Trente années après la découverte du virus de l’immunodéficience humaine (VIH), la pandémie du « syndrome d’immunodéficience acquise » (SIDA) se poursuit, en particulier dans les pays en développement. Le SIDA, décrit pour la première fois en 1981, est la conséquence grave de l’infection par le VIH, responsable d’une diminution de l’immunité cellulaire qui est source d’infections opportunistes. L’amélioration des fonctions immunitaires sous traitement antirétroviral (TARV) a permis de réduire de façon considérable le nombre de décès liés à l’infection (Mahy et al., 2010).
L’infection par le VIH réalise une pandémie, dont la transmission par voie sexuelle est la plus fréquente. A la fin de l’année 2011, il existait près de 34 millions de personnes infectées dans le monde. L’Afrique Subsaharienne restait l’une des régions les plus gravement touchées avec près d’un adulte sur 20 (4,9%) vivant avec le VIH, ce qui représentait 69% des personnes infectées (ONUSIDA, 2012). Les enfants ne sont pas épargnés par cette pandémie. Selon les dernières estimations, 3,4 millions d’enfants de moins de 15 ans vivaient avec le VIH en 2010 (OMS 2011), et 90% de ces enfants vivaient en Afrique Sub-saharienne (ONUSIDA, 2010). La grande majorité des enfants séropositifs pour le VIH sont infectés verticalement. En 2011, 330 000 enfants ont été infectés par le VIH. Cela représente une baisse de 43 % depuis 2003 et une baisse de 24 % depuis 2009 (ONUSIDA, 2012). Ces résultats encourageants sont la conséquence des efforts déployés à l’échelle mondiale, ayant pour objectif l’élimination de la transmission mère enfant (TME) du VIH d’ici à 2015. Cependant, malgré les efforts consentis, il existe encore des enfants qui naissent infectés par le VIH. Le taux de mortalité reste élevé chez ces enfants infectés, dans les premiers mois de vie à l’absence d’une bonne prise en charge incluant le TARV et la prophylaxie au co-trimoxazole. Un taux de 30% des enfants infectés meurent durant la première année de vie et 50% ne survivent pas jusqu’à l’âge de deux ans à défaut d’une bonne prise en charge (Newell M L et al., 2004).
Définition
Le Virus de l’Immunodéficience Humaine, est un virus possédant un génome sous forme d’ARN, contenu dans une capside protéique, elle-même entourée par une enveloppe formée d’une membrane lipidique. Ce virus appartient à la famille des Retroviridae, lesquels ont été identifiés dans de nombreuses espèces de mammifères. Ce sont des virus enveloppés, à ARN qui possèdent une reverse transcriptase. Cette enzyme spécifique permet de transformer l’ARN viral en ADN double brin (provirus), lequel peut s’intégrer dans le chromosome cellulaire et ainsi être exprimé durant toute la vie active de la cellule. Chez l’homme, le VIH est responsable du Syndrome de l’Immunodéficience Acquise (SIDA) (Gallo R C et Montagnier L, 2003).
Classification
Le VIH appartient à la famille des Retroviridae (ou rétrovirus) et précisément à la sous famille des Orthoretrovirinae (http://ictvonline.org/virusTaxonomy.asp version=2012). Les Retroviridae sont représentés par une large famille de virus dont le matériel génétique est composé d’ARN monocaténaire. Ils sont définis par leur mode de réplication qui passe par une étape de rétrotranscription de leur matériel génétique constitué de deux molécules d’ARN identiques, en ADN. Cette étape obligatoire à la multiplication du virus est possible grâce à une enzyme virale : la Transcriptase Inverse (TI) ou Reverse Transcriptase (RT). L’ADN néoformé intégré dans le génome de la cellule hôte se comporte comme partie intégrante de ce dernier et se réplique en même temps que lui (Coffin J M et al., 1997). La famille des Retroviridae est divisée en deux sous familles réparties en 7 genres:
– sous famille des Spumaretrovirinae composé du seul genre Spumavirus
– sous famille des Orthoretrovirinae subdivisée en 6 genres : Alpharetrovirus, Bétaretrovirus, Gammaretrovirus, Deltaretrovirus, Epsilonretrovirus et les Lentivirus .
Les lentivirus sont des virus qui provoquent des maladies à évolution lente (pneumonies, désordres neurologiques) et qui sont cytopathogènes en culture. Le VIH fait partie de ce genre.
Origine du VIH
Le VIH provient de multiples transmissions zoonotiques de SIV des primates non humains aux humains en Afrique de l’ouest et du centre. La transmission entre espèces est probablement survenue durant les processus de chasse, et de boucherie des primates pour la viande de brousse et la captivité, de commerce et d’élevage des singes comme animaux domestiques (Hahn et al., 2000). Plus de 40 différentes espèces de primates non humains ont l’infection à SIV, et chaque espèce a un type de virus spécifique (Aghokeng et al., 2010). Des transmissions zoonotiques indépendantes, des primates non humains aux humains ont engendré plusieurs lignées de VIH : VIH de type 1 (VIH-1) groupes M, N, O et P et VIH de type 2 (VIH-2) groupes A-H .
L’étendue de l’épidémie causée par chaque groupe varie considérablement. Le VIH 1 groupe M est responsable de la pandémie globale (environ 33 millions d’individus infectés), le groupe O cause quelques milliers d’infections en Afrique de l’ouest et du centre, le groupe N a été retrouvé chez un petit nombre de personnes au Cameroun et le groupe P a récemment été identifié chez deux individus originaires du Cameroun (Simon F et al., 1998 ; Roques P et al., 2004 ; Plantier J C et al., 2009 ; Ayouba A et al., 2001 ; Vallari A et al., 2011).
Biologie du virus
Morphologie et structure
Les rétrovirus se présentent sous forme de particules sphériques d’un diamètre de 80 à 120 nm . Ces particules sont constituées d’une enveloppe externe d’origine cellulaire dans laquelle sont insérées les glycoprotéines d’enveloppe du virus. Cette enveloppe, tapissée à l’intérieur de la particule virale par une matrice, entoure la capside virale centrale ou excentrée, qui contient le génome viral, la nucléocapside et les enzymes nécessaires à la réplication du virus.
Organisation génomique du VIH
Le génome du VIH est présent en deux copies d’ARN identiques de 9200 nucléotides. Ce génome contient trois gènes principaux, gag, pol, env, (figure 5) (Gonda M A, 1988) qui mènent ensuite à la formation de diverses autres protéines. Le gène gag mène à la production du précurseur Gag (Pr55) qui, suite à son clivage, produit la matrice (MA) (p17), la capside (CA) (p24), la nucléocapside (NC) (p7) et une petite protéine p6. Ces protéines structurales sont essentielles pour obtenir une particule virale complète. De son côté, le gène pol code pour les enzymes telles que la TI (rétrotranscription de l’ARN en ADN), l’intégrase (IN) (intégration de l’ADN viral au génome cellulaire) et la protéase (PR) (maturation des particules virales). Finalement, le gène env permet la production des protéines qui constituent l’enveloppe soient la glycoprotéine gp120 et la protéine transmembranaire gp41.
Le génome à ARN simple brin est rétrotranscrit en ADN double brin lors de l’entrée du virus dans la cellule. Une même séquence de taille variable (Long Terminal Repeat ou LTR) est présente à chaque extrémité de l’ADN viral; cette séquence, qui permet l’intégration de l’ADN sous forme d’un provirus dans le génome de la cellule hôte, contient les éléments promoteurs nécessaires à l’expression des gènes. L’organisation du génome du VIH est complexe car, outre trois gènes rétroviraux classiques, il existe deux régions particulières, situées entre les gènes pol et env, et à la suite du gène env (figure 5), lesquelles contiennent au moins six gènes viraux supplémentaires, dénommés tat, rev, vif, vpr, vpu ou vpx (pour le VIH-2) et nef. Les protéines codées par ces gènes supplémentaires sont, pour la plupart, impliquées dans des phénomènes de régulation de l’expression des protéines virales et, par là même, de la multiplication du virus. (Seelamgari A et al., 2004). Elles sont également capables de modifier l’expression de certains gènes cellulaires, et donc de provoquer une altération du fonctionnement des cellules de l’immunité touchées par le virus.
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Table des matières
INTRODUCTION
Chapitre 1- Le VIH: Définition-Classification-Origine
1- Définition
2- Classification
3- Origine du VIH
3-1 Origine du VIH-1
3-2 Origine du VIH-2
Chapitre 2: Biologie du virus
1- Morphologie et structure
2- Organisation génomique du VIH
2-1 Les LTR
2-2 Le gène gag (gène des antigènes de groupe)
2-3 Le gène pol
2-3-1 La protéase virale (PR)
2-3-2 La transcriptase inverse
2-3-3 L’intégrase
2-4 Le gène env
2-4-1 La glycoprotéine de surface gp120
2-4-2 La gp41 (transmembranaire)
2-5 Les gènes de régulation tat et rev et les gènes auxiliaires vif, vpr, vpu et nef
2-5-1 Le gène tat (trans-activator of transcription)
2-5-2 Le gene rev (regulator of expression virus)
2-5-3 Le gène vif (viron infectivity factor)
2-5-4 Le gène vpr (viral protein R)
2-5-5 Le gène vpu (viral protein U)
2-5-6 Le gène nef (negative expression factor)
3- Cycle de réplication du VIH-1
3-1 Phase précoce
3-1-1 L’attachement de la particule virale à une cellule
3-1-2 La fusion, l’entrée et la décapsidation
3-1-3 La transcription inverse
3-1-4 L’intégration de l’ADN viral
3-2 Phase tardive
3-2-1 Transcription, Epissage, Traduction de l’ARN et Maturation des protéines
3-2-2 Assemblage
3-2-3 Bourgeonnement et Maturation des virus
4- Facteurs de restriction de la cellule hôte
Chapitre 3- Diversité génétique – Epidémiologie
1- Variabilité génétique du VIH
1-1 Répartition des sous-types/CRFs du VIH-1 dans le monde
1-2 Mécanismes de la diversité génétique
1-2-1 Faible fidélité de la transcriptase inverse
1-2-2 Pressions de sélection
1-2-3 Recombinaison génétique
1-3 Conséquences de la diversité génétique
1-3-1 Conséquences sur la transmission et la progression de la maladie
1-3-2 Impact sur le diagnostic et la mesure de la charge virale
1-3-3 Impact sur la réponse au traitement ARV et la résistance
1-3-4 Impact sur la prévention
1-4 Méthodes d’étude de la diversité génétique
1-4-1 Détermination du génotype par analyse phylogénétique
1-4-2 Génotypage par HMA ou « Heteroduplex Mobility Assay »
1-4-3 Génotypage par MHA (« Multi-region Hybridation Assay »)
1-4-4 Sérotypage
2- Epidémiologie de l’infection à VIH
CONCLUSION