Les enjeux socio-économiques, professionnels, de santé publique
Par rapport à ce thème, il est important d’interroger la pertinence de cette étude. La résonnance du sujet va être étudiée afin d’identifier si le thème est une question socialement vive, ensuite l’utilité et l’enjeu seront également identifiés.
Question socialement vive : Le thème choisi est un sujet d’actualité. En effet, la HAS a inclus dans son programme le sujet suivant : L’adaptation de l’intervention auprès des personnes handicapées vieillissantes (chapitre 4 2015) (6). Ensuite, l’ANESM a établi la recommandation suivante « Le soutien des aidants non professionnels. Une recommandation à destination des professionnels du secteur social et médicosocial pour soutenir les aidants de personnes âgées, adultes handicapés. ». L’ANESM fait partie de l’HAS depuis 2018 (7). Plus localement au niveau de la région, ARS PACA a proposé dans le projet régional de santé 2018-2022 les deux axes suivants : Prendre en compte les besoins d’une population vieillissante ; Proposer une palette de réponses diversifiées aux personnes en situation de handicap (8). Concernant l’utilité du thème, voici les différents axes répertoriés :
1) Améliorer l’accompagnement des besoins des personnes handicapées vieillissantes (6).
2) Adapter l’intervention des professionnels (6).
3) Aider les institutions à s’adapter au mieux à cette évolution (9).
4) Accompagner les aidants naturels dans le processus du vieillissement aboutissant à terme à une rupture de l’accompagnement (10).
Les enjeux sont en lien avec l’utilité. En effet, ils sont justifiés par les axes d’utilités cités cidessus. De l’axe n°1 découle les enjeux suivants :
• De santé publique par la promotion d’un besoin d’accompagnement spécifique en institut par rapport au vieillissement ;
• D’éthique par rapport à la juste posture à adopter en tant que soignant face aux personnes handicapées vieillissantes ;
• Politique suite aux dispositifs pensés, testés ou pas encore mis en place ;
• Economique car un accompagnement peut passer par un investissement matériel, et financier pour l’accès aux soins.
Pour l’axe n°2, il y a un enjeu professionnel lié à la formation spécifique des professionnels de santé sur le vieillissement des personnes en situation de handicap ; Dans l’axe n°3, nous retrouvons un enjeu politique par rapport aux lois (par exemple celle de février 2005) qui peuvent être mises en place pour aider cette adaptation. Un enjeu économique est présent car pour pouvoir appliquer les dispositifs, des fonds sont nécessaires (axe n°4). Enfin pour le dernier axe, un enjeu démographique est présent dû au phénomène de vieillissement de la population. L’intervention des professionnels de santé est interrogée par rapport aux résidents vieillissants mais aussi à leurs aidants naturels qui peuvent être eux aussi vieillissants. En résumé, les enjeux identifiés sont les suivants : politique, économique, de santé publique, professionnel, éthique et démographique.
La prise en soin des PHV8 par les professionnels de santé
Le vieillissement de la population en France est un phénomène actuel qui demande une adaptation de la société pour y faire face. Ce phénomène est présent chez les personnes en situation de handicap. Une grande majorité de résultats d’études parlent de ce phénomène (9,11–22). Pour certains handicaps, il y a un vieillissement appelé « précoce » comme pour les personnes polyhandicapées. Le résultat de l’étude (14) vient appuyer cette idée de vieillissement précoce qui entraîne une accentuation de la pathologie ainsi que l’apparition de nouveaux troubles (14). Les résultats de plusieurs études viennent s’accorder aux résultats de l’étude précédente en explicitant les troubles rencontrés « troubles musculosquelettique, de force, d’endurance, de spasticité, d’arthrose, de chutes, de fractures, de douleurs, de fatigue, d’épilepsie, de comportements, de nutrition, de ralentissement psychomoteur, de dépression… » (17,18,21). Tous ces éléments sont à prendre en compte dans la prise en soin de ces personnes. Les établissements médico-sociaux comme les MAS/FAM accueillent une majorité de personnes polyhandicapées comme les personnes paralysées cérébrales. Ces dernières ont des troubles moteurs et mentaux et sont confrontés au vieillissement précoce. Les résultats de l’étude (9) donnent des explications sur l’allongement de l’espérance de vie (9). L’évolution de la médecine ainsi que les soins apportés en institut viendraient contribuer à ce phénomène. Ce phénomène qui évolue demande aux professionnels de santé de pouvoir s’adapter afin d’apporter des prises en soin appropriées. Ces professionnels doivent prendre en compte l’augmentation des troubles liés à la pathologie. Les activités de la vie quotidienne réalisées au préalable doivent être repensées et s’adapter aux besoins, aux capacités et incapacités de la personne. Avec l’augmentation des troubles, les activités seront réalisées avec plus de lenteur. Les professionnels doivent penser à s’adapter dans le but que la personne conserve un maximum d’autonomie et d’indépendance dans ces activités. De plus, il est intéressant d’inclure les activités de bien-être pour lutter contre la dépression. Les résultats des études (16, 17) s’accordent face aux recommandations exprimées dans les résultats de l’étude (12). Face à la question du bien-être, quels moyens proposer pour que cette notion soit incluse dans l’accompagnement du vieillissement des personnes en situation de handicap ? La relation thérapeutique doit être souple et adaptable. Il faut prendre en compte le problème de communication souvent présent qui empêche les personnes de s’exprimer. Les professionnels doivent remettre en question régulièrement leur pratique afin de s’assurer qu’elle soit toujours bienveillante et adaptée au fur et à mesure de l’avancée en âge des résidents. La prise en soin du vieillissement précoce nécessite des connaissances à appliquer sur le terrain. Ces connaissances peuvent être issues de formations ou bien avoir été apprises « sur le tas » en étant confrontées aux situations de vieillissement. Les résultats de l’étude (9) expliquent que l’espérance de vie des personnes en situation de handicap vivantes à domicile est moins élevée que celle des personnes résidentes en structures spécialisées qui bénéficient de soins spécifiques (9). Les MAS et FAM sont des instituts qui peuvent accueillir des personnes de 18 ans jusqu’au décès. Ils sont donc particulièrement confrontés au vieillissement de leurs résidents. Leur expérience de terrain les oblige à s’adapter à l’évolution de leurs usagers en tenant compte des difficultés grandissantes et de la perte d’autonomie et d’indépendance. Le résultat de l’étude (13) vient complémenter celui de l’étude (9) en affirmant que les professionnels de MAS/FAM sont tout à fait adaptés au phénomène du vieillissement (9,13). De ce fait, qu’est-ce que les ergothérapeutes mettent en place en MAS/FAM face au vieillissement des résidents ? D’autres résultats d’études (11, 14) viennent s’opposer en explicitant que les professionnels de santé doivent être formés (11,14). Même si certaines initiatives sont prises, elles ne sont pas suffisantes pour être totalement efficaces. Il existe actuellement des formations en gériatrie qui pourraient enrichir les connaissances des professionnels de santé. De plus, la mise en commun des savoirs pourrait être une option complémentaire à la formation et à la pratique sur le terrain. Cette idée est évoquée par les résultats des études (14, 17) qui s’accordent. Etant donné que les professionnels en MAS et FAM sont confrontés au décès des patients, il serait intéressant qu’ils puissent échanger avec les professionnels de santé travaillant dans les services de soins palliatifs afin de transférer leurs savoirs et compétences respectifs. Selon les études (14, 17), les professionnels en MAS et FAM doivent apprendre à gérer le deuil des résidents décédés qu’ils ont accompagnés durant de nombreuses années. Les ergothérapeutes sont-ils formés pour gérer ces deuils et pouvoir accompagner les familles dans ce processus ? A l’inverse, les professionnels de soins palliatifs peuvent avoir besoin de conseils pour adapter au mieux le confort des personnes qui vont décéder.
Les difficultés rencontrées par les aidants naturels face à leur vieillissement et à celui de leur proche en institut
Les aidants naturels des personnes en situation de handicap sont eux aussi confrontés à leur propre avancée en âge. Généralement, le vieillissement entraîne chez la plupart des personnes, des difficultés dans les actes de la vie quotidienne et une fatigue plus importante. Les aidants naturels vieillissants peuvent rencontrer de plus en plus de difficultés pour s’occuper de leur proche avec handicap (9,13). Lorsque les personnes en situation de handicap sont en MAS/FAM, les aidants prennent en soins leur proche le week-end et pendant les vacances scolaires (19). A domicile, ils doivent s’occuper de leur proche malgré leurs propres difficultés. Les professionnels qui interviennent pendant ces périodes sont les infirmiers, en cas de soins, sinon les aidants naturels gèrent tout, seuls. Les populations accueillies en MAS/FAM, sont en majorité des personnes avec paralysies cérébrales et déficits intellectuels associés. Comme évoqué précédemment, ce type de population connait un vieillissement précoce qui entraîne des aggravations des troubles existants ainsi que l’apparition de troubles associés. Au fur et à mesure du temps, les aidants familiaux ont leur propre vieillissement à gérer ainsi que celui de leur proche. Comment les ergothérapeutes pourraient aider l’accompagnement à la fois, des aidants et de leur proche ? Les résultats de l’étude (19) préconisent la mise en place systématiquement de professionnels de santé autres que les infirmiers pour soulager les aidants naturels. En ce point, cette étude vient complémenter les résultats des études (9,11-13) qui expliquent les difficultés que rencontrent les aidants naturels dans l’accompagnement de leurs proches en situations de handicap (9,11–13). Face à leur propre vieillissement, les aidants naturels peuvent rencontrer plusieurs difficultés en plus de celles liées à l’accompagnement de leurs proches en difficultés. Des craintes concernant l’avenir peuvent se manifester. Les résultats des études (9, 12, 13) traitent de ce point (9,12,13). Les résultats des études 19 et 22 viennent se complémenter au sujet des craintes et complémenter les études (9,11–13). Envisager le décès de son enfant en situation de handicap dont l’état de santé se dégrade peut-être difficile pour les aidants naturels. De même, se voir vieillir peut-être source de stress par rapport à l’avenir de leur proche en difficultés. Ces deux problématiques sont des craintes auxquelles peuvent être confrontés les familles et les personnes en situation de handicap. Face à ces problèmes, qu’en est-il de l’accompagnement des aidants naturels par les professionnels, et spécifiquement par les ergothérapeutes ? Les résultats de l’étude (22) montrent que les aidants naturels représentés par les mères ont une qualité de vie pauvre avec des problèmes de dépression. Il serait intéressant de connaître les données pour l’ensemble des membres de la famille vivant sous le même toit que leur proche en situation de handicap (22). Un dernier point concernant les aidants naturels peut être évoqué. Bien que les personnes en situation de handicap vivant en instituts spécialisés rentrent à domicile seulement le week-end et les vacances, la famille a une place très importante pour eux. Les décisions concernant les éléments de la prise en soin doivent donc inclure la famille qui fait partie des facteurs environnementaux de la personne. Les résultats de l’étude (20) parlent de « culture familiale » à respecter. Est-ce que les familles sont incluses dans les décisions ? Quelles relations les ergothérapeutes ont avec elles ? Comment ces professionnels perçoivent-ils l’engagement des familles ? Sur le terrain quelles difficultés liées à l’accompagnement ressortent de la relation aidants naturels/professionnels ? Suite à cette analyse critique, la question de l’accompagnement des personnes en situation de handicap et de leurs proches est tout à fait actuelle. Certains moyens ont été pensés au niveau politique et mis en place. Malgré cela, la problématique est toujours présente. De plus, il n’y a pas de texte qui parle de solutions concrètes sur l’accompagnement en ergothérapie face au vieillissement des résidents et de leurs proches. Une enquête sur le terrain pourra apporter d’autres éléments afin d’étayer cette recherche. La problématique pratique qui émerge de cette analyse critique est la suivante : Comment les ergothérapeutes peuvent-ils accompagner au mieux les résidents et les aidants naturels ? Qu’estce qu’ils mettent en place en MAS/FAM face au vieillissement des résidents ? Quels moyens leur sont donnés en institution ? Ont-ils un rôle à jouer dans l’accompagnement du processus de deuil des résidents et/ou des aidants naturels ? Est-ce que les ergothérapeutes sont aidés par des dispositifs au niveau politique ?
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Table des matières
1. Introduction
1.1 Le contexte
1.2 Le thème général
1.3 Les enjeux socio-économiques, professionnels, de santé publique
1.4 La revue de littérature
1.5 L’enquête exploratoire
1.6 Question initiale de recherche
1.7 Le cadre de référence
1.7.1 Le modèle systémique
1.7.2 La communication
1.7.3 Le concept d’engagement
1.8 Question et objet de recherche
2. Matériel et Méthode
3. Résultats
3.1 Les données descriptives
3.2 Les données textuelles
4. Discussion des données
4.1 Interprétation des résultats
4.2 Elément de réponse à l’objet de recherche
4.3 Critique du dispositif de recherche et discussion autour des résultats
4.4 Apports, intérêts et limites des résultats pour la pratique professionnelle
4.5 Proposition et transférabilité pour la pratique professionnelle
4.6 Perspectives de recherche à partir des résultats et ouverture vers une nouvelle question de recherche
5. Bibliographie
6. Annexes
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