L’engagement psychologique des adultes en formation professionnelle

Au Burkina Faso, de nombreuses personnes suspendent leur parcours de formation initiale pour différentes raisons et s’engagent dans la vie professionnelle. Mais à l’issu d’un certain parcours professionnel, certaines reprennent le chemin des structures de formations. Cette reprise de formation s’opère alors dans le champ de la formation continue et place l’adulte dans une nouvelle configuration personnelle, sociale, professionnelle et psychologique. C’est ce dernier aspect qui nous intéresse dans la présente recherche de thèse dans laquelle nous explorons l’engagement psychologique dont font preuve les adultes dans le cadre de cette activité.

Le concept d’engagement mobilise les efforts de nombreux chercheurs, car il constitue un facteur important pour expliquer de nombreuses pratiques et comportements sociaux. Les pratiques d’engagement sont diverses et multiformes avec des dynamiques spécifiques. Cet acte peut être davantage considéré comme pragmatique et utilitariste, inscrit dans la durée ou non, individuel (Fillieule, 2001 ; Havard-Duclos & Nicourd, 2004) ou collectif (Sawicki & Simeant, 2006 ;Jullien, Roudaut & Le Squin, 2011), et perceptible par les autres ou non (Derville & Pionchon, 2005). Il nous renvoie assez rapidement au cas de l’homme politique (de Bouver, 2016) ou de la femme politique (Bessette-Viens, 2017), de l’intellectuel (Hirsch, 2011 ; Mortier, 2013), de l’altermondialiste (Jossin, 2008 ; Fillieule, 2004) de l’environnementaliste (Centemeri, 2010), du défenseur d’une cause sociale (Pette & Eloire, 2016), pour ne donner que ces exemples qui nous sont proposés, lorsque l’on s’intéresse à ce concept pour une action, une valeur ou une cause quelconque dans laquelle s’engage un personnage donné. L’engagement est également convoqué en relation avec la sphère organisationnelle du travail (Bosset & Bourgeois, 2014) et assimilé à l’implication (Neveu & Thévenet, 2002 ; Thévenet, 1992, 2002).

Pour de Rozen (2014, p.40), l’engagement apparaît tantôt comme « la parole donnée et ses conséquences », puisqu’il « vient nous contraindre et nous lier », il est dans un rapport de soi à soi, une fidélité à des valeurs signifiantes pour soi, une « manière d’être et d’agir dans le monde ». Il est également vis-à-vis d’autrui et des causes diverses. « Il me semble également que l’engagement est lié d’une certaine manière au besoin de reconnaissance, qu’il soit de singularité ou de conformité », « La forme et la nature de nos engagements sont amenées à se transformer, par l’interaction inévitable avec le caractère changeant des contextes et des environnements dans lesquels nous évoluons et notre propre cheminement existentiel » et « ces formes multiples sont indissociables des situations particulières dont elles émergent et n’engendrent pas la même prise de risque ».

Il est souvent fait usage de ce concept en le considérant comme un synonyme de « participation », de « présence » à une activité, sans fournir une réelle définition. Il semble aller de soi que le sens est accessible à tous, mais nous faisons appel à ce concept dans une acception psychologique. Le concept a connu une popularité dans les disciplines de la psychologie du travail et du comportement organisationnel (Allen & Meyer, 1996 ; Mathieu & Zajac, 1990). L’engagement est également abordé en relation avec le travail (Demerouti, Mostert & Bakker, 2010 ; Hakanen, Schaufeli & Aloha, 2008 ; Jodoin, 2000), la profession (Duchesne, Savoie-Zajc & St-Germain, 2005), différentes cibles au travail (Morin, Madore, Morizot, Boudrias & Tremblay, 2009), l’organisation (Meyer & Allen, 1991), le couple (Brassard, Brault-Labbé & Gasparetto, 2011). Dans le domaine de l’éducation, le concept d’engagement a connu diverses définitions ces dernières décennies, probablement en raison d’une compréhension accrue du rôle que jouent certains facteurs intellectuels, émotionnels, comportementaux, physiques et sociaux dans le processus d’apprentissage et le développement social (Brault Labbé & Dubé, 2008, 2009, 2010 ; CSE, 2008 ; Dubé, Kairouz & Jodoin, 1997). Dans ce contexte, l’engagement des étudiants se réfère à la participation, au degré d’attention, de curiosité, d’intérêt, et des actions entreprises dans leurs apprentissages. L’engagement traverse presque toutes les pratiques humaines comme celles relatives à la formation des adultes qui nous intéresse.

Souvent évoqué en association avec l’engagement en formation, la motivation (Bourgeois, 1998 ; Boutinet, 1988 ; Carré, 1988, 2001 ; Charlet, Brouet & Mattison, 1998) apparaît comme un facteur important dans la présence manifeste d’un sujet dans une activité, à telle enseigne qu’ils sont parfois confondus (Appleton, Christenson & Furlong, 2006 ; Reeve & al., 2004 ; Russell & al., 2005, cités par Brault-Labbé & al., 2010, p.81). La prise en compte de cette motivation se fait d’autant plus nécessaire lorsque, le sujet rencontre des obstacles dans son parcours ou encore lorsqu’il doit entreprendre un travail de plus longue haleine (Vezeau & Bouffard, 2009, p.15). Se pose alors la question de savoir quelles influences la motivation exerce sur l’engagement ? D’autres recherches sur les adultes en formation convoquent le sentiment d’autodétermination (Deci & Ryan, 1985, 2000), le sentiment de compétence personnelle (Bandura, 1997), le projet (Nuttin, 1980), la dynamique identitaire (Barbier, 1996) puisque chaque construit, à son niveau, permet de rendre compte de l’engagement.

Situation géographique

Le Burkina Faso est un pays enclavé d’une superficie de 274.000 km2 , situé au cœur de l’Afrique de l’Ouest (voir la carte ci-dessus). Il est limité au nord et à l’ouest par le Mali, à l’est par le Niger et au sud par la Côte d’Ivoire, le Ghana, le Togo et le Bénin. (Ibrahim, 2012). Le pays doit son ancien nom de « Haute-Volta » aux trois cours d’eau qui le traversent : le Mouhoun (anciennement la Volta noire), le Nakambé (anciennement la Volta blanche) et le Nazinon (anciennement la Volta rouge).

Histoire politique et administrative

C’est au 19e siècle que territoire actuel du Burkina Faso a été occupé par la France, en tant que colonie de Haute-Volta et fut intégré dans le grand ensemble des colonies de l’Afrique Occidentale Française (AOF). Comme d’autres colonies de cet ensemble, elle obtient son indépendante, le 05 août 1960 (Kaboré, 2011, p.26). A la suite de différents soubresauts politico-militaires, le pays, sous le régime du Conseil national de la révolution (1983-1987), a changé de nom pour devenir «Burkina Faso », c’est-à-dire « le pays des hommes intègres » en août 1984. Depuis l’indépendance (1960), le pays a été soumis à une vingtaine d’années de régimes d’exception avec cinq expériences de régimes de dictature politique et militaire, et trente-quatre ans de régimes constitutionnels, à travers quatre Républiques, dont la dernière date de juin 1991. Le dernier séisme politico-militaire, doublé d’une réplique, date de 2015 et a abouti à la chute d’un « pouvoir sans débat » après un long règne de plus d’un quart de siècle (de 1987 à 2015) et la mise en échec d’une tentative de coup d’Etat en septembre 2015, par les populations insurgées. Après des élections présidentielle et législatives (novembre 2015), suivies des élections municipales (mai 2016), le pays a retrouvé une vie politique des plus conventionnelles avec la participation de toutes les forces souhaitant apporter leurs contributions à l’édification d’une société démocratique. Le paysage politique et social est marqué par la présence d’une multitude de formations politiques, la pluralité de la presse et une diversité d’associations et d’Organisations non gouvernementales (ONG) et des OSC (Organisations de la société civile) intervenant dans tous les secteurs culturels, sociaux et politiques. Le pays reste néanmoins, sur le qui-vive sécuritaire comme de nombreux autres pays dans le monde. La sécurité intérieure du pays est mise à mal par des attaques terroristes. La capitale, Ouagadougou, n’est pas épargnée, puisqu’elle en a subi en janvier 2016, en août 2017, et mars 2018. Les attaques ont lieu également dans le nord du pays qui est au plan administratif, divisé en 13 régions, 45 provinces, 351 communes dont 49 communes urbaines et plus de 8000 villages. (MESRSI). A la tête d’une région se trouve un gouverneur, à la tête d’une province, un hautcommissaire, à la tête d’un département, un préfet, à la tête d’une commune, un maire élu qui anime la gouvernance locale (Consulat du Burkina à Paris). Un village est gouverné par un chef de village et un président de Conseil villageois de développement (CVD). Le chef de village est un représentant désigné par les notables du village concerné ou désigné par une autre structure supérieure selon l’organisation sociale traditionnelle en place. Enfin, Le gouverneur, le hautcommissaire et le préfet sont nommés par le gouvernement (Kaboré, 2011, p.27). Les cinq principales villes sont Ouagadougou, Bobo-Dioulasso, Koudougou, Ouahigouya et Banfora, mais les villes de Ouagadougou (capitale politique et économique) et Bobo-Dioulasso (capitale culturelle) sont des communes à statut particulier. Elles sont subdivisées en arrondissements communaux.

Caractéristiques climatiques et hydrographiques

Le climat est à dominante sahélienne et expose une subdivision en trois principales zones climatiques en fonction de la pluviométrie. La zone sahélienne au nord reçoit environ 300 à 600 mm/an, pendant que la zone subsahélienne (ou soudano-sahélienne) au centre reçoit environ 600 à 900 mm/an et la zone sud, soudanienne au sud, reçoit environ 900 à 1200 mm/an). L’essentiel des ressources en eau du Burkina Faso est apporté par la pluviométrie dont le cumul annuel diminue du sud vers le nord, avec un gradient de l’ordre de 1 mm/km/an (Ibrahim, 2012, p.23). Le pays est soumis à une pluviométrie assez capricieuse présentant une forte variabilité spatiotemporelle et une tendance à la baisse comme sur une grande partie de l’Afrique (Paturel & al., 2010, cités par Ibrahim, 2012, p.1). La hauteur moyenne des précipitations est estimée à 748 mm/an, soumettant une population à 80% investie dans les activités agricoles, à des lendemains souvent incertains. Le Burkina Faso est drainé par plusieurs cours d’eau qui convergent vers les trois bassins principaux de la Volta, de la Comoé et du Niger. Ces bassins sont alimentés principalement, par les fleuves du Mouhoun, du Nakambé, du Nazinon et de la Comoé. Ces fleuves prennent tous leur source au Burkina Faso, mais la plus grande partie de leurs cours se trouvent dans les pays voisins du Sud dont le Ghana pour le Mouhoun, le Nakambé et le Nazinon, et la Côte d’Ivoire pour la Comoé (RGPH 2006, p.30). Le climat ensoleillé, chaud et sec, est caractérisé par l’alternance d’une saison humide et d’une saison sèche. La saison humide débute de façon progressive, entre mai (au Sud) et juin (au nord), mais sa fin intervient de façon brutale, entre la fin du mois de septembre et la mi-octobre. La saison sèche et fraîche, qui s’étend de novembre à février, est caractérisée par l’harmattan, un vent sec, poussiéreux, provenant du nord. La saison sèche et chaude plus que caniculaire s’étend de mars à mai. Cependant, c’est un vent humide, chaud et chargé d’orages, qui souffle en saison pluvieuse (hivernage) de juin à octobre. La rareté et la mauvaise répartition des pluies sont à l’origine de fortes migrations de populations du nord et du centre vers les villes, le sud-ouest du Burkina et les pays côtiers frontaliers.

Caractéristiques sociales et culturelles

Configurations ethniques
Le Burkina Faso est constitué d’une mosaïque de soixante-trois (63) ethnies répertoriées officiellement (Balima, pp.33-34) dont les Mossés constituent le groupe le plus important (RGPH 2006, p.90).

Configuration linguistique
A chacune des soixante-trois ethnies correspond une langue ou son dialecte et trois de ces langues ont été retenues comme langues nationales : le mooré de l’ethnie majoritaire (originaire du centre du pays), le jula (plutôt à l’Ouest et dans d’autres pays d’Afrique occidentale) et le peulhfulfuldé au Nord (également parlé dans d’autres pays). Le français retenu comme langue officielle est parlé par 24 à 26% de la population, alors que l’arabe n’est pratiqué que comme langue de culte musulman (Kaboré, 2011, p.32). La rétention du français comme langue officielle s’explique par quatre principales raisons de prudence politique (Batiana, 1993, cité par Bazyomo, 2009, pp.34- 35) puisque : « Le français est une langue internationale et de ce fait, permet aux différents pays qui la parlent de participer au concert des nations ; le français est la langue du savoir scientifique ; le français permet d’entretenir une unité nationale. Etant la langue d’aucune ethnie, personne ne pourrait la revendiquer, ni se sentir brimé, d’où son rôle de ciment de l’unité nationale. Le français, parce qu’aux indépendances, aucune langue africaine n’était ni préparée ni assez représentative pour jouer le rôle du français ».

Mais pour Napon (2003 et 2005, cité par Yoda, 2010, p.35) diverses raisons politiques, économiques, sociolinguistiques ou psychologiques font du français «l’unique véhicule de l’enseignement. C’est « la langue de promotion sociale […] omniprésente dans tous les domaines de la vie de la nation : économique, politique et culturelle, contrairement aux langues nationales qui ne procurent aucun avantage socioéconomique à leurs locuteurs » (Napon, 2008, p.13). Ce que confirment Balima et Frère (2003, cités par Yoda, 2010, p.38) « la situation d’ensemble aujourd’hui, confirme bien la prédominance du français qui reste la langue de l’information et de la culture, donc du pouvoir ».

Organisation traditionnelle
Deux principaux types d’organisation sociale traditionnelle peuvent être retenus (Kaboré, 2011, p.32) : le type d’organisation sociale traditionnelle hiérarchisée comme en sociétés mossi, gourmantché et peulh, etc. ayant un pouvoir central, intermédiaire et local, et des catégories sociopolitiques distinctes (nobles et roturiers) se superposant aux catégories familiales (hommes/femmes, aînés/cadets). Le type d’organisation sociale peu structurée, reposant essentiellement sur la famille sans pouvoir central, pour la plupart des autres ethnies. Il existe également des groupes ethniques nomades ou transhumantes à l’Est et au Nord du pays, en l’occurrence les Peulhs et les Touaregs.

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Table des matières

INTRODUCTION
1. PROBLEMATIQUE ET QUESTIONS DE RECHERCHE
2. CADRE THEORIQUE
3. OBJECTIFS DE LA RECHERCHE
4. POSITIONNEMENT EPISTEMOLOGIQUE
5. METHODOLOGIE DE LA RECHERCHE
6. ORGANISATION DE LA THESE
CHAPITRE 1 : PRESENTATION GENERALE DU BURKINA FASO
CONTEXTE GENERAL DE L’ETUDE
1.1. Situation géographique
1.2. Histoire politique et administrative
1.3. Caractéristiques climatiques et hydrographiques
1.4. Situation démographique
1.5. Caractéristiques sociales et culturelles
1.6. Contexte économique et de l’emploi
1.7. L’enseignement supérieur
1.8. Législation de la formation professionnelle au Burkina Faso
SYNTHESE DU CHAPITRE 1
CHAPITRE 2 : CADRE EPISTEMOLOGIQUE, METHODOLOGIQUE ET THEORIQUE DE LA RECHERCHE
2.1. Problématique générale de la recherche
2.2. Justification de la recherche
2.3. Positionnement épistémologique et méthodologique
2.3.1. Le positivisme
2.3.2. L’interprétativisme
2.3.3. Le constructivisme
2.4. Les considérations éthiques
2.5. La méthodologie de recherche et d’analyse
2.6. Proposition du modèle de la recherche
SYNTHESE DU CHAPITRE 2
CHAPITRE 3 : L’ENGAGEMENT : UN CONCEPT PLURIEL
3.1. Conceptualisation de l’engagement
3.2. L’engagement et sa pluralité
3.2.1. L’implication
3.2.2. La persévérance
3.3. L’engagement et ses dimensions
3.3.1. L’engagement affectif
3.3.2. L’engagement cognitif
3.3.3. L’engagement comportemental
3.3.4. L’engagement unidimensionnel
3.3.5. L’engagement bidimensionnelle
3.3.6. L’engagement tridimensionnel
3.4. L’engagement psychologique
3.4.1. Le modèle intégratif de l’engagement psychologique
SYNTHESE DU CHAPITRE 3
CHAPITRE 4 : LA FORMATION DES ADULTES
4.1. La formation permanente
4.2. La formation des adultes
4.3. La formation professionnelle continue
4.4. La formation continue et le régime LMD
4.5. La formation tout au long de la vie
SYNTHESE DU CHAPITRE 4
CHAPITRE 5 : LA MOTIVATION
5.1. La théorie de l’autodétermination
5.1.1. Le continuum d’autodétermination
5.1.1.1. La motivation intrinsèque
5.1.1.2. La motivation extrinsèque
5.1.1.3. L’amotivation
SYNTHESE DU CHAPITRE 5
CHAPITRE 6 : LA CARRIERE ET LES MOTIVATIONS DE CARRIERE
6.1. La carrière
6.1.1. La carrière objective versus subjective
6.1.2. Les nouvelles approches de la carrière
6.2. Les motivations de carrière
6.2.1. La vision de carrière
6.2.2. L’identité de carrière
6.2.3. La résilience de carrière
SYNTHESE DU CHAPITRE 6
CHAPITRE 7 : LES SOUTIENS SOCIAUX ET ORGANISATIONNELS
7.1. Soutien social
7.1.1. Dimensionnalité du soutien social
7.1.2. Le soutien social perçu
7.1.3. La mesure du soutien social perçu
7.1.4. L’échelle multidimensionnelle du soutien social perçu
7.2. Le soutien organisationnel
7.2.1. Le soutien organisationnel perçu
7.2.2. Mesure du soutien organisationnel perçu
7.2.3. Le soutien hiérarchique
7.2.4. Le soutien des collègues
SYNTHESE DU CHAPITRE 7
CONCLUSION

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