LE TELEPHONE FIXE A DOMICILE : UN OUTIL DE COMMUNICATION OU UN OBJET DE DECOR
Le téléphone fixe, après ses preuves dans le fonctionnement du secteur de la production était un outil de famille que beaucoup rêvaient d’acquérir. Mais ce fut en une période où le médium constituait un véritable luxe pour la population du Sénégal. Aujourd’hui les conditions d’accès ont connu des améliorations notoires et sa qualité a beaucoup évolué. Bien que son attraction ait diminué, il est présent dans les ménages et se prête à plusieurs emplois.
Le téléphone fixe à domicile : un accès commun
Le téléphone filaire est un appareil bien usité dans la localité de G.Y. même si le niveau de vie n’est pas fameux. L’échelle de fréquentation définie par les usagers en est une illustration. En effet, quoiqu’il soit difficile de cartographier ce phénomène, le niveau d’utilisation qui ne dépasse souvent pas le cadre familial laisse comprendre que beaucoup en disposent. A G.Y. 40,8% ménages ont le téléphone fixe. Donc plus de la moitié des foyers n’ont pas d’accès à domicile. Mais il n’est pas dérisoire de penser que cela convient à ce groupe aux conditions sociales assez défavorables. On pourrait, en se basant sur l’âge des lignes, faire une petite chronologie de l’installation de ce réseau téléphonique. Trois phases marquent cette liaison. De 1985 à 1990, de 1990 à 2000 et de 2000 à 2007.
Phase 1 : 1985-1990, le début
Avec une insertion de 3,3%, le téléphone est très peu associé à la vie de relation des populations. A cette période, le produit n’avait pas une telle ampleur, car la société était à ces premières années de fonctionnement. Son antécédent, l’Office des Postes et des Télécommunications (OPT) avait montré ses limites dans sa mission de développer ces moyens de communication au Sénégal. Son éclatement en 1972 en deux organismes (l’Office des Postes et des Caisses d’Epargne et le Société Nationale des Télécommunication) amorça une grande « révolution technologique » au Sénégal.
Phase 2 : 1990-2000, l’éveil
Dans cet intervalle, le changement est net. De 3,3%, la liaison passe à 18,3% des ménages dans le quartier. Le pouvoir de la promotion et la fin effective du monopole de l’opérateur historique du secteur des télécommunications (Sonatel Sa) ont permis ce progrès.
Phase 3 : 2000 -2007, le grand rush
C’est le développement le plus important du téléphone fixe dans cette localité. La privatisation et la libéralisation totale (19 juillet 2004) survenues dans le secteur ont incité une promotion dans le sens d’une concurrence au grand bonheur des consommateurs. Ainsi de nouvelles options sont lancées avec keurgui Khéweul et Keurgui Confort initiant le prépaiement. L’accès à une ligne est alors adouci et le fixe devient un instrument pour tous. Actuellement on peut estimer que 40,8% des ménages dans notre site d’étude ont un abonnement téléphonique fixe quelle que soit la sorte de ligne pour laquelle ils ont opté. « La réalité c’est qu’il y a plus de lignes téléphoniques à Manhattan que dans toute l’Afrique subsaharienne » déclarait Thabo Mbeki, vice-président de l’Afrique du sud, devant le G7 venu dans son pays réfléchir sur « la Société de l’information et le développement ». Nous tenterons dans cette section d’identifier ces détenteurs de lignes en nous basant sur les données des enquêtes menées sur les lieux .
Profil des propriétaires de téléphone fixe
Pour mieux identifier les bénéficiaires de lignes téléphoniques fixes, une analyse comparative nous paraît nécessaire si l’on suppose que ces derniers peuvent se distinguer par leurs statuts fonciers, leurs revenus mensuels et leurs autres sources de revenus.
Statut foncier et téléphonie fixe
Ce sont les propriétaires d’habitations qui, le plus souvent, se payent le luxe d’une ligne fixe. Des raisons peuvent expliquer ce phénomène. Il faut considérer que les locataires sont le plus souvent des travailleurs venus chercher fortune avec leur famille et l’entretien d’une ligne fixe ferait des charges de trop.
Revenus mensuels et téléphonie fixe
La relation entre les revenus mensuels et la détention d’une ligne fixe n’est pas directe. En effet, autant il y a des ménages dont les responsables n’ont aucun revenu et qui ont une ligne fixe, autant il y a des salariés qui en ont. Ce qui est difficile à saisir si l’on sait que toutes les lignes en service nécessitent l’acquittement d’une facture mensuelle. Plusieurs critères favorisent alors l’acquisition de l’outil dans ce quartier.
Téléphonie fixe et autres sources de revenus
Il ressort de cette comparaison que les responsables bénéficiant d’autres sources de revenus ont dans leur majorité un appareil fixe. Ce qui est analogue à l’analyse précédente. On se rend compte alors que l’acquisition du fixe est très influencée par l’importance des revenus mensuels. Une typologie pourrait ressortir de l’usage que l’on réserve à l’outil.
Les usages de la téléphonie fixe
Les fonctions usitées
Le téléphone peut servir, dans les demeures, à diverses applications. A G.Y. il est soumis à deux principaux emplois. Ce sont l’émission et la réception d’appels et la réception d’appels uniquement. Ce dernier choix est la mode chez ces populations car 57,14% des ménages abonnés ont un répondeur seulement. Cette option est souvent une stratégie de contrôle de la consommation. Les autres émettent des appels de leurs appareils mais tout en ayant un œil sur le médium pour limiter les fréquentations. Il n’est pas rare de trouver dans un salon ou une chambre à coucher, un appareil logé dans une boite avec un cadenas de sécurité. Tout de même, ces derniers utilisent effectivement leur outil pourrait-on dire, mais avec une particularité bien de chez nous. Dans la plupart des cas, c’est le chef qui peut se permettre d’appeler à partir de l’appareil et pour certains on n’y appelle que pour régler des urgences ou dans des cas particuliers. Cet outil de famille comporte donc un problème d’accès qu’il serait important d’expliquer.
Le rayon d’accès
L’accès le plus fréquent s’étend à la taille de la famille. Ainsi 63,26% des bénéficiaires utilisent leur téléphone au niveau de la famille. Des raisons peuvent favoriser la réduction de ce rayon de fréquentation. Il est difficile de cartographier le phénomène téléphone dans un quartier mais les avis des populations ont deux tendances. Dans bien des cas, c’est la densité du téléphone dans la zone qui est à l’origine de ce rayon limité. Des propriétaires avancent parfois, qu’il fut une période où leur appareil était l’objet de communication de tout leur entourage mais maintenant chaque domicile a sa ligne fixe. Le second facteur de cette réduction est le développement de la téléphonie mobile. Ceux qui peuvent se procurer un cellulaire font l’essentiel de leur liaison téléphonique sur leur mobile. Donc malgré le caractère limité de ce pouvoir d’attraction, le téléphone fixe reste un outil d’usage communautaire. Le voisinage a accès à l’appareil pour la réception d’appel sans échange aucun, si ce n’est un petit « merci ». Ce qui est un trait de solidarité bien vécu dans la société sénégalaise que le téléphone revivifie. Ainsi 31,7% des lignes sont utilisées et par la famille et par l’entourage.
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Table des matières
INTRODUCTION GENERALE
Problématique
Méthodologie
PREMIERE PARTIE : LE CADRE GEOGRAPHIQUE
CHAPITRE I : LE SITE DE GRAND YOFF
1. Genèse et formation du quartier de Grand Yoff
2. Grand Yoff, un quartier complexe
CHAPITRE II : LA POPULATION
1. Les caractères sociodémographiques des ménages
2. Les équipements des ménages
3. Les contraintes des ménages
DEUXIEME PARTIE : L’UTILISATION DU TELEPHONE FIXE
CHAPITRE I : LE TELEPHONE FIXE A DOMICILE : UN OUTIL DE COMMUNICATION OU UN OBJET DE DECOR
1. Le téléphone fixe à domicile : un accès commun
2. Profil des propriétaires de téléphone fixe
3. Les usages de la téléphonie fixe
CHAPITE II : LES ACCES SEMI-PUBLICS, LES TELECENTRES PRIVES
1.Répartition spatiale
2. La fréquentation des télécentres
TROISIEME PARTIE : LE TELEPHONE PORTABLE
CHAPITRE I : LE TELEPHONE MOBILE ET LA SOCIETE, VERS UNE IDENTIFICATION DES USAGERS
1. Une forte présence dans les ménages
2. Le téléphone mobile, un outil pour chacun
3. Les conditions de procurations du mobile, et la question de la souscription auprès des opérateurs
CHAPITRE II : LES DIFFERENTS USAGES ET LA CONSOMMATION MOYENNE
1. Les principaux services du téléphone mobile en usage à Grand Yoff
2. Divers sens des appels et une valeur mobile de la consommation
3. Les conséquences de l’usage du cellulaire sur ses détenteurs
4. Interface téléphone fixe/téléphone mobile
CHAPITRE III : LES « TECHNICIENS » DU TELEPHONE MOBILE
1. Particularité de ces acteurs
2. Boutiques phone et espace d’exercice
3. Les contraintes du service des « boutiques phone »
CONCLUSION GENERALE
BIBLIOGRAPHIE