Le travail de l’enseignant ordinaire

Lieux et modes d’intervention

Une des caractéristiques les plus utilisées par les intervenants, en tout cas dans un premier temps, pour décrire leurs modalités d’intervention est le lieu où celle-ci se déroule. Ce paramètre semble particulièrement important pour eux et résulte à chaque fois d’une longue réflexion. RP et MCDI1 travaillent quasiment exclusivement à l’intérieur de la classe, justifiant cette pratique par une volonté de ne pas stigmatiser l’élève qu’ils accompagnent, en allant jusqu’à essayer ne pas montrer au reste de la classe qu’ils sont présents spécifiquement pour cet enfant. Ces deux intervenants souhaitent, dans l’idéal, pratiquer le co-enseignement, bien que de leur propre aveu cela ne soit pas toujours possible : « Une situation idéale ça serait une situation où par exemple la maitresse de classe va intervenir au sein du groupe de façon complétement normale et en suivant son programme et en intervenant comme elle sait le faire et de temps à autres moi je vais prendre la main un court moment de façon opportune durant le cours pour participer également au cours comme si j’étais également maître de classe de telle sorte que les enfants ne distinguent pas vraiment la raison pour laquelle je suis là » (RP) Cependant, ils savent aussi que cette pratique peut être mal perçue par certains enseignants qui ont de la peine à accepter la présence d’un deuxième adulte dans leur salle de classe. Ils ont donc pris l’habitude de s’entretenir avec l’enseignant au début de leur intervention pour le rassurer : « La façon dont je fonctionne, moi, c’est prendre contact avec le prof de classe, lui expliquer mon rôle, mes attentes, lui expliquer que moi je suis pas là pour évaluer ou juger son travail, que je suis pas enseignante ordinaire, que j’ai rien à dire sur sa façon de donner son cours, ça c’est important pour qu’on puisse collaborer correctement » (MCDI1)

Au contraire, MCDI2 et MA ont pour habitude de sortir les élèves de la classe. Bien qu’ils soient conscients du côté stigmatisant que peut avoir cette démarche, ils lui trouvent des avantages : « Je me rends compte qu’ils se sentent pas trop stigmatisés, ils sont plutôt contents au contraire d’aller travailler en individuel […] Donc c’est des moments qui sont agréables pour lui. On prend vraiment le temps de chercher ce qui va l’aider, donc pour lui c’est tout bénéf’» (MCDI2) Cette pratique leur permet non seulement de se concentrer sur l’élève pour lequel ils interviennent, mais aussi d’éviter les problèmes liés au regard d’un adulte sur le travail de l’enseignant ordinaire : « C’est toujours pareil, y en a qui ont des difficultés à avoir quelqu’un d’autre dans la classe. Même moi quand j’avais ma propre classe, j’aimais pas spécialement quand y avait quelqu’un d’autre dans la classe avec moi » (MCDI2) Il est intéressant de noter que l’expérience de MCDI2 en tant qu’enseignante ordinaire influence ses pratiques d’intervenant. L’acceptation par l’enseignant ordinaire de la présence d’un deuxième adulte dans la classe semble donc réellement jouer un rôle central dans le travail des intervenants et dans le choix de leurs pratiques. Les deux modalités d’intervention, à l’intérieur et à l’extérieur de la classe, semblent donc cohabiter au sein d’un même établissement, chacune ayant ses avocats et ses détracteurs. Elles peuvent correspondre aux co-interventions externes et internes identifiées par Tremblay (2012). On préférera ce terme à celui de co-enseignement, car, bien que ce dernier soit souvent souhaité par les intervenants, il implique la co-animation de la classe, ce qui, dans les faits, se rencontre rarement, voir jamais, en particulier au degré secondaire.

Collaboration : éléments de définition

La collaboration dans un contexte professionnel est une notion qui peut être interprétée de manière très personnelle par les différents acteurs. La littérature propose elle aussi de nombreuses définitions, portant soit uniquement sur la présence but commun (Marcel, Dupriez, Bagnoud et Tardif, 2007) soit sur la présence d’une action commune (Mc Ewan, 2003). Benoit et Angelucci (2011), en accord avec Marcel & al. (2007), distinguent la coordination, qui a lieu principalement sur un plan administratif, la collaboration, qui désigne la réalisation d’un projet commun, par exemple une séquence d’enseignement, mais des interventions séparées face aux élèves et la coopération, qui elle seule contient l’idée d’agir ensemble en classe. On peut donc conclure que ces termes ne sont actuellement pas stabilisés puisqu’aucune définition ne fait consensus. Les intervenants interrogés semblent eux-mêmes utiliser le terme « collaboration » de manière polysémique pour désigner tantôt un temps de travail en commun, tantôt la participation des acteurs au projet pédagogique mis en place autour de l’élève. Dans tous les cas, les collaborations sont qualifiées de « bonnes » lorsque certains des critères de Friend et Cook (2010) sont présents : engagement volontaire de l’enseignant, confiance entre les acteurs et relations cordiales.

Préparation en commun des leçons et co-enseignement Les intervenants qui restent en classe, et qui essaient de pratiquer au maximum le co-enseignement, souhaitent généralement être impliqués le plus possible dans la préparation de la leçon. Cependant, on constate que, le plus souvent, cette collaboration se borne à des propositions de l’intervenant, acceptées ou non par l’enseignant ordinaire. « Dans les faits c’est le prof qui maintient son cours et puis moi je suis en classe et j’essaie de retranscrire et restructurer un peu les notions qui sont données en collectif pour que l’élève dont je m’occupe puisse en faire quelque chose. C’est souvent ça » (MCDI1) Là encore, le rapport asymétrique entre l’enseignant ordinaire et l’intervenant se ressent, et se traduit par un glissement des pratiques du co-enseignement souhaité à la co-intervention interne. Il faut noter que ces pratiques peuvent aussi correspondre à l’un des six types de co-enseignement décrit par Tremblay (2013) en se basant sur les travaux de Friend et Cook (2010). Il note cependant que cette configuration, où un des acteurs enseigne pendant que le second apporte un soutien pédagogique, « peut se traduire par une « domination » d’un enseignant sur l’autre » et qu’il est donc nécessaire que les deux acteurs se partagent les rôles. C’est cette absence de partage des rôles qui permet de définir les pratiques décrites par les intervenants interrogés comme de la co-intervention interne et non du co-enseignement. Benoit et Angelucci (2011) citent de nombreuses études montrant que l’intervenant est généralement « relégué à un rôle de subordination », ne pouvant donc être qualifié de co-enseignant.

Les enseignants qui laissent les intervenants prendre part activement à leurs cours semblent être une exception, alors que MCDI1 et RP considèrent que ces situations sont pour eux les conditions de travail les plus efficaces. Elles leurs permettent non seulement d’aider l’élève qu’ils suivent, mais aussi le reste de la classe : « Y a des interventions comme ça ponctuelles pendant le cours mais les élèves aiment assez. Ils aiment avoir un autre point de vue et puis des fois, juste le fait d’avoir d’autres mots pour expliquer, pouf, on voit la petite ampoule qui s’éclaire au-dessus de leur tête, parce que voilà, c’était le mot qui leur manquait » (MCDI1) Beaucoup d’enseignants semblent ne pas percevoir l’intérêt du co-enseignement pour l’ensemble de leur classe. Bien que l’intervenant soit en classe pour un élève en particulier, ils n’exploitent que rarement cette opportunité pour enrichir leur enseignement et améliorer leur propre pratique. Benoit et Angelucci (2011) énumèrent pourtant les bénéfices perçus du co-enseignement, tant par les élèves (approches et styles d’enseignement différents (Wilson et Michaels, 2006), modèle social de collaboration (Scruggs, Mastropier et McDuffie, 2007)) que par les enseignants ordinaires (Scruggs, Mastropieri et McDuffie, 2007) ou les intervenants (Tremblay, 2009). MCDI2 nous donne un indice quant aux raisons de cette réticence vis-à-vis du co-enseignement : « Quand je viens dans la classe, certaines collègues avec qui je m’entends très bien, spontanément, je vais pouvoir intervenir, mais en la laissant maître de sa classe, et y en a d’autres avec qui je sais que vaut mieux que je dise rien, si je veux intervenir, je le fais discrètement, pas devant les élèves » .

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Table des matières

Introduction
Problématique
Méthodologie
Démarche globale
Récolte des données
Méthodes d’analyse
Analyse des données
Pratiques
Lieux et modes d’intervention
Interactions avec l’enseignant ordinaire et choix des pratiques
Collaboration avec les enseignants ordinaires
Collaboration : éléments de définition
Préparation en commun des leçons et co-enseignement
Discussions informelles et réseaux
Régulation du travail de l’intervenant
Collaborer, coopérer ou se coordonner
Différences entre le degré primaire et le degré secondaire
Pratiques inclusives au degré secondaire
Les différences institutionnelles
Les différences en dehors de la classe
Synthèse des concepts
Développement personnel et professionnel
Conclusion
Bibliographie

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