LE TRAVAIL DANS LA CIVILISATION CAPITALISTE

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LES ORIGINES IMMEDIATES

Après des recherches intenses en philosophie, Marx a établi dès 1846, avec le concours d’Engels que le régime économique constitue la base sur laquelle s’érige la superstructure politique.
L’interaction des forces productives et des rapports de production, au cours de la production sociale, forme le fondement dissimulé du développement historique de toute société.
Ainsi est née la conception dialectique et matérialiste du processus historique dont Ludwig Feuerbach et Karl Marx vont s’abriter sous l’aile hégélienne de gauche.

Le matérialisme feuerbachien

Feuerbach

Ludwig Feuerbach est un philosophe allemand. Il est né le 28 juillet 1804 à Landshut. Son père, juriste renommé venait alors d’être nommé professeur à l’université de cette ville.
Feuerbach suit des études secondaires au lycée de Landshut et décide de se consacrer à la théologie protestante. En 1823, il écoute Hegel à l’université de Heidelberg. En 1824, il se rend à Berlin où enseigne Hegel dont il suit les cours jusqu’en 1826.
Il décide alors de renoncer à la théologie au profit de la philosophie. Il termine ses études à Berlin par une dissertation intitulée : De ratione una, universali, infinita qu’il envoie à Hegel accompagnée d’une lettre où il se déclare son disciple.
Feuerbach a proposé une interprétation psychologique de la religion et de la foi et a développé l’une des premières doctrines matérialistes apparues en Allemagne.

Après des études de théologie à Heidelberg et à Berlin, Feuerbach devient l’élève de Hegel dont il critiquera la philosophie idéaliste. Pour lui, la pensée spéculative ne peut rendre compte de la éalitér.
Or, la philosophie est la science de la réalité ell-même, constituée par la nature. La pensée de Feuerbach part d’abord d’une réflexion sur la philosophie de Hegel dont il fut l’auditeur attentif à l’université de Berlin de 1824 à 1826.
La théologie chrétienne et le sentiment religieux raversent l’ensemble de sa pensée. Enfin, Feuerbach réfléchitsur la nature et les sciences naturelles.
Cette nature, Hegel la dédaigne en fondant la réalité sur l’idée et Feuerbach va jusqu’à présenter Hegel comme un théologien dont la doctrine serait : « l’expression rationnelle de la doctrine théologique selon laquelle la nature est créée par Dieu » .
Feuerbach, au contraire, soutient que la religion correspond à un besoin psychologique. La préoccupation essentielle de l’individu étant le moi, le culte de Dieu est, en réalité, un culte dumoi idéalisé.
Ainsi, l’essence de Dieu n’est que l’essence du moi , et toute religion est réduite à une dimension humaine. C’est à partir d’ici que Feuerbach va constituer sa réflexion philosophique que nous allons développer plus bas.

La réflexion philosophique de Feuerbach

Feuerbach est l’un des philosophes du XIX ème siècle qui a osé défier l’ordre établi de la société. En 1830, Feuerbach publia un essai intitulé :
Pensée sur la mort et sur l’immortalité.
Il conclut ici qu’il faut nier l’immortalité personnelle, et il affirme que seule la raison est immortelle. Nous comprenons ainsi sa revendication de l’athéisme23.

Feuerbach mène une vie de gentilhomme campagnard au bonheur simple auprès de sa femme Bertha Loöw qu’il a épousée en 1836.
D’ici, Feuerbach rallie le groupe des hégéliens degauche, ennemis du passé et de l’Etat. Dans leur revue, les Annales de Halle, Feuerbach publie, en 1839 ; sa Contribution à la critique de la philosophie hégélienne où il dénonce le caractère factice et erroné de l’unité de la pensée et de l’être dans l’optique idéaliste de Hegel.
Dans l’une de ses œuvres intitulée L’essence du christianisme , Feuerbach révèle les mystères de la religion, afinque l’homme puisse se connaître lui-même. Ici, il s’oriente vers un naturalisme de plus en plus appauvri.
Cette orientation est précipitée par la polémique,que Dieu n’est plus le reflet des perfections humaines mais de la nature tout entière.
Feuerbach part du fait que la religion rend l’homme étranger à lui-même et dédouble le monde en monde religieux, objetde représentation et en monde temporel.
Son travail consiste à résoudre le monde religieux en sa base temporelle. Il ne voit pas que ce travail une fois accompli, le principal reste encore à faire : « Le fait notamment, que la base temporelle se détache d’elle-même, et se fixe dans les nuages, constituan ainsi un royaume, ne peut s’expliquer précisément que par le déchirement et la contradiction internes de cette base temporelle […] Il faut donc d’abord comprendre cell e-ci dans sa contradiction pour la révolutionner ensuite pratiquement en supprimant la contradiction »24.

Donc, une fois qu’on a découvert, par exemple, que la famille terrestre est le secret de la famille céleste, c’est la première désormais dont il faut faire la critique théorique et qu’il faut révolutionner dans la pratique.
Feuerbach résout l’essence humaine, mais l’essence de l’homme n’est pas une abstraction inhérente à l’individu isolé. Dans sa réalité, elle est l’ensemble des rapports sociaux.
« La conscience de Dieu est la connaissance de soi de l’homme. A partir de son Dieu, tu connais l’homme, et inversement, à partir de l’homme, son Dieu : les de ux ne font qu’un » 25.
Telle est l’essence de la religion en général : conaissance, volonté et amour constituent les prédicats de l’homme qui, incapable de les réaliser par lui-même, il va les projeter hors de lui, dans un treê supérieur qu’il appelle
Dieu.
Dieu est la réplique exacte de l’homme véritable. L’homme est donc essentiellement passé de son état d’aliénation à une pleine réconciliation de lui-même avec lui-même.

Plus important encore que la théorie de la religionFeuerbach est son matérialisme sensualiste, exposé dans lesPrincipes de la philosophie de l’avenir en 1843.
Feuerbach place les individus et leurs besoins matériels au fondement de la pensée sociale et politique. L’individu, tout comme son esprit, sont les produits de leur environnement. La conscience de l’individu est en totalité, le résultat de l’interaction des organes sensoriels et du monde extérieur.
Le principal défaut, jusqu’ici, du matérialisme de tous les philosophes, y compris celui de Feuerbach est que l’objet, la réalité, le monde sensible n’y sont saisis que sous la forme d’ objet ou d’intuition, mais non en tant qu’activité humaine concrète, en tant que pratique, de façon non subjective.
C’est ce qui explique pourquoi l’aspect actif fut d éveloppé par l’idéalisme, en opposition au matérialisme, mais seulement abstraitement.
Karl Marx qui, dans ses Thèses sur Feuerbach, reprend à son compte le concept de l’essence de l’homme auquel se réfère sa théorie de l’aliénation, voient dans la philosophie de Feuerbach, en particulier dans son analyse des besoins, un mouvement vers une interprétation matérialiste de la société dont ils livrent plus tard une formulationdans leur « matérialisme historique ».

Le matérialisme historique est, en effet, un concept dialectique, c’est-à-dire, une conception selon laquelle la société est une réalité en transformation constante.
Dans cette condition, le travail, en tant que moyen et méthode pour transformer la nature, fait donc partie de la praxis26.
Feuerbach n’avait pas pu exposer cette conception dans sa prophétie de l’avenir. Il omettait le raisonnement selon lequel la connaissance a besoin de la théorie que l’on déduit d’elle, afin de mieuxagir dans le monde.

Le matérialisme historique ne se contente pas d’expliquer l’aspect technique qui préside à la production des biens matériels. Mais il arrive surtout à déceler la place détenue par l’homme dans le processus de la production.
Contrairement aux auteurs classiques, Marx et Engels estiment que dans l’étude de l’économie politique, l’accent doitêtre avant tout, mis sur la praxis de la production. Car c’est la production qui détermine en dernière instance la répartition des biens et ses manifestations sociales.
La nécessité constante de la pratique sociale permet l’accumulation des sensations et le développement de la connaissance sensible.
Mais cette connaissance sensible en elle-même, bienqu’elle soit issue de la pratique sociale, n’est pas encore suffisante. Il faut l’intervention de l’esprit humain par le biais de la réflexion et de l’abstraction pour que cette connaissance sensible soit transformée en idée générale entraînant ainsi la transformation qualitative de la connaissance.

Lorsque la connaissance sera transformée, l’homme va chercher à récupérer les valeurs qu’il a données à Dieu. L’homme se réapproprie son essence en comprenant que le rapport entre l’homme et Dieu n’est rien d’autre qu’une projection du rapport qui existe ent re l’individu et l’espèce humaine. Chacun comprend qu’il doit réaliser à son niveau les buts communs de l’espèce tout entière.
Il ne s’agit pas, pour Feuerbach, contrairement, par exemple, à Nietzsche, de détruire les valeurs religieuses. L’athéisme conserve les valeurs traditionnelles. Mais il leur enlève toute caution divine. Enlever Dieu n’est donc pas enlever à l’homme les obligations qu i sont les siennes, mais, au contraire, donner à l’homme la pleine responsabi lité de son destin.
Les valeurs traditionnelles sont simplement pour éliminer tout principe de caractère religieux. Elles en deviennent même plus fortes car elles ne sont plus imposées de l’extérieur mais sont liées nécessairement à l’homme.
Il faut bien voir que pour Feuerbach, la religion a une nécessité historique. Elle est la première étape nécessaire ourp qu’ensuite l’homme prenne conscience de son existence.

L’idéologie hégélienne

La théorie de la dialectique

Georg Wilhelm Friedrich Hegel est un philosophe allemand. Il est né à Stuttgart en 1770 et mort à Berlin en 1831. A Hei delberg et à Berlin, il s’imposa par l’ampleur et le caractère définitif d’un projet qui rend compte de tous les devenirs et vise, à travers l’oppositio n entre le réel et la pensée, à l’accomplissement humain.
Dans le développement de la dialectique, Hegel procéda par contradictions surmontées à travers la logique, à l a philosophie de l’esprit tout en passant par la philosophie de la nature. Ceci n’implique qu’un seul principe « l’idée » qui, au terme du parcours atteint « l’absolu ».

Certes, Hegel est un idéaliste incontestable durantle début du XIX siècle. Il est l’auteur de trois grands ouvrages : La phénoménologie de l’esprit en 1807, La science de la logique en 1812 et Principes de la philosophie du droit en 1821 dont l’influence sera assurée pleinement par ses disciples.
Hegel était reconnu comme le philosophe majeur de l’époque en Allemagne. Ses conceptions dominaient l’enseignement. L’idéalisme philosophique de Hegel est concentré dans l’explication du mouvement dialectique.
« Et le terme dialectique dérive du mot composé grec – dial’egein – qui indique, dès le départ, que son sens n’est passimple ».
La signification la plus courante de l’ « égein», c’est « parler » et le préfixe «dia » indique « l’idée » d’un rapport ou d’un échange . La dialectique est donc, d’après son étymologie, un échange de paroles ou de discours.

Comme forme de savoir, la dialectique est alors la technique du dialogue, ou l’art de la dispute, tel qu’il a été développé et fixé dans le cadre de la pratique politique propre à la cité grecque.
La théorie de la dialectique chez Hegel est une catégorie technique de la philosophie. Elle ne peut pas être strictemen formelle. La dialectique est déjà déterminée, pensée au niveau de son contenu. Le développement des catégories est donc une détermination, une positionde l’Absolu comme Etre.
Si l’Absolu est l’idée ou le savoir, il est d’abord le réel. La dialectique est, par contre, du côté du réel, de la « chose même », avant d’être du côté des représentations particulières que nous pouvons en avoir subjectivement. La dialectique n’est pas alors ce qui nous permet d’échapper au changement et d’accéder au réel, mais ce qui, à l’intérieur même du changement, exprime la présence contrastée du réetl du rationnel.

« Le surgissement d’un terme nouveau, qui sera lui – même impliqué dans une contradiction nouvelle, réalise l’identité de l’Absolu »27.
Hegel nourrissait l’ambition d’élaborer un système philosophique d’une telle envergure qu’il embrasserait les idées de ses prédécesseurs (Platon, …,) tout en livrant le cadre conceptuel né cessaire à une compréhension philosophique du passé et de l’avenir.
Une telle visée n’impliquait rien de moins qu’une explication complète de la réalité elle-même. C’est pourquoi,ourp Hegel, l’objet de la philosophie est la totalité de la réalité.
Ce que Hegel appelle l’Absolu, ou Esprit absolu, c’ est précisément cette réalité en tant que totalité du processus dedéveloppement de toute chose.
Pour Hegel, l’activité philosophique consiste à saisir le déploiement de l’Esprit absolu. Ce qui implique tout d’abord de mettre à jour la structure rationnelle interne de l’Absolu, puis de montrer comment il se manifeste dans la nature et dans l’histoire humaine, et enfin, d’expliquer la nature téléologique de l’Absolu, en d’autres termes, de montrer la fin ou le but auquel tend l’Absolu.
La dialectique hégélienne se caractérise toujours arp la prise en compte de l’histoire, du processus de formation, et ses renversements qualitatifs. Prise comme contradiction du sujet pratique, de l’impossible objectivation de sa liberté (thèse), réduite à la écessitén de sa cause (antithèse) et de sa résolution dans la prise en compte et le dépassement de cette nécessité par une liberté avertie (synthèse),la dialectique est devenue une technique ou une méthode.
Le sujet libre n’est pensable qu’à la soumission au x déterminations de l’objet qui lui fait obstacle. Le sujet ne reste pas toujours le même mais il est toujours, d’abord, absorbé par la situation avant de pouvoir en prendre conscience et s’y orienter.

On ne peut donc plus porter attention qu’à un énoncé qui contient sa propre critique, son projet abstrait et les médiations de sa réalisation concrète.
Hegel ajoute à ces conditions en affirmant ainsi : « Notre liberté se limite à notre négativité en acte qui, même dans la négation de la négation ne saurait être entièrement positive ni abolir le temps ». La dialectique hégélienne a nourri les idées des andsgr penseurs de son époque, en particulier Karl Marx, Friedrich Engels, etc.
A sa mort en 1831, ses disciples se divisèrent rapidement en hégéliens de gauche et hégéliens de droite. Sur leplan théologique et politique, les hégéliens de droite livraient une interprétation conservatrice de son œuvre. Ils mettaient en avant la compatibilité de la philosophie hégélienne et du christianisme.
Quant aux hégéliens de gauche, ils finirent par adopter une position athéiste. En politique, nombre d’entre eux devinrent des révolutionnaires. Ce groupe de l’aile gauche hégélienne, historiquement très important, comprenait Ludwig Feuerbach, Bruno Bauer, Friedrich Engels et Karl Marx.

Engels et Marx furent particulièrement influencés par l’idée hégélienne du mouvement dialectique de l’histoire.Mais ils remplacèrent l’idéalisme philosophique de Hegel par le matérialisme.

Son aspect idéaliste

Karl Marx, en tant que matérialiste, a une vision out à fait contradictoire à la vision de l’idéaliste sur le rapport de la matière à l’idée. A cet effet, il attaque particulièrement la pensée deHegel. Marx écrit : « Le mouvement de la pensée qu’il personnifie sous le nom de l’idée est le démiurge de la réalité…»29. Dans ce sens, pour Hegel, c’est l’idée qui existe bien avant toutes choses. Ainsi, elle est le créateur de toutes les formes d’existence comme celle du monde et celle de la nature de l’homme.
En d’autres termes, la philosophie hégélienne apprend que c’est de l’idée que toutes formes d’existence trouvent leur origine. A défaut, tout restera vide. Bref, l’idée est la première source de l’existence du monde et de la matière, selon la vision hégélienne.

Cependant, Hegel considérait les objets et leur développement comme de simples copies réalisées de l’idée. Ce quiveut dire, en dernière analyse, que la formation des objets matériels n’est rien d’autre que le produit de la manifestation extérieure du mouvementde la pensée désignée sous le nom d’idée.
En face de cette circonstance, Marx n’hésite pas à apporter son attaque contre la pensée hégélienne. Il dit :
« Pour moi, au contraire, le mouvement de la pensée n’est que le reflet du mouvement réel transporté dans le cerveau de l’homme » 30.
Ainsi, il n’est donc pas étonnant si Karl Marx a critiqué la philosophie hégélienne, puisque d’après la vision matérialiste, celle de Marx y comprise, la nature avait déjà son existence bien avant l’existence de l’idée et que cette dernière n’est rien d’autre que le produit, la copie du mouvement extérieur de la nature. Ce qui indique ainsi que l’idée est une créature de la nature, en ce sens que le développement de l’idée épend nécessairement du développement du mouvement réel de la nature.
En parfait accord avec la philosophie matérialiste de Marx, Engels, en l’exposant dans l’ Anti-Dühring , écrivait : « L’unité du monde ne consiste pas en son être… L’unité réelle du monde consiste en sa matérialité,et celle-ci se prouve… par un long et laborieux développement d e la philosophie et de la science de la matière. Jamais, et nulle part, il n’y a eu de matière sans mouvement et il ne peut y avoir… Mais si l’on demande ensuite ce que sont la pensée et la conscience et d’où elles viennent, on trouve qu’ell es sont des produits du cerveau humain et que l’homme est lui-même un produit de la nature, qui s’est développé dans et veca son milieu ; d’où il résulte naturellement que les productions du cerveau humain, qu’en dernière analyse, sont aussi des produits de la nature, ne sont pas en contradiction, mais en conformité avec l’ensemble de la nature » .
Dans ce passage, il est clair qu’Engels a confirmé le caractère indépendant et primordial de la matière en ce sensque l’intégrité du monde ne signifie nullement l’achèvement de l’œuvre de l’ essence du monde.

Au contraire, l’intégrité du monde consiste surtoutdans le caractère matériel du monde lui-même. Cette vision est donc rouvée,p partagée par une longue investigation de la philosophie moderne, comme celle du matérialisme, plus particulièrement, et de la science de la nature.
La philosophie matérialiste affirme donc l’importance majeure de l’existence de la nature avant tout. Malgré tout cela, bien que l’idée soit une créature de la nature, cela ne veut pas dire que prendre en considération la fonction du cerveau humain signifie une contradiction avec le matérialisme. Au contraire, parce que d’après le naturaliste Thomas Henry Huxley : « Tant que nous observons et pensons réellement, nous ne pouvons jamais sortir du matérialisme » .
Le principal défaut de tout matérialisme jusqu’ici,y compris celui de Feuerbach, est que l’objet extérieur, la réalité etle sensible ne sont saisis que sous la forme d’objet ou d’intuition, mais non en t ant qu’activité humaine sensible33.
Ces thèses sont essentielles et constituent le renversement effectif de la dialectique de Hegel. Elles refusent le point de vue contemplatif de l’Absolu pour tenir compte de la finitude de l’énonciation. Elles s’orientent enfin sur la réalité pratique du travail constituan réellement le monde humain.

En effet, au-delà de l’idéologie, c’est l’intention nalité qui constitue l’objet et, en dernière instance, le rapport social. Marx est parti de là.

LA NOTION DE TRAVAIL

LES ORIGINES DU TRAVAIL

La signification du mot travail est unique : servitude, assujettissement, etc. Par contre son interprétation est très diverse. C’est pour cette raison que nous examinerons dans ce présent chapitre les différentes origines du mot travail, pour aboutir, en dernier lieu, à l’avènement de la propriété privée.
La propriété privée mutile, en effet, le sens propre du travail et martèle à coups de marteau l’existence humaine. Nou s appréhendons au mieux l’assertion susmentionnée par l’absence, dans la propriété privée, du principe selon lequel « à chacun selon son travail ».

Définition et analyse du travail

Le sens du mot travail est très large. Pour mieux appréhender la signification, il nous semble utile de savoir son sens étymologique.
L’origine du mot suggère l’idée d’assujettissement, de torture. L’étymologie du mot français « travail » nous renvoie au latin tripalium qui désignait un instrument à trois pieux destinés à maintenir les bœufs ou les chevaux difficiles pour les ferrer.
Le substantif travaillor qui en sort directement et qui prend rapidement la forme « travailleur » signifie bourreau, tourmenteur. On dit communément qu’une femme qui accouche est « en travail ».
Le mot latin labor désigne donc à la fois le travail et la souffrance, comme aussi le mot français « peine ». Le travail, en effet, exprime à l’origine, la servitude de l’homme qui ne parvient à survivre dans la nature que par un effort douloureux.

Le travail est « le signe de l’aliénation » de l’homme perdu dans une nature différente ou hostile à laquelle il faut coûte que coûte s’adapter pour subsister. Ainsi, pour les Grecs, le travail exprime la misère de l’homme et non sa noblesse.
De même, dans la tradition chrétienne, le travail ste une punition.
Après le péché originel, Dieu dit à Eve :
« Tu enfanteras tes enfants en travail », et à Ada m :
« Tu mangeras ton pain à la sueur de ton front » 34.
Le travail est donc, loin d’être une simple activité volontaire au même titre que le jeu, il s’impose à l’homme comme une obligation, une contrainte. Il conditionne par conséquent la surviede l’homme.

Mais le travail va lui-même renverser le sens de la situation métaphysique dont il est issu. Car le travail est également le fondement de l’existence humaine. Le monde du travail diffère pratiquement du mythe de l’âge d’or, de l’époque heureuse où l’homme n’avait pas besoin de travailler.
Travailler désigne toute activité, dès l’instant qu’elle est socialement rentable. Ainsi, travaillent, non seulement l’ouvrier, l’employé ou le cadre, mais aussi l’enfant qui apprend à l’école, l’artist e qui peint son œuvre, le sportif professionnel qui « joue » au football…
En outre, le travail apparaît comme quelque chose d’essentiel pour l’homme car le travail conditionne sa vie. Le travail est l’activité rationnelle de l’homme grâce à laquelle, il transforme les obje ts de la nature et les adapte à ses besoins.

L’homme a donc besoin de travailler quelles que soient les conditions de la vie. Le travail est le propre de l’homme.
Au temps de Karl Marx, le travail occupe une place immense dans la société. Le travail est dans l’optique de Marx et li disait : « Le travail détermine la nature de l’homme »35.
Le travail est, dans ce sens, le moteur du développement culturel et socio-économique des sociétés. Le travail est doncla base et le fondement de toute la structure fondamentale de la race humaine.
Selon Marx, le travail détermine les conditions matérielles de l’existence, assurera également le développement culturel, idéologique et intellectuel de l’homme.

Mais avant d’être vécu comme une activité libératrice, le travail apparaît ordinairement et essentiellement comme une contrainte, sans doute, parce que l’homme ne s’y soumet pas volontiers, mai s par nécessité.
La notion de travail n’acquiert un statut philosophique que très tardivement avec Rousseau, Hegel et surtout Marx. Le travail existait pourtant, mais les philosophes ne s’approchent pas assez de la question.
C’est le cas de Platon quand il écrit de façon détaillée l’éducation souhaitable pour les soldats et les dirigeants ; ainsi que l’organisation de leur vie quotidienne, alors qu’il demeure plus ou moins muet en ce qui concerne les artisans producteurs qui sont précisément, leseuls citoyens travaillant au sens propre du terme.
On admet fréquemment que cette absence de la notionde travail sur le plan philosophique s’explique par des conditions philosophiques. Comme toutes les conditions n’étaient pas remplies, il fallait d’abord qu’elle se manifeste pratiquement comme étant une notion universelle, c’est-à-dire quand fut socialement instaurée l’idée de salariatface à une économie de marché ou plus exactement, à partir de la deuxième moitié du XIX siècle.
On pourra se demander, en outre, s’il ne convient pas de considérer également ces conditions historiques d’un point de vue particulier, en comprenant que le mutisme de la philosophie était favorisé par le fait que son activité de type intellectuel ne pouvait être ocialements perçue comme un travail.

Toujours est-il que c’est d’abord l’économie politique qui va tout modifier. En effet, au XVIIIème siècle, Adam Smith, philosophe et économiste écossais, fait du travail le concept central de son système, alors que ses prédécesseurs admettaient la richesse commeprovenant seulement des quantités d’or et d’argent disponibles.
La philosophie s’apercevra ensuite que le travail, malgré que la double tradition grecque et chrétienne qui faisait du travail une punition et une souffrance, est d’abord ce qui définit l’homme. C’est une idée exprimée fortement par Hegel et surtout par Marx en ajoutant ceci : « Le travail constitue un refus de la pure et simple animalité naturelle » .
D’un autre côté, le développement de l’économie detype capitaliste fait naître une analyse qui ne tarde pas à montrer que le salaire perçu par le travailleur est toujours inférieur à la valeur qu’il produit.
Ainsi, peut-on constater que l’homme se détermine par le travail, mais il perd tout de même sa liberté et sa personnalité dans et par le travail : d’où l’ambiguïté et la complexité de ce terme.
Dans les paragraphes suivants, la notion de travail sera traitée d’une manière plus « superstitieuse ». C’est pour cette raison que nous avons pensé mieux d’aborder cette notion par une interprétation biblique.

Interprétation biblique du travail

L’histoire religieuse nous enseigne, à travers la Bible que l’homme est la dernière création de Dieu. Et celui-ci créales êtres humains, c’est-à- dire l’homme et la femme à sa propre image.
Pour leur faire plaisir, à savoir, à Adam et à Eve, il mit à leur disposition un joli et grand jardin au pays d’Eden. Il mit également au centre de ce jardin, l’arbre de vie, un arbre qui donne la connaissance du bien et du mal.
Par mesure de prudence et de discrétion, Dieu interdit aux deux êtres humains de cueillir les fruits de cet arbre, encore moins de les manger.
Mais un jour, la femme tint une conversation avec le serpent qui lui dit : « Dès que vous en aurez mangé, vous serez comme lui, capables de savoir ce qui est bien ou mal »37.
Persuadée de tout ce que le serpent lui dit, ne pouvant pas résister aux fruits de l’arbre qui étaient bien jolis à regarder, qu’ils devraient être bons, qu’ils donnaient envie d’en manger pour acquérir un savoir plus étendu, la femme en prit un et le mangea avec son époux afin d’acquérir la connaissance du bien et du mal.
A peine avaient-ils mangé ces fruits que la colère de Dieu se manifesta. L’homme fut saisi de peur ! En effet, sa connaissance s’est élargie et il s’est immédiatement rendu compte qu’il étaittout nu.

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Table des matières

INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE : LES ORIGINES DE LA PHILOSOPHIE
MARXISTE
CHAPITRE I : LES ORIGINES LOINTAINES
I.- Le matérialisme de Démocrite
1.- Qui est Démocrite ?
2.- Le matérialisme de Démocrite
II.- Le matérialisme épicurien
1.- La vie d’Epicure
2.- La philosophie matérialiste d’Epicure
CHAPITRE II : LES ORIGINES IMMEDIATES
I.- Le matérialisme feuerbachien
1.- Feuerbach
2.- La réflexion philosophique de Feuerbach
II.- L’idéologie hégélienne
1.- La théorie de la dialectique
2.- Son aspect idéaliste
DEUXIEME PARTIE : LA NOTION DE TRAVAIL
CHAPITRE I : LES ORIGINES DU TRAVAIL
I.- Définition et analyse du travail
II.- Interprétation biblique du travail
III.- L’avènement des propriétés privées
CHAPITRE II : LE ROLE DU TRAVAIL DANS LA SOCIETE
I.- Le travail, apanage de l’homme
II.- Définition de l’homme par le travail
III.- Le travail et la nature
IV.- Travail et développement social
TROISIEME PARTIE : LE TRAVAIL DANS LA CIVILISATION CAPITALISTE
CHAPITRE I : LE TRAVAIL COMME SOURCE DE DIVISION SOCIALE
I.- Le problème d’aliénation
1.- L’aliénation économique
2.- L’aliénation religieuse biblique du travail
II.- La lutte des classes
CHAPITRE II : MARX ET LA BOURGEOISIE
I.- Une idéologie dans l’impasse
II.- La dictature prolétarienne
III.- L’avènement du communisme
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE

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