Le syndrome d’immunodéficience acquise (SIDA), identifié en 1981 chez des homosexuels américains ( 9), fut rapidement considéré, par analogie avec les modèles animaux, comme étant d’origine rétrovirale. Le virus en cause, caractérisé en 1983 à partir de cellules lymphoïdes ganglionnaires (4 ), fut dénommé LAV (Lymphadenopathy Associated Virus), puis VIH (Virus de l’Immunodéficience Humaine) (4) . Deux années plus tard, la détermination du génome viral a permis de distinguer deux virus apparentés mais génétiquement distincts : le VIH-1, responsable de l’épidémie mondiale actuelle et le VIH-2 endémique en Afrique de l’Ouest (2).
Des recherches intenses menées depuis plus de 20 ans, ont permis de mieux comprendre les stratégies qu’utilisent ces virus pour se multiplier et persister dans l’organisme. Des traitements anti-rétroviraux ont ainsi été mis au point et ont, depuis 1996, fait reculer, dans les pays développés, le nombre de cas de SIDA et de décès dus à cette maladie. Mais les deux tiers des personnes infectées vivent dans les pays à ressources limitées où l’accès aux soins et aux thérapeutiques est faible .
Globalement, le SIDA est responsable de la mort de plus de 25 millions de personnes depuis qu’elle a été identifiée en 1981, ce qui en fait l’une des épidémies les plus dévastatrices de l’histoire . L’ampleur de cette pandémie a pu être suivie grâce à une importante composante des programmes nationaux de lutte contre le SIDA qu’est la surveillance de l’infection à VIH. Cette surveillance peut être une surveillance biologique, comportementale, combinée, etc (voir plus loin) La Surveillance sentinelle est la surveillance biologique la plus communément utilisée. Après la description des premiers cas de SIDA en 1986, le Sénégal a, dés 1989, mis en place un système de surveillance de l’infection à VIH par sites sentinelles qui a fournit l’essentiel des données obtenues sur l’épidémie de VIH dans le pays
En 2000, l’ONUSIDA/OMS publie de directives de surveillance seconde génération du VIH .
TAXONOMIE ET STRUCTURE DU VIRUS
Le VIH appartient à la famille des Retroviridae et à la sous-famille des Lentivirinae. Deux types de VIH sont identifiés à ce jour :
Le VIH 1 : Répandu en Europe, aux Etats Unis, en Afrique centrale et en Afrique de l’est.
Le VIH 2 : Répandu surtout en Afrique de l’ouest.
Le virus se présente sous la forme d’une particule sphérique de 80 à 100 nm de diamètre. Il est constitué de quatre éléments : le génome, la capside, la matrice et l’enveloppe .
Le génome
Il est constitué de deux molécules d’ARN identiques, chacune d’elle comporte environ 10 000 nucléotides porteurs de l’information génétique nécessaire à la synthèse des protéines virales. Ce génome comporte des gènes dits classiques et des gènes dits supplémentaires.
Les gènes classiques
Ils représentent la majeure partie de la molécule d’ARN et sont constitués de trois gènes :
• Le gène gag (group antigen) : il code pour des protéines de la structure interne du virus
– p17 MA (matrice)
– p24 CA (capside)
– p7 NC (nucléocapside)
• Le gène pol (polymérase) : il code pour les enzymes virales transcriptase inverse, intégrase et protéase.
• Le gène env. (enveloppe): il code pour des protéines de la structure externe du virus.
– gp160 (c’est une protéine précurseur)
– gp120 SU (c’est une protéine de la surface de l’enveloppe virale)
– Gp 41 TM (protéine transmembranaire).
Les gènes supplémentaires
On a identifié six gènes appelés tat, rev, nef, vif, vpr et vpu (VIH-1) ou vpx (VIH-2). Ces gènes codent pour des protéines de régulation qui interviennent lors de la réplication virale, mais qui ne participeront pas à la structure du virus.
La capside virale
Située au cœur de la particule virale, elle est constituée de protéines p24. Elle renferme les deux molécules de l’ARN, la protéine p7 et les enzymes virales (transcriptase inverse et intégrase).
La matrice
Constituée de protéines p17, elle tapisse l’intérieur de la particule virale. La protéase virale se retrouve au niveau de cette matrice.
L’enveloppe
C’est un fragment de la membrane cytoplasmique de la cellule hôte qui est utilisé par le virus comme enveloppe externe. Elle est recouverte à sa surface par la glycoprotéine d’enveloppe externe gp120 et par la glycoprotéine gp41 transmembranaire. Ces glycoprotéines de surface proviennent du clivage de la gp160 qui est un précurseur. La gp120 est une protéine dont la structure se modifie continuellement du fait d’une variabilité génétique propre au VIH.
VARIABILITE GENETIQUE DES VIH
Le VIH est caractérisé par une grande variabilité génétique . Ceci va constituer un élément aggravant de l’infection, car l’organisme infecté va sans cesse lutter contre des souches différentes. Le génome du virus contient toutes les informations génétiques nécessaires à la perpétuation du message. Cependant, pour survivre, il doit constamment s’adapter aux menaces de l’environnement. Les variations qu’il va subir au niveau de son génome vont se traduire par des modifications de la structure externe. Le système immunitaire se retrouvant confronté à une structure nouvelle ne la reconnaît pas, laissant ainsi le virus lui échapper. Néanmoins, tous les virus modifiés ne survivent pas car ils ne vont pas résister à la pression de la sélection qu’ils subissent. La diversité est produite au hasard, seules les bonnes variations (celles qui ne perturbent pas la multiplication) seront viables. Les mauvais variants disparaissent car les modifications subies empêchent la multiplication virale de se dérouler normalement, ce qui est létal pour le virus. L’apparition de nouveaux variants est favorisée par la multiplication très rapide du virus, de l’ordre de 10 000 virus par jour en moyenne. À ce rythme, pour une particule virale au départ on en aura mille milliards au 4ème jour. Le nombre de virus éliminés par la sélection est dérisoire par rapport à cette production.
La variation fait suite aux erreurs qui surviennent lors de la réplication du génome viral et sont le fait surtout de la transcriptase inverse. Elle fait en moyenne une erreur sur 10 000 nucléotides, ce qui correspond à la taille du génome. Mais du fait de la sélection, ne seront gardés que les variants pouvant se répliquer. En général, lorsque la variation touche les protéines env., la souche obtenue est viable car elle va présenter une structure non reconnue par le système immunitaire de l’hôte. Si la variation entraîne une modification d’une enzyme du virus, ce variant disparaît car il ne peut plus se multiplier. La variabilité du gène codant pour la glycoprotéine gp 120 est importante à considérer car c’est celle-ci qui permet la fixation du virus au récepteur CD4. On a pu constater que la gp120 possède une région constante (C) et une région variable (V). Les régions constantes sont essentielles à la survie du virus; lorsque le gène qui code leurs protéines subit une mutation, celle-ci est létale. Les modifications qui portent sur la région V mettent la gp120 à l’abri de la réponse immunitaire de l’hôte, et permettent au virus d’infecter facilement d’autres cellules.
Les modifications du gène gag, dues aux erreurs commises par la transcriptase inverse, vont se traduire par des modifications antigéniques de la région V de la gp 120. C’est cela qui a permis d’identifier les groupes et les sous types du VIH-1. En 1986, un second virus, le VIH-2, a été découvert en Afrique de l’Ouest. Les études génétiques montrent qu’il y a seulement 42 % d’homologie entre le VIH-1 et le VIH-2; chaque type de virus comporte lui-même des différences. Le VIH-1 est divisé en trois groupes M (majoritaire), O (Outlier) et N (non-M non-O). Le groupe M est lui-même subdivisé en sous-types dénommés par des lettres allant de A à K et de souches recombinantes (CRF). La connaissance de la variabilité génétique du virus est importante pour la mise au point de tests de diagnostics et de vaccins. En effet, un test peut être bon dans un pays et pas dans un autre s’il ne détecte pas tous les sous-types circulant dans cet autre pays. Cette variabilité doit être prise en compte lors du choix des tests diagnostics. Pour les vaccins, il est bien connu que celui-ci doit donner aux cellules mémoires de l’organisme la structure de l’antigène pour leur permettre de déclencher la réponse immunitaire lors d’un contact ultérieur avec le virus. Or les modifications continues qui affectent la région V de la gp120 rendent difficile la mise au point d’un vaccin qui pourrait faire produire des anticorps neutralisants. Le vaccin produit à partir d’une souche ne serait efficace que contre la souche utilisée. Cependant, même dans ce cas il peut devenir inopérant. En effet, la grande vitesse de la réplication virale débouchera rapidement sur l’apparition de nouveaux variants chez la personne, non reconnus par les anticorps vaccinaux.
Cette répartition est cependant très évolutive, avec la variabilité importante du virus, l’apparition de nouveaux sous-types n’est pas à exclure.
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Table des matières
INTRODUCTION
1° PARTIE : REVUE DE LA LITTERATURE : LE VIRUS DE L’IMMUNODEFICIENCE ACQUISE (VIH) ET LES METHODES DE SURVEILLANCE EPIDEMIOLOGIQUE DE L’INFECTION A VIH
1-TAXONOMIE ET STRUCTURE DU VIRUS
A-le génome
a) les gènes classiques
b) les gènes supplémentaires
B-la capside virale
C-la matrice
D-l’enveloppe
2-VARIABILITE GENETIQUE
3-EPIDEMIOLOGIE DE L’INFECTION
A-evolution
B-modes de transmission du virus
a) transmission par voie sexuelle
b) transmission par voie sanguine
c) transmission materno-fœtale ou transmission verticale
C-repartition géographique des types et sous- types
4-HISTOIRE NATURELLE DE LA MALADIE
A-la primoinfection
B-L’infection asymptomatique
C- le Syndrome de l’Immunodéficience Acquise ou SIDA
5-DIAGNOSTIC : PRINCIPES ET METHODES
6-METHODES DE SURVEILLANCE EPIDEMIOLOGIQUE DU VIH
A-principe de la surveillance épidémiologique
B-la surveillance biologique
a) la sérosurveillance sentinelle
b) enquêtes sérologiques de la population générale
c) autres types de surveillance biologique
C-la surveillance comportementale
a) les enquêtes de la population générale
b) les enquêtes dans des sous population spécifiques
D-les systèmes de surveillance seconde génération
E-autres sources d’informations utiles
2° PARTIE : TRAVAIL PERSONNEL
SURVEILLANCE DE L’INFECTION A VIH AU SENEGAL (PAYS A EPIDEMIE CONCENTREE) 2000 à 2004
7CONTEXTE
8- CADRE DE L’ETUDE
9-INSTITUTIONS PARTENAIRES
A-le conseil national de lutte contre le sida (CNLS)
B-la division de lutte contre le SIDA/IST du ministère de la santé et de la prévention médicale
C-le laboratoire de bactériologie virologie de l’Hôpital Aristide le Dantec (LBV)
D-les laboratoires régionaux du ministère de la santé et les structures sanitaires
sites de la surveillance sentinelle
10-MATERIEL UTILISE
11-METHODOLOGIE
A-objectifs de la surveillance sentinelle
B- population cibles
C-taille d’échantillon par sites
D-sites sentinelles
E-périodicité et durée de la collecte des données
F-déroulement de la collecte des données de surveillance
a) activités au niveau des sites
b) activités au niveau du laboratoire de bactériologie virologie LBV
c) analyses au laboratoire
G-gestion et analyse des données
H-dissémination des données de surveillance
I-interprétation des données
12-RESULTATS
A-prévalence du VIH chez les femmes enceintes (2000 à 2004)
B- prévalence du VIH chez les malades hospitalisés et les tuberculeux
C- prévalence du VIH chez les travailleuses du sexe (TS)
13-METHODES D’ESTIMATION ET DE PROJECTION DE LA SURVEILLANCE SENTINELLE
A- méthodologie
B- résultats
DISCUSSION DES RESULTATS DE LA SURVEILLANCE SENTINELLE
Contraintes du système de surveillance actuelle
Acquis de la surveillance sentinelle
CONCLUSON