvent servir de suppléance [22]. Le mécanisme de suppléance par les veines lombaires se fait par un relais, au niveau des veines pelviennes, avant de rejoindre le système azygos[27]. Notre patient présente une suppléance par le système azygos (veine azygos et veine hémi-azygos). Par ailleurs, son type d’agénésie de la veine cave inférieure, est compatible avec la vie comme l’affirme Moore [19].
La prise en charge des varices du membre pelvien, dans le cadre d’une agénésie de la VCI, est difficile car la chirurgie n’est pas de règle du fait qu’elle ne repose sur aucune recommandation dans la littérature [28]. Cette chirurgie, si elle est pratiquée, a pour but d’éradiquer les réseaux veineux superficiels variqueux et de supprimer les reflux qui les alimentent. Notre patient n’a pas bénéficié d’une chirurgie parce qu’il faut conserver le réseau veineux superficiel qui permet de drainer veineux en cas de thrombose du réseau veineux profond.
Devant l’hyperpression veineuse secondaire à l’agénésie de la VCI, le traitement médical, par bas de contention, doit être proposé. Cette dernière a pour but d’exercer une contre-pression afin de compenser l’augmentation pathologique des pressions dans la circulation de retour. La contre pression doit être dégressive de l’extrémité du membre à sa racine. Il existe des contentions inélastiques et des contentions élastiques.
La contention élastique ou compression exerce une pression de repos plus élevée et de travail plus faible. Les indications de chaque type de compression diffèrent selon la sévérité de l’insuffisance veineuse. La contention peut être effectuée par bande ou par bas.
Les implications thérapeutiques
En chirurgie thoracique
La connaissance préalable d’une interruption de VCI avec continuation azygos ou hémi-azygos isolée est primordiale en matière de chirurgie cardio-thoracique. En effet, cette anomalie incite à prendre des précautions particulières au moment de la dissection des structures médiastinales afin de ne pas léser un vaisseau de calibre et/ou de position inhabituels. En plus, elle contre-indique formellement le clampage du système azygos en cas d’agénésie de la veine cave qui risquerait d’interrompre brutalement le retour veineux sous-diaphragmatique. Cette situation, certes, rare mais aussi dramatique, a d’ailleurs été illustrée dans la littérature [21]. Nous avons trouvé un cas de ligature de la veine azygos chez un patient porteur d’une VCI rétro-hépatique interrompue au cours d’un geste de chirurgie thoracique sans rapport avec la pathologie vasculaire [21].
En chirurgie vasculaire
De manière générale, la connaissance de certaines variantes anatomiques de la VCI est aussi primordiale pour toute intervention nécessitant d’aborder le rétro-péritoine comme dans la chirurgie de l’aorte abdominale, urologique ou rachidienne par voie antérieure [8]. Nous pouvons aisément imaginer que la présence d’une VCI gauche rendrait particulièrement délicate la dissection de la partie gauche d’un anévrisme de l’aorte abdominale (AAA). C’est effectivement ce qu’évoque Bartel [8] en rapportant deux cas de découvertes per-opératoires de duplication de la VCI avec présence d’une VCI gauche, lors d’un geste de dissection d’un AAA. Cependant, et pour ce type d’opération qui requiert aujourd’hui systématiquement une imagerie scannographique pré-opératoire, nous ne pouvons que souligner l’importance de l’expertise du radiologue, dont le compte-rendu se doit de mentionner avec précision l’ensemble des variantes anatomiques observées en pré-opératoire [8,29].
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Table des matières
INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE : NOTRE OBSERVATION
I. OBSERVATION
I.1. L’histoire de la maladie
I.2. L’examen physique
I.3. Les examens complémentaires
I.4. Traitement
DEUXIEME PARTIE: REVUE DE LA LITTERATURE
I.EMBRYOLOGIE
I.1.La veine cave caudale
I.1.1. Le système vitellin
I.1.2. Le système ombilical
I.1.3. Le système cardinal
I.1.3.1. Le système cardinal postérieur
I.1.3.2. Le système sous-cardinal
I.1.3.3.Le système supra-cardinal
I.2. Le système cave supérieur
II. ANATOMIE
II.1. La veine cave caudale
II.2. Le système azygos
II.2.1. La veine Azygos
II.2.2. La veine hémi-azygos
II.2.3.La veine hémi-azygos accessoire
III. LES ANOMALIES CONGENITALES DE LA VEINE CAVE CAUDALE
III.1.Les anomalies congénitales du segment sous-rénal de la VCC
III.1.1. La veine cave caudale gauche
III.1.2. La veine cave caudale double
III.1.3. L’agénésie de la veine cave caudale sous-rénale
III.2. Les anomalies congénitales du segment supra-rénal de la VCC
III.2.1. L’agénésie du segment rétro-hépatique de la VCC
III.2.1.1. La continuation par la veine azygos d’une VCC droite
III.2.1.2. La continuation par la veine hémi-azygos d’une VCC droite
III.2.1.3. Continuation mixte d’une VCC droite
III.2.2. L’hypoplasie du segment rétro-hépatique de la VCC
IV.DISCUSSION
IV.1. Epidémiologie
IV.2. Les implications anatomiques et cliniques
IV.3. Les implications thérapeutiques
IV.3.1. En chirurgie thoracique
IV.3.2. En chirurgie vasculaire
TROISIEME PARTIE : CONCLUSION GENERALE
CONCLUSION
REFERENCES
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