Revue critique de la littérature
L’immensité de la littérature consacrée à l’inégalité des chances devant l’enseignement ne permet pas de la présenter de manière exhaustive. De ce fait, nous nous limiterons à exposer quelques résultats obtenus par des chercheurs et à présenter quelques ouvrages relatifs à ce thème. Mais, avant cela, nous montrerons l’origine et l’évolution du phénomène d’inégalité des chances devant l’enseignement. L’école a été considérée pendant longtemps comme une institution donnant une chance à tous les enfants et qu’il suffisait d’être travailleur et intelligent pour réussir. L’avènement de la sociologie de l’éducation a battu en brèche cette idéologie et a montré que l’échec et la réussite scolaires sont socialement déterminés. Le terme de sociologie de l’éducation est forgé par DURKHEIM qui a publié en 1922 un ouvrage intitulé « Sociologie et Education » dans lequel il analyse l’éducation comme fait social en montrant sa fonction d’intégration sociale des membres d’une société ou d’un groupe et sa fonction de perpétuation d’une société. Ainsi il définit l’éducation comme « l’action exercée par les générations adultes sur celles qui ne sont pas encore mûres pour la vie sociale. Elle a pour objet de susciter et de développer chez l’enfant un certain nombre d’états physiques, intellectuels et moraux que réclament de lui la société politique dans son ensemble et le milieu spécial auquel il est particulièrement destiné »15. DURKHEIM a montré la place importante qu’occupe l’école dans la socialisation des enfants en raison du déclin des institutions traditionnelles que sont la famille et la religion. Pour lui « l’institution scolaire différencie et hiérarchise les individus tout en leur inculquant des valeurs fondamentales et un savoir minimum ». La sociologie de l’éducation va évoluer et va faire de l’inégalité des chances devant l’enseignement son objet suite à la démocratisation de l’enseignement qui a permis à l’école d’accueillir des enfants issus de toutes les catégories sociales et à l’augmentation du nombre d’enfants qui quittent prématurément l’école sans avoir les qualifications nécessaires. Il s’en suit de nombreuses enquêtes dont les rapports ont contribué à une meilleure compréhension du phénomène d’inégalité des chances.
Structure du système éducatif
Elle est définie à travers la loi d’orientation de 1991. Elle se présente comme suit :
– Un cycle fondamental, divisé en une éducation préscolaire et un enseignement polyvalent, comprenant successivement un enseignement élémentaire et un enseignement moyen,
– Un cycle secondaire et professionnel, subdivisé en un enseignement secondaire et une formation professionnelle.
– Un enseignement supérieur
Le préscolaire reçoit les enfants âgés de 2 à 3 ans pour une formation de trois ans. Il est subdivisé en petite, moyenne et grande section. Le cycle élémentaire comprend 6 niveaux : CI, CP, CE1 , CE2 , CM1 , CM2. Il recrute les enfants âgés normalement de 6 ou 7 ans même si l’age de scolarisation peut varier jusqu’à 12 ans. L’enseignement est, d’après l’article 5, placé sous la responsabilité de l’Etat, qui garantit aux citoyens la réalité du droit à l’éducation par la mise en place d’un système de formation. Le ministre de l’Education est chargé de l’application de la politique du gouvernement en matière d’éducation. Il est assisté dans la réalisation de cette tâche par des ministres délégués et des directeurs d’enseignement chargés de mettre en œuvre les orientations définies par le ministère. Ces structures sont représentées au niveau de chaque région par une inspection d’académie subdivisée en inspections départementales de l’éducation nationale et chargée de coordonner l’action éducative au niveau de cette entité administrative. Aujourd’hui avec le Plan Décennal de l’Education et de la Formation, qui repose sur une planification de type décentralisée, et qui passe par la conception, la réalisation et l’évaluation de plans régionaux départementaux et locaux de développement de l’éducation, il a été mis en place un dispositif de pilotage et de gestions participatives qui renforce les mécanismes de coordination et de suivi à tous les échelons du système. Ce dispositif comporte huit (8) structures intervenant chacune à un niveau clé du système. Ces structures sont :
– Le Conseil Supérieur de l’Education et de la Formation (CONSEF)
– Le Comité National de Coordination et de Suivi (CNCS)
– Les Comités Régionaux de Coordination et de Suivi (CRCS)
– Les Comités Départementaux de Coordination et de Suivi (CDCS)
– Les Comités Locaux d’Education et de Formation (CLEF)
– Les Comités de Gestion des établissements d’enseignement moyen et secondaires (CG)
– Les Comités de Gestion des Etablissement d’enseignement technique et de formation professionnelle (CG)
– Les comités de gestion des centres de développement de la petite enfance, des écoles élémentaires, des écoles communautaires de base ou des centres d’alphabétisation.
Cette brève présentation du système éducatif montre qu’il repose sur des objectifs nobles qui devront être atteint à travers la fréquentation de sa structure d’ensemble qui va du primaire au supérieur. Elle montre également que la décentralisation est une réalité dans l’éducation car aujourd’hui, chaque entité administrative réalise les objectifs nationaux fixés à travers l’étude et la connaissance de ses propres réalités et en tenant compte de ses spécificités. C’est ainsi qu’on parle de plans régionaux et départementaux de l’éducation et de la formation. Après le système éducatif, nous allons passer à la présentation des données de l’enquête.
Encadrement des enfants
L’éducation scolaire nécessite beaucoup de moyens. Pour aboutir à son terme, elle suppose une mobilisation d’énergie et de sous, sans lesquels son rendement risque d’être mauvais. L’intervention des parents dans l’encadrement des enfants est une nécessité vue l’état de sur chargement des classes qui empêche l’enseignant de pouvoir contrôler tout un chacun, vue le temps accordé à l’étude des matières qui peut être insuffisant pour un élève moyen et à plus forte raison pour un nul, et enfin, vue le manque de motivation de beaucoup d’enseignants qui ne se sentent plus obligés de dépenser toute leur énergie pour instruire les enfants. Il faut reconnaître aujourd’hui que la fonction enseignante n’est plus valorisée. Rien qu’en jetant un coup d’œil sur le mode de recrutement, sur le personnel, rien qu’en s’interrogeant sur qui sont réellement ces nouveaux recrutés, on aura, sans aucun doute, donné raison aux parents qui ne cessent de les critiquer. Aujourd’hui, enseigner n’est plus un sacerdoce, mais un tremplin, un métier de dernier recours et le plus souvent, celui qui exerce ce métier n’a plus d’issue. C’est pourquoi, il est de plus en plus fréquenté par des jeunes qui n’ont pas réussi à faire des études supérieures ; dès fois ayant fréquenté l’université mais incapables de s’insérer dans la vie active. Ainsi, ils considèrent le métier comme un gagne pain, ou comme un métier transitaire, qu’on exerce en attendant de trouver mieux. En plus de cela, l’enseignement fait parti des métiers ou la corruption est très fréquente. La compétence n’est plus de rigueur dans ce métier et la sélection laisse à désirer. D’où le manque de sérieux et de motivation chez les jeunes enseignants ; très souvent, leur besoin économique dépasse le montant de leur salaire. Raisons pour lequel bon nombre d’entre eux exerce parallèlement d’autres activités génératrices de revenus. Partant de tout cela, nous pensons que l’action du maître doit être accompagnée et complétée par celle des parents qui doivent non seulement aménager un lieu de travail pour les enfants au sein de la maison mais aussi les obliger à avoir le goût des études. C’est à eux qu’incombe l’achat de fournitures, le versement des cotisations (coopérative). Ils doivent aussi contrôler et encadrer les enfants en veillant à ce qu’ils fassent leurs devoirs à la maison, à ce qu’ils apprennent leurs leçons mais aussi à leur assiduité aux cours ; autrement dit, ils doivent se rapprocher davantage de l’école afin de mieux maîtriser leurs absences et leurs retards. Mais nous reconnaissons que ce comportement sera difficile si les parents sont dépourvus de moyens et passent quotidiennement en à chercher, s’ils sont analphabètes et pire, ignorant l’impact et le rendement de l’école dans leur vie et celle de leurs enfants. C’est ainsi qu’à la question vous arrive t – il de passer de temps en temps à l’école pour contrôler vos enfants ? Beaucoup de parents ont répondu par « rarement » sinon jamais. Ils sont trop pris par les activités économiques et n’ont pas de temps à consacrer à la surveillance des enfants. Les seuls occasions qu’ils ont d’aller à l’école, c’est quand on leurs convoque. Ils ne posent jamais de question au maître. Ils ne demandent jamais comment évoluent leurs enfants, quelles sont les matières qu’ils ne maîtrisent pas. Et, c’est sur la base des réponses obtenues à ces questions, confirmées par la consultation des cahiers de devoirs et de leçons, que devait se faire l’encadrement. Ainsi, le manque ou le mauvais encadrement explique l’accumulation de lacunes chez les enfants qui leurs font redoubler ou tripler de classes. Vu la situation actuelle du moins chez nos interrogés, l’encadrement fait défaut dans la mesure où les parents n’ont pas, soit les moyens, soit les compétences, où soit le temps pour le faire. Ils laissent l’enfant organiser son travail comme il veut et généralement, l’enfant n’use pas la bonne méthode, il travaille dans la plus grande liberté et dans la plus grande facilité. F. SINGLY20 toujours dans « Sociologie de famille contemporaine » affirme « le suivi familiale de la scolarité est une nécessité pour détecter d’éventuels défaillances de façon à y remédier et pour encourager l’effort des jeunes eux mêmes ». Le non suivi des parents de la scolarité des enfants est confirmé par le nombre important d’abandon. Les enfants quittent l’école sans même l’aval de leurs parents qui peuvent rester longtemps sans le savoir. Il est aussi une réalité dans la mesure où beaucoup de parents ne connaissent même pas les niveaux d’étude de leurs enfants. Pour répondre à cette question, ils font appel à ces derniers. On a l’impression qu’ils se désengagent de plus en plus car ayant des préoccupations beaucoup plus urgentes que l’encadrement des enfants. Leur devoir se limite à scolariser tout court leurs enfants. C’est pour cette raison qu’ils sont parfois traités d’irresponsables par les enseignants qui ne les connaissent et ne les voient pratiquement pas. Tout ceci est la conséquence de la crise économique et sociale qui a rendu la situation plus difficile et a engendré ou empiré d’autres phénomènes tels que l’implication dans la gestion des foyers et l’exercice de métiers chez les enfants.
Stratégies développées par les enfants : L’exercice de métiers pendant les vacances
Les vacances sont considérées comme une période de repos. Elles représentent pour les élèves un moment de détente et de distraction. Ces derniers en profitent pour découvrir beaucoup de choses en voyageant, en séjournant chez tantes et oncles. Certains en profitent pour partir en colonie de vacances ou même, approfondir leurs connaissances soit religieuses, en s’inscrivant dans les écoles coraniques, soit scolaires, en faisant des cours de vacances pour élever leur niveau et progresser rapidement dans les études. Mais au moment ou ces enfants donnent aux vacances leur vraie signification en se divertissant, d’autres enfants, conscients de leurs situations et animées par d’autres préoccupations, se lancent dans l’exercice de métier pendant cette période. Ils sont des apprentis maçons, des menuisiers, des mécaniciens, des vendeurs, des colporteurs, des domestiques etc.… Ils développent ces alternatives pour diverses raisons.
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Table des matières
INTRODUCTION
PARTIE PREMIERE : CADRE THEORIQUE ET METHODOLOGIQUE
1.1.Cadre théorique
1.1.1. Problématique
1.1.2. Objectif
1.1.2.1. Objectif général
1.1.2.2. Objectifs spécifiques
1.1.3. Hypothèse
1.1.4. Pertinence ou justification du sujet
1.1.5. Analyse des concepts
1.1.5.1. L’échec scolaire
1.1.5.2. L’abandon
1.1.5.3. L’exclusion
1.1.5.4. Le redoublement
1.1.6. Le modèle théorique
1.2.Cadre méthodologique
1.2.1 Présentation du cadre d’étude
1.2.2 La phase exploratoire
1.2.1.1. La recherche documentaire
1.2.1.2. L’observation
1.2.1.3. L’entretien exploratoire
1.2.3Le choix des méthodes
1.2.4 L’enquête par questionnaire
1.2.3.1 Le questionnaire
1.2.3.2 Population cible et échantillonnage
1.2.4 Technique d’échantillonnage
1.2.5 L’entretien
1.2.6 Technique de collecte et de traitement des données
1.2.7 Revue critique de la littérature
1.2.8 Difficultés rencontrées
DEUXIEME PARTIE : PRESENTATION DES DONNEES
2.1. Présentation du système éducatif sénégalais
2.1.1. Historique
2.1.2. Les fondements théoriques et juridiques du système Educatif
2.1.2.1. Les objectifs
2.1.2.2. Structure du système éducatif
2.2 La présentation des données de l’enquête
2.2.1. Présentation des données relatives aux enfants
2..2.2 Présentation des données relatives aux parents
TROISIEME PARTIE : ANALYSE ET INTERPRETATION
3.1. Les causes de l’échec scolaire à Thiès
3.1.1. Caractéristiques des familles
3.1.1.1 Niveau d’étude et profession
3.1.1.2. Situation matrimoniale et profession
3.1.1.3 Situation matrimoniale et nombres d’enfant
3.2. Encadrement des enfants
3.3. L’implication dans la gestion des foyers
3.3.1. L’exercice de travaux domestique
3.3.2. Stratégies développées par les enfants : L’exercice de métier pendant les vacances
3.3.3. Les raisons de l’exercice de métiers
3.3.3.1 La couverture des besoins scolaires
3.3.3.2 La multiplication des chances de réussite
3.3.3.3 Autres raisons
3.4. Les conséquences
Conclusion
Bibliographie
Annexes
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