L’ÉLABORATION DE SOLUTIONS TECHNOLOGIQUES INNOVANTES À L’AIDE DE LA MÉTHODE TRIZ

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Les mythes contestés et les fonctions méconnues de l’innovation

Les représentations au sujet de l’innovation méritent quelque attention car elles conditionnent la manière dont sont modélisés les processus et conduits les projets d’innovation.
T. Gaudin (1998, pp. 13-15) note que l’innovation fonctionne selon deux mythes. Le premier est que la théorie précède la pratique. Le second est que les bonnes idées changent le monde, irrésistiblement et instantanément. Il les récuse cependant tous les deux. Tout d’abord, son examen des faits montre qu’en général c’est plutôt la pratique qui précède la théorie. La machine à vapeur, par exemple, a précédé de plusieurs décennies la thermodynamique. De plus, le changement technique provient essentiellement de l’initiative d’entrepreneurs extérieurs au mouvement scientifique. Pour ce qui est du second mythe, il ne suffit pas qu’une idée soit bonne pour qu’elle éclaire le monde de sa vérité et le transforme. Nombre d’inventeurs, de créateurs, de découvreurs se sont heurtés à l’indifférence ou aux résistances conservatrices de leurs contemporains.
M. Callon (1994) considère, pour sa part, que trois mythes sont centraux dans l’innovation : le mythe des origines, la séparation du social et du technique et l’improvisation romantique. Le premier met en scène un inventeur génial, marginal, visionnaire, obstiné et incompris de ses proches. Or, les études consacrées à l’innovation montrent qu’elle est en réalité le fait d’un collectif de multiples acteurs qui interagissent et non pas d’un individu qui la mettrait en forme. Avec le développement des coopérations entre laboratoires, entreprises, etc., la délimitation des contributions devient de plus en plus problématique. Aussi, selon M. Callon, il convient d’admettre que l’innovation est produite par des collectifs qui capitalisent le travail d’une myriade d’autres collectifs. Le second mythe, la séparation du technique et du social, est exprimé de deux manières : d’une part en opposant la phase de conception d’une innovation à celle de sa diffusion et, d’autre part, en distinguant le contenu de l’innovation du contexte au sein duquel elle prend forme et se répand. Cette séparation n’existe pas car l’adoption d’une innovation est un processus d’adaptation continue. Pour qu’elle réussisse, l’innovateur, au sens de M. Callon c’est-à-dire d’être collectif, doit intéresser d’autres acteurs au dispositif proposé. Pour les intéresser et pour s’en faire des alliés, il faut qu’il accepte de traduire leurs demandes, attentes et observations dans le7 dispositif et sous la forme de choix techniques appropriés. Ainsi « la technique n’a pas plus d’impact sur la société que la société n’a d’impact sur les techniques : les deux forment un tissu sans couture » (Callon, 1994, p. 13). Le troisième mythe, celui de l’improvisation romantique, postule que l’innovation est spontanée, sauvage, qu’elle ne peut pas être planifiée. Pour M. Callon, aucun mythe n’est plus faux ni plus dangereux que celui-là car l’innovation est de part en part affaire d’organisation. Le groupe qui la conçoit représente le monde dans lequel elle va prendre forme et se développer. Il est le porte-parole et le représentant de réseaux avec lesquels il interagit. La diffusion d’une innovation peut donc être vue comme un « processus social » (Rogers, 1995). Une idée nouvelle suscite des échanges d’informations perçues de manière subjective dans un premier temps. Le sens de l’innovation s’élabore progressivement à travers un processus de construction social. Il requiert la négociation et l’intégration entre différents points de vue souvent antagonistes. L’analyse sociologique de l’innovation consiste à comprendre comment un comportement hors normes devient progressivement un comportement normal (habituel) puis normatif (obligatoire) (Alter, 2002, p. 13).
Nous mettrons au jour, dans la partie III, les mythes oubliés ou inconnus sur lesquels s’est construite la méthode TRIZ et nous verrons de quelle manière ils ont, pour partie, induit l’architecture du dispositif AMReSTI.
Au-delà des fonctions économiques ou sociales, l’innovation peut encore être abordée d’un point de vue psychologique ou anthropologique (Boutinet, 1999). Négligées des sociologues et des gestionnaires de l’innovation, ces dimensions contribueraient pourtant à éclairer certains des comportements de ses acteurs.
L’innovation comme vecteur d’émancipation. L’innovation représente, selon F. Cros, un moyen essentiel de lutte contre les institutions établies, elle serait en ce sens porteuse d’aspirations libertaires. Les actions conduites en son nom peuvent également être source d’enrichissement, de progrès voire de bonheur. Elles amènent leur auteur à une progressive rprise de conscience de leur place en tant que sujet. L’innovateur ainsi se grandit à ses propres yeux (Cros & Adamczewski, 1996, p. 45) en faisant surgir un inédit ou ce qui constitue sa singularité (Boutinet, 1999, p. 292). Ceci est nettement perceptible chez G. Altshuller (2002, p. 151), le père de TRIZ, lorsqu’il déclare, par exemple : « Vous voulez des aventures modernes, intelligentes, portant profit aux gens ? – Inventez ! »
L’innovation conjuratoire de l’angoisse de mort. Le temps est, pour G. Adamczewski, « un innovateur redoutable qui déchire et ravage tout sur son passage ». C’est ce qui engagerait les être humains affolés par sa course à introduire des nouveautés, des innovations pour raccommoder les choses » (Cros & Adamczewski, 1996, p. 25) et ainsi se détourner de la mort, « tabou inadmissible » (Boutinet, 1999, p. 66). L’innovation permettrait ainsi « la réappropriation du pouvoir créateur, jusqu’alors confisqué par les Dieux » (Gaudin, 1998, p. 154). Nous reviendrons, en conclusion, sur la relation entre innovation et mort.

Les processus d’innovation

Bien qu’elle ait à affronter l’inconnu et l’incertitude, l’innovation ne résulte pas du hasard ou de la chance. Elle s’organise comme toute autre fonction de l’entreprise. Dans la mesure où elle va être sanctionnée par le marché (cf. supra), elle ne peut pas être réduite à une phase ponctuelle dans un projet. Elle relève d’un processus (Rogers, 1995 ; Alter, 2002) dont la maîtrise est déterminante pour le succès. De la variété des regards sur l’innovation résulte une variété de modélisation de ces processus.

Le modèle de l’innovation poussée par la science ou la technologie

Le modèle de l’innovation poussée par la science (science push) ou la technologie (technological push), également nommé « modèle d’innovation hiérarchique et linéaire » (Perrin, 2001), semble encore dominant aujourd’hui malgré les critiques dont il est l’objet. Il est la traduction du premier mythe dénoncé par T. Gaudin (la théorie précède la pratique). M. Akrich et al. (1988, p. 15) l’illustrent à l’aide de la maxime de l’exposition universelle de Chicago en 1933 : « La science découvre, l’industrie applique et l’homme suit. ».

Le modèle de l’innovation tirée par le marché
Dans le modèle de l’innovation tirée par le marché – ou du marketing de la demande (market pull) -, le marché a une influence déterminante car les innovations sont développées, majoritairement, en réponse à une demande sociale. L’innovation dans ce cas relève de la responsabilité des experts en marketing. La technique n’est plus alors qu’une caractéristique du produit parmi d’autres (prix, dimensions, forme de promotion…). Le service de développement, sous-traitant du service marketing, privilégie dans ce cas les améliorations de court terme (Fernez-Walsh, 2001). Tout comme le précédent, ce modèle est l’objet de critiques. Il a été construit à partir d’études d’innovations qui relatent des succès commerciaux. Ce serait donc une lapalissade que de constater a posteriori qu’un produit a trouvé un marché. Par ailleurs, pour démontrer que l’innovation a effectivement répondu à la demande, il faudrait connaître par avance la direction de développement de ce marché. Or le rythme du processus d’innovation technologique, trop lent, ne peut pas attendre les signaux du marché avant de démarrer (Flichy, 1995, pp. 40-42). Le concept même de demande et l’idée qu’une innovation vise à satisfaire des besoins préexistants ne peuvent être établis qu’a posteriori quand le produit a trouvé – ou plutôt s’est construit son marché – ses utilisateurs et ses circuits de distribution (Benghozi, 1990, p. 24).

Le modèle tourbillonnaire

La principale critique adressée aux modèles Science/Technology push ou Market pull est qu’ils sont linéaires. Des auteurs réfutent la pertinence d’un flux unidirectionnel, qu’il aille dans le sens science technologie marché ou inversement. C’est de là qu’a été conçu le modèle tourbillonnaire, dans les années 80, par M. Callon et B. Latour.
Dans ce modèle, l’innovation peut partir de n’importe où, aucun acteur n’ayant le monopole de l’imagination (Akrich et al., 1988, p. 20). Ni le génie de l’idée initiale de l’inventeur ni son volontarisme ne suffisent pour conduire une innovation à son terme. L’idée ne se diffusera que si elle est reprise par des groupes qui, en l’adoptant, vont l’adapter et la modifier. Une part de hasard entre donc en ligne de compte. Dans le modèle tourbillonnaire, le regard ne porte plus essentiellement sur le produit mais sur les acteurs impliqués dans sa genèse. Ce groupe constitue un réseau technico-économique (RTE). Ce réseau est défini, par M. Callon (1994, p. 17), comme « un ensemble coordonné d’acteurs hétérogènes : laboratoires, centres de recherche technique, entreprises, organismes financiers, usagers, pouvoirs publics, qui participent collectivement à l’élaboration et à la diffusion des innovations et qui à travers de nombreuses interactions organisent les rapports entre recherche scientifico-technique et marché. Mais un réseau ne se limite pas aux seuls acteurs qui le constituent. Entre eux circule tout un ensemble d’intermédiaires qui donne un contenu matériel aux liens qui les unissent : il peut s’agir de documents écrits (articles scientifiques, rapports, brevets, modes d’emplois), de compétences incorporées (chercheurs en mobilité, ingénieurs passant d’une firme à l’autre), d’argent (contrat de coopération entre un centre de recherche et une entreprise, prêts financiers, achat par un client d’un bien ou d’un service…), d’objets techniques plus ou moins élaborés (prototypes, machines, échantillons, produits destinés à la consommation finale…) ». La réussite de l’innovation reposera sur la solidité du réseau au sein duquel agissent des acteurs ayant des motivations et des intérêts divergents. C’est donc l’agrégation des intérêts qui importe ici. Vue ainsi, l’innovation est « l’art d’intéresser un nombre croissant d’alliés qui vous rendent de plus en plus fort » (Akrich et al., 1988, p.17). C’est par de multiples négociations, des hésitations, des itérations que l’innovation se construit au travers d’expériences d’intéressements. A chaque boucle de l’itération, l’innovation se transforme, redéfinissant ses propriétés et son public (ibid., p. 21).
Nous venons de voir que la modélisation d’un processus d’innovation dépend, pour une large part, de ce que l’on considère être le pôle dominant (la science ou la technologie, le marché ou les acteurs de l’innovation). Cette modélisation peut également être incorporée implicitement dans un outil de gestion et y être enfouie au point d©être oubliée. Elle constitue alors une technologie invisible » (Berry, 1983) mais néanmoins influente. Nous verrons, par exemple, que la méthode TRIZ est orientée Science push ce qui ne sera pas sans créer de difficultés dans le dispositif d’accompagnement AMReSTI dédié à des PMI c’est-à-dire à des organisations sans laboratoires ni centres de recherche scientifique structurés.
Les obstacles à l’innovation
Si l’innovation constitue un enjeu important pour la compétitivité des entreprises aussi bien que des nations, de nombreux écueils l’entravent. Ils peuvent être examinés à l’échelle des pays, d’une catégorie d’organismes comme les entreprises ou, de manière plus spécifique, à une catégorie d’entre elles, les PMI par exemple.
Le Livre vert sur l’innovation (Commission européenne, 1996, pp. 36-52) répertorie les principaux obstacles au sein de l’Union européenne :
Un manque de coordination : les efforts sont dispersés au lieu d’être concentrés sur quelques priorités essentielles.
Des ressources humaines inadaptées : les systèmes de formation n’accordent pas suffisamment de place à la démarche personnelle de recherche et d’expérimentation ni au travail en équipe ; la mobilité des personnes est trop faible entre les mondes de la recherche, de l’université et de l’entreprise.
Un financement difficile : le risque « innovation » semble faire fuir les systèmes financiers ; le financement public est limité ; l’environnement fiscal européen est peu favorable à l’innovation.
Un environnement juridique et réglementaire inadéquat : les règles de protection, par brevet, par exemple, sont sous-utilisées ; les réglementations, normes, certifications… peuvent selon les cas, inhiber ou promouvoir l’innovation ; les formalités administratives sont trop lourdes.
Promouvoir l’innovation nécessite donc une approche globale intégrant les aspects technologiques, éducatifs, financiers, juridiques, etc. N’oublions pas cependant que si l’innovation rencontre des obstacles, celles d’aujourd’hui peuvent en elles-mêmes constituer les obstacles au changement de demain (Bouvier, 1996, p 84). Nous y reviendrons en conclusion.
Un autre type d’obstacles relève de la complexité de l’innovation. Celle-ci provient de l’incertitude à affronter, de son aspect multidimensionnel (produit, processus, acteurs, financement…) et de l’interdépendance des nombreux paramètres à prendre en compte. Les formes de complexité spécifiques aux systèmes incluant des acteurs humains ont été précisées par J. Girin (2000, pp. 131-138) :
La complexité de coordination. Tout d’abord, les acteurs poursuivent des objectifs divergents, voire contradictoires, susceptibles de nuire à l’efficacité de l’activité commune. Ensuite, même si des acteurs désirent parvenir à un résultat d’intérêt commun ils ne disposent généralement que d’informations partielles sur les moyens d’y parvenir. Enfin, des effets pervers peuvent apparaître : la poursuite de certaines finalités par des acteurs individuels peut les conduire collectivement à des résultats inverses de ceux que chacun attendrait.
La complexité cartographique. De nombreuses ressources symboliques (documents, schémas, plans) accompagnent aujourd’hui les activités industrielles, de gestion, etc. Mises en oeuvre pour un usage déterminé, elles sont souvent reprises par d’autres acteurs pour d’autres usages avec toutes les contradictions et compromis que cela engendre. Par ailleurs l’abondance de ces ressources symboliques est devenue telle qu’elle dépasse les capacités cognitives des utilisateurs.
La complexité contextuelle. Bien que pléthoriques, les représentations symboliques ne suffisent jamais pour réaliser une activité car « la carte n’est pas le territoire » (Korzybski). Dans l’action, les acteurs mobilisent des savoirs tacites qui ne sont jamais entièrement explicitables.
La complexité de cadrage. Des événements ou des comportements peuvent avoir des significations plurielles qu’il convient de savoir décrypter. Par exemple, dans une réunion avec un supérieur hiérarchique, savoir faire la part entre ce qui relève d’opinions soumises à discussion et ce qui résulte d’opinions qui marquent l’exercice de l’autorité sachant qu’il se peut qu’aucune différence syntaxique ne les différenciera.
Le dispositif d’accompagnement AMReSTI est bien entendu soumis à ces diverses complexités que nous tenterons de rendre lisibles au fur et à mesure de notre progression. Nous mettrons au jour, par exemple, les mécanismes de coordination entre l’entreprise bénéficiaire du dispositif, les organismes qui l’accompagnent et les pouvoirs publics qui financent l’action (partie III § 2). La méthode TRIZ est une ressource symbolique qui s’ajoute celles déjà en place dans les entreprises. Nous verrons les difficultés que cela engendre (parties II et III).
En nous intéressant un peu plus précisément au fonctionnement des organisations, nous allons découvrir de nouvelles problématiques, de nouveaux potentiels pour l’innovation mais aussi de nouveaux obstacles, notamment dans les PMI.
L’innovation au sein des organisations
L’innovation n’est pas « l’addition d’un génial Eurêka et d’un processus de diffusion » (Flichy, 1995, p. 236). Fruit d’un acteur collectif, elle dépend donc d’organisations. E. Rogers (1995, p. 376) relève cependant un paradoxe à leur égard. On pourrait penser que l’innovation est plutôt rare en ces lieux où l’on cherche à réduire l’incertitude, où règnent une certaine stabilité, des barrières et des résistances au changement. En réalité, l’innovation est un des processus fondamentaux en marche dans toutes les organisations. Toutes les structures organisationnelles ne s’y prêtent cependant pas bien. La bureaucratie mécaniste, structure rigide aux processus stabilisés, aux activités répétitives et au centre opérationnel isolé de l’extérieur est bien adaptée à la production standardisée. Elle n’offre, par contre, pas de terrain favorable à l’innovation alors que la structure adhocratique est celle qui lui convient le mieux (Mintzberg, 1995).
La capacité d’innovation d’une organisation dépend de trois types de variables : 1) les caractéristiques personnelles d’un leader, 2) les caractéristiques de la structure organisationnelle et 3) les caractéristiques externes de l’organisation (Rogers, 1995, p. 379).
De la R&D à la R.I.D.
Les projets de R&D présentent des caractéristiques qui les distinguent de ceux d’ingénierie classique (Bougaret, 2001, pp. 75-76) :
La complexité. Elle est comprise au sens étymologique du terme c’est-à-dire « tissé ensemble ». Le nombre d’interactions entre les différentes parties du projet est très élevé. Cela implique un ajustement mutuel, au sens de Mintzberg, et une relation intense entre les acteurs du projet.
Le manque de spécifications de la cible du projet. Le nombre élevé d’inconnues empêche de définir le produit final. Chaque membre de l’équipe projet peut par ailleurs avoir une représentation mentale différente du produit final.
Le risque lié à l’innovation technologique. La probabilité d’arriver sur le marché est faible s’il est fait usage d’une technologie nouvelle pour la première fois. Cela induit une source soit de motivation soit de démotivation. Cela conditionne également implicitement le degré de priorisation des projets sachant qu’un projet très risqué est rarement prioritaire.
Le degré de haute spécialisation des ressources humaines. Le fort degré de liberté du chercheur nuit à la lisibilité de l’avancement du projet. Son comportement individualiste en fait souvent une personnalité peu sensible aux objectifs collectifs. Ce comportement génère un isolement dans la collectivité, d’où une frustration manifestée par un besoin permanent de reconnaissance. A défaut d’indicateurs de performances directement contributifs à la stratégie, les chercheurs s’attribuent alors des indicateurs propres à leurs sciences et reconnus par leurs pairs (publications…).
La Recherche et Développement (R&D)
Le terme « R&D » peut laisser croire que l’on a affaire à un ensemble homogène. Or la recherche et le développement sont des phases distinctes dans un processus d’innovation (Rogers, 1995, p. 137). Le terme « développement » recouvre lui-même des réalités différentes selon les auteurs. Le développement est considéré, par E. Rogers (ibid.), comme le processus de mise en forme d’une nouvelle idée dont on attend qu’elle rencontre les besoins d’une cible d’adoptants potentiels. Celui qui développe la nouvelle idée doit, dans ce cas, non seulement comprendre son propre problème mais également anticiper ceux d’individus et d’organisations variés qui seront les futurs utilisateurs de l’innovation. J. Perrin (2001, p. 19 & p. 125), pour sa part, a relevé trois autres définitions du développement :
Le développement désigne les activités qui font suite, dans le modèle science push, aux activités de recherche fondamentale puis appliquée. Elles conduisent à la mise au point du premier prototype. Il s’agit là de la définition de l’O.C.D.E. dans le Manuel de Frascati.
Le développement peut concerner l’ensemble des activités de conception et de reconception d’un produit avec des contraintes de qualité, coûts, délais.
Pour T. Clark, B. Chew et T. Fujimoto (1987) le développement est l’ensemble des activités de création et de communication d’informations qui transforment les données du marché et les opportunités techniques en informations pour la production (modèles, spécifications, prototypes, dessins…).
Selon D. Ledibois (2001, p. 64), on ne devrait plus parler, dans une entreprise innovante, de fonction R&D tant le R et le D sont désormais différents. Deux critères séparent en effet les deux activités :
Le mode de raisonnement des acteurs. Le chercheur, par un raisonnement divergent, va explorer les champs du possible tandis que le responsable du développement aura un raisonnement convergent vers la cible (Bougaret, 2001, p. 78).
L’organisation projet. Les chercheurs rejettent souvent l’organisation en projet expliquant que ce mode de travail ne leur correspond pas et qu’il nuit à leur créativité (Bougaret, 2001, p. 74). Le processus de développement, quant à lui, très formalisé et fortement industriel, est beaucoup plus proche des contraintes de la fabrication que de celles de la recherche (Ledibois, 2001, p 64).
Si l’activité de recherche et développement a longtemps été considérée comme le moteur du développement économique, elle ne répond plus bien aujourd’hui aux besoins des entreprises. Il y a deux raisons à cela. Tout d’abord, un projet de R&D se déroule encore souvent avec une approche exclusivement technologique et donc avec les inconvénients que l’on a vus. D’autre part, la bipartition entre la recherche et le développement tend à isoler la recherche un peu plus qu’elle ne l’est déjà naturellement (Bougaret, 2001, p. 74). S’il est nécessaire d’améliorer la gestion dans les phases d’émergence des projets, quelques caractéristiques sont cependant à maintenir : une organisation souple et flexible qui favorise la créativité des équipes, des indicateurs légers et des dispositifs de capitalisation des connaissances.
La Recherche – Développement – Engineering (R.D.E.)
J. Perrin (2001, pp. 124-125) rapporte deux évolutions du concept de R&D. En 1983, C. Freeman  suggérait de le remplacer par celui de R-D- D (research, design and development) afin de mieux rendre compte de la diversité des activités scientifiques et techniques mobilisées dans les processus d’innovation. Quelques années plus tard, en 1990, R. Miller introduisait la R-D-E (recherche, développement, engineering). Dans une étude sur l’industrie automobile mondiale, cet auteur montrait que, parmi les personnels de R.D.E., 4,5 % seulement étaient affectés à des activités de recherche fondamentale, 7,8 % se consacraient à la production de connaissances non finalisées pour les sciences de l’ingénieur mais surtout que près 90 % d’entre eux travaillaient à des activités de conception directement liées au développement de produit.

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Table des matières

INTRODUCTION
Plan de la thèse
PARTIE I. LES ENJEUX DE LA CONCEPTION DANS LES PROJETS D’INNOVATION DES PMI
1. LES PROBLÉMATIQUES DE L’INNOVATION
1.1. Approches du concept d’innovation
1.1.1. L’innovation : un terme polysémique
1.1.2. Les mythes contestés et les fonctions méconnues de l’innovation
1.1.3. Les processus d’innovation
1.1.3.1. Le modèle de l’innovation poussée par la science ou la technologie
1.1.3.2. Le modèle de l’innovation tirée par le marché
1.1.3.3. Le modèle tourbillonnaire
1.1.4. Les obstacles à l’innovation
1.1.5. L’innovation au sein des organisations
1.1.5.1. Innovations d’exploitation et d’exploration
1.1.5.2. La situation paradoxale des PMI face à l’innovation
1.2. Le management des projets d’innovation
1.2.1. Le management des phases amont
1.2.2. Le management des projets innovants
1.2.3. De la R&D à la R.I.D
1.2.3.1. La Recherche et Développement (R&D)
1.2.3.2. La Recherche – Développement – Engineering (R.D.E.)
1.2.3.3. La Recherche – Innovation – Développement (R.I.D.)
1.3. L’innovation : fondée sur la recherche ou sur la conception ?
2. LA CONCEPTION AU CŒUR DES PROCESSUS D’INNOVATION
2.1. Les caractéristiques des activités de conception
2.2. Les modèles de processus de conception
2.2.1. Une succession hiérarchique de phases
2.2.2. Une itération d’un cycle élémentaire de conception
2.2.3. Un phénomène émergent d’auto-organisation
2.2.4. Un processus cognitif
2.2.5. Des formes de communication et de conversation avec la situation
2.3. Une théorie unifiée de la conception : la théorie C-K
2.3.1. Les principes de la théorie
2.3.2. Les propriétés et les expansions de l’espace des concepts
2.3.3. Le raisonnement en conception : disjonctions et conjonctions
2.3.4. Les quatre opérateurs C-K et le carré de la conception
2.3.5. Les implications de la théorie C-K
2.4. Les conditions de la conception innovante en PMI
3. LE TERRAIN ET LA MÉTHODOLOGIE DE RECHERCHE
3.1. Le dispositif d’accompagnement AMReSTI
3.1.1. La construction d’une action d’aide à l’innovation en PMI
3.1.1.1. Le contexte
3.1.1.2. Le premier cas pilote
3.1.1.3. Les quatre cas pilotes complémentaires
3.1.1.4. Le programme prévisionnel du dispositif d’accompagnement AMReSTI
3.1.2. Le déroulement du dispositif d’accompagnement AMRESTI
3.1.2.1. La formation des acteurs
3.1.2.2. Le choix et la sélection des projets
3.1.2.3. Les acteurs, leurs attentes et les projets industriels traités
3.1.2.4. La démarche type de traitement des cas industriels
3.1.2.5. La réunion intermédiaire
3.1.2.6. La valorisation de l’action
3.1.2.7. Les réunions du comité de pilotage
3.2. La méthodologie de la recherche
3.2.1. La construction du projet de recherche
3.2.1.1. La recherche d’un terrain
3.2.1.2. Les entrées sur le terrain
3.2.1.3. La place du chercheur sur le terrain et l’évolution de celle-ci
3.2.1.4. La question de recherche
3.2.2. Le recueil et la construction des données
3.2.2.1. Les observations
3.2.2.2. Les entretiens
3.2.2.3. Les études de cas
3.2.2.4. Synthèse sur la construction des données
3.2.3. La validation des données, la légitimation des savoirs et la généralisation des résultats
3.2.3.1. La validation des données
3.2.3.2. La légitimation des savoirs actionnables
3.2.3.3. La généralisation des résultats d’une étude de cas
3.2.4. Les restitutions au terrain
3.3. Des théories et du terrain aux faits mis en forme
PARTIE II. L’ÉLABORATION DE SOLUTIONS TECHNOLOGIQUES INNOVANTES À L’AIDE DE LA MÉTHODE TRIZ
1. INTRODUCTION À LA MÉTHODE TRIZ
1.1. Les origines
1.2. Les notions essentielles
1.2.1. Les contradictions
1.2.2. Le Résultat Idéal Final
1.2.3. Les ressources
1.2.4. Les lois d’évolution des systèmes techniques
1.2.5. L’inertie psychologique
1.3. Les outils de déblocage de l’inertie psychologique
1.3.1. Les hommes miniatures
1.3.2. Les opérateurs DTC (dimension, temps, coût)
1.3.3. La méthode des neuf écrans
1.4. Les outils de résolution des problèmes
1.4.1. La matrice de résolution des contradictions techniques
1.4.2. Les onze principes de résolution des contradictions physiques
1.4.3. Les soixante-seize standards de résolution des vépôles
1.4.4. Autres outils
1.5. La démarche générale de résolution d’un problème avec la méthode TRIZ
1.6. Les degrés d’inventivité des solutions
2. LA MISE EN ŒUVRE DE LA MÉTHODE TRIZ DANS LE DISPOSITIF AMRESTI
2.1. Le cas général d’élaboration des solutions technologiques
2.1.1. La documentation du sujet
2.1.2. La modélisation TRIZ du problème
2.1.3. La définition des modèles de solutions
2.1.4. L’interprétation des modèles de solutions
2.1.5. L’élaboration détaillée des solutions
2.1.6. La restitution à l’entreprise des voies de solutions envisageables
2.1.7. La cotation des solutions envisagées
2.1.8. Le développement de la solution retenue
2.1.9. Le degré d’inventivité des solutions dans le dispositif AMReSTI
2.1.10. Résumé du processus d’élaboration des solutions
2.2. Deux cas particuliers riches d’enseignements
2.2.1. L’entreprise A
2.2.2. L’entreprise B
2.2.3. Discussion des deux cas d’entreprises
2.2.3.1. Le produit
2.2.3.2. Les normes
2.2.3.3. La culture et le capital social
2.2.3.4. Les personnes
2.2.3.5. La compatibilité avec l’existant
2.2.3.6. La compatibilité avec les besoins
2.2.3.7. Les biais chez les agents de changement
3. PREMIERS ÉLÉMENTS DE MISE EN PERSPECTIVE : 5 THÉORIES INTERMÉDIAIRES
3.1. Les facteurs de contingence qui déterminent la structure d’accueil de la méthode TRIZ
3.2. Des stratégies différenciées pour l’introduction d’un nouvel outil
3.3. Une critique de la notion d’inertie psychologique
3.4. A la recherche de l’acteur collectif en PMI
3.5. La rencontre délicate de l’outil et de l’organisation
PARTIE III. DE L’INTRODUCTION D’UN OUTIL DE GESTION À L’ACCOMPAGNEMENT DE L’INNOVATION EN PMI
1. UN RETOUR CRITIQUE SUR LA MÉTHODE TRIZ
1.1. Le rôle et la place de TRIZ dans un processus de conception
1.1.1. Comparaison de TRIZ avec d’autres outils de conception
1.1.1.1. Le brainstorming
1.1.1.2. L’analyse fonctionnelle et l’analyse de la valeur
1.1.1.3. Synthèse des principales similitudes et différences entre TRIZ et AV
1.1.2. La complémentarité de TRIZ avec d’autres méthodes de conception
1.1.3. La place de TRIZ dans un processus de conception
1.1.4. Synthèse sur le rôle et la place de TRIZ dans un processus de conception
1.2. Les perspectives de diffusion de TRIZ
1.2.1. TRIZ : un acronyme dommageable
1.2.2. La méthode TRIZ et le temps
1.2.3. Les atouts et inconvénients de TRIZ en matière de diffusion
1.2.3.1. L’avantage relatif
1.2.3.2. La compatibilité
1.2.3.3. La complexité
1.2.3.4. La possibilité d’essai
1.2.3.5. La visibilité des résultats
1.2.3.6. Synthèse des caractéristiques de TRIZ en matière de diffusion
1.2.4. Arguments pour une nouvelle traduction/réinvention de TRIZ
1.3. L’esquisse d’une épistémologie de TRIZ
1.3.1. TRIZ fondée sur une épistémologie positiviste ?
1.3.2. Des divergences entre TRIZ et d’autres connaissances en conception
1.3.3. TRIZ, modélisation systémique et pensée complexe
1.3.4. Synthèse sur les caractéristiques épistémologiques de TRIZ
1.4. Une approche de TRIZ en tant qu’outil de gestion
1.4.1. TRIZ entre technologie invisible et vecteur de changement
1.4.2. TRIZ : un objet intermédiaire
1.5. De la nécessité d’un Tertius iungens entre l’outil et l’organisation
2. L’ACCOMPAGNEMENT DE LA CONCEPTION DANS LE DISPOSITIF AMRESTI
2.1. Les rôles différenciés des acteurs du dispositif AMReSTI
2.1.1. Les initiateurs
2.1.2. Les agents de changement
2.1.2.1. L’expert TRIZ en butte aux injonctions paradoxales
2.1.2.2. Le porteur de projet, le tiers qui relie
2.1.2.3. Le conseiller technologique, un titre réducteur pour un rôle complexe
2.1.2.4. L’organisme de formation, l’acteur inopiné du dispositif
2.1.3. Le comité de pilotage, régulateur du dispositif
2.1.4. L’entreprise, un bénéficiaire parfois distant
2.1.5. Résumé des principaux rôles des acteurs du dispositif AMReSTI
2.2. La coordination acentrique polycentrique dans le dispositif AMReSTI
2.2.1. La coordination dans les cas pilotes
2.2.2. La coordination dans le dispositif AMReSTI
2.2.2.1. Les quatre réunions de traitement des projets
2.2.2.2. Les échanges entre acteurs hors réunions
2.2.2.3. Synthèse des différents niveaux de coordination du dispositif AMReSTI
2.3. De la nature de la conception collaborative en PMI
2.3.1. Etudes de « co- » dans le dispositif AMReSTI
2.3.1.1. Une co-conception lacunaire et un co-développement inachevé
2.3.1.2. Une co-location discrète et une concourance doublement amputée
2.3.1.3. Une coordination polaire-répartie et une coopération à construire
2.3.1.4. Une co-exploration sécurisée et un co-apprentissage multiniveau à prescrire
2.3.1.5. Une confiance à instaurer préalablement à toute intervention
2.3.1.6. Une co-production de valeurs reconfigurable
2.3.1.7. Repères synthétiques pour une conception collaborative en PMI
2.3.2. Une aide ou un accompagnement pour les PMI ?
2.3.2.1. Les limites de l’autonomie de la PMI dans l’introduction d’un nouvel outil
2.3.2.2. La relation d’aide rogerienne
2.3.2.3. L’accompagnement, une pratique séduisante
3. SEPT PRÉCONISATIONS POUR L’ACCOMPAGNEMENT DE PROJETS D’INNOVATION
3.1. (In)former tous les acteurs du projet sur l’outil à introduire mais de manière différente
3.2. Accompagner les projets d’innovation jusqu’à la démonstration des solutions
3.3. Diagnostiquer l’entreprise avant de l’accompagner
3.4. Différencier les stratégies d’accompagnement
3.5. Privilégier le travail en tandem pour accompagner l’entreprise
3.6. Faire évoluer le rôle du conseiller technologique
3.7. Mailler les projets accompagnés
CONCLUSION
1. LES APPORTS, LIMITES ET PROLONGEMENTS DE LA THÈSE
1.1. Retour sur les grandes lignes de la thèse et sur ses résultats
1.2. Discussion sur la nature des résultats obtenus
1.3. Des sujets laissés dans l’ombre
1.3.1. Les rapports de pouvoir
1.3.2. La forme des contrats de partenariat
1.3.3. Le rôle des organismes de formation dans la diffusion des innovations
1.3.4. La construction du marché d’un nouvel outil de gestion
1.3.5. Le management multiprojet dans les organismes d’accompagnement
1.4. Des perspectives de prolongements
1.4.1. L’accompagnement de la conception innovante en PMI
1.4.2. L’élucidation de l’alchimie des compétences sociales
1.4.3. L’imbrication des situations de gestion
2. D’UNE INNOVATION SCOTOMISANTE AUX PROGRÈS DE LA CLAIRVOYANCE
2.1. Les limites actuelles du management de l’innovation
2.1.1. Les innovations d’aujourd’hui : obstacles au changement de demain ?
2.1.2. Des ressources que l’on sait désormais limitées
2.1.3. Une consommation boulimique mais insatisfaisante
2.1.4. Critique de l’innovation répétée et de la rationalisation
2.1.5. Les conséquences des innovations
2.1.6. Critiques du progrès, du développement et de la (dé)croissance
2.2. Un regard à modifier
2.2.1. Ouvrir l’innovation à de nouvelles parties prenantes
2.2.2. Intégrer le coût global dans le calcul économique
2.2.3. Réhabiliter le temps long
2.2.4. Actualiser nos valeurs
2.3. Vers un modèle intégrateur pour une innovation enrichie
3. TROIS NOUVEAUX CHANTIERS POUR L’INNOVATION
3.1. Promouvoir l’écologie industrielle
3.2. Développer les biens publics globaux
3.3. Poursuivre le processus d’hominisation
3.4. Enrôler TRIZ sur nos chantiers ?
ANNEXE 1 : CONVENTION DE COLLABORATION ENTRE LE DOCTORANT ET LES PMI
ANNEXE 2 : SIGLES
ANNEXE 3 : TABLE DES FIGURES
ANNEXE 4 : TABLE DES TABLEAUX
RÉFÉRENCES

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