L’encéphalite auto-immune à anticorps anti-NMDAR (EAI-NMDAR)

L’encéphalite auto-immune à anticorps anti-NMDAR (EAI-NMDAR) 

Etiologie et terrain

L’EAI à anticorps anti-NMDAR est une pathologie qui a été découverte en 2007 par le neurologue espagnol Josef Dalmau (Dalmau et al., 2007 ; Sansing et al., 2007). La pathologie affecte 1,5 personnes par million d’individus chaque année dans le monde. Ce chiffre est probablement sous-estimé étant donné le nombre croissant de nouveaux cas diagnostiqués par an (Venkatesaen et al., 2013 ; Venkatesan et Adatia., 2017).

Au même titre que d’autres pathologies auto-immunes, l’EAI à anticorps anti-NMDAR touche majoritairement le jeune adulte avec une prédisposition pour le sexe féminin. La femme est affectée dans 81 % des cas (Dalmau et al., 2008 ; Leypold et al., 2015 ; Venkatesan et Adatia., 2017). L’âge médian d’apparition de la maladie se situe entre 21 et 23 ans ; 37 % des sujets féminins ont moins de 18 ans et 5% ont plus de 45 ans (Dalmau et al., 2008 ; Leypold et al., 2013 ; Leypold et al., 2015 ; le Guen et al., 2015). Le patient le plus jeune avait 2 mois et le plus âgé, 85 ans (Kayser et Dalmau.,2016). Les hommes peuvent également être affectés par la maladie mais en moindre mesure (Le guen et al., 2015).

Epidémiologie

Les anticorps anti-NMDAR ont été pour la première fois caractérisés en 2007 chez douze femmes par l’équipe barcelonaise du Pr. Josef Dalmau (Dalmau et al., 2007), c’est-à-dire deux ans après la description clinique des premiers cas (Vitaliani et al., 2005). Par la suite, une meilleure sensibilisation et formation du personnel médical face à cette nouvelle pathologie a permis d’augmenter de manière significative le nombre de cas diagnostiqués ainsi que la rapidité d’établissement du diagnostic. Depuis lors, l’encéphalite à anticorps anti-NMDAR semble être la plus fréquente des encéphalites auto-immunes (Granerod et al. 2010) et infectieuses chez les personnes de moins de 30 ans (Gable et al. 2012). Nous allons, ci-après, décrire les deux principales formes d’EAI à anticorps anti-NMDAR classiquement rencontrées : la forme infectieuse et la forme paranéoplasique.

Les différentes formes d’encéphalite auto-immune à anticorps anti-NMDAR 

Depuis sa découverte en tant que syndrome paranéoplasique, plusieurs autres formes d’EAI à anticorps anti-NMDAR ont pu être mises en évidence. Deux grands types d’EAI à anticorps anti-NMDAR peuvent être différenciés et sont, soit liés à une tumeur, soit associés à la présence d’un agent infectieux. Nous allons ici nous focaliser sur ces deux formes qui restent celles les plus classiquement rencontrées dans la littérature scientifique.

L’encéphalite auto-immune à anticorps anti-NMDAR de type paranéoplasique 

Un évènement paranéoplasique correspond à l’ensemble des manifestations pouvant se mettre en place en parallèle d’une tumeur. Dans ce cas précis, la tumeur est un tératome signifiant en grec « tumeur monstre » . Cette tumeur est composée de cellules germinales pluripotentes permettant la présence de tissus complexes tels que du tissu nerveux localisé dans des zones anormales (exemple : l’ovaire) (Day et al., 2014 ; Lemura et al., 2018). D’une manière générale, ce type de tumeur se compose de cellules issues des 3 feuillets embryonnaires classiquement décrits que sont l’endoderme, le mésoderme et l’ectoderme. Ces trois feuillets peuvent en théorie donner n’importe quel tissu ou ébauche d’organe. Il est ainsi possible d’observer au sein de ces tératomes des cheveux, des dents ou bien encore des ébauches d’yeux pour la partie macroscopique. Pour la partie microscopique, nous constatons la présence d’un important infiltrat de cellules immunitaires composé principalement de lymphocytes B (CD20), de plasmocytes (CD138) et, de manière plus rare, de lymphocytes T (CD3)  (Tüzün et al., 2009 ; Braverman et al., 2015 ; Lemura et al., 2018 ; Chefdeville et al., 2019). Dans le cas des encéphalites de type paranéoplasique, l’ovaire est l’organe le plus souvent touché (80 % des cas) (Dalmau et al., 2007-2008 ; Florance et al., 2009 ; Dalmau et al., 2011).

D’autres cancers peuvent induire une EAI à anticorps anti-NMDAR comme dans le cas des tératomes médiastinaux (situés dans le médiastin, près de l’ensemble cœur-poumons) ou encore le carcinome pulmonaire à petites cellules (Dalmau et al., 2008 ; Dalmau et al., 2011 ; Venkatesan et Adatia., 2017). Chez les individus masculins, l’étiologie paranéoplasique est plus rarement évoquée mais des tératomes testiculaires peuvent être rapportés dans différents cas cliniques (Dalmau et al., 2008 ; Dalmau et al., 2011 ; Venkatesan et Adatia., 2017).

La forme infectieuse

Cette forme nécessite l’implication d’un agent bactérien ou viral à distance. Le sang et le liquide céphalorachidien (LCR) sont analysés dans le but de trouver le pathogène mis en cause (Venkatesan et al., 2013). Les patients présentent souvent des sérologies positives pour le virus de l’Herpès simplex de type 1 (HSV 1) (Nosadini., 2017), pour l’entérovirus de type 1 ou encore pour le Mycoplasma pneumoniae ; ce dernier étant toutefois plus impliqué dans les cas pédiatriques que nous ne traiterons pas ici (Dalmau et al., 2011 ; Venkatesan et al., 2013). Il est également possible de retrouver le virus varicelle-zona (VZV) ou encore le virus de la grippe H1N1 (Le Guen et al., 2015). Il est important de noter que malgré de larges investigations, l’étiologie des encéphalites, dans leur globalité, reste inconnue dans 30 à 60% des cas (Glaser et al., 2003 ; Glaser et al., 2006 ; Granerod et al., 2010 ; Bloch et Glaser 2015 ; Pillai et al., 2015 ; Parpia et al., 2016).

Symptomatologie clinique des différentes phases associées à l’EAI à anticorps anti-NMDAR 

La symptomatologie clinique de l’EAI à anticorps anti-NMDAR est vaste et présente des manifestations à la fois psychiatriques et neurologiques. Il est admis que cette pathologie évolue selon trois phases distinctes caractérisées par une symptomatologie propre à chacune d’entre elles .

La symptomatologie clinique de la phase prodromale 

Cette phase initiale correspond à des symptômes classiquement rencontrés lors d’une grippe ou d’une gastro-entérite d’origine virale ; elle peut durer entre 1 et 21 jours en fonction des patients (Dalmau et al., 2007 ; Venkatesan et Adatia., 2017) mais elle dure en moyenne une semaine (Kayser et Dalmau., 2014). Au cours de cette phase, des épisodes de fièvre, des courbatures, des céphalées et la présence de troubles gastriques plus ou moins sévères sont observés. Cette phase est constatée chez 70 % des patients mais est souvent négligée ou oubliée par les patients eux-mêmes (Dalmau et al., 2008 ; Florance et al., 2009 ;Dalmau et al., 2011 ; Peery et al., 2012 ; Zekeridou et al., 2015 ; Leypold et al., 2015). À la suite de ce prodrome, la maladie va évoluer de manière brutale avec des symptômes caractérisant une maladie neuropsychiatrique.

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Table des matières

Introduction
I : L’encéphalite auto-immune à anticorps anti-NMDAR (EAI-NMDAR)
I-1 : Etiologie et terrain
I-2 : Epidémiologie
I-3 : Les différentes formes d’encéphalite auto-immune à anticorps anti-NMDAR
I-3-A : L’encéphalite auto-immune à anticorps anti-NMDAR de type paranéoplasique
I-3-B : La forme infectieuse
I-4 : Symptomatologie clinique des différentes phases associées à l’EAI à anticorps anti-NMDAR
I-4-A : La symptomatologie clinique de la phase prodromale
I-4-B : La symptomatologie clinique de la phase psychiatrique
I-4-C : La symptomatologie clinique de la phase neurologique
I-5 : Outils diagnostics de la pathologie
I-5-A : Détection des auto-anticorps dans le sang et le liquide cérébrospinal
I-5-B : Autres anomalies du liquide céphalo-rachidien
I-5-C : Autres examens complémentaires
I-5-D : Histologie cérébrale : études post-mortem et biopsies cérébrales
I-6 : Thérapies disponibles ou traitements
II : Le récepteur NMDA et son implication dans la physiopathologie de l’encéphalite auto-immune à anticorps anti récepteur NMDA
II.1 Généralité sur les récepteurs glutamatergiques
II-2 : Le NMDAR : structure, localisation et rôle en condition physiologique
II-2-A : Généralité sur le récepteur NMDA
II-2-B : Localisation des récepteurs NMDA
II-2-C : Structure du récepteur NMDA : constitution en sous unités
II-2-D : Caractérisation de l’épitope reconnu par les anticorps anti-NMDAR et effets directs sur l’activité du NMDAR
II-2-E : Effets des auto-anticorps anti-NMDAR sur l’adressage au niveau post synaptique du récepteur NMDA
II-2-F : L’hippocampe : une structure préférentiellement touchée dans l’EAI à anticorps anti récepteur NMDA
III : Les modèles murins d’encéphalite auto-immune à anticorps anti récepteur NMDA
III-1 : Le modèle d’infusion intra cérébroventriculaire
III-1-A : Présentation des tests comportementaux réalisés dans le modèle d’infusion intra cérébroventriculaire
III-1-B Etudes immunohistologiques dans le modèle d’infusion intra cérébroventriculaire
III-2 : Modèles murins d’EA à anticorps anti-NMDAR basés sur une immunisation active
III-2-A : Modèle de Pan et collaborateurs en 2017
III-2-B : Modèle de Jones et collaborateurs en 2019
III-2-C : Modèle de Ding et collaborateurs en 2021
III-3 : Modèle d’injection intracérébroventriculaire de Wright et collaborateurs en 2015 : une adaptation du modèle d’infusion pour l’étude de l’épilepsie
IV : Les lymphocytes B : cellules centrales dans l’encéphalite auto-immune à anticorps anti-NMDAR
IV-1 : Introduction
IV-2 : La phase indépendante de l’antigène : les principaux acteurs cellulaires et moléculaires précoces
IV-2-A : Développement précoce des cellules B au niveau embryonnaire et les principaux acteurs moléculaires associés
IV-2-B : Suite de la différenciation de la lignée B dans la moelle osseuse
IV-2-C : Suite du développement : l’acquisition du pré-récepteur de la cellule B (Pre-BCR)
IV-3 : Lymphocytes B transitionnels : passage vers les organes lymphoïdes secondaires
IV-4 : Différenciation et maturation des cellules B : les sous types B1 et B2
IV-4-A : Les lymphocytes B1
IV-4-A-a : Les lymphocytes B1-a
IV-4-A-b : Les lymphocytes B1-b
IV-4-B : Les lymphocytes B2
IV-4-B-a : Les lymphocytes B2 de la zone marginale
IV-4-B-b : Les lymphocytes B2 de la zone folliculaire
IV-5 : Lymphocytes B mémoire et plasmocyte
IV-5-A : Les lymphocytes B mémoires
IV-5-B : Les plasmocytes
IV-5-B-a : Les acteurs moléculaires au cœur de la formation du plasmocyte
IV-5-B-b : Les différentes populations plasmocytaires
IV-5-B-b-1 : Les plasmocytes à courte durée de vie
IV-5-B-b-2 : Les plasmocytes à longue durée de vie
V – Les points de contrôle de régulation de la cellule B : prévention de l’auto-immunité
Conclusion

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