L’encadrement juridique de la gestion électronique des données médicales

Au cours des deux dernières décennies, la France s’est engagée dans une réforme de son système de santé fondée sur le concept de « la santé électronique » dans le double objectif d’améliorer la qualité des soins et de maîtriser les dépenses de santé. La santé électronique, intégration des technologies de l’information et de la communication dans le domaine de la santé, implique une informatisation généralisée du système de santé (A). L’informatisation du système de santé implique une gestion électronique accrue de données médicales qui nécessite un encadrement juridique strict. Au plan international, la régulation de la politique de santé des États est assurée par les instances comme l’OCDE , l’OMS et la Commission européenne. Néanmoins, la France a mis en place un cadre institutionnel interne qui lui est propre. Les compétences en matière de politique de santé et de régulation du système de soins sont partagées entre l’État (Parlement, gouvernement et administrations ministérielles) ; les organismes d’assurance maladie obligatoire et les collectivités territoriales (les agences régionales de santé (ARS). Votant les principales lois qui guident le projet d’informatisation du système de santé, le Parlement est en amont de l’organisation. La mise en application de ce projet est assurée par le gouvernement à travers les règlements qu’il prend et les maîtres d’ouvrage qu’il nomme. Une autorité indépendante de régulation supervise toutes les actions en veillant à ce qu’elles respectent les normes de la loi informatique et libertés. La nécessité de la prise de tant de mesures de contrôle réside dans la singularité qui caractérise la gestion électronique des données médicales. Que renferme l’expression « gestion électronique des données médicales» et quelle en est sa spécificité ? Une analyse préalable de ces notions s’imposera pour la clarté de la suite de cette étude (B).

L’informatisation du système de santé

L’informatisation du système de santé qui passe nécessairement par la gestion électronique de données médicales s’inscrit, en France, dans le cadre de l’évolution de l’administration électronique avec la collaboration de partenaires socio-économiques des secteurs public et privé sous le contrôle de la CNIL.

De l’administration électronique à la santé électronique

L’implication de l’État dans le système de santé français tel que nous le connaissons aujourd’hui date de la fin du XIXe siècle, lorsque, succédant à l’église et au pouvoir royal dans la gestion administrative des hôpitaux, l’État doit veiller à la protection de la santé publique. Il crée les premières institutions et met en place des législations dont la loi du 15 février 1902 définissant le premier cadre d’action pour les communes et les départements. Le ministère de la santé est créé en 1920 et le code de la santé publique est promulgué sous le régime de Vichy . Les années 70 ont été marquées par l’essor des systèmes macro-informatiques dans les grandes organisations, notamment les administrations publiques en Europe et en Amérique du Nord. L’ordinateur était présenté comme un instrument de renforcement de l’efficacité des administrations publiques dans leurs relations avec les usagers dans le cadre de l’exercice de leurs fonctions de contrôle, dans les matières fiscales et policières. Cependant, de nombreux travaux relatifs au développement de l’informatique dans l’administration soulignent les risques que fait peser cette technique sur les libertés publiques. En France par exemple, les administrés manifestaient une crainte vis-à-vis de cet outil qui représentait pour eux l’instrument par lequel l’administration investirait progressivement la sphère privée. « On parle d’une nouvelle sorcellerie qui va mettre l’homme à nu et l’exposera sans défense à la vue de tous », reprenait madame GALLOUEDEC-GENUYS, Françoise. Cette psychose a été nourrie par un article de Philippe BOUCHER paru le 21 mars 1974 au journal le Monde. Intitulé Safari ou la chasse aux Français, cet article dénonçait le détournement de finalité de données personnelles des 52 millions de Français par le ministère de l’intérieur au moyen d’un ordinateur Iris-80. SAFARI ou système automatisé des fichiers administratifs et des répertoires des individus, avait été créé dans le but de mieux repérer les personnes en facilitant l’interconnexion des fichiers administratifs à partir de l’identifiant unique que constitue leur numéro de sécurité sociale. Des interventions comme l’avertissement adressé à l’Académie des sciences morales et politiques du Procureur général TOUFFAIT dans son discours du 9 avril 1973 suscitaient déjà un climat d’inquiétude. Il l’exprimait en ces termes : «la dynamique du système qui tend à la centralisation des fichiers risque de porter gravement atteinte aux libertés, et même à l’équilibre des pouvoirs politiques ». En France, ce fut l’élément générateur de la loi informatique et libertés de 1978. D’autres États ont suivi la France dans ce mouvement et plusieurs mesures législatives ont été adoptées par des pays occidentaux pour protéger les citoyens contre les abus dont ils pourraient être victimes de la part des administrations publiques exploitant systématiquement leurs données personnelles.

Les années 80 ont servi à rétablir la confiance entre les usagers et l’administration publique dont les mots d’ordre étaient : la transparence administrative, la simplification, la télématique administrative, les droits des usagers dans leurs relations avec les administrations, etc. Dans cette dynamique, l’État va amorcer un processus de modernisation visant à modifier les relations entre administrations et administrés et encadré par plusieurs lois. La transparence était ainsi assurée à travers les lois du 17 juillet 1978 sur la liberté d’accès aux documents administratifs ; du 6 janvier 1978 sur l’informatique, les fichiers et les libertés ; et celle du 3 janvier 1979 sur les archives.

Poursuivant ce processus, le gouvernement français a engagé, dès 1997, à travers le programme PAGSI , une promotion de l’usage des technologies de l’information et de la  communication dans les services rendus par les administrations publiques. Désignée sous le vocable « e- administration ou e-gouvernement » ou encore « administration électronique », cette méthode a pour finalité première l’amélioration des services rendus au public. En novembre 2001, le gouvernement a procédé à la généralisation des téléservices après la mise en ligne des documents administratifs et des textes publics. « L’État se donne pour objectif que soient proposées en ligne, d’ici à 2005, l’ensemble des démarches administratives des particuliers, des associations et des entreprises, ainsi que les paiements fiscaux et sociaux. Il s’agit de faire progressivement en sorte que chaque usager bénéficie des technologies de l’information et de la communication dans les transactions avec les services publics et puisse notamment :
– accéder simplement et rapidement à toutes les informations et à une aide personnalisée sur les services publics et ses démarches administratives. Un téléservice ne doit donc jamais être plus complexe à utiliser que son équivalent « papier » ;
– effectuer en ligne et de manière sûre toutes ses démarches avec les services publics sauf celles qui, par nature, exigent un déplacement. Cela inclut notamment les échanges euxmêmes, mais également le suivi de ses dossiers, la définition de calendrier prévisionnel personnalisé, la relance par courrier électronique, etc. ;
– accéder à ses démarches passées et stocker en ligne, à son gré et en toute sécurité les résultats dématérialisés issus de ces dernières ;
– exercer en ligne son droit d’accès et, le cas échéant, de modifier des informations le concernant détenues ou échangées par les administrations, notamment aux dispositions de la loi du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés . » .

Le 12 novembre 2002, le premier ministre Jean-Pierre RAFFARIN présentait un programme succédant au PAGSI, dénommé programme gouvernemental RE/SO 2007 (pour une république numérique dans la société de l’information). Celui-ci comprend trois volets dont une intervention directe de l’État en tant qu’acteur de la société de l’information ayant  vocation à l’exemplarité. Dans cette optique, l’État compte, entre autres, utiliser tous les apports des technologies de l’information et de la communication dans le domaine de la santé . « Ce développement s’orientera vers l’amélioration des pratiques médicales, de la prise en charge et du suivi des patients. Le gouvernement souhaite favoriser le haut débit pour les réseaux d’expertise et impulser le dossier médical partagé .» Depuis les années 80, l’informatique était déjà implantée dans les cabinets privés et les centres hospitaliers par la numérisation des données nominatives des usagers, à partir du projet de médicalisation des systèmes d’information (PMSI). La modernisation passant notamment par l’informatisation des systèmes d’information de santé est une des options qu’a privilégiées le gouvernement français. Divers projets d’incitation à l’utilisation des TIC ont été menés par le gouvernement des années 80 à nos jours, qui influencent énormément le fonctionnement du système de santé français dans sa recherche de solutions pour une meilleure qualité de soins et la réduction des dépenses de santé .

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Table des matières

INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE: LE CADRE JURIDIQUE DU TRAITEMENT AUTOMATISE DES DONNEES MEDICALES
CHAPITRE I: LE CADRE JURIDIQUE COMMUN DU TRAITEMENT AUTOMATISE DES DONNEES PERSONNELLES
SECTION 1: LES FORMALITES PREALABLES A LA MISE EN ŒUVRE DES TRAITEMENTS
Paragraphe 1: La procédure de déclaration
Paragraphe 2: La procédure d’autorisation
SECTION 2: LES PRINCIPES GENERAUX ENCADRANT LE TRAITEMENT AUTOMATISE DES DONNEES PERSONNELLES
Paragraphe 1: Les principes d’ordre Constitutionnel
Paragraphe 2 : Les principes issus des règlements européens et de la loi informatique et libertés
CHAPITRE II : LE CADRE JURIDIQUE PARTICULIER DU TRAITEMENT AUTOMATISE DES DONNEES MEDICALES
SECTION 1: LE PRINCIPE DE L’INTERDICTION DE TRAITEMENT AUTOMATISE
Paragraphe 1: L’exposé du principe
Paragraphe 2 : Les exceptions au principe
SECTION 2: LE TRAITEMENT AUTOMATISE DES DONNEES MEDICALES : UN REGIME EXORBITANT
Paragraphe 1 : Les droits des personnes concernées et les obligations des responsables de traitement
Paragraphe 2 : Les procédures spécifiques à certains traitements des données de santé
DEUXIEME PARTIE : LE CADRE JURIDIQUE DU PARTAGE DES DONNEES MEDICALES
CHAPITRE I : LA MISE EN ŒUVRE DU PARTAGE DES DONNEES MEDICALES
SECTION 1: L’INTEROPERABILITE DES SYSTEMES D’INFORMATION DE SANTE
Paragraphe 1 : L’interopérabilité des systèmes d’information : une condition sine qua non
Paragraphe 2 : Les limites de l’interopérabilité
SECTION 2 : LA TELESANTE
Paragraphe 1 : La notion de télésanté
Paragraphe 2: Le statut juridique de la télésanté
CHAPITRE II : LE DOSSIER MEDICAL PERSONNEL : UN OUTIL CAPITAL DE MISE EN ŒUVRE DE LA TELESANTE
SECTION 1: LA CONSTITUTION DU DMP
Paragraphe 1: La présentation du DMP
Paragraphe 2 : Le consentement du titulaire dans le processus de création du DMP
SECTION 2: LA GESTION DU DMP: LES GARANTIES DE LA CONFIDENTIALITE DANS LE DMP
Paragraphe 1 : L’hébergement sécurisé du DMP
Paragraphe 2 : l’accès limité au DMP
CONCLUSION

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