Nos représentations aujourd’hui
Pour plusieurs raisons, dont les remarquables progrès réalisés au XX ème siècle en matière de médecine et d’hygiène, le temps de la «vieillesse» s’est allongé de 25 ans. En un sens la personne âgée vient de naître. Elle était une exception il y a encore cent ans. On parle aujourd’hui, nous l’avons vu, de troisième, quatrième, voir même de cinquième âge. Il y a cependant encore peu de penseurs de la vieillesse. Pendant des années la psychanalyse s’est désintéressée du vieillissement car le psychisme des personnes âgées était considéré comme trop peu plastique. Si le vieillissement de la population mondiale préoccupe de nombreux économistes ainsi que le milieu médical, il nous oblige aussi à dépoussiérer nos idées sur la personne âgée.
Il y a eu ces derniers temps quelques changements dans la prise en considération du grand âge et les représentations de la vieillesse. Hier encore, elles étaient largement péjoratives.
Le Général De Gaulle l’illustra à travers sa célèbre déclaration : « La vieillesse est un naufrage ». A l’aube du troisième millénaire, selon le professeur Claude OLIEVENSTEIN, la vieillesse correspondrait plutôt en réalité, à « une autre manière de naviguer » . Nos représentations aujourd’hui sont donc bien plus positives mais des progrès sont encore possibles.
Le rapport de la vieillesse et la mort, par exemple, parait si étroit qu’il semble souvent impossible d’évoquer l’un sans l’autre. Or on ne meurt pas de vieillesse, on meurt toujours dequelque chose. La vieillesse n’est pas une maladie ! On peut rencontrer des personnes âgées heureuses, actives, en bonne santé, se contentant de ce qu’elles ont. Elles sont autant occupées que durant leur vie « active » mais d’une autre manière moins contraignante.
La bibliothérapeute Régine DETAMBEL explique le caractère erroné des représentations négatives de la vieillesse. Selon elle, « fruits de nos préjugés, elles sont ignorantes des faits et occultent des pans entiers de l’expérience des personnes âgées. Elles trahissent notre haine de la vieillesse, avatar de la peur panique de notre propre vieillissement. »
C’est en effet une guerre que notre monde livre au corps vieilli. Apparenté au corps malade, il est souvent accaparé par le discours médical. Aux yeux de beaucoup, la vieillesse est un état à combattre et à retarder.
En témoigne le marché de la beauté, promesse de l’éternelle jeunesse, qui n’a jamais été aussi florissant : soins « anti-âge », toxine botulique, etc. Beaucoup cherchent à faire disparaître les signes du vieillissement dans une logique de pensée magique. Comme si avec la disparition du signe disparaîtrait aussi le vieillissement, et derrière celui-ci la mort. Cette illusion « jeuniste » nous préserve de la nécessité à penser la vie dans son entier. Cela rejoint la pensée d’Yves JEANNE, maître de conférences à l’Université Lumière de Lyon, selon lequel « le déni de la mort s’inscrit dans notre contexte social et culturel occidental comme une norme acceptable » . Ce serait ce refus de la mort et l’occultation du vieillissement, souvent assimilé à la déchéance, qui nous amèneraient à reléguer les personnes âgées loin des regards, en déléguant à des professionnels la tâche d’en prendre soin.
D’après Simone de Beauvoir, « par la manière dont une société se comporte avec ses vieillards, elle dévoile sans équivoque la vérité – souvent soigneusement masquée – de ses principes et de ses fins ». Partant de ce principe, on peut se demander si derrière la conception « socialisante » d’espaces communs (maison de retraite, résidences pour personnes âgées, etc.), il ne se cache pas une réalité inavouable : pouvoir surveiller les personnes âgées avec un effectif de professionnels réduit. De plus, ces mesures n’ont-elles pas tendances à extraire les personnes âgées du commun, de l’ordinaire de la vie ? Elles deviennent alors seulement l’objet de notre compassion et non plus nos pairs.
Les manifestations du vieillissement et l’intérêt de la psychomotricité
Malgré la grande hétérogénéité des performances psychomotrices des personnes âgées, il semble possible de déterminer des grands axes de modifications naturelles dûes au temps qui passe. Nous verrons notamment ici les répercussions des changements psycho-perceptivomoteurs liés au vieillissement, dans le domaine de la psychomotricité.
Les manifestations physiques du vieillissement
Quand on évoque le vieillissement physique, on pense en premier lieu aux manifestations corporelles visibles. On observe avec l’avancée en âge une perte graduelle des cheveux et un blanchiment de la chevelure. La peau se ride et sa texture se modifie : elle est plus mince et élastique et des taches brunes apparaissent. Il y a aussi une modification de la posture : « Le corps s’affaisse peu à peu, le centre de gravité se délocalise et la verticalité devient moins fière ». François DAGONET, philosophe français, définit trois dimensions du corps qui, selon lui, seraient confondues pour une personne en bonne santé. La première, « le corps en soi », est biologique. La seconde, « le corps pour soi », correspond au corps perçu et sous-tend notre identité personnelle. Enfin la dernière, « le corps pour les autres », correspond à notre identité sociale.
Les répercussions du vieillissement sur les systèmes sensoriels
C’est grâce aux sens que nous sommes en relation avec notre environnement. Ils nous permettent de communiquer, d’être informés et d’agir sur le monde qui nous entoure. D’une manière générale, les déficits sensoriels sont dûs à la fragilisation des organes sensoriels et à la dégradation de la transmission de l’information aux voies centrales.
Tact
On note une perte de la sensibilité cutanée et une diminution de la perception aux vibrations. La qualité et la quantité d’informations reçues dans l’espace de manipulation du sujet âgé se modifient. Les stimuli n’étant pas perçus assez rapidement, il y a par exemple un risque de blessures et de brûlures accru. La sensibilité au niveau des pieds est aussi altérée. Cela entraîne une « mauvaise perception des reliefs et de la consistance du sol »16. L’équilibre en est donc affecté.
Les répercussions du vieillissement sur la motricité globale
L’appareil locomoteur
La motricité globale s’appuie sur l’appareil locomoteur. L’appareil locomoteur désigne l’ensemble des organes permettant à l’homme de se déplacer et de maintenir une posture en absence de mouvement. Il se compose du système musculaire, du squelette osseux et cartilagineux et des éléments qui y sont rattachés (ligaments, tendons…).
La diminution de la densité des fibres musculaires entraîne une baisse de la force musculaire. La contraction et le relâchement sont donc plus lents. Cette fonte musculaire joue aussi un rôle dans l’altération des processus digestifs et dans les problèmes d’incontinence.
Au niveau du squelette et du cartilage, il y a une calcification entraînant des raideurs. Le système articulaire, comme toutes les autres fonctions, s’auto-entretient et la conservation d’une fonction dépend de son utilisation. C’est donc l’utilisation insuffisante des amplitudes articulaires possibles de certains mouvements qui les rendent non fonctionnels. L’intervention psychomotrice pourra aider à entretenir la mobilité des articulations par des exercices de motricité globale dynamiques.
S’il y a une déformation de la colonne vertébrale, le corps perd plus ou moins son axe corporel. Lors de déplacements, la personne aura alors tendance à déplacer son centre de gravité en dehors de la surface d’appui de pied. Cet élargissement du polygone de sustentation peut entraîner un certain déséquilibre. À travers des exercices mettant en jeu le contrôle tonique, un travail en psychomotricité permettra d’aider à maintenir une bonne posture et stabiliser ainsi les déviations de la colonne vertébrale.
Malgré la diminution de la force musculaire et l’altération ostéo-articulaire, l’homme a la capacité de se tenir debout et de marcher jusqu’à la fin de sa vie. Les possibilités de déplacements sont cependant plus limitées avec l’avancée en âge. Il y a une réduction de moitié de la vitesse de la marche. Les pas se font glissants voir traînants sur la surface du sol. Cela augmente le risque de chute par accrochage du pied. Il y a aussi une diminution de la durée de la phase d’appuie uni-podal (piétinements). Tout cela entraîne une augmentation du coût énergétique lors de déplacements. La personne âgée réduit donc souvent ses activités. De ce fait, il y a une réduction de son espace personnel et l’espace commun est moins investi. Il y a un appauvrissement du schéma corporel en conséquence de l’immobilité.
L’équilibre
« L’équilibre désigne l’ensemble des phénomènes destinés à lutter contre l’apesanteur, aussi bien dans la position debout qu’assise ». Ces phénomènes sont de nature réflexes et presque imperceptibles à la conscience.
Nous l’avons vu, l’équilibre résulte d’une intégration complexe de plusieurs systèmes sensoriels mais aussi moteurs. Si l’un des récepteurs sensoriels fait défaut, il devient difficile pour une personne âgée de maintenir son équilibre dans des situations imprévues. Par conséquent, plus elle vieillit, plus le sentiment de manque de stabilité, de vertige, et d’insécurité augmente lors des déplacements.
Les personnes vieillissantes réagissent souvent aux pertes d’équilibre en raidissant leurs muscles au lieu de se servir de leur flexibilité. De plus, elles ont tendance à adopter une position de déséquilibre postérieure (observable également en position assise). Cela témoigne de leur crainte importante du vide antérieur et donc de la chute. Les facteurs psychologiques influent grandement sur la posture. Un travail de réassurance sera souvent au cœur de la pratique psychomotrice.
Les répercussions cognitives du vieillissement
Il n’existe pas d’âge à compter duquel les capacités cognitives diminuent. On constate seulement le déclin de la vitesse du traitement de l’information avec le vieillissement.
Mémoire
La mémoire des faits anciens n’est généralement pas affectée par le vieillissement, mais la mémoire des faits récents peut l’être. Il y a une diminution des capacités de mémorisation à court terme. Celles-ci sont surtout nécessaires à l’association et l’interprétation des messages sensoriels. Cela entraîne une diminution de la vitesse des réactions d’association. Il y a donc un ralentissement des fonctions comme la planification, le jugement, la prise de décision et la capacité à résoudre un problème, etc. Selon la gérontopsychiatre Nathalie SHAMLIAN, « ce qu’on voit dans le vieillissement normal ce n’est pas tant les pertes de mémoire qu’une plus grande difficulté à retrouver l’information. »
En effet, l’information n’a pas disparue, elle est juste plus difficilement accessible.
En résumé
Le processus de vieillissement suit différents rythmes pour un même sujet, selon qu’il s’agisse du corps physique, de ses objets, du social, etc. Toutefois la conscience corporelle, la capacité d’écoute à soi-même en relation avec l’environnement est généralement, chez la personne âgée, immédiate, fine et permanente.
Le corps de la personne âgée, comme tout corps, est un corps en changement. Sa spécificité est que cette transformation est surtout connotée sur le registre de la perte. Nous l’avons vu, toutes les structures sont touchées par le vieillissement. Les différents canaux de la sensorialité, de la perception, sont affectés. C’est donc aussi la relation aux autres et au monde qui est touchée. De plus, ce qui dans le meilleur des cas était muet devient bruyant (articulations, muscles, etc.). Ces évolutions supposent une adaptation, une modification du comportement. Trouble de la marche, trouble de l’équilibre, trouble spatio-temporel, anxiété, peur de la chute, désinvestissement corporel, etc., sont autant de difficultés liées à l’avancée en âge du ressort de la pratique psychomotrice. Cela explique l’essor et l’engouement de la psychomotricité en gériatrie.
LA PERSONNE HANDICAPEE VIEILLISSANTE
LE CAS DE LA TRISOMIE 21
Ces dix dernières années, avec les progrès en matière d’accompagnement, toute une génération de personnes handicapées mentales a atteint « le troisième âge ». Si vieillir reste aujourd’hui une inquiétude pour beaucoup d’entre nous, nous verrons à travers cette partie pourquoi cela est encore plus vrai pour les personnes handicapées.
Toutefois la notion de vieillissement, nous l’avons vu, est assez floue et la population des personnes handicapées est très hétérogène ! Étudier le vieillissement des personnes handicapées en général parait donc difficile. C’est pourquoi je porterai particulièrement mon intérêt aux personnes handicapées mentales. Tout d’abord, j’exposerai les caractéristiques de cette population, puis je m’arrêterai quelque peu sur la question du vieillissement. Nous verrons ensuite plus spécifiquement les répercussions psychomotrices de l’avancée en âge pour des personnes porteuses d’un syndrome de Down.
Le handicap mental
Données épidémiologiques
Les chiffres sont conséquents. Aujourd’hui, la France compte 3,5 millions de personnes handicapées. Parmi elles, 700 000 se trouvent en situation de handicap mental, ce qui représente 20 % des personnes handicapées. En 1930, l’espérance de vie des personnes handicapées mentales était d’une vingtaine d’années. Aujourd’hui on estime à 180 000 le nombre de personnes handicapées qui atteindront l’âge de 60 ans au cours des dix prochaines années.
Cela est le résultat de l’amélioration constante de la qualité des accompagnements proposés ces dernières années.
Actuellement, d’après l’enquête ES-Handicap menée par Yara MAKDESSI et Bénédicte MORDIER , plus de 12 % des adultes en établissements médico-sociaux ont au moins 55 ans, soit près de 27 000 personnes. En foyer occupationnel, la part des 50 ans ou plus est passée de 26 % en 2006 à 31 % en 2010. « Le vieillissement des handicapés mentaux constitue une donnée démographique nouvelle » constate Janine CAYET, membre du Conseil Economique, Social et Environnemental (CESE). Le vieillissement entraîne de nouveaux facteurs de vulnérabilité pour les personnes handicapées. De ce fait, il apparaît nécessaire de pouvoir l’anticiper. Les psychomotriciens, en tant que professionnels de santé, sont à ce niveau particulièrement concernés. Ils s’attachent donc à repérer l’apparition du vieillissement et à prévenir ses effets.
Proposition de définition
La distinction entre handicap mental (aussi appelé déficience intellectuelle) et maladie mentale n’est pas toujours évidente. D’autant qu’il arrive qu’une personne ayant une déficience intellectuelle soit aussi mentalement malade.
La maladie mentale affecte le comportement des gens. Quand une personne souffre d’une maladie mentale, son comportement diffère alors de sa manière d’agir d’avant la maladie.
La déficience intellectuelle est un état qui handicape une personne depuis toujours. Ce n’est donc pas une maladie.
D’après PIAGET, l’intelligence est la faculté qui permet à l’être humain d’apprendre, de connaître, d’utiliser son savoir, de créer, de s’adapter au monde et à son environnement. Plus une personne est intelligente, plus elle sera flexible. La personne présentant une déficience intellectuelle, selon l’American Association on Mental Retardation (AAMR), « se caractérise par des limitations significatives du fonctionnement intellectuel et du comportement adaptatif.
Cette incapacité se manifeste avant l’âge de 18 ans dans les habiletés sociales, conceptuelles, et pratiques ». Cela va dans le sens de PIAGET.
Evolution des représentations du handicap mental
La définition du handicap dépend pour une bonne part de ce qui est considéré comme normal dans une culture donnée. C’est le résultat du regard porté par la société, croisé à celui que porte la personne handicapée sur elle-même. C’est pourquoi les représentations du handicap ne sont pas les mêmes d’une culture à l’autre et évoluent avec le temps. Dans les sociétés comme la nôtre, les aptitudes intellectuelles sont jugées très importantes. Une personne dont les capacités intellectuelles sont atteintes sera donc considérée comme anormale, handicapée, et de ce fait souvent mise à l’écart.
Au XIX ème siècle, la société a pris conscience qu’elle négligeait son devoir en se contentant de permettre aux personnes handicapées de vivre. Les premiers services furent offerts aux enfants présentant des déficits sensoriels. L’abbé de l’Epée s’intéressa aux enfants sourds et son élève Louis BRAILLE aux enfants aveugles. Un groupe de médecins se préoccupa ensuite des enfants ayant une déficience intellectuelle. Ce fut le cas par exemple de Jean-Marc ITARD avec Victor l’enfant Sauvage de l’Aveyron en 1805. Désiré-Magloire BOURNEVILLE ouvrit en 1893 le premier institut médico-pédagogique. Les grandes figures de ce courant médicopédagogique furent Alfred BINET en France et Maria MONTESSORI en Italie.
S’il se heurta encore à quelques réticences, le mouvement d’intégration des personnes handicapées avança de manière incontestable. Les autorités politiques et l’opinion publique changèrent progressivement leur façon de les considérer. L’évolution des lois en faveur des personnes handicapées et des termes employés pour les désigner en témoigne.
Une première loi notable fut celle qui marqua la création de classes spécialisées s’adressant aux enfants « arriérés », au sein des écoles primaires en avril 1909. Plus tard, conjointement à la création de la Sécurité sociale en 1945, on observa en France un essor des instituts médico pédagogiques. La création des associations de parents d’enfants handicapés va jouer aussi un rôle déterminant dans cette évolution. Avec les travaux de Renée ZAZZO en 1969 et de Roger MISES en 1975 qui permettent une meilleure compréhension des déficiences intellectuelles, les législateurs délaissèrent le problème de l’adaptation au profit de celui de l’intégration et la normalisation.
La dernière loi en date de février 2005, stipule que « toute personne handicapée a le droit à la solidarité de l’ensemble de la collectivité nationale, qui lui garantit, en vertu de cette obligation, l’accès aux droits fondamentaux reconnus à tous les citoyens ainsi que le plein exercice de sa citoyenneté. »
L’Etat se porte garant de l’égalité de traitement des personnes handicapées sur l’ensemble du territoire. Ce principe de non-discrimination implique de faire de la scolarisation des enfants présentant un handicap en milieu ordinaire une priorité. Pour les adultes, cela inclut leur participation à leur projet de vie même lorsqu’ils sont sous tutelle.
Vieillissement et handicap
Les dénominations « personne âgée » et « personne handicapée » sont toutes deux le produit des politiques sociales catégorielles d’après-guerre . Il y a des points communs concernant l’accompagnement et la prise en charges des personnes en situations de handicapet des personnes âgées dépendantes. La première caractéristique commune est la dépendance : le handicap empêche l’autonomie et le vieillissement est essentiellement une perte de l’autonomie.
Le handicap et le vieillissement peuvent aussi tous les deux entraîner la mise à l’écart de la société, l’isolement dans des institutions, le burn out des soignants et le découragement des familles. De plus, l’un comme l’autre peuvent provoquer le détournement des regards. Selon Yves JEANNE , c’est parce que pour beaucoup, nous sommes «englués dans des modèles pseudo-biologiques ». Ceux-ci nous amèneraient à concevoir « la vieillesse et le handicap comme l’altération des facultés, comme le témoignage pitoyable du déclin ».
Le syndrome de Down
Généralités
La trisomie 21 n’est pas une maladie : c’est un handicap mental lié à une anomalie chromosomique. Les personnes porteuses d’une trisomie 21 ont un chromosome 21 en plus, elles possèdent donc au total 47 chromosomes au lieu de 46. Cette anomalie chromosomique a des conséquences sur leur développement physique, intellectuel et physiologique, mais ne les prive pas de compétences.
Les personnes porteuses de cette anomalie présentent des caractéristiques physiques communes : une nuque épaisse et large, un visage rond, des yeux bridés, un nez dont la racine est aplatie, des pieds et des mains plutôt petits avec fréquemment un pli palmaire unique. Leur taille est souvent inférieure à la taille normale (en moyenne 1 m 45 pour les femmes et 1 m 55 pour les hommes). Cependant, comme pour tout un chacun, les traits physiques des personnes porteuses d’une trisomie 21 sont influencés par le bagage génétique reçu de leurs parents.
Les personnes trisomiques ont une déficience intellectuelle généralement légère ou modérée, mais elle peut parfois être grave. Cette déficience se traduit notamment par une difficulté d’abstraction. La notion de temps est donc relativement étrangère à la personne trisomique. Le rapport au présent (et encore plus au futur) est très difficile à appréhender et à penser pour elles. Les personnes trisomiques comprendront plus facilement les choses concrètes avec lesquelles elles peuvent avoir un contact tactilo-visuel. De plus, leur mode de raisonnement n’est pas cartésien. Elles sautent les étapes pour arriver directement à la fin. Les personnes trisomiques sont capables d’apprentissage, mais l’encodage est généralement passif.
Elles apprennent surtout par imitation.
L’acquisition du langage se fait avec retard et son évolution est très variable. Certaines personnes trisomiques gardent des troubles de l’élocution importants qui peuvent contraster avec un bon niveau de compréhension. Si leur discours a une apparence décousue, il a tout de même une logique.
Leur développement psychomoteur est aussi retardé avec des variations individuelles importantes. Les personnes trisomiques présentent une hypotonie (un faible tonus musculaire)accompagnée d’une hyperlaxité ligamentaire. Elles sont généralement vite fatigables
Le vieillissement spécifique de la personne trisomique
En raison de l’amélioration des soins, de l’alimentation et des conditions de travail, les personnes trisomiques bénéficient de l’allongement de la durée de vie globale de toute la population. Mais elles bénéficient aussi de progrès médicaux et paramédicaux qui leur sont propres. Il y a eu par exemple le développement des thérapeutiques médicamenteuses (des neuroleptiques notamment). Un développement également des prises en soins précoces et à l’âge adulte. Et enfin, un essor des psychothérapies et des soins institutionnels.
Les adultes trisomiques sont sujets à la plupart des ennuis et des maladies des gens de leur âge, mais sous certains rapports, ils semblent vieillir plus vite. Les signes de la vieillesse apparaîtraient en moyenne 10 ans plus tôt que dans la population générale. De plus, leur vieillissement présente des spécificités.
Sur les plans affectif et social
Les problèmes de santé mentale sont quatre à six fois plus présents que dans la population générale. Cela peut s’expliquer par la déficience intellectuelle. À mesure qu’elles vieillissent, les personnes trisomiques, comme tout le monde, vivent de plus en plus de pertes et de deuils. Seulement, du fait de leur difficile élaboration, elles éprouvent des difficultés à comprendre ce qui leur arrive. Elles peuvent ne pas être en mesure d’exprimer leurs émotions.
Les personnes trisomiques traduisent alors souvent leurs malaises psychiques en comportements. L’établissement d’un diagnostic associé à la santé mentale est donc à nuancer.
De plus, rares sont les personnes trisomiques qui ont pu constituer une famille, acquérir des biens matériels, etc. Il y a des risques qu’elles soient orphelines de tout lien affectif au décès de leurs parents. De ce fait, quand elles vieillissent, leur patrimoine affectif et matériel est généralement bien moindre que celui d’une personne « normale », tout aussi handicapée parson âge. Les personnes trisomiques sont donc plus vulnérables. Une rupture d’équilibre dans leur environnement peut donc avoir de graves répercussions affectives et sociales.
Sur le plan cognitif : la maladie d’Alzheimer
Chez les personnes présentant une trisomie 21, l’association avec la maladie d’Alzheimer a souvent été évoquée. Dans environ 30 % des cas, chez les 35-40 ans, des chercheurs américains ont mis en évidence une détérioration intellectuelle, des régressions comportementales et émotionnelles et une perte rapide des habitudes apprises, toutes des caractéristiques de la maladie d’Alzheimer. Il ne faut cependant jamais négliger une erreur de diagnostic.
Il est en effet difficile de diagnostiquer une maladie d’Alzheimer chez une personne trisomique, car elle a souvent divers problèmes de santé liés au vieillissement qui peuvent soit limiter le symptôme de la maladie d’Alzheimer, soit en masquer la présence. Les habiletés motrices, langagières, communicatives et intellectuelles d’une personne trisomique jeune sont déjà limitées. Il est donc plus difficile de déceler les changements subtils dans ces habiletés. De plus, les tests d’évaluation servant au diagnostic de la maladie ne tiennent généralement pas compte des spécificités de la personne trisomique.
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Table des matières
Introduction
PREMIERE PARTIE THEORIQUE : Le vieillissement des personnes trisomiques
I. Le vieillissement
II. La personne handicapée vieillissante : la trisomie 21
A. Le handicap mental
B. Le syndrome de Down
DEUXIEME PARTIE CLINIQUE : L’accompagnement en psychomotricité de personnes trisomiques vieillissantes
I. Présentation du foyer occupationnel
II. Le projet
III. L’accompagnement en psychomotricité
IV. L’atelier de prévention
TROISIEME PARTIE : Discussion
I. Bilan et Analyse de ma pratique
II. Quelques réflexions
Conclusion
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