Sous la dépendance directe des aléas climatiques et des facteurs anthropiques, les écosystèmes traversent aujourd‘hui une crise sans précédentes. En effet, sécheresse et pression démographiques ont rompu l‘équilibre classique entre société humaine et milieu physique. Ce qui a accéléré le rythme de la pauvreté et freiné les efforts de développement notamment sur le plan environnemental dans la plupart des pays africains.
La RBDS, située dans la partie estuarienne du bassin hydrographique du Sine-Saloum au Sénégal, couvre une superficie de 334 000 hectares (UICN 2003). Elle englobe la partie continentale de la région de Fatick, jusqu‘à la frontière gambienne et les îles du Gandoul ; la partie située au Nord du Diombos et du Niombato et la partie située au Sud du Diombos (Fall M, 2000).Elle se caractérise par la présence de trois principaux milieux écologiques : un domaine continental riche en forêts et limité dans sa partie basse par la mangrove et les tannes ; un domaine amphibie composé de trois grands groupes d’îles bordés par un réseau dense de chenaux entourés de mangroves ; et un domaine maritime. Ces trois milieux ont des fonctions relativement différentes et sont fortement dépendants du point de vue de leur fonctionnement, leur dynamique et leur évolution.
Le domaine continental est l’habitat principal de la grande et moyenne faune sauvage, il est la principale source trophique (eau et constituants organiques et minérales) des cours d’eau estuariens et de son écosystème mangrove. . Il englobe un certain nombre de massifs forestiers dont des forêts classées de longue date comme la forêt de Fathala, classée en 1934.C’est aussi la zone la plus dégradée de la RBDS, plus de 80% de la superficie est défrichée, l’avancée de la langue salée et des tannes et, la dégradation de la mangrove est très remarquable à ce niveau. L’érosion hydrique drainant une forte proportion de particules sableuses est une menace à long terme pour les écosystèmes vasière-mangrove d’une part, et les galeries forestières d’autre part (écoinfos, 2008).
Le domaine amphibie qui constitue l’estuaire est le milieu principal de reproduction, de nourrissage et de repos des espèces halieutiques et les oiseaux d’eau. Cette richesse est maintenue grâce aux nombreuses vasières, chenaux ou bolongs bordés de mangrove. Les îles et îlots inhabités constituent les derniers refuges de la grande et moyenne faune sauvage.
PROBLEMATIQUE
Contexte et Justification
L‘importance écologique du Delta du Saloum ainsi que ses multiples usages, font jouer à cet écosystème un rôle-clé dans la vie des populations estuariennes. Ses richesses forestières et halieutiques ont attiré un nombre croissant d‘exploitants au moment même où les conditions de l‘environnement se dégradaient du fait de la péjoration climatique des années soixante-dix et quatre-vingt. Le secteur de la pêche procure divers produits halieutiques dont les plus commercialisés sont les poissons à l‘état frais et à l‘état sec. Ces poissons font aussi sur le plan local l‘objet de troc contre les produits agricoles (mil, arachide) (Ndour, 2003). La production halieutique dans la région en 2000 était estimée à 5 642 tonnes ou 4,304 milliards de FCFA (JICA 2002). Délaissant l‘agriculture, les populations ont transformé leurs prélèvements halieutiques de subsistance en une activité commerciale de rente.
L‘écosystème de la mangrove du delta du Saloum joue aussi un rôle primordial dans la vie des populations locales du fait de son importance écologique ainsi que de ses multiples usages. Cette mangrove luxuriante jusque dans les années 1980 selon (Dupuy et Verschueren, 1982), a amorcé depuis ces dernières années une dégradation graduelle plus prononcée d‘amont en aval des cours d‘eau. Cette dégradation est estimée à plus de 25 % des superficies de la mangrove sur le fleuve Saloum (Soumaré, 1992). Il s‘y ajoute que dans la zone, les intensités de coupe de bois de mangrove sont comprises entre 1500 et 5700 individus à l‘hectare et les plus bas taux de recouvrement entre 45 et 56 % (Ndour, 2005). Les principaux facteurs de dégradations de la mangrove sont les coupes abusives de bois frais, la salinité des eaux de mer due à la baisse de la pluviométrie, l‘ensablement des vasières et la coupe des rhizophores au cours de la cueillette des huîtres (Diop et al. 1997 ; Diaw, 1997).
L‘exploitation illégale du bois de mangrove et des ressources halieutiques occupe donc la majeure partie des activités insulaires. Ces pratiques sont en outre amplifiées par l‘apparition de technologies nouvelles inadaptées (four de fumage) diffusées par des allochtones guinéens. Les captures de poissons ont fortement diminué de 30 000 à 10 000 Tonnes entre 1970 et 1990 au delta du Saloum (Diouf, 1996). Cet écosystème exceptionnel est menacé tant par l‘évolution climatique que par les activités anthropiques. Ainsi, sous ces effets conjugués (climatique et anthropique) s‘en suit une dégradation accrue de cette écosystème, les normales pluviométriques dans le delta du Saloum sont passées de 600 à 900 mm pour la période 1931-1950 à moins de 400 à 600 mm dans les années 90 (UNESCO 2000). Les conséquences les plus remarquables de ce déficit pluviométrique sont la sursalinisation des eaux marines, la baisse des nappes phréatiques, la salinisation et l‘acidification des terres ainsi que des eaux souterraines. Il en résulte une dégradation des mangroves et des formations forestières qui, à certains endroits, connaissent une évolution régressive. Par ailleurs, cette situation climatique a provoqué une crise de l‘ensemble des systèmes de production agricole (UICN 2003). Les inventaires effectués dans le Sine-Saloum et la comparaison d‘images satellites de 1976 à 1991 montrent clairement la diminution des surfaces de mangroves (Soumaré 1992, Diouf 1996). A ces causes de dégradations s‘ajoute la perturbation des régimes hydriques, de submersion (Diop et al. 1989, Diouf 1996) et de sédimentation (Soumaré 1992, Diouf 1996). La pression humaine et les mesures de gestion inadéquates accélèrent encore le processus au lieu de le stabiliser. Au nombre des activités anthropiques, l‘exploitation ligneuse et la pêche comptent parmi les plus préoccupantes. L‘exploitation ligneuse peut se diviser en trois catégories: l‘usage traditionnel du bois de chauffe à titre domestique, l‘exploitation commerciale des perches et l‘approvisionnement des fours de séchage. Les perches de palétuviers, du fait de leur durabilité, font l‘objet d‘une forte demande pour la construction des cases, des clôtures, des tables de séchage des produits halieutiques ou encore pour les échafaudages des entrepreneurs. Outre la consommation locale, une importante demande émane de la ville de Kaolack, en amont du fleuve Saloum.
Depuis quelques années, l‘écosystème mangrove du delta s‘inscrit dans le cadre de la Stratégie Mondiale de la Conservation de la Nature et fait l‘objet d‘attentions toutes particulières de la part de l‘Etat sénégalais et de ses partenaires non gouvernementaux. De nombreuses conventions internationales ont été signées en impliquant des institutions telles que l‘UNESCO, la CEE et les ONG comme l‘UICN afin de prendre un certain nombre de mesures pour la protection de ce patrimoine naturel, érigé en Réserve de Biosphère du delta du Saloum (RBDS) en 1981.
Les initiatives se multiplient dans la Réserve de la Biosphère du Delta du Saloum (RBDS) pour réhabiliter les écosystèmes côtiers et préserver ses ressources naturelles. L‘érection du delta du Saloum en réserve de biosphère et son classement au patrimoine mondial de l‘UNESCO, prirent une importance internationale et attirèrent l‘intérêt des projets et ONG voire des services étatiques concernés. C‘est ainsi que plusieurs programmes de conservation sont mis en œuvre dans le Delta du Saloum par l‘Etat et les ONG ((UICN, WWF, FIBA, Wetlands International etc.). Ces interventions ont permis de définir un nouveau système de gestion des ressources naturelles basé sur le principe de la participation communautaire, sur le renforcement des mesures de conservation, sur le règlement des conflits d‘usage et sur la diversification des activités économiques.
Revue critique de la littérature
A travers cette revue documentaire, nous avons pu consulter un certains nombres d‘ouvrages traitant à la fois des questions relatives à la géographie humaine, à la gestion des ressources naturelles, la conservation de la biodiversité et des écosystèmes, à la protection de l‘environnement et aussi des rapports d‘ONG ou de projets ayant intervenus dans la RBDS. Mais aussi nous avons analysé comment les questions de recherche qui nous intéressent, ont été traitées dans d‘autres secteurs d‘activités et d‘autres zones géographiques. Ces thèmes nous ont beaucoup inspiré sur la manière d‘aborder cette thématique.
Parmi ces ouvrages figurent celui de CASTELLANET, (C.), RODARY, (E.), (2003) qui ont fait des recherches sur l‘évolution de la conservation des ressources naturelles. Dans cette étude, l‘auteur démontre l‘impossibilité d‘intégré gestion environnementale et développement local malgré une politique de gestion intégré de gestion participative. Pour l‘auteur, les institutions non étatiques et même étatiques n‘interviennent que pour des intérêts politiques. En revanche, Peter Utting et Ronald Jaubert (1998), ont pour leur part étudié les politiques de gestion environnementale au Sénégal et révèlent que le discours des institutions nationales et internationales en matière d’environnement est souvent très loin des réalités sur le terrain, mais néanmoins le discours et la politique de ces institutions se sont sensiblement modifiés aux cours des derniers années pour s’intéresser davantage à une gestion communautaire des ressources naturelles. Un rapport de la FAO (2001) s‘est penché sur l‘étude des conflits liés à la gestion des ressources. Il démontre que les conflits liés à la gestion des ressources naturelles sont une caractéristique inévitable de toutes les sociétés. Ainsi, les politiques, les programmes et projets concernant ces ressources constituent un cadre important pour affronter les besoins et préoccupations à l‘origine des conflits. Le lien qui unit la notion de biodiversité et l‘action des ONG qui se consacrent à la conservation de la nature, à l‘histoire des ONG de conservation, à l‘organisation hiérarchisée d‘ONG pour la gestion mondiale de la biodiversité etc. ont été traités par David Dumoulin (2005), Chartier David (2002) a étudié à travers deux ONG, le rôle des organismes non gouvernementaux dans la résolution des problèmes environnementaux. En revanche, Gérard Perroulaz (2004) a étudié les forces et limites, légitimité et contrôle ainsi que le rôle des ONG dans la politique de développement. Le rapport de synthèse du CILSS de 2009 a étudié les impacts des investissements publics et privés dans la gestion des ressources naturelles. Le rapport d‘évaluations de l‘UICN (2011) s‘est appesanti sur des recommandations concernant les ressources naturelles en particulier dans le delta du Saloum.
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Table des matières
I – INTRODUCTION
II- PROBLEMATIQUE
III- ANALYSE CONCEPTUELLE
IV- METHODOLOGIE
PREMIERE PARTIE : PRESENTATION DU DELTA DU SALOUM
CHAPITRE I : LES ASPECTS PHYSIQUES
CHAPITRE II : LE CADRE HUMAIN
CHAPITRE III : LES CARACTERISTIQUES DES SECTEURS D’ACTIVITES SOCIO-ECONOMIQUES
DEUXIEME PARTIE : INVENTAIRE, CLASSIFICATION DES PROJETS DE PRESERVATION DES RESSOURCES NATURELLES DANS LE DELTA DU SALOUM
CHAPITRE I : INVENTAIRE, CLASSIFICATION DES PROJETS DE PRESERVATION DES RESSOURCES NATURELLES DANS LE DELTA DU SALOUM
I. Les acteurs essentiels à la protection de l’environnement du Delta du Saloum
II. Inventaire et classification des projets
III. Organigramme des types de projets, démarche et systèmes d’interventions des acteurs
CHAPITRE II : PERCEPTION SUR LES PROJETS DE PRESERVATION
CHAPITRE III : IMPACTS DES PROJETS DE PRESERVATION
I. Impacts des projets sur l’environnement
II. Impacts des projets sur l’économie locale des collectivités
III Les difficultés liées à la gestion des ressources naturelles du le delta du Saloum
IV CONCLUSION
Bibliographie
Table des matières
ANNEXE