L’eau : du solvant pur à l’effluent industriel

L’eau est un élément essentiel à l’éclosion de la vie et au développement de l’Humanité. Elle est nantie de propriétés physiques et chimiques exceptionnelles telles que sa présence sur Terre sous ses trois états (glace, liquide, vapeur), sa grande inertie thermique et surtout la propriété importante d’être un très bon solvant quasi universel. Toutes ces propriétés justifient ainsi de l’implication de l’eau dans toutes les activités humaines et notamment les activités industrielles. En effet, l’Industrie dans son ensemble utilise abondamment l’eau dans une multitude de procédés industriels où l’eau entre en contact avec diverses matières minérales et organiques en tant que solvant susceptible de les dissoudre ou de les solubiliser. Ainsi, son utilisation permanente dans de nombreuses industries entraîne par voie de conséquence sa pollution. Les eaux résiduaires provenant de l’Industrie sont appelées de façon générale des effluents.

Par conséquent, selon les procédés industriels mis en œuvre et utilisant l’eau comme solvant, des effluents de compositions différentes et complexes sont produits et peuvent constituer alors des rejets polluants pour l’environnement. Afin de préserver la ressource naturelle et fragile que représente l’eau, il est nécessaire de procéder aux traitements de ces rejets polluants que représentent les effluents industriels. Un large éventail de procédés de traitement est disponible pour les industriels selon les différents types de pollutions rencontrées dans les effluents. Une énumération exhaustive de ces procédés montrerait toute la complexité que représente le traitement d’un effluent composé d’un grand nombre de pollutions différentes. Il convient alors de se concentrer sur le domaine particulier dans lequel s’inscrit ce travail de thèse qui est le domaine du Nucléaire. Les industries nucléaires utilisent divers procédés de séparations et de lavages tout au long du cycle du combustible nucléaire qui mettent en contact l’eau avec des solvants organiques et des composés minéraux possédant une certaine radioactivité. Ainsi, le traitement des effluents que ces industries produisent est indispensable pour limiter les rejets polluants dangereux pour l’environnement.

En France et plus précisément à La Hague, l’entreprise Areva procède au retraitement et au recyclage des combustibles usés provenant de divers réacteurs de centrales nucléaires françaises. Le site d’Areva La Hague est constitué de diverses installations de traitement spécifiques et plus particulièrement des usines et ateliers de décontamination qui traitent des effluents provenant du lavage de pièces métalliques et de canalisations ayant été en contact avec les matières organiques et radioactives. Ces effluents peuvent ainsi contenir des solvants organiques utilisés dans le milieu nucléaire et des éléments possédant une radioactivité résiduelle. Les procédés de traitement actuellement utilisés permettent de décontaminer ces effluents mais peuvent présenter des limites quant au type de pollutions rencontré et à la gestion des déchets finaux en vue de leur conditionnement. Ainsi ces procédés doivent être améliorés en permanence en termes de coût, d’efficacité et de compatibilité avec les matrices de conditionnement des déchets, mais également ces procédés doivent s’adapter aux nouvelles restrictions et normes environnementales.

L’eau : du solvant pur à l’effluent industriel 

L’eau occupe une place essentielle dans l’histoire du développement industriel. L’implantation des manufactures et usines s’est toujours effectuée à proximité d’un fleuve ou plan d’eau pour plusieurs raisons, comme :
– le transport des matières premières ou des produits manufacturés par voie d’eau
– la source de solvant ou de réactif dans les procédés industriels
– l’exutoire pour les effluents .

L’eau est ainsi nécessaire car elle offre un panel de propriétés physiques et chimiques très complet qui est exploité par les industries de l’agro-alimentaire, de l’énergie, du bois et papier ou encore l’hydrométallurgie. Toute activité industrielle utilisant de l’eau engendre nécessairement des effluents polluants qui doivent alors être traités ou recyclés avant leur rejet dans l’environnement. Ainsi les normes concernant les eaux résiduaires industrielles deviennent de plus en plus drastiques et les industriels doivent alors s’adapter et proposer de nouveaux procédés physico-chimiques pour le traitement des rejets. Il convient alors de connaître les différents polluants et leurs effets sur l’environnement pour développer des procédés de traitement efficaces.

Les différentes pollutions et leurs effets sur l’environnement

Le ministère du développement durable et de l’environnement dresse une liste non exhaustive des différents types de pollutions des eaux habituellement rencontrés dans les effluents industriels, associés à leurs risques toxicologiques sur l’Homme et l’environnement.
❖ Les matières organiques : la pollution organique comme les insecticides ou les pesticides est très dangereuse pour les milieux aquatiques. Selon leurs formes et leurs natures chimiques, ces substances présentent des effets toxiques, mutagènes et cancérogènes.
❖ Les matières en suspension (MES) : les matières en suspension augmentent la turbidité (opacité) d’une eau impactant sur la photosynthèse, la respiration des poissons et colmatant les milieux aquatiques. Les particules peuvent également transporter différentes formes de pollutions qu’elles soient minérales ou organiques.
❖ Les matières azotées et phosphorées : l’azote et le phosphore causent une eutrophisation des milieux aquatiques par excès de matières nutritives pour les végétaux et conduisent à l’asphyxie des milieux. L’ammoniaque et les nitrites sont toxiques pour la faune aquatique. Les nitrates peuvent engendrer chez les nourrissons un empoisonnement du sang par blocage de l’hémoglobine interdisant le transport de l’oxygène.
❖ Les métaux et les radioéléments : certains métaux sont indispensables à la faune et la flore où ils sont communément appelés oligo-éléments. Mais, à des concentrations élevées, ils peuvent se révéler très nocifs. De plus les métaux sont non biodégradables et ont donc tendance à s’accumuler dans les organismes vivants. Leurs effets toxicologiques varient suivant le métal et sa forme chimique mais de façon générale, des troubles d’ordre respiratoire, digestif, nerveux ou cutané sont observés.

Etape de solubilisation micellaire 

Définition de la solubilisation micellaire

Qu’est-ce qu’un tensioactif ? 

Un tensioactif est un composé qui modifie la tension superficielle du liquide dans lequel il est soluble. Les composés tensioactifs sont des molécules dites amphiphiles, c’est-à-dire qu’ils possèdent au moins deux parties qui sont dans le cas de l’eau : une partie polaire miscible à l’eau dite hydrophile .

Par ailleurs les tensioactifs peuvent contenir également deux ou plusieurs chaînes hydrophobes ou hydrophiles et peuvent être de type macromoléculaire. C’est le cas notamment des copolymères à bloc qui présentent plusieurs parties hydrophiles/hydrophobes.

De plus, selon la charge de la partie polaire, les tensioactifs sont classés en quatre catégories que sont les tensioactifs anioniques (chargés négativement), cationiques (chargés positivement), zwiterioniques (possédant plusieurs charges selon le pH) et non-ioniques (absence de charges). Les propriétés des tensioactifs sont dues principalement à leur structure amphiphile. C’est pourquoi une molécule tensioactive peut se dissoudre dans l’eau tel un monomère et s’adsorber à une interface, ou bien former avec d’autres molécules tensioactives des agrégats moléculaires, les micelles. Cette nature amphiphile est donc responsable des phénomènes d’activité de surface et de micellisation.

Micellisation d’une solution tensioactive 

Dans des solutions aqueuses très diluées, les molécules tensioactives existent sous forme de monomères complètement dissociés, adsorbés à l’interface air/eau. Les groupements hydrophiles et lipophiles sont situés dans la phase qu’ils affectionnent le plus, l’énergie libre du système est ainsi minimisée (Rosen et al.). L’ajout de molécules supplémentaires engendre une augmentation du nombre de monomères en solution et de ce fait une augmentation de l’énergie libre totale du système. Or le système veut tendre vers un état d’énergie minimale, donc à partir d’une concentration seuil appelée concentration micellaire critique CMC, la surface est dite saturée, et les molécules tensioactives s’ordonnent pour former des structures généralement sphériques appelées micelles.

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Table des matières

Introduction générale
Chapitre 1 : Présentation de la thèse et étude bibliographique
I. Contexte général
I.1. L’eau : du solvant pur à l’effluent industriel
I.2. Les différentes pollutions et leurs effets sur l’environnement
I.3. La pollution à traiter dans le domaine du nucléaire
II. Objectifs de la thèse
III. Etape de solubilisation micellaire
III.1. Définition de la solubilisation micellaire
III.1.1. Qu’est-ce qu’un tensioactif ?
III.1.2. Micellisation d’une solution tensioactive
III.1.3. Solubilisation micellaire de molécules organiques en phase aqueuse
III.1.4. Application de la solubilisation micellaire à la décontamination organique des pièces métalliques
III.2. Application de la solubilisation micellaire à la décontamination
III.2.1. Nature des ions étudiés
III.2.2. Complexation des lanthanides
III.2.2.1. Solubilisation des lanthanides
III.2.2.2. Complexation des lanthanides par un ligand
III.2.3. Choix de la nature du ligand
III.2.3.1. La famille des β-dicétones
III.2.3.2. La famille des acides carboxyliques
III.2.3.3. La famille des organophosphorés
III.2.3.4. Conclusion sur le choix des ligands
IV. Etape de concentration des déchets micellaire
IV.1. Description du procédé dit « sol-gel »
IV.2. Mécanismes réactionnels d’un procédé sol-gel
IV.3. Tensioactifs compatibles avec la condensation d’un réseau de silice par voie sol-gel
IV.4. Concentration des micelles contenant la pollution par ce procédé de précipitation « sol-gel »
IV.4.1. Cas d’une pollution organique
IV.4.2. Cas d’une pollution organique et ionique
V. Conclusion sur les études à réaliser
Chapitre II : Matériels et techniques d’analyses expérimentales
I. Techniques d’analyses en milieu liquide
I.1. Techniques spectrométriques
I.1.1. Spectrométrie de Résonance Magnétique Nucléaire du liquide appliquée au phosphore (RMN 31P)
I.1.1.1. Notions de base
I.1.1.2. Levée de dégénérescence et phénomène de résonance
I.1.1.3. Phénomène de précession et de relaxation
I.1.1.4. Paramagnétisme des lanthanides
I.1.2. Spectrométrie d’émission atomique par plasma à couplage inductif (ICP-AES)
I.1.3. Spectrométrie UV-visible
I.2. Techniques de diffusion de rayonnements
I.2.1. Phénomènes de diffusion
I.2.2. La diffusion de la lumière en mode dynamique (DLS)
I.2.3. La diffusion aux petits angles (neutrons et rayons X)
I.2.3.1. Interprétation graphique et géométrique d’une solution diluée
I.2.3.2. Modèles d’ajustement numériques
I.3. Technique d’analyse par l’imagerie wet-STEM
II. Techniques d’analyses des solides
II.1. Diffusion des rayons X aux petits angles appliquée aux solides
II.2. Analyse porale et surfacique d’un solide poreux par adsorption de gaz
II.2.1. Phénomènes d’adsorption et isothermes d’adsorption/désorption
II.2.2. Théorie de l’adsorption
II.2.3. Méthodes de détermination des principaux paramètres
Chapitre III : Mise en place du procédé de séparation pour un système de référence et études paramétriques sur les constituants
I. Introduction
II. Procédé de séparation de référence
II.1. Description de l’effluent modèle
II.2. Rappel du procédé en différentes étapes
II.3. Choix des composés pour ce procédé de séparation des cations
II.4. Protocole expérimental pour le système de référence
II.5. Etude des interactions à partir du système de référence
II.5.1. Interaction cation – micelles
II.5.2. Interaction micelles – ligand
II.5.3. Interaction cation – ligand
II.5.4. Interaction micelles – cation – ligand
II.5.5. Conclusions sur le système extractant modèle
III. Etudes paramétriques sur le procédé de séparation
III.1. Rôle et influence de la nature du lanthanide
III.1.1. Interaction lanthanide – micelles et lanthanide – ligand
III.1.2. Interaction lanthanide – ligand – micelles
III.1.3. Effet de la précipitation de la phase de silice sur la dépollution des lanthanides
III.1.4. Conclusion sur l’étude de différents lanthanides
III.2. Rôle et influence de la nature du ligand
III.2.1. Les béta-dicétones
III.2.1.1. Choix des β-dicétones et protocole expérimental
III.2.1.2. Etude de l’influence des β-dicétones sur la séparation du cation
III.2.1.3. Optimisation du système à base des β-dicétones
III.2.1.4. Conclusion sur l’étude des β-dicétones
III.2.2. Etude de ligands de la famille des composés organophosphorés
III.2.2.1. Choix des ligands organophosphorés et protocole expérimental
III.2.2.2. Interaction entre le ligand et le néodyme en l’absence de tensioactifs
III.2.2.3. Interaction entre le ligand et le tensioactif en l’absence de néodyme
III.2.2.4. Interaction ligand/néodyme/tensioactif avant l’étape de précipitation
III.2.2.5. Effet de l’ajout de TEOS à la solution ligand – néodyme – tensioactif
III.2.2.6. Discussion sur la stœchiométrie des complexes Nd-ligand
III.2.2.7. Conclusion sur l’étude des ligands organophosphorés
III.3. Rôle et influence de la nature du tensioactif
III.3.1. Choix des tensioactifs étudiés et protocole expérimental
III.3.2. Etude des interactions entre le complexe Nd-HDEHP et les différents tensioactifs
III.3.3. Effet de la concentration en C12E10 et en Triton X-100 sur la stabilisation du complexe NdHDEHP
III.3.4. Effet de la précipitation par voie sol-gel dans les systèmes C12E10 et Triton X-100 concentrés
III.3.5. Conclusion sur l’étude de différents tensioactifs
IV. Conclusion
Conclusion générale

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