L’effet Seebeck de spin

Il est désormais possible d’introduire des capteurs à moindre coût dans les bâtiments, les routes, sur le réseau d’électricité ou d’eau. Ces capteurs seront reliés à un réseau de télécommunication de cinquième génération donnant la bande passante nécessaire à cette nouvelle ère de l’internet des objets. Cela donnera naissance à une quantité de données colossale qu’il faudra stocker mais surtout analyser dans le but d’optimiser l’utilisation des ressources. Il sera alors important d’optimiser la performance énergétique de l’ensemble de la chaine du capteur à l’information finale.

Pour cela, plusieurs stratégies sont possibles, améliorer l’architecture des composants informatiques en est une. L’autre est de faire en sorte que les principales pertes d’énergie sous forme de chaleur soient réutilisées d’une autre manière. On peut les utiliser comme source d’énergie pour par exemple chauffer le réseau d’eau d’une ville. Mais, on peut aussi imaginer utiliser ce dégagement de chaleur pour alimenter d’autres capteurs ou d’autres unités de traitement d’information améliorant ainsi l’efficacité énergétique. Le domaine de la caloritronique de spin s’inscrit dans cet idéal. C’est un domaine où différents domaines de la physique se côtoient car il s’agit de mesurer une tension dépendant du spin ou de l’aimantation en réponse à un courant de chaleur. Il se situe donc à l’interface entre la thermique (calor), l’électronique (tronique), le magnétisme et la spintronique (de spin).

L’effet Seebeck de spin

La première observation de l’effet Seebeck de spin, et même la définition de celuici remonte à 2008 (Uchida, et al., 2008). Les échantillons sont composés d’une couche d’un métal ferromagnétique (dans leur cas du Ni81Fe19), et d’électrodes de platine déposées tout le long de l’échantillon. L’expérience consiste en la mesure de la tension aux bornes de l’électrode de platine en fonction de l’aimantation de la couche lorsque l’échantillon est soumis à un gradient de température. Ils observent alors une tension proportionnelle à l’aimantation de la couche ferromagnétique linéaire en position et qui s’annule au milieu de l’échantillon. Par ailleurs, en l’absence d’électrode de platine, ils n’ont pas mesuré de tension.

Ils font l’hypothèse que le gradient de température est bien le long de la ligne de Ni81Fe19 et que l’ajout d’électrode de platine ne perturbe pas la direction des courants de chaleur. Ils en déduisent que la tension mesurée n’existe pas dans le Ni81Fe19 et donc que son origine est due à un effet se produisant dans le platine. Leur interprétation est qu’une différence de potentiel chimique entre deux populations de spin apparait. Son amplitude est linéaire en position et s’annule au milieu de l’échantillon. Cette différence de potentiel chimique peut alors diffuser dans l’électrode de platine. Ce courant de diffusion de spin dans le platine est converti en un courant de charge par effet Hall de spin inverse et une tension peut être mesurée. Elle est proportionnelle à l’amplitude et à la polarisation du courant de spin. Le platine agit ici comme un détecteur de courant de spin et on voit bien l’influence de leurs travaux antérieurs dans le choix de cette interprétation(Saitoh, Ueda, Miyajima, & Tatara, 2006).

L’effet Seebeck de spin a par la suite été étudié dans d’autres matériaux. En particulier deux ans après le papier original parlant d’effet Seebeck de spin, ce dernier est observé dans un semi-conducteur ferromagnétique, GaMnAs (Jaworski, et al., 2010). Cette étude est intéressante car elle montre beaucoup de résultats expérimentaux et questionne l’interprétation initiale. D’abord la tension obtenue n’est pas linéaire en fonction de la position mais le changement de signe de la tension entre les deux bords et l’annulation au milieu de l’échantillon sont observés. Ils ont également essayé de voir si la tension mesurée était différente si la ligne de GaMnAs était coupée en deux. Le résultat qui a été obtenu est que la tension mesurée n’a pas besoin que le GaMnAs soit continu. L’interprétation est que le couplage entre les deux morceaux d’échantillon se fait soit par une interaction dipolaire soit par les phonons du substrat. Cette mesure remet en question l’interprétation initiale selon laquelle il y a une différence de potentiel chimique entre les deux populations de spin tout au long de l’échantillon et force donc à voir l’effet de manière locale.

Enfin, ils observent cette fois des hystérésis sans électrode de platine en prenant directement un contact sur le GaMnAs. Ce signal ne change pas de signe entre les deux côtés de l’échantillon contrairement à ce qui se passait sur Ni81Fe19 dans (Uchida, et al., 2008). Les auteurs arguent que ce non changement de signe est dû à l’effet Nernst Planaire. Ils citent un article publié en 2006 (Pu, Johnston-Halperin, Awschalom, & Shi, 2006) dont un des co-auteurs est commun pour justifier cette interprétation, pourtant le signal observé est anti-symétrique alors que l’effet Nernst Planaire est symétrique.

Par ailleurs après correction de ce qu’ils estiment être l’effet Nernst planaire, ce signal reste bien plus grand qu’avec l’électrode de platine (un coefficient de
environ 1μV/K pour l’échantillon avec les électrodes de platine contre près de
1,5μV/K avec des contacts directe sur GaMnAs). Ils affirment qu’un tel signal
avait été observé sur Ni81Fe19 sans électrode de platine dans (Uchida, et al., 2010).

Les effets Nernst planaire et anomaux 

L’effet Nernst dans les métaux paramagnétiques est connu depuis la fin du XIXème siècle. Il est l’équivalent thermoélectrique de l’effet Hall et se traduit par l’apparition d’une tension dans la direction transverse lorsqu’un courant de chaleur est injecté dans l’échantillon et qu’un champ magnétique perpendiculaire est appliqué. Tout comme l’effet Hall, il acquiert dans les matériaux ferromagnétiques une composante anomale et une composante planaire. Bien que l’effet Nernst planaire a été considéré (Kato, Myers, Gossard, & Awschalom, 2004), une interprétation complète de la mesure en terme d’effet thermoélectrique de la couche de GaMnAs n’a pas été poussée au bout de ce qui était possible, notamment concernant l’effet Nernst anomal.

En 2011, l’effet de la position du chauffage sur la tension mesurée dans le cadre de l’effet Seebeck de spin est étudié (Huang, Wang, Lee, Kwo, & Chien, 2011). Ils partent d’une situation où la tension change de signe entre le côté froid et le côté chaud de l’échantillon (caractéristique principales de l’effet Seebeck de Spin). Ils changent ensuite la position du chauffage et obtiennent le même signe des deux côtés . L’interprétation de cette mesure est que des gradients de température apparaissent perpendiculairement au plan de l’échantillon. La tension peut alors être intégralement interprétée par l’effet Nernst anomal.

Une analyse similaire a été menée sur des échantillons suspendus et différents substrats. (Avery, Pufall, & Zink, 2012) (Schmid, et al., 2013) et pour une disposition du chauffage plus variée (Yin, Mao, Meng, Li, & Zhao, 2013).

Ces études ont mis en lumière la nécessité de ne pas postuler a priori la direction du courant de chaleur. La raison est que les substrats et les fils utilisés pour la mesure de tension, quels qu’ils soient ne sont pas des isolants thermiques suffisants. Par ailleurs, une telle analyse n’est valable qu’à la seule condition que le matériau ferromagnétique utilisé soit conducteur, sans quoi il ne peut pas exister d’effet Nernst car c’est un effet thermoélectrique. Ces deux points ont conduit à regarder l’effet en géométrie longitudinale dans le YIG qui est un matériau ferromagnétique isolant.

L’effet Seebeck de spin longitudinal

Avant même la publication des articles évoquant l’interprétation Nernst anomale due à des courants qui seraient orientés perpendiculairement à la couche, le groupe à l’origine de l’effet Seebeck de spin évoque cette possibilité : « Here we note that, if ferromagnetic metallic slabs are used as the F layer, the ISHE signal not only is suppressed significantly by short-circuit currents in the F layer due to the electric conduction of F but also is overlapped with the signal of the anomalous Nernst– Ettingshausen effect in F. » (Uchida K. , et al., 2010). Ils proposent alors une géométrie dans laquelle non seulement la direction des courants de chaleur semble plus claire car le courant de chaleur est attendu perpendiculaire à l’échantillon et en plus le matériau utilisé est un isolant ferromagnétique ce qui rend l’interprétation en terme d’effet thermoélectrique impossible . C’est l’effet Seebeck de spin longitudinal.

Le changement de signe entre les deux côtés de l’échantillon n’existe pas dans cette géométrie. Pour rappel, ce changement de signe était dû à une différence de potentiel chimique entre les deux populations de spin linéaire le long de l’échantillon et nulle au centre. C’était pourtant une des caractéristiques principales de l’effet Seebeck de spin. A la place, un courant de spin est injecté directement dans l’électrode de platine et il décroit exponentiellement avec l’épaisseur de l’électrode. L’originalité est que le courant de spins peut passer de l’isolant au métal, que le courant de spin est induit par un gradient de température et qu’il est détecté par l’effet Hall de spin inverse. A ce titre, cela ressemble beaucoup aux expériences sous résonances du début de l’effet Hall de spin inverse (Saitoh, Ueda, Miyajima, & Tatara, 2006) en remplaçant la résonance par un gradient de température.

Le rapport de stage ou le pfe est un document d’analyse, de synthèse et d’évaluation de votre apprentissage, c’est pour cela chatpfe.com propose le téléchargement des modèles complet de projet de fin d’étude, rapport de stage, mémoire, pfe, thèse, pour connaître la méthodologie à avoir et savoir comment construire les parties d’un projet de fin d’étude.

Table des matières

Introduction
1.1 Motivation
1.2 Etat de l’art
1.3 Objectif de cette thèse
Modèle et théorie
2.1 Remarques préliminaires
2.2 Eléments de magnétisme
2.3 Transport anisotrope
2.4 Influence d’une distribution de mobilité sur les propriétés de transport des semi-conducteurs
2.5 L’effet Hall en géométrie Corbino
2.6 Modèle à deux canaux de l’effet Hall de spin
2.7 Diffusion de la chaleur en régime sinusoïdal forcé
2.8 Résonance ferromagnétique
Méthodes expérimentales
3.1 Présentation du dispositif expérimental de mesure de transport
3.2 Mesure électrique DC
3.3 Caractérisation thermoélectrique – Mesure des coefficients Seebeck
3.4 Mesures thermoélectriques transverse avec modulation
3.5 Résonance ferromagnétique
Résultats expérimentaux
4.1 Effets Righi-Leduc planaire et anomal dans permalloy
4.2 Effet Nernst dans le platine
4.3 Effet Hall et effet Nernst dans InSb
4.4 Détection du potentiel thermoélectrique provoqué par résonance ferromagnétique
4.5 Transport anisotrope en géométrie Corbino dans le permalloy, CoGd, CoTb et platine
Conclusion
Références
Table des figures
Annexes

Lire le rapport complet

Télécharger aussi :

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *