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La mise en tension du virtuel et du réel comprise comme un dialogue
Il ne s’agit pas ici de prétendre démêler la complexité de ce que signifie un dialogue relativement aux travaux qui ont cherché à le définir, mais plutôt d’expliciter la manière dont nous nous saisissons de ce concept. Tout d’abord, les travaux qui se sont construits autour du modèle de la conception proposant un dialogue entre le virtuel et le réel semblent se rapprocher des travaux de Bakhtine. Ils permettent d’aborder le processus de conception comme un processus finalisé qui relie un acte de la pensée (celui de conceptualiser un nouvel objet) à celui de sa production (e.g. Béguin, 2010), et ceci par la création d’un dialogue qui se construit tout au long du processus. L’approche dialogique développée par Bakhtine à la fin des années 1920 recouvre les échanges verbaux entre un locuteur et un allocutaire au minimum, considérant l’acte de langage pas seulement comme une mise en mots de la pensée du locuteur, mais aussi participant au processus de construction de cette pensée. Le dialogue se définit alors à travers son énoncé (l’unité de l’échange verbal, aussi appelé le dialogue réel) et son orientation dialogique (un énoncé peut être orienté « (i) vers des énoncés réalisés antérieurement sur le même objet de discours, et (ii) vers la réponse qu’il sollicite », Bres, 2005, p. 51-52). Ainsi le dialogue, selon Bakhtine, ne permet pas seulement de comprendre l’objet du discours, mais aussi de le constituer et de le transformer. Bakhtine comprend alors l’objet du dialogue comme une production de l’échange verbal en cours de construction. C’est la mise en dialogue d’énoncés qui permettrait de relever leur signification. En conséquence, le dialogue tel qu’il est envisagé ici peut être considéré comme « développemental » pour deux raisons. Tout d’abord, le dialogue ne résulte pas seulement de la structure de l’échange verbal, mais bien ce qu’il crée de nouveau. Ensuite, le dialogue ne se termine jamais puisqu’il est toujours dans un rapport avec le réel, et en cela, il est sujet à des développements (Bakhtine, 1978).
Il est aussi important de noter que les dialogues n’ont pas toujours été étudiés du point de vue des interactions verbales. Effectivement, certains auteurs considèrent d’autres formes du dialogue que la forme discursive. Par exemple, les travaux de Morin (1988) s’intéressent également à la notion de dialogique en s’appuyant moins sur des échanges verbaux qui permettent des rencontres entre des énoncés, mais plus sur l’existence d’interactions entre deux pôles contradictoires, cherchant à dépasser ces contradictions et proposant de lire ces deux pôles contraires comme faisant partie d’une unité. De la même manière, nous pouvons citer les travaux de Schön (1983, 1987; Schön & DeSanctis, 1986) qui parle de conversation réflexive avec la situation pour souligner le dialogue qui s’instaure entre le concepteur et la situation. Enfin, des travaux envisagent des dialogues entre un (ou des) interlocuteur(s) et des objets intermédiaires ainsi qu’entre les interlocuteurs autour de ces objets intermédiaires (e.g. Béguin, 2004, 2013 ; Béguin, Cerf & Prost, 2012). Ces derniers travaux introduisent l’idée que les dialogues permettent une convergence entre deux pôles, dans le cadre de la conception, pensés en lien avec (1) une volonté relative au futur de ce qui est à concevoir et de comment concevoir et (2) ce qui est possible de réaliser dans les conditions données par le réel.
Dans le cadre de cette thèse, il s’agit de porter une attention particulière aux dialogues qui se jouent entre les énoncés, considérés comme le contenu des échanges, et moins à ceux identifiés dans l’alternance d’échanges verbaux entre des interlocuteurs. Les analyses construites dans le cadre de cette recherche auront pour objet le contenu des échanges verbaux, produits au cours d’entretiens réunissant un ou plusieurs agriculteur(s) et intervenant(s). Il s’agit de comprendre les dialogues comme des orientations d’un énoncé vers un autre, c’est-à-dire ce qui se crée entre des contenus d’échanges verbaux qui se rencontrent, se répondent au travers de mises en tensions entre une volonté relative au futur et le réel de l’agriculteur. Il s’agit alors de considérer que chaque acteur de la conception porte en lui un dialogue interne, qui met en tension le virtuel et le réel, et explore aussi ces tensions dans des dialogues externes avec d’autres interlocuteurs.
C’est à partir de cette compréhension du concept de dialogue que nous parlerons alors du modèle dialogique de la conception, entendu comme la mise en tension de deux pôles, ici le réel et le virtuel.
Enrichir le modèle dialogique du concevable pour mieux penser les temps de la conception
La section précédente permet de comprendre le processus de conception dans une vision dialogique. Elle appuie l’idée selon laquelle le processus de conception est orienté vers le futur et ancré dans le présent. A l’inverse, la mobilisation du temps passé, compris comme le temps déjà déroulé du processus de conception, semble peu saisie dans les travaux alors que la mise en oeuvre d’un tel processus semble y faire référence nécessairement par la sollicitation des connaissances et expériences des travailleurs et/ou des concepteurs.
L’enjeu de cette section est alors d’identifier les travaux qui se sont intéressés à la dimension du passé, à la compréhension des dialogues qui se jouent entre le passé – présent – futur, et à soutenir ces dialogues. Ainsi, cette section se focalise dans un premier temps sur la mobilisation du passé dans le processus de conception qui passe notamment par l’élaboration de l’expérience du travailleur. Une deuxième sous-section propose de s’intéresser à des travaux d’historiens qui soulignent l’indivisibilité des moments du temps. Enfin, la dernière sous-section donne à voir des supports méthodologiques pour outiller notre démarche de compréhension et de soutien du processus de conception d’un système de travail d’agriculteurs.
Comprendre le processus de conception déjà déroulé : mobilisation du passé
Le concept de réflexivité et de pratique réflexive semble pertinent (e.g. Argyris & Schön, 1974 ; Schön, 1983) pour comprendre comment le passé peut être mobilisé par un travailleur. Etymologiquement, la réflexivité fait référence au retour sur soi : une personne, engagée dans une activité réflexive, se regarde agir pendant l’action (reflection-in-action) au présent et a posteriori (reflection-on-action) afin de développer une réflexion sur ses propres actions passées (Schön, 1983). Alors, les travaux de Schön permettent de mieux comprendre la construction de l’expérience d’un individu. L’expérience, qui renvoie directement au passé (Pastré, 2008, p. 231), continue de se construire a posteriori de l’action réalisée, « par la capacité du sujet à revenir sur son action pour l’analyser et pour la construire à un autre niveau » (Beckers, 2009, p. 5). Pour Schön, il ne s’agit pas de reproduire ce qui s’est déjà passé pour apprendre de son expérience, ou bien celle d’un autre, mais bien de s’engager dans une « transformation réflexive de l’expérience » (Schön, 1988, p. 25) que nous comprenons de la manière suivante : le travailleur, une fois son action passée, porte un regard sur celle-ci lui permettant de mieux se l’approprier, la comprendre, l’analyser et parfois de la modifier ou bien de modifier son environnement. Cela fait écho au concept d’ »activité constructive », reprenant le terme de Samurçay et Rabardel (2004), ainsi qu’à celui d’activité méta-fonctionnelle3 qui permettent une analyse critique de l’activité par le travailleur lui-même : le travailleur met à distance une expérience, il tire des leçons de sa propre expérience, construit une meilleure connaissance de lui-même dans l’action et ainsi accroît son potentiel d’action, sa capacité d’arbitrage et sa réactivité face aux aléas (Falzon & Teiger, 1995 ; Mollo & Nascimento, 2013). Dans un processus de conception, et plus largement dans une situation de travail, il s’agirait d’apprendre ou d’avoir appris de son expérience pour en tirer des leçons pour le futur. Il s’agit de comprendre les traces des situations de travail et de l’activité passées, qui permettent d’accéder à la dimension du réel, comme une base importante pour le travailleur qui peut s’en ressaisir et construire des repères pour penser les situations de travail futures dans un processus de conception. Nous comprenons alors que s’attaquer à la question du passé dans le cadre d’un processus de conception doit être compris relativement au futur et inscrit dans l’activité du travailleur. Par ailleurs, des auteurs ont souligné que l’action réalisée doit être analysée avec les actions non réalisées qui s’y rattachent dans le sens où le comportement « est une infime part de ce qui est possible. L’homme est plein à chaque minute de possibilités non réalisées » (Vygostki, 1994, p. 41, cité par Clot, 2001, p.256). Autrement dit, les alternatives non vécues par le travailleur semblent extrêmement importantes pour comprendre celles que le travailleur a choisi de vivre. Nous comprenons que, de la même manière que les situations vécues par le travailleur, celles-ci puissent fournir au travailleur des repères pour penser ses situations de travail futures. Alors, le passé peut être mobilisé par le biais de situations vécues par un travailleur mais également par celles qu’il a choisi de ne pas vivre ou qu’il n’a pas réalisé parce qu’il ne disposait pas de ressources pour le faire.
Finalement, nous retenons d’une part que pour construire et mettre en oeuvre sa volonté relative au futur, le travailleur-concepteur revient sur des actions passées et plus largement sur le processus de conception qu’il a déjà mis en oeuvre, ou bien sur les alternatives qui auraient pu être mises en oeuvre. Alors, le pôle du réel du modèle dialogique de la conception, que nous choisissons de comprendre à l’aune du présent de l’activité du travailleur mais aussi à l’aune du passé de son expérience, serait une façon d’intégrer ce retour sur le passé de l’agriculteur-concepteur sur son processus de conception, pour construire la suite. D’autre part, nous retenons que le travailleur portant un nouveau regard sur son passé est inscrit dans une activité au présent, et que ce retour en arrière est intimement lié à une projection dans le futur.
La sous-section suivante cherche à souligner ce en quoi les mises en tension entre les pôles du processus de conception incarnent des dialogues entre le temps passé (le processus de conception déjà déroulé), présent (l’agriculteur met en oeuvre son processus de conception et conçoit son système de travail), et futur (le processus de conception qui reste à venir).
Le processus de conception structuré par l’indivisibilité du temps
Cette sous-section explicite deux mouvements du temps que nous relevons comme importants pour progresser dans la compréhension du processus de conception selon une vision dialogique. Il s’agit (i) du mouvement chronologique et (ii) du mouvement circulaire du temps.
A propos du (i) mouvement chronologique, il décrit une orientation obligatoire des situations vécues par un individu d’un temps passé vers un temps futur, en passant par le présent (e.g. Chesneaux, 2004 ; Gaudart, 2013). Ce temps, considéré à l’échelle du processus de conception, ancre l’agriculteur en train de concevoir (présent), dans un processus chronologique et linéaire, depuis un point A (début du processus de conception avec une vision initiale de l’objet à concevoir, passé) vers un temps futur défini par la volonté relative au futur de l’agriculteur. Chesneaux, (2004) propose une représentation originale du temps chronologique : non pas par une flèche rectiligne et unidirectionnelle comme le suggère la représentation du temps dans le processus de conception (Figure 1, p. 30), mais sous forme de parabole (Figure 2).
Quels outils pour comprendre et intervenir dans un processus de conception en tenant compte de l’indivisibilité du temps ?
Cette sous-section s’intéresse d’abord aux outils d’aide à la conception (Cours d’action et Change Laboratory), inscrits dans une démarche développementale, et qui tiennent compte des moments du temps, voire qui cherchent à stimuler leurs articulations. Un autre outil, celui du récit, retient notre attention en cela qu’il semble être révélateur du dialogue qui se joue entre les trois moments du temps. Plus que cela, il s’agit d’un support identifié comme pertinent, dans les échanges construits avec les agriculteurs, pour comprendre et soutenir l’explicitation de leur processus de conception passé, présent et futur, dans un dialogue entre le virtuel, le réel et le concevable.
Des outils d’aide à une conception développementale
Il s’agit ici d’aborder (1) la manière dont le Cours d’Action mobilise le passé puis (2) la manière dont le Change Laboratory mobilise l’articulation du passé, présent et futur dans l’accompagnement que ces deux approches font des transformations du travail.
(1) Dans un premier temps, ce travail bibliographique a relevé une préoccupation pour le moment passé dans les travaux qui s’appuient sur le concept du cours d’action6 (CA). Ils s’appuient principalement sur des observations de situations de travail, ainsi que des récits et commentaires des travailleurs rapportés par le biais d’auto-confrontations (e.g Theureau & Filippi, 1994 ; Theureau & Jeffroy, 1994). Nous développons ici deux de ces méthodes, directement pensées dans un lien avec le temps, et susceptibles de soutenir la construction de notre méthodologie de recherche et d’intervention. Tout d’abord en lien avec le passé, la méthode analytico-régressive consiste à analyser le chemin parcouru par le travailleur, c’est-à-dire la totalité du CA en partant du présent. Plus exactement, cette méthode « consiste à effectuer un découpage en unités plus ou moins larges d’une chronique de cours d’action. Elle est analytique en ce sens qu’elle s’attache à découper en parties la totalité du cours d’action jusqu’à un instant donné, et régressive parce qu’elle part de l’état d’avancement du cours d’action à cet instant et revient en arrière sur les différents moments de sa réalisation » (Theureau & Filippi, 1994, p. 552). De cette manière, cette méthode fait le lien entre le présent et le passé dans le sens où le découpage du CA se fait depuis le présent, jusqu’au début du CA considéré. A l’inverse, la méthode synthético-progressive s’intéresse à la construction du CA depuis son début, dans son orientation vers le futur, ceci jusqu’au présent. La méthode créée dans le cadre de l’intervention menée au cours de cette thèse tend à suivre cette orientation. Plus précisément cette méthode « consiste à parcourir la chronique dans son déroulement temporel, d’où son caractère progressif, et cherche à rendre compte du pas suivant à partir du chemin parcouru jusqu’à un instant donné, comme si l’on ne connaissait pas la suite, la fin de l’histoire. Elle vise à s’assurer que les unités significatives dégagées dans un premier temps ne livrent pas seulement une reconstruction a posteriori de l’activité, mais sa construction au fur et à mesure » (Ibid, p. 553).
Le récit : mobiliser le passé dans le temps présent pour penser le futur
Il s’agit maintenant de s’intéresser aux récits. Le récit est ici compris comme pouvant révéler et soutenir la mobilisation des moments du temps, passé – présent – futur, en valorisant celle de l’expérience dans les processus de conception. Via cette préoccupation pour les moments du temps et pour l’expérience, nous pensons que le récit peut être révélateur des dialogues qui se créent entre le virtuel, le concevable et le réel, et ainsi des processus de conception des agriculteurs. Cette sous-section propose dans un premier temps de comprendre en quoi le récit permet de saisir le moment passé, et plus que cela, d’élaborer une ou des expérience(s) par celui qui le met en mots. Dans un deuxième temps, elle montre que le récit favorise l’élaboration de l’expérience dans le présent de la narration, en vue de « voir venir », dans le futur. Peu de recherches en ergonomie se sont saisies de ce concept (e.g. Decortis, 2008 ; Beaujouan 2011). Ce travail de thèse propose de s’en saisir dans le contexte particulier de la conception pour en faire un socle de sa méthodologie de recherche.
Le récit pour donner une signification à l’expérience, relativement au présent
Le récit fait référence au présent de l’énonciation ; c’est à partir de ce présent que peuvent être repérées les références au passé et au futur (Sassier, 2007, cité par Varro, 2008). De plus, « un récit est un compte rendu de l’expérience ou d’évènements qui sont mis dans une séquence temporelle et qui véhiculent une signification » (Decortis, 2008, p. 32). Autrement dit, « dans chaque énoncé, il y a production (et non reproduction) de nouvelles significations » (Varro, 2008, p. 4). Il constitue ainsi un outil qui permet de construire des significations, de donner du sens à l’expérience de celui qui raconte, ainsi que de développer une conscience de soi au fil des expériences vécues. Bruner (1996) parle du récit comme d’un véhicule de l’élaboration de la signification. Plusieurs auteurs parlent du récit à travers deux dimensions : la représentation linéaire et épisodique du récit, et sa dimension « configurante » (Carcassonne & Servel, 2009). Cette deuxième dimension renvoie à ce qui « transforme la succession des évènements en une totalité signifiante qui […] fait que l’histoire15 se laisse suivre » (Ricoeur, 1983, p. 17). Cette dimension révèle le sens qui émerge de l’expérience à travers le récit. Ainsi, « suivre le déroulement d’une histoire (ordre chronologique), c’est déjà réfléchir sur les événements en vue de les embrasser en un tout signifiant (ordre configurationnel) par un acte de jugement réflexif » (Adam, 1984, p. 17). S’il semble admis que le récit puisse permettre de donner à voir l’expérience, et plus que cela, d’élaborer l’expérience, la question suivante se pose : de quelle expérience le récit rend-t-il compte ? Rogalski et Leplat (2009) proposent de distinguer deux types d’expérience. Tout d’abord les expériences épisodiques qui correspondent à des épisodes singuliers mémorisés, vécus ou non par le locuteur (pouvant être transmis par une autre personne), et contextualisés. Les expériences épisodiques sont transmissibles par le discours et le récit est donc un moyen de diffusion de ces expériences. Ensuite, les expériences sédimentées correspondent aux expériences répétées dans leur variabilité, c’est-à-dire que ce sont les variations rencontrées dans une même situation qui font l’expérience, moins sa singularité. Ce type d’expérience est plus difficile à déceler dans le récit. En effet, les expériences sédimentées ont une part « incorporée » et non verbalisable qui les rend difficilement accessibles.
De plus, le récit constitue l’identité narrative de celui qui parle. « La narration a une fonction pratique : raconter son expérience par le récit est un moyen de ressaisir le temps et de transformer ce rapport en identité narrative » (Beaujouan, 2011, p. 71). Médiateur entre le temps vécu par un individu et le temps qu’il raconte (e.g Carcassonne & Servel, 2009), le récit est « la construction d’une réalité chronologique, où des évènements passés sont racontés à partir d’un présent partagé par les co-énonciateurs (enquêté/enquêteur) » (Varro, 2008, p. 5). Certains auteurs parlent de l’activité narrative comme d’ « une activité permettant activement, par le récit ou au travers d’un histoire, de donner du sens et de rendre compte de son expérience de façon narrative. » (Decortis, 2008, p. 29)
Bruner (1990) a proposé un ensemble de critères pour déterminer ce qu’est un récit : « Il doit avoir une séquence ; contenir une intrigue ou une séquence qui doit véhiculer du sens. Il peut être réel ou imaginaire. Il doit contenir une tension qui demande une résolution. […] Un récit dirige l’attention vers l’expérience personnelle ou subjective. »
(Decortis, 2008, p. 33). De plus, le récit a une autre caractéristique, celle du coda. « Il s’agit d’une évaluation rétrospective : « Qu’est-ce que tout cela peut bien vouloir dire ? ». Ce dernier élément sert aussi à faire revenir le lecteur ou l’auditeur du « là-bas et alors » du récit à l’ « ici et maintenant » du moment où il est raconté. » (Bruner, 2002, p. 21).
D’autres auteurs ont cherché à caractériser un récit, et à lui donner des frontières, notamment en ergonomie. Dans ses travaux, Beaujouan (2011 ; Beaujouan & Daniellou, 2012 ; Beaujouan, Coutarel & Daniellou, 2013) cherche à caractériser ce qui relève du récit professionnel à visée didactique, dans un contexte de séminaires destinés à des ergonomes en formation. Dans ce cadre, il retient sept critères pour caractériser les récits professionnels à visée didactique. Nous présentons dans la suite ces critères, tout en les discutant au regard de notre cas d’étude ciblant des processus de conception dans un contexte de TAE. Tout d’abord, le récit doit être finalisé. L’élaboration du récit doit venir répondre à un objectif externe au contenu du récit. Il doit présenter au minimum une succession temporelle de deux actions16, constituant une histoire, rapportée par le locuteur. Nous comprenons que l’auteur fait référence à des actions réalisées. Cependant, le contexte de conception dans lequel se situe ce travail de thèse impliquerait de porter aussi un intérêt à des actions envisagées. Par ailleurs, la succession des actions dans un récit ne suffit pas. Il est nécessaire que ces actions « s’inscrivent dans un projet commun […et présentent] non seulement un enchaînement chronologique (venir les unes après les autres), mais également un enchaînement causal, autrement dit naître l’une de l’autre. » (Beaujouan, 2011, p. 18). Ceci implique que le récit ait un début, un milieu et une fin : « Le commencement de l’action renvoie aux causes et aux desseins qui y sont associés, les effets de ces causes et les difficultés rencontrées dans l’exécution des desseins en sont le milieu, le dénouement et la résolution de ces difficultés correspondent à la fin de l’action » (Ibid, p. 18-19). Se positionner dans un contexte de TAE compris comme un processus de conception, questionne cette idée de « fin du récit » pour deux raisons : (1) nous nous intéressons au processus de conception en cours, ce qui implique que la fin du processus n’existe pas encore, et (2) nous nous interrogeons sur le fait que ce processus de conception, dans le cas particulier de la TAE, ait une fin. Ensuite, le récit doit concerner au moins un même acteur dans la narration des différentes actions. Les intérêts (de sécurité, de productivité, de santé, de qualité…) de cet acteur doivent être impliqués. De plus, le récit doit décrire « ce qu’il advient à l’instant (t+n) des prédicats d’être, d’avoir et/ou de faire qui caractérisent » le professionnel à l’instant t. (Ibid, p. 28). De la même manière, on ne sait pas si le (t+1) peut être situé dans le temps futur, ce qui nous semblerait important dans un contexte de processus de conception. Le récit doit également proposer une intrigue. Il y a une « mise en intrigue du récit par la présence d’une ou plusieurs complications (obstacles, difficultés rencontrées par les protagonistes) aboutissant à leur résolution (ou tentative de résolution) en fin de récit » (Ibid, p. 28). Nous pensons que la volonté relative au futur, dont il est question dans le processus de conception, participe aussi à la construction de l’intrigue. Enfin, l’auteur propose un dernier critère, celui de l’évaluation finale qui, dans le cas particulier de ses travaux, « a une finalité didactique » (Ibid, p.28). Dans notre cas, nous ne cherchons pas l’évaluation finale que pourrait porter l’agriculteur sur son processus de conception et l’état de son objet de conception, d’autant plus que ce travail de thèse propose d’analyser l’objet en cours de conception. Cependant, nous pourrions porter une attention aux évaluations des agriculteurs qu’ils donnent à voir au fil de leur processus. Alors, si ces critères étaient un moyen pour permettre de comprendre et d’identifier ce qui relève du récit, ils semblent très orientés par la visée didactique et portent moins sur le pôle virtuel et concevable que le réel. Ainsi, la sous-section prochaine cherche à valoriser la dimension du récit relative au futur.
Le récit orienté vers le futur
Le récit n’est pas à comprendre uniquement dans la narration d’une expérience passée qui s’actualise dans le présent de la narration, mais également dans sa dimension ancrée dans le futur. Plusieurs auteurs soulignent sa dimension relative à ce qui pourrait advenir : le possible, les perspectives, les anticipations, etc. que nous mettons en lien avec le concevable. Le récit consiste aussi à raconter quelque chose qui est en train de se produire, ou bien se produira (Engel, 1999). Dans ce sens, d’autres travaux (e.g. Carcassonne & Servel, 200917), s’appuyant sur Schütz18 (1987), expliquent que « l’expérience porte aussi en elle des anticipations d’événements plus éloignés dans le temps avec lesquelles l’expérience présente est censée être en relation. Dans la pensée courante, ces anticipations et ces attentes ont fondamentalement les mêmes structures typiques qui ont été bonnes jusqu’alors pour nos expériences passées et qui sont incorporées dans notre réserve de connaissances disponibles » (Ibid., p. 206). Schütz (1987) considère qu’il y a peu de différences entre la rétrospection et la prévision puisque « l’événement est considéré comme s’étant produit :
– sur le mode effectif dans le passé pour le cas de la rétrospection où l’action répond alors à des motifs ‘en parce que’,
– sur le mode quasi-existant dans un passé anticipé (au futur antérieur) dans le cas de la prévision ; la prévision étant de ce point de vue une rétrospection anticipée, qui « dépend de notre réserve de connaissances à disposition avant l’événement, et pour cette raison laisse ouvert ce qui va irrévocablement être rempli par l’occurrence de l’événement anticipé lui-même » (ibid, p. 216). Dans ce cas, l’action obéit alors à des motifs en vue de » (Carcassonne & Servel, 2009, p. 4).
Dan Slopin, spécialisé dans l’étude des relations entre langage et pensée explique qu’il n’est pas possible de mettre en mots une expérience sans que celle-ci soit embrassée par une perspective. D’autant plus que la verbalisation va généralement favoriser certaines (Dan Slopin, 2000, cité par Bruner, 2002, p. 66). Ceci fait fortement écho à la proposition de ce travail de thèse d’ajouter un pôle concevable au modèle dialogique de la conception.
Le système de travail : des composants impactés par et/ou impactant le travail
Carayon et Smith (2000), dans une approche de l’ergonomie alliant l’ergonomie de l’activité et les Human Factors, parlent explicitement de système de travail pour penser à la fois la santé du travailleur et sa performance. Ils ont élaboré un modèle de système de travail, présenté en Figure 5, dans lequel le travailleur est au coeur du système.
D’après la Figure 5, le système de travail comprend cinq éléments : une ou plusieurs personnes, leurs tâches, les outils et technologies avec lesquels elles interagissent, l’environnement physique et l’organisation. Tous ces éléments interfèrent au sein du système et s’influencent mutuellement. Ces interactions ont alors un impact, positif ou négatif, sur la santé, la performance, la sécurité et la qualité de vie au travail du travailleur (Carayon & Smith, 2000). Autrement dit, chaque élément d’un système est une variable qui a un impact sur le travail et le travailleur (Ashby, 1958 ; Leplat & Cuny, 1977). Le travailleur doit alors effectuer son travail en tenant compte de toutes ces variables. Leplat et Cuny (1977), sans parler de système de travail, ont proposé un modèle de régulation de l’activité, dit le schéma des cinq carrés, pour approfondir la compréhension de ces variables et leurs impacts sur le travailleur et son activité, ainsi que leurs répercussions pour l’entreprise. Ce schéma, repris dans de nombreuses recherches en ergonomie (e.g. Leplat, 2000 ; Falzon, 2013) et représenté en Figure 6, propose de distinguer la tâche (ce qu’il est demandé au travailleur de faire pour atteindre des objectifs prédéterminés) de l’activité du travailleur (ce qu’il fait réellement pour atteindre les objectifs) selon un certain nombre de déterminants qui sont les conditions internes (expérience, historique, âge, santé, compétence, etc.) et externes (règles, environnement de travail, caractéristiques de la société, etc.) du travailleur.
Ces conditions internes et externes auront un impact sur le travailleur et sur son activité, ce qui aura des conséquences pour le travailleur et dans notre contexte, pour l’exploitation agricole. Finalement, nous proposons d’une part que l’ensemble des éléments pouvant avoir un impact sur le travailleur, son activité et plus largement sur la performance de l’entreprise, constitue des composants du système de travail de ce travailleur. D’autre part, nous retenons du schéma des cinq carrés que, par son activité : (1) le travailleur a un impact direct sur le système dans lequel il opère, voire (2) il se charge, à un certain niveau, de la gestion du système (Valot, Weill-Fassina, Guyot & Amalberti, 1995). Ceci est d’autant plus vrai lorsque le système est dans une dynamique désorganisée, c’est-à-dire que « les règles, procédures et expériences acquises ne correspondent pas aux contextes visés et ne peuvent jouer efficacement leur rôle de guide dans la structuration de l’activité » (Ibid., p. 276). Dans le contexte de TAE, nous comprenons que les agriculteurs qui s’engagent dans le processus de conception que représente la TAE voient leur système de travail perturbé et doivent construire de nouvelles règles et procédures, mais surtout élaborer de nouvelles expériences de ce système en cours de conception. Les agriculteurs sont ainsi de véritables régulateurs de leur système de travail.
Pour poursuivre la construction de notre compréhension de ce que pourrait être un système de travail en ergonomie de l’activité, nous avons analysé des travaux qui utilisent ce terme, mais sans le définir explicitement. C’est par exemple le cas des travaux de Vidal-Gomel, Olry, Lanoë et Jeanmougin, (2007) qui donnent le périmètre du système de travail d’un livreur de béton. Celui-ci comprendrait le lieu du chantier ; la centrale à béton ; l’entreprise de livraison du béton ; un travailleur cible (le livreur du béton) ; d’autres travailleurs et personnes présentes lors de la livraison ou en lien avec des ressources matérielles et humaines, envisagées comme des déterminants de l’activité ; et des règles. Les auteurs évoquent également des « caractéristiques du chantier » (e.g. des lignes électriques présentent sur le lieu du chantier) qu’ils voient comme des déterminants des risques à gérer pour les travailleurs (Vidal-Gomel & al., 2007). Ces auteurs ne donnent pas seulement à voir les éléments qui composent le système de travail du livreur de béton, ils relèvent aussi un ensemble d’interactions entre ces éléments. Ces interactions semblent se créer en référence aux tâches (e.g. déchargement), à l’activité des travailleurs (e.g. des échanges d’informations, des prises de décisions, de l’entraide), au savoir et savoir-faire des travailleurs. Ces auteurs parlent également du temps (délai, durée, etc.), de marges de manoeuvre, de risques, d’erreurs et d’incidents.
Le système de travail conçu au fil des expériences dans la progression d’un processus continu et finalisé
Dans un second temps, nous avons élargi notre compréhension du système de travail en mobilisant d’autres travaux issus des théories de l’activité. Dans ses travaux, Engeström (1987) comprend l’activité dans sa dimension systémique et comme une activité humaine collective-conjointe complexe. Selon ce cadre, l’activité est « un système associant l’individu et la communauté à laquelle il appartient » en cela que l’activité est « médiée par des artefacts porteurs d’une dimension historique et culturelle, qui rattachent la pensée de l’individu à la société » (Eyme, 2017, p. 496). Ce cadre nous invite à prendre l’activité elle-même comme un système « dynamique » qui doit nécessairement être constitué des composantes individuelles et collectives (Eyme, 2017), « résultant d’un développement historique et […qui s’inscrit] dans un processus d’évolution continue » (Ibid, p. 497). Cette activité (ou ce système), est orientée « vers un objet, qui se définit aussi par le social et la culture dans lesquels agit l’individu » (Ibid). Le travailleur est parfois confronté à des situations qui l’amènent à transformer l’objet de son activité, soit de son système, qui en retour, vient le transformer. Ainsi, Engeström parle de système d’activité, pensé en relation avec d’autres systèmes d’activité, et représenté en Figure 7.
Le système de travail dans la transition agroécologique : transverse à de multiples autres systèmes
Cette section propose de s’éloigner un peu de la notion de système de travail que nous tentons de définir pour s’intéresser à celle du système de manière plus générale. Cette proposition bibliographique nous amène alors dans une première sous-section à nous intéresser d’abord à la notion de système dans le contexte de transition agroécologique, puis à son fonctionnement dans le temps du processus de conception. La seconde sous-section permet alors de mieux cerner l’utilisation de cette notion en agronomie et surtout de construire une proposition des systèmes que le système de travail pourrait recouvrir.
La transition agroécologique : penser la pluralité de systèmes dynamiques en transformation
Le contexte de transition agroécologique : penser plusieurs systèmes
Dans un contexte de développement durable, que nous ramenons au contexte de TAE dans lequel est construite cette thèse, Thatcher et Yeow (2016) proposent de parler de sustainable system-of-systems pour développer une approche de l’ergonomie qui puisse valoriser la compréhension des relations existantes entre l’homme et la nature (Thatcher, 2013). Cette approche nous semble intéressante en cela que penser le system-of-systems (SoS) permet de saisir des déterminants beaucoup plus larges que ceux considérés à l’échelle du travail de l’agriculteur (Wisner, 1985) et confirme notre intuition qu’il est nécessaire d’élargir notre compréhension du travail de l’agriculteur en TAE à celle de son système de travail. D’une part, ce concept permet de souligner la co-existence de plusieurs systèmes et de les penser ensemble, et d’autre part, que le SoS est défini principalement par les relations hiérarchiques entre ces systèmes, relativement au niveau de complexité du système considéré et de son échelle géographique.
Tout d’abord, le SoS (e.g. Thatcher & Yeow, 2016) requiert plusieurs conditions préalables pour exister en tant que tel. Maier (1996) en définit cinq :
– Les différents composants du système doivent fonctionner indépendamment les uns des autres et, en même temps, apporter des bienfaits au système mondial ;
– La nécessité pour un fonctionnement indépendant signifie en pratique que le composant peut sortir du SoS ;
– Le SoS n’est pas verrouillé : il peut évoluer dans ses objectifs, ses composants et son fonctionnement ;
– Le SoS promeut et intègre des évolutions qui ne sont pas latentes pour le système ou qui n’ont pas pu être anticipées ;
– Les sous-systèmes qui composent le système devraient être géographiquement répartis.
Ensuite, Wilson (2014) caractérise le système des systèmes à travers différents niveaux d’interrelations. Premièrement, les systèmes parents correspondent aux systèmes qui incluent d’autres systèmes. Deuxièmement, les systèmes cousins21 correspondent à des systèmes qui sont en interaction avec d’autres systèmes : ils soutiennent ou sont soutenus par d’autres systèmes. Troisièmement, les systèmes enfants correspondent aux systèmes inclus dans un système plus large. Ainsi un changement qui se produit à l’intérieur d’un système influencera les changements potentiels, voire entraînera des changements dans d’autres systèmes, à des échelles spatiales et temporelles différentes (Holling & Gunderson, 2002 ; Thatcher, Guiboudenche & Cahour, 2019). Pour une intervention ergonomique dans un contexte de TAE, il ne suffit donc pas de se concentrer sur un système cible mais il est donc nécessaire d’élargir sa compréhension, voire son intervention ergonomique, aux systèmes parents, enfants et cousins qui peuvent affecter le système cible ou bien être affectés par les changements apportés au sein du système cible.
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Table des matières
Summary
Valorisation de la thèse, activités de recherche et d’enseignement
Liste des tableaux
Liste des figures
Liste des annexes
Introduction
1. Introduction générale
2. Contexte et positionnement de la thèse
3. Organisation de la thèse
Première partie Cadre théorique
Chapitre 1 – Le processus de conception vu comme un dialogue entre le réel, le concevable et le virtuel, trois pôles incarnant l’indivisibilité du temps
1. Introduction au chapitre
2. La conception vue au travers d’un modèle dialogique
2.1. Un modèle de conception construit sur la mise en tension du virtuel et du réel
2.2. La mise en tension du virtuel et du réel comprise comme un dialogue
2.3. Point d’étape : quelles mobilisations et valorisations du passé dans le modèle dialogique de la conception ?
3. Enrichir le modèle dialogique du concevable pour mieux penser les temps de la conception
3.1. Comprendre le processus de conception déjà déroulé : mobilisation du passé
3.2. Le processus de conception structuré par l’indivisibilité du temps
3.3. Quels outils pour comprendre et intervenir dans un processus de conception en tenant compte de l’indivisibilité du temps ?
3.3.1. Des outils d’aide à une conception développementale
3.3.2. Le récit : mobiliser le passé dans le temps présent pour penser le futur
3.4. Point étape : moments du temps, récits de conception et formes de dialogue virtuel – concevable – réel
Chapitre 2 – Le système de travail comme objet de conception des agriculteurs en transition agroécologique
1. Introduction au chapitre
2. Le système de travail construit et structuré autour de l’activité de l’agriculteur
2.1. Quelles représentations du système de travail associées à la transformation du travail ?
2.1.1. Le système de travail : des composants impactés par et/ou impactant le travail 57
2.1.2. Le système de travail conçu au fil des expériences dans la progression d’un processus continu et finalisé
2.2. Quels éléments de l’activité de l’agriculteur pris en compte dans la conception de son système de travail ?
2.3. Point d’étape : le système de travail, un ensemble d’éléments impactés ou impactant le travail d’un travailleur
3. Le système de travail dans la transition agroécologique : transverse à de multiples autres systèmes
3.1. La transition agroécologique : penser la pluralité de systèmes dynamiques en transformation
3.1.1. Le contexte de transition agroécologique : penser plusieurs systèmes
3.1.2. Un système dynamique et adaptatif
3.2. Une multiplicité de systèmes impactés et impactant l’activité de l’agriculteur
3.3. Point d’étape : le système de travail transverse, adaptatif et dynamique, objet de conception des agriculteurs en transition
Chapitre 3 – Problématique de recherche et stratégie de recherche
1. Problématique de recherche
2. Stratégie de recherche et d’intervention
2.1. Démarche de recherche et d’intervention
2.2. Dispositifs d’intervention et de recherche
2.2.1. Description de la méthode Chronique du Changement
2.2.2. Présentation des terrains d’intervention et de recherche
2.2.3. Choix des études de cas
2.3. Dispositif de recherche
2.3.1. Récapitulatif des entretiens mobilisés pour le recueil des données
2.3.2. Analyse des données
Deuxième partie Contributions empiriques
Chapitre 4 – Des récits de conception d’agriculteurs en transition agroécologique, révélateurs de processus de conception focalisés
1. Objectifs du chapitre
2. Méthodologie
3. Récits de conception d’agriculteurs engagés dans une conversion à l’agriculture biologique sans labour : le cas de X&L
3.1. Récit XL-1 : Passer à l’AB : des difficultés de rentabilité et de sens
3.2. Récit XL-2 : Travailler sur un sol vivant
3.3. Récit XL-3 : Difficulté à anticiper
3.4. Récit XL-4 : Isolement des agriculteurs
3.5. Récit XL-5 : Lutter contre les mauvaises herbes
3.6. Récit XL-6 : Temps de travail et mécanisation
3.7. Récit XL-7 : Inoculation du soja
3.8. Récit XL-8 : Autonomie semencière
3.9. Récit XL-9 : Embaucher quelqu’un ?
3.10. Récit XL-10 : Date de conversion à l’AB
3.11. Récit XL-11 : Date de clôture d’exercice
3.12. Récit XL-12 : Augmenter la rentabilité : de nouvelles activités ?
4. Récits de conception d’un agriculteur en recherche d’autonomie : le cas de N
4.1. Récit N-1 : Produire quelque chose dans mes champs
4.2. Récit N-2 : La situation économique de l’exploitation
4.3. Récit N-3 : Une ferme pédagogique ?
4.4. Récit N-4 : Ses animaux dehors
4.5. Récit N-5 : Sa santé et son plaisir au travail
4.6. Récit N-6 : La perte de veaux
4.7. Récit N-7 : Le regard des voisins
4.8. Récit N-8 : Un passage à l’AB ?
5. Conclusion du chapitre : les récits de conception révélateurs de processus de conception focalisés
5.1. Des récits de conception révélant des préoccupations des agriculteurs en transition agroécologique
5.2. Des agriculteurs explorant les différents moments du temps dans les récits de conception
Chapitre 5 – Le système de travail mis en mouvement dans le processus de conception
1. Objectifs du chapitre
2. Méthodologie
3. Les sous-systèmes de travail distribués dans les récits de conception
3.1. Représentations des systèmes de travail des agriculteurs X&L et N
3.2. Le système biologique et technique d’agriculteurs engagés dans une transition agroécologique
3.3. Le système socio-économique d’agriculteurs engagés dans une transition agroécologique
3.4. Les agriculteurs et leurs familles pris dans leur système de travail : X&L et N
3.4.1. Les caractéristiques propres des agriculteurs X&L et N
3.4.2. Le système familial des agriculteurs X&L et N
4. Le système de travail dans sa dynamique d’interaction, distribué dans le temps de la conception
4.1. Les sous-systèmes de travail, distribués au fil des situations des processus de conception focalisés
4.2. Différentes explorations par l’agriculteur des sous-systèmes de travail et de leurs combinaisons pour penser et concevoir son objet
4.2.1. L’exploration combinée des sous-systèmes de travail de l’agriculteur
4.2.2. L’expérience des sous-systèmes de travail dans la construction d’une vision systémique de l’objet de conception de l’agriculteur
4.3. Revenir sur les expériences passées de l’objet de conception pour en explorer d’autres à venir
5. Conclusion du chapitre : un système de travail dynamique dont l’agriculteur fait l’expérience pour poursuivre sa conception
5.1. Quelle caractérisation du système de travail d’un agriculteur ?
5.2. Dynamique d’évolution du système de travail au fil du processus de conception
5.3. Quelle projection de l’agriculteur dans son système de travail à partir de l’expérience ?
Chapitre 6 – Formes de dialogue entre le réel, le virtuel et le concevable
1. Objectifs du chapitre
2. Méthodologie
3. Le processus de conception : une intrication de dialogues dans un ajustement progressif du virtuel et du réel
3.1. Le virtuel : entre idéaux et buts
3.2. Le réel : une mobilisation du passé et du présent
3.3. Plusieurs formes de dialogue entre le virtuel et le réel : élaborations réciproques et obstacles
4. Proposition pour enrichir le modèle dialogique de la conception : le concevable
4.1. Un pôle concevable qui mobilise le conditionnel passé et futur
4.2. Le concevable pris dans différentes formes de dialogue avec le réel et avec le virtuel
4.3. Un dialogue tripartite dans le processus de conception : virtuel – concevable – réel
4.3.1. Les pôles virtuel – concevable – réel mobilisés à travers leurs dimensions spécifiques
4.3.2. Les pôles virtuel – concevable – réel mis en dialogue par les agriculteurs
5. Conclusion du chapitre : des dialogues complexes entre virtuel – concevable – réel, révélateurs de l’indivisibilité du temps
5.1. Caractérisation du virtuel et du réel : convergence et expansion du processus de conception
5.2. Le concevable : pôle du conditionnel passé et futur pour comprendre le dialogue entre virtuel et au réel
Troisième partie
Discussion générale et perspectives
Chapitre 7 – Discussion générale et perspective
1. Réponse à la problématique
1.1. Introduction et rappel de la problématique
1.2. Indivisibilité du temps comme moteur du processus de conception
1.3. L’expérience pour mobiliser le passé dans le système de travail
1.4. Les récits de conception sont-ils révélateurs du rôle de concepteur des agriculteurs ?
1.5. Considérer la transition agroécologique comme un processus de conception
1.5.1. Mobilisation et construction de ressources d’agriculteurs en transition agroécologique
1.5.2. Convergence et expansion des pôles virtuel, concevable et réel d’agriculteurs en transition agroécologique
1.5.3. Dynamique du système de travail conçu par l’agriculteur en TAE
2. Quels apports pour la méthodologie d’intervention et de recherche sur les processus de conception ?
3. Au-delà de la thèse : la transition, une opportunité de concevoir un système de travail durable ?
Bibliographie
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