Télécharger le fichier pdf d’un mémoire de fin d’études
Les mécanismes ayant lieu dans une LED : modèles analytiques et simulations numériques
Afin de modéliser les comportements électro-optiques des LED à base de GaN, deux approches pourraient être utilisées : la modélisation analytique et la modélisation numérique.
La modélisation analytique consiste en la résolution des équations différentielles régissant les mécanismes à l’intérieur d’une LED, c’est-à-dire le transport, les recombinaisons des porteurs, …. Malheureusement la résolution analytique de l’ensemble des équations nécessaires à la description d’une LED à puits quantiques munis d’une couche de blocage d’électrons ne semble pas possible ou disponible jusqu’alors. Aussi, la première partie de ce chapitre exposera le modèle analytique d’une structure LED beaucoup moins complexe, mais qui présente l’avantage d’exister. Les mécanismes usuels d’une LED à base de GaN et des expressions analytiques de ces mécanismes seront détaillés.
La modélisation numérique utilise la méthode des éléments finis. La dernière partie du présent chapitre présentera le logiciel de simulation numérique utilisé ATLAS de SILVACO pour obtenir les résultats du chapitre suivant.
Description générique
Les principaux mécanismes présents dans une LED sont distingués par les catégories citées ci-après :
Injection
Des porteurs de charge sont injectés dans les couches de transport par les électrodes et dans la zone active composées de puits quantiques après avoir traversé les zones neutres. L’efficacité de l’injection par les électrodes se caractérise par les résistances de contact et les barrières énergétiques pour les porteurs de charge. L’injection des porteurs dans la zone active dépend de multiples facteurs : les barrières pour les électrons et les trous, les fuites des porteurs de la zone active vers les couches de transport, les recombinaisons dans les couches de transport, … De par la différence des mobilités des électrons et des trous, l’injection des trous est souvent moins efficace que celle des électrons.[110]–[112] Par exemple, dans des LED à multiples puits quantiques, presque la totalité des trous occupent le puits le plus proche de la couche GaN-p.[113] Grâce à leur mobilité élevée, les électrons peuvent traverser la zone des puits quantiques sans se recombiner avec les trous.
Transport
Le transport des porteurs dans les zones neutres d’une LED peut être modélisé par les mécanismes de diffusion et de dérive (“drift”). Le modèle “drift-diffusion” est explicité dans la partie 2.2 ci-après. Quand la LED est soumise à une faible tension, les porteurs hors équilibre existent dans certaines parties de la LED et induisent un courant de diffusion. Lorsque la tension augmente, les champs électriques s’intensifient et le courant de drift s’impose dans la LED.
Génération et recombinaison
Dans un semiconducteur à l’équilibre, les concentrations des électrons ?0 et des trous ?0 suivent la loi d’action de masse (équation (2.1)).
?0×?0=??2
Dans l’équation (2.1), ?? est la concentration de porteurs intrinsèques dans le semiconducteur, liée à l’énergie de la bande interdite ?? et aux densités d’états effectives des bandes de conduction ?? et de valence ??. ??2=????exp(−?????)
Pour le GaN, la valeur de ?? à 300? est 2.31×10−10??−3. Par absorption de photons ou par injection électrique, les concentrations des porteurs ? et ? sont déviées de leurs valeurs à l’équilibre ?0 et ?0. Les porteurs hors équilibre générés peuvent se recombiner pour ramener le semiconducteur à l’équilibre. Les mécanismes de génération-recombinaison sont divers et peuvent être distingués en :
Les transitions bande à bande : les porteurs changent directement de la bande de conduction à la bande de valence et vice versa,
Les transitions assistées par des niveaux de piège : les mécanismes de génération-recombinaison s’effectuent entre les bandes de conduction (valence) et des niveaux de pièges dans la bande interdite du matériau. Ce mécanisme de transition est modélisé statistiquement par Shockley et Read.[114]
Dans le domaine des LED, les mécanismes de génération-recombinaison peuvent également être classés dans les catégories suivants :
Transitions par des niveaux de piège dans la bande interdite (génération/recombinaison de Shockley-Read-Hall – SRH) : les électrons et les trous se recombinent ou sont générés par des processus à deux étapes invoquant un centre de recombinaison, souvent une impureté ou un défaut structural.[114], [115] Le modèle de recombinaison SRH est décrit en détail ultérieurement dans la partie 2.2.4.
Transitions optiques (absorption de photon/recombinaison radiative) : un électron dans la bande de conduction et un trou dans la bande de valence se recombinent directement pour créer un photon (transition bande à bande). Inversement, lorsqu’un photon possède une énergie égale ou supérieure à l’énergie de la bande interdite d’un matériau, le photon peut être absorbé pour générer une paire électron-trou.[25] La recombinaison radiative est modélisée dans la partie 2.2.5.
Recombinaisons Auger : un électron et un trou se recombinent non-radiativement (transition bande à bande). L’énergie issue de cette recombinaison est transférée à un troisième porteur (un électron ou un trou) qui transite vers un autre niveau d’énergie.[31] Le modèle des recombinaisons Auger est décrit dans la partie 2.2.6.
Ionisation par impact électronique : ce processus est l’inverse des recombinaisons Auger. Sous l’influence d’un fort champ électrique, un électron dans un semiconducteur acquiert une énergie cinétique élevée. Par collision, cet électron peut transférer son énergie à un second électron de la bande de valence. En conséquence, l’électron de la bande de valence est excité jusqu’à atteindre les niveaux d’énergie de la bande de conduction, créant un trou dans la bande de valence. Si la nouvelle paire électron-trou possède également une énergie élevée, le processus continue et crée l’effet avalanche. L’ionisation par impact est importante dans les transistors à effet de champ (FET).[116] Dans les LED à base de GaN, Masui et al.[117] proposent qu’un phénomène similaire à l’ionisation par impact – la génération cinétique des paires électrons-trous – peut avoir lieu dans la partie GaN-p grâce à des électrons qui s’échappent de la zone des puits quantiques. Des jonctions Schottky polarisées en inverse peuvent également émettre de la lumière grâce aux recombinaisons des électrons et des trous générés par ionisation par impact.[3]–[6], [10], [118], [119] Le modèle de l’ionisation par impact est présenté dans la partie 2.2.7.
Recombinaisons à la surface : les états à l’interface d’un semiconducteur peuvent agir comme des centres de recombinaison SRH. Les recombinaisons à la surface deviennent importantes lorsque le rapport entre la surface et le volume d’un semiconducteur est important,[120] par exemple dans des nanofils.[121] Le modèle des recombinaisons aux surfaces est basé sur le modèle SRH et développé par Fitzgerald et Grove.[122] (voir partie 2.2.8). La densité d’états de surface d’un semiconducteur susceptibles d’induire les recombinaisons de surface peut être limitée en passivant la surface du semiconducteur.[123]
Transition par effet tunnel : sous l’influence d’un champ électrique, les électrons peuvent se déplacer de la bande de valence à la bande de conduction d’une jonction p-n par effet tunnel.[124]–[126] L’effet tunnel peut être direct (de type Zener)[125] ou assisté par des niveaux de pièges, similaire à une recombinaison SRH.[126] Dans des LED à base de GaN, l’effet tunnel assisté par défauts peut causer une partie de la perte du rendement.[127]–[129] Un modèle de l’effet tunnel est décrit dans la partie 2.2.9.
Extraction
Dans une LED idéale, la totalité des photons créés par les recombinaisons radiatives devraient s’extraire de la LED et contribuer au flux lumineux utile. Cependant, dans une LED réelle, seule une fraction de ces photons sont capables de s’échapper du matériau. Du fait des indices de réfraction des semiconducteurs supérieurs à celui de l’air, un photon généré à l’intérieur d’une LED peut être piégé par les réflexions totales internes (voir la figure 2-1). Les photons piégés peuvent éventuellement être absorbés en différents lieux de la LED, par exemple dans le substrat, dans les couches épitaxiées, dans les contacts électriques.[10]
Le taux d’extraction varie également avec la forme de la LED. Wang et al.[131] démontrent théoriquement et expérimentalement que l’intensité du flux lumineux émis d’une LED rectangulaire est plus faible que l’intensité du flux émis par des LED d’autres géométries (triangulaire, pentagonale, hexagonale, …). La géométrie circulaire semble plus efficace que la géométrie rectangulaire[132]. La forme optimale pour l’extraction de la lumière d’une LED est certainement la forme sphérique dont la zone active se situe au centre de la sphère. Par conséquent, les rayons émis par la zone active sont normaux à l’interface de la LED et ne sont pas soumis à la réflexion totale (la réflexion de Fresnel a toujours lieu). Cependant, cette forme ne convient pas aux techniques de fabrication de semiconducteurs actuelles. D’autres formes favorables à l’extraction pour les LED ont également été étudiées : la forme conique,[133] hémisphérique[134], [135] ou la sphère de Weierstrass22.[135] Les flux et les intensités énergétiques émis par des LED de ces formes sont reportées supérieures aux flux et intensités énergétiques émis par des LED planaires.[135] Comme la forme sphérique, les formes citées ci-avant sont moins compatibles avec les techniques de fabrication actuelles que les formes planaires (chapitre 9.3 de la référence [10]).
Conversion
Bien que les mécanismes de conversion ne soient pas étudiés dans ce travail de thèse, ces mécanismes jouent un rôle important dans la génération de la lumière blanche. Cette partie présente brièvement ces mécanismes.
Une sphère de Weierstrass est une sphère tronquée à une distance égale à ?/? du centre, ? et ? étant respectivement le rayon et l’indice de réfraction de la sphère.
Les applications d’éclairage nécessitent des LED émettant de la lumière blanche ou presque. Or la lumière blanche correspond à une combinaison des longueurs d’onde couvrant une part importante du spectre de la lumière visible par l’oeil humain (typiquement de 390?? à 720??[10]). En conséquence, afin de créer de la lumière blanche, différentes sources lumineuses doivent être combinées. Les différentes stratégies employées pour créer la lumière blanche peuvent être classées en deux groupes (chapitre 20 de la référence [10]) : l’utilisation de sources de lumière distinctes émettant des couleurs complémentaires et l’association d’une LED bleue à un ou des convertisseurs de couleur. Ces stratégies sont récapitulées dans la figure 2-4 et détaillées ci-dessous.
|
Table des matières
Introduction
1.1 MATERIAU : GAN
1.1.1 Propriétés structurales
1.1.2 Propriétés électroniques
1.1.3 Propriétés optiques
1.2 DESCRIPTION DES STRUCTURES LED
1.2.1 Jonction p-n
1.2.2 Hétérojonction p-n
1.2.3 LED à puits quantiques
1.2.4 LED à puits quantiques et couche de blocage électronique
1.3 LES DIFFERENTES STRUCTURES DE LED
1.3.1 La notion de “spreading”
1.3.2 Conventional chip
1.3.3 Vertical thin film
1.3.4 Autres structures
1.4 LES CARACTERISTIQUES D’UNE LED
1.4.1 Les mesures électro-optiques
1.4.2 Le rendement d’une LED et ses composantes
1.4.3 Le droop
1.5 CONCLUSION
2.1 DESCRIPTION GENERIQUE
2.1.1 Injection
2.1.2 Transport
2.1.3 Génération et recombinaison
2.1.4 Extraction
2.1.5 Conversion
2.2 DESCRIPTION ANALYTIQUE DES MECANISMES
2.2.1 Les équations de base
2.2.2 Modèle de Shockley de diode/LED à basse tension (ou à faible injection)
2.2.3 Modèle de diode/LED à haute tension (ou à forte injection)
2.2.4 Modèle SRH
2.2.5 Modèle de recombinaison radiative
2.2.6 Modèle de recombinaison Auger
2.2.7 Modèle d’ionisation par impact électronique
2.2.8 Modèle de recombinaison à la surface
2.2.9 Modèle de transition par effet tunnel
2.2.10 Conclusion sur la description analytique
2.3 SILVACO/ATLAS – METHODES ET MODELES DISPONIBLES
2.3.1 La structure VTF étudiée
2.3.2 Les modèles physiques utilisés pour les simulations
2.4 STRATEGIE DE MODELISATION
2.4.1 Le cas particulier de l’étalement du courant (“spreading”)
2.4.2 Le cas des recombinaisons de surface
3.1 SCHEMA EQUIVALENT D’UNE LED
3.1.1 Schéma équivalent de base
3.1.2 Schéma équivalent raffiné
3.2 RESULTATS DE MODELISATION DE LA STRUCTURE VTF
3.2.1 La LED à l’équilibre
3.2.2 Caractéristique ?−? de la LED
3.2.3 Caractéristique ?−?
3.2.4 Rendement de la LED
3.2.5 Les taux de recombinaison dans les différentes parties de la LED
3.2.6 Le courant de fuite
3.3 LES VARIATIONS DES PARAMETRES DE LA COUCHE DE BLOCAGE D’ELECTRONS
3.3.1 Les variations de la composition en aluminium dans la couche de blocage d’électrons
3.3.2 Les variations de l’épaisseur de la couche de blocage d’électrons (???=?.??)
3.3.3 Les variations du dopage de l’EBL (???=?.?? et ?????=?.????)
3.3.4 Discussion dopage et épaisseur de l’EBL
3.3.5 Conclusion sur les variations des paramètres de la couche de blocage d’électrons
3.4 LES VARIATIONS D’AUTRES PARAMETRES
3.5 CONCLUSION
4.1 METHODES DE CARACTERISATION DE LA VITESSE DES PORTEURS
4.1.1 Mesure de mobilité par effet Hall
4.1.2 Mesure de mobilité par magnéto résistance
4.1.3 Mesure de mobilité par temps de vol
4.1.4 Mesure de mobilité par fabrication de MOSFET
4.1.5 Méthodes 4 pointes
4.2 MOBILITE EN FONCTION DU CHAMP ELECTRIQUE DANS LES MATERIAUX
4.2.1 Exemples dans les autres matériaux
4.2.2 Le cas du nitrure de gallium
4.3 MESURES EXPERIMENTALES DE LA MOBILITE DES TROUS DANS GAN-P EN FONCTION DU CHAMP ELECTRIQUE
4.3.1 Description de l’expérience
4.3.2 Résultats des mesures
4.4 SIMULATION ATLAS EN INTRODUISANT UN MODELE DE MOBILITE DES PORTEURS DEPENDANT DU CHAMP ELECTRIQUE
4.4.1 Modèles de mobilité
4.4.2 Description des LED simulées
4.4.3 Les résultats de simulation en fonction de la vitesse de saturation des trous
4.5 CONCLUSIONS
5.1 DESCRIPTION DE L’EXPERIENCE
5.2 RESULTATS EXPERIMENTAUX
5.2.1 Exemple de mesures d’électroluminescence
5.2.2 La puissance optique
5.2.3 Le courant électrique
5.2.4 Etude de la durée de vie différentielle des porteurs
5.3 CONCLUSION
5.3.1 Résultats
5.3.2 Limites des études par électroluminescence pulsée
Annexe A Les variations des paramètres de la couche de blocage d’électrons – taux de recombinaison à basses tensions (?<??)
A.1 LES VARIATIONS DE LA COMPOSITION EN ALUMINIUM DANS LA COUCHE DE BLOCAGE D’ELECTRONS
A.2 LES VARIATIONS DE L’EPAISSEUR DE LA COUCHE DE BLOCAGE D’ELECTRONS (???=?.??)
A.2.1 Les recombinaisons SRH
A.2.2 Les recombinaisons radiatives et Auger
A.3 LES VARIATIONS DU DOPAGE DE L’EBL (???=?.?? ET ?????=?.????)
Bibliographie
Télécharger le rapport complet