Le territoire comme lieu privilégié de transmission des savoirs

LE TERRITOIRE COMME LIEU PRIVILÉGIÉ DE TRANSMISSION DES SAVOIRS

Exclusion coloniale des femmes autochtones

Pour plusieurs sociétés autochtones du Canada, les rapports entre les genres étaient égalitaires avant le contact avec les Euro-canadiens et le pouvoir social et économique des femmes s’exerçait de concert avec celui des hommes (Gouvernement du Canada, 1996; Ohmagari et Berkes, 1997; Rude et Deiter, 2004; V an Woudenberg, 2004). Cette « égalité » ne signifiait pas nécessairement que les droits et les responsabilités de chacun étaient identiques. Il était plutôt question d’une relation de réciprocité fondée sur le respect et la complémentarité des rôles qui permettait le maintien de l’équilibre social (LaFromboise et al., 1990; Lajimodiere, 2011; Sayers et MacDonald, 2001).

Venus de sociétés relativement homogènes, où les rapports de genre étaient plus ou moins figés et les rôles sociaux profondément « genrés », les premiers observateurs européens n’ont pas été en mesure de saisir les nuances des rapports sociaux de genre qui structuraient les différents peuples autochtones et ont résumé cette complexité à des catégories dichotomiques :patriarcat, matriarcat (Boyer, 2009; LaFromboise et al., 1990; Suzack et al., 2010). Par exemple, l’établissement en grand nombre des colons Euro-canadiens a réduit l’accès des hommes Wabanakis aux terres de chasse et des femmes Wabanakis aux marais, endroit privilégié pour l’approvisionnement en matières premières pour la fabrication de paniers.

Durant la deuxième moitié du XIXe siècle, les hommes ont graduellement envahi la sphère de la fabrication des paniers faute d’accès à d’autres ressources, privant ainsi les femmes de leur principal moyen de subsistance et les obligeant à négocier avec les hommes leur relation à la terre. L’accomplissement du rôle des femmes et le respect qu’elles en tiraient ont par conséquent été m1s en péril (Van Woudenberg, 2004). La colonisation, d’abord religieuse puis politique, a voulu homogénéiser les rôles sociaux et les aligner sur le modèle européen (Mihesuah, 2000). Les sociétés que les observateurs européens ont qualifiées de matriarcales ou matrilinéaires, où les femmes jouaient un rôle important dans les prises de décisions «politiques » ont été particulièrement touchées par cet effort de normalisation. La Loi sur les Indiens a été le principal instrument de ce projet colonial de restructuration des relations des genres et de subordination de la femme à l’homme, notamment parce qu’elle impose le modèle des droits patriarcaux et institutionnalise la discrimination envers les femmes autochtones (Anderson, 2009; Boyer, 2009; Nahanee, 1997; Van Woudenberg, 2004).

En effet, jusqu’en 1985, l’article 12 (1) b de la Loi sur les Indiens stipulait« qu’une femme indienne qui se marie à un non-Indien cesse d’être une indienne » (Séguin, 1981, p. 251 ). Ces femmes et les enfants issus de cette union devaient donc quitter leur famille et leur communauté, le mari non-Indien ne pouvant pas habiter sur la «réserve». Inversement, un homme Indien qui mariait une femme non-Indienne conservait son statut et son droit de résidence, sa femme et ses enfants recevaient respectivement un plein statut et tous les droits qui l’ accompagnent.

Les femmes autochtones et la recherche

L’exclusion des femmes autochtones réduit les savoirs utilisés dans les mécanismes de prise de décision (McGregor, 2008). Une partie du blâme revient aux pratiques coloniales qui ont réservé l’espace politique aux hommes. Cela dit, il convient de noter que les femmes autochtones ont longtemps été – et sont encore souvent – absentes de la recherche (Green, 2007). C’est souvent à partir des seules données recueillies auprès des hommes que les chercheurs généralisent les résultats de leurs recherches et dressent le portrait des communautés autochtones Lorsque la question des femmes autochtones est abordée, c’est souvent en relation aux problématiques des femmes non autochtones (Markstrom, 2008; Silvey, 1999). Ce peu d’intérêt pour l’expérience des femmes autochtones a même conduit à ce que plusieurs recherches menées par des femmes autochtones soient jugées non valides car biaisées (Green, 1993; LaRocque, 1996). Depuis plus d’une dizaine d’années, divers protocoles et lignes directrices pour la recherche en contexte autochtone ont été développés, tant au Canada qu’ailleurs dans le monde par des organismes subventionnaires et des organismes autochtones.

À titre d’exemple, l’Énoncé de politiques des trois Conseils (CRSH, CRSNG et IRSC) publié en 2010 et révisé depuis, comporte un chapitre dédié à la recherche avec les peuples autochtones. En parallèle, l’Assemblée des Premières Nations du Québec et du Labrador a publié en 20 14 une deuxième édition de son Protocole de recherche. Ce dernier s’adresse autant aux communautés des Premières Nations qu’aux chercheurs et il propose une série de valeurs et de principes ainsi que des exemples de projets de recherche pertinents.

Ainsi, les principes PCAPMD (propriété, contrôle, accès et possession des données de la recherche), élaborés en 1998 par le Comité directeur de l’Enquête régionale longitudinale sur la santé des Premières Nations et des !nuits (APNQL, 2014), sont considérés comme des principes de base qui doivent guider toute recherche avec les peuples autochtones, incluant la recherche avec les femmes autochtones. Les Lignes directrices en matière de recherche avec les femmes autochtones (AFAQ, 2012) ont été développées dans cette logique et proposent d’autres modalités, qui précisent certaines particularités de la recherche avec les femmes autochtones (Tableau 2.1 ). L’un des pnnctpes des Lignes directrices (AF AQ, 2012) veut que les chercheurs contactent et consultent la communauté ou l’organisme autochtone concerné avant d’entreprendre une recherche. Cette consultation qui, rappelons-le, est aussi reconnue par les trois conseils de recherche du Canada comme une composante de l’éthique de la recherche en milieu autochtone (CRSH et al., 2014), sert à déterminer (1) si la recherche répond à des besoins particuliers des communautés, (2) si elle rencontre les conditions des protocoles locaux, (3) quelle sera l’implication des femmes autochtones dans les différentes étapes de la recherche, et ( 4) quelles sont les conditions pour l’obtention du consentement (collectif et individuel). Ces quatre conditions distinguent d’emblée les recherches conduites avec les femmes autochtones de celles en milieu non autochtone, même celles conduites auprès de femmes.

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Table des matières

AVANT-PROPOS
LISTE DES FIGURES
LISTE DES TABLEAUX
RÉSUMÉ
CHAPITRE I  INTRODUCTION GÉNÉRALE  
1.1 Les peuples autochtones et le lien au territoire
1.2 Systèmes de savoirs autochtones
1.3 La recherche avec les femmes autochtones
1.4 Cadre théorique
1.4.1 Gouvernance
1.4.2 Cogestion
1.4.3 Consultation
1.5 Les Premières Nations au Québec
1.6 Aire d’étude
1.7 Objectifs de la thèse
CHAPITRE II CO-ÉLABORATION D’UN OUTIL DE COLLECTE DE DONNÉES : UNE ÉTUDE DE CAS AVEC DES FEMMES ATIKAMEKW
2.1 Résumé
2.2 Introduction
2.2.1 Exclusion coloniale des femmes autochtones
2. 2. 2 Les femmes autochtones et la recherche
2.3 Méthodologie
2.4 Résultats et discussion
2.5 Discussion des résultats avec les participantes à la recherche
2.6 Réciprocité et dialogue .
2. 7 Principes de recherche
2.8 Conclusion
2.9 Remerciements
2.10 Références
CHAPITRE III PERCEPTIONS DES FEMMES ATIKAMEKW DE LEUR RÔLE ET DE LEUR PLACE DANS LA GOUVERNANCE DU TERRITOIRE ET DES RESSOURCES NATURELLES
3.1 Résumé
3.2 Introduction
3.3 Le rôle des femmes autochtones dans la gouvernance
3.4 Questions et objectifs de recherche
3.5 Le peuple Atikamekw
3.6 Méthodologie
3.6.1 Approche méthodologique
3.6.2 Analyse thématique
3.7 Résultats
3.7.1 Gestion et occupation du territoire
3.7.2 Changements sur le territoire
3.7.3 Mode de vie
3.7.4 Accès au territoire
3.7.5 Économie et travail
3.7.6 Transmission des savoirs et des valeurs
3. 7. 7 Responsabilités et leadership des femmes
3.7.8 Leadership politique des femmes
3.7.9 Résolution de conflit
3.7.10 Complémentarité homme/femme et rôle des hommes
3.7.11 Vision d’avenir.
3. 8 Discussion
3. 8.1 Gestion et occupation du territoire
3.8.2 Changements sur le territoire
3.8.3 Mode de vie
3.8.4 Accès au territoire
3.8.5 Économie et travail
3. 8.6 Transmission des savoirs et des valeurs
3.8.7 Responsabilités et leadership des femmes
3. 8. 8 Leadership politique des femmes
3.8.9 Résolution de conflit
3.8.10 Complémentarité hommes/femmes et rôle des hommes
3.8.11 Vision d’avenir
3.9 Conclusion
3 .1 0 Remerciements
3.11 Références
CHAPITRE IV LE TERRITOIRE COMME LIEU PRIVILÉGIÉ DE TRANSMISSION DES SAVOIRS ET DES V ALE URS DES FEMMES A TIKAMEKW
4.1 Résumé
4.2 Introduction
4.3 Contexte de la recherche
4.4 Méthodologie
4.4.1 Approche inductive
4.4. 2 Analyse thématique
4.5 Résultats
4.5.1 Organisation sociale
4.5.2 Grossesses et accouchements
4.5.3 Sages-femmes
4.5.4 Lieu d’origine
4.5.5 Nom traditionnel
4.5.6 Éducation
4. 5. 7 Pensionnats
4.6 Discussion
4.6.1 Organisation sociale
4.6.2 Grossesses et accouchements
4.6.3 Sages-femmes
4.6.4 Lieu d’origine
4.6.5 Nom traditionnel
4.6.6 Éducation
4.6.7 Pensionnats
4. 7 Conclusion
4.8 Remerciements
4.9 Références
CHAPITRE V CONCLUSION GÉNÉRALE 
5.1 Gouvernance de la recherche
5.2 Gouvernance du territoire
5.3 Le territoire : lieu de transmission des savoirs
5.4 Limites de l’étude
5.5 Pistes de recherche
5.6 Références de l’introduction et de la conclusion générales

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