LE SYMBOLISME LUNAIRE AU SEIN DES CIVILISATIONS

LE SYMBOLISME LUNAIRE AU SEIN DES CIVILISATIONS

LE SYMBOLE LUNAIRE

Avant d’examiner la place qu’a pris la Lune dans les différentes cultures humaines, il est nécessaire de s’intéresser à la Lune en tant que symbole. La Lune comme tout symbole vivant est porteuse de nombreux éléments suggestifs, hérités de traditions de la mémoire archaïque et collective.
Pour M. ELIADE (16), cette symbolique est issue de la pensée analogique qui veut que ce qui est comme, .. a la même force que… Ce mode de raisonnement, au niveau duquel on rencontre une unité de sensibilité dans la représentation que l’homme se fait de l’univers, apporte une solution aux questions fondamentales: naissance, vie, mort, renaissance, précisément là où la pensée logique déductive n’apporte pas de solution satisfaisante.
Mais, comme le souligne JUNG (30), si le symbole est ainsi un substitut de réponse, en particulier lorsqu’on l’aborde d’un point de vue cartésien, il n’en demeure pas moins une expérience cognitive originale qui recherche perpétuellement des relations entre le connu et l’inconnu. Il permet de nous projeter dans des domaines où le raisonnement logique est incompétent, voire impossible à mettre en œuvre. Il permet également d’établir des relations entre les opposés, d’unifier les trois plans: inférieur, terrestre, céleste, ainsi que les différents niveaux de conscience: manifesté et latent, connu et inconnu, moi et surmoi.
Le symbole est donc facteur d’intégration de l’homme dans son milieu. Il apporte une réponse au besoin de connaissance, de tendresse et de sécurité, là où la pensée rationnelle ne peut qu’expliquer le phénomène. En bref il humanise notre environnement en nous le rendant plus accessible.
Concrètement cela se traduit par un ensemble de croyances, de mythes et de rites, plus ou moins intégrés dans un système religieux selon l’époque et le lieu. Néanmoins, même quand les religions s’effondrent, quand les croyances changent, les symboles perdurent. Ce n’est que lorsque la pensée logique est capable de comprendre et d’expliquer, que le symbole s’affadit et finit par ne plus exister. Mais si le symbole meurt sous la lumière de la science, il renaît ailleurs, là où la pensée logique ne peut pas officier. C’est peut être une explication des multiples apparitions d’extraterrestres et autres expériences de l’au-delà, ainsi que de la passion de nos contemporains pour le surnaturel.
La connaissance de la Lune en tant que symbole ne peut donc pas se faire au moyen des éléments évoqués précédemment, mais par la connaissance intuitive de notre satellite. Pour cela il faut donc dégager les caractéristiques qui vont stimuler la pensée analogique, et abandonner toute idée de rationalité. Nous entrons dans un nouveau monde, celui de l’imaginaire et de la pensée intuitive. Il n’est plus vraiment de connaissances au sens cognitif, mais de sensibilité, d’intuition et d’analogie. C’est un peu le monde de l’enfant qui cherche à connaître sans savoir.

Caractéristiques

D’après Mircéa ELIA DE (16), les principales caractéristiques de la Lune qui font d’elle un symbole puissant peuvent se résumer à:
– son caractère céleste
– son rayonnement
– son aspect cyclique
– ses actions sur la Terre
A partir de ces éléments, on peut facilement dégager les principaux traits de la Lune en tant que symbole.

Caractère Ouranien

En tant qu’astre la Lune est un élément impalpable, dont la connaissance a été très longtemps indirecte. Si les missions Apollo ont « décroché » la Lune, en permettant notamment de la matérialiser (présence humaine, pose d’un drapeau), notre satellite a longtemps été inaccessible à la pensée rationnelle et par conséquent, s’est inscrit dans le domaine de l’imaginaire et du rêve (8, 16).C’est ainsi qu’elle est devenue un lieu de séjour des morts, des héros voire, au contraire, un lieu de punition (16, 32). Aller sur la Lune a toujours été un rêve de toutes les époques, comme signe d’accession à la connaissance supérieure. C’était approcher du domaine des Dieux. John Fitzgerald Kennedy, ainsi que le souligne BIANUCCI (8), ne s’y est pas trompé, lorsqu’il lança le défi en 1961 de transporter un homme sur la Lune, afin de symboliser la supériorité américaine sur les Soviétiques.Le caractère céleste est une caractéristique qui tend à faire de la Lune un objet sacré.La plupart des religions associent en effet, un caractère divin à ce qui est en haut.Pour M. ELIADE (16) on retrouve un reliquat de cette croyance dans la prière chrétienne: « Notre père qui êtes aux Cieux », mais aussi dans l’ensemble de l’exégèse catholique: une étoile annonce la naissance de Jésus Christ, l’Esprit Saint descend tel une colombe…etc.En résumé ce caractère céleste confère à la Lune un caractère divin.

Rayonnement

Tout en étant un des deux luminaires, la Lune n’émet pas par elle-même de lumière. Ce phénomène, connu depuis le VIème siècle av. JC, en fait une puissance passive, un réceptacle des rayons solaires qu’elle renvoie vers la Terre (8).
C’est sans doute ce fait qui lui confère la qualité de principe féminin et fécond, en opposition avec le principe masculin et fécondateur du Soleil (6, 13, 16, 17, 18, 19, 23, 24, 38, 48, 50, 51).
Lorsque l’on regarde la Lune, c’est indirectement la lumière du Soleil que l’on voit en elle. La Lune est ainsi un symbole de connaissance indirecte et intuitive, et, elle règne sur les sciences occultes, l’inconscient et les rêves.Enfin, elle brille beaucoup moins intensément que le Soleil; elle est associée au monde de la nuit et des ténèbres. Cela lui confère un aspect négatif, néfaste, en relation avec les puissances infernales (13, 16, 17, 18, 19, 23, 24, 38).

Cycles lunaires

Le cycle synodique perpétuellement reproduit, associé au fait que la Lune nous présente toujours la même face, fait d’elle le symbole des rythmes prolongés.Elle symbolise le temps qui passe, et, est un intermédiaire entre le rythme circadien terrestre et le rythme solaire annuel. La Lune devient un instrument de mesure du temps.Comme le montrent M. ELIADE (16) et E. MOZZANI (38) la révolution synodique peut également être assimilée aux grands rythmes des êtres vivants dont elle symbolise la condition.Elle naît chaque mois, à la nouvelle Lune puis, après une période de croissance, subit la décrépitude en Lune décroissante, puis la mort, lorsqu’elle disparaît pendant la Lune Noire.Elle est donc très proche des destinées humaines, ce qui lui assure, si l’on inclut son aspect féminin, un caractère de Magna Mater, c’est-à-dire de mère universelle, dispensatrice de vie, de croissance, mais aussi de mort avec un espoir de renaissance (13, 16, 17, 18, 19, 23, 24, 38).Ce caractère de mère féconde est d’ailleurs renforcé par la périodicité synodique de 29 jours, proche des cycles menstruels féminins, ce qui a été mis en évidence par MENAKER (37).

Actions sur la Terre

L’aspect le plus visible et le plus vérifiable est l’action de la Lune sur les marées océaniques, comme nous l’avons vu précédemment au Chapitre I.
Cette action sur les eaux, permet d’associer la Lune aux divinités présentes dès le Paléolithique, associant le culte de la mère, de la fécondité et des eaux (16, 17, 50).

Symbolisme de la Lune

A partir de ces particularités, on peut dégager les principales caractéristiques du symbole Lune qui sont:

Instrument de mesure du temps

La Lune est un symbole, mais aussi un instrument qui permet de mesurer le temps qui passe. Les civilisations ont quasi-universellement utilisé des calendriers lunaires pour rythmer les évènements terrestres (5, 8, 26, 38, 40, 41).

Magna Mater

Tant par ses propres rythmes, mais aussi parce qu’elle est un réceptacle de la lumière solaire, la Lune est considérée comme un principe féminin maternel et fécond. Dans le Yi-King, la Lune est assimilée au Yin, le caractère féminin, passif et négatif, aqueux et froid.
Elle présidera donc tout naturellement à la fécondité, aux naissances, et régnera en tant que mère nourricière sur la végétation et les eaux (16, 38).

Mort et résurrection

Sa disparition périodique tous les mois, fait de la Lune un symbole de mort. C’est la Lune Noire, représentée par un point fictif dans le ciel, symbole de l’anéantissement. Mais cette disparition n’est que temporaire et correspond au Karma Hindou, qui ouvre la porte à une nouvelle création, meilleure (16, 38, 41).
On trouve une illustration de cette caractéristique dans la représentation du croissant, en Islam, qui représente l’espoir de la résurrection des croyants (13, 19).

Connaissance indirecte

La Lune règne sur les sciences occultes qui font, dans leurs opérations magiques, largement appel à elles, comme le met en évidence L. TUAN (49) soit comme instrument de mesure du temps, soit comme instrument de divination, voire catalyseur (25, 29).

Aspect néfaste

L’aspect néfaste de la Lune s’exprime dans un ensemble de croyances lui attribuant un effet mauvais ou destructeur. Cet effet négatif s’exprime en pendant du Soleil bienfaiteur, mais aussi en raison du côté nocturne et ténébreux du monde lunaire (16, 38).
Voici donc les principales caractéristiques du symbole Lune. Nous verrons dans le Chapitre III que ces caractéristiques se retrouvent presque universellement. Elles nous serviront de plan pour examiner, au fil des cultures humaines, la place tenue par la Lune.

La Lune et le verbe

L’ensemble de la symbolique lunaire se retrouve également dans le langage et la littérature qui sont de merveilleuses mémoires collectives. Nous commencerons cette analyse en nous penchant sur les mots dérivés de la Lune. Toutefois, au sein même de l’alphabet,
Mircea ELIADE (16) voit dans dix des onze caractères de l’écriture hébraïque des représentations de la Lune.

Etymologie

Le temps qui passe

M. ELIADE (16) retrouve une référence à la Lune dans l’étymologie des mots ayant trait à la mesure du temps qui passe.
La racine indo-européenne me qui signifie « Lune » a donné naissance à un ensemble de mots tels que mois, mensuel et leurs dérivés que l’on retrouve dans:
– le sanscrit mâs, terme à rapprocher de mâmi qui signifie je mesure
– l’avestique mâh
– le vieux prussien mah
– l’arabe ma d’où provient le mot almanach (le livret de la Lune)
– le gothique mêna
– le lithuanien menu
– le grec mêné
– le latin mens, mensis, menstruus
– le russe et le polonais miesiac
– l’anglais month
D’autre part le mot calendrier provient des calendes romaines, qui correspondent au premier jour du mois lunaire, terme qui sera d’ailleurs en usage jusqu’à la fin du Moyen age.

Aspect féminin

La même racine est à l’origine des mots concernant les cycles féminins, tels que menstrues, menstruel, ménopause (16).
Enfin, bien que ces termes soient du vieux français et obsolètes actuellement, rappelons que l’on désignait par le mot « lunée » ou « loaret », une femme supposée être enceinte du simple fait de la Lune (38).

Aspect néfaste

Le terme lunatique, s’appliquait autrefois aux malades mentaux, dont la maladie était censée être aggravée selon les phases lunaires (33). Les Grecs les nommaient d’ailleurs Séléniaques (de Séléné, déesse de la Lune). Le terme luné est un vestige de ce vocabulaire (38).
Nous passerons sous silence les nombreuses comparaisons, au demeurant fort peu élogieuses, auxquelles on associe notre satellite.

Connaissance indirecte

Le terme sélénium, dérivé du grec Séléné, s’applique à un corps simple dont la conductibilité varie en fonction de la lumière qu’il reçoit.

Littérature et Poésie

Elles utilisent toutes deux différents éléments de la symbolique lunaire. En voici l’illustration à travers quelques exemples.

Le temps qui passe

La Lune est coutumière
De naître tous les mois
Ronsard, Ode à Cassandre
Bois, car après nous, la Lune souvent
Passera de son déclin à son croissant
Et de son croissant à son déclin
Omar Khayyân

La divinité féminine

O Lune, O jeune fille amoureuse et timide.
Vincent Muselier
L’homme qui aime normalement sous le Soleil, adore frénétiquement sous la Lune Guy de Maupassant
…Elle s’étendit sur toi avec la tendresse d’une mère…
Charles Baudelaire

Le culte de la fécondité

La Lune est ma mère: combien j’aime la Lune.
Théodore Roetkhe
Et toi, Lune, qui placée dans la région la plus basse du ciel de mois en mois, toujours nourrie des rayons du Soleil, resplendis d’un auguste éclat pour perpétuer les semences génératives.
Firmicus Maternicus (IVè siècle)

La connaissance indirecte

Quand je puise de l’eau, la Lune est dans mes mains.
Yu Leang Che (VIIIè siècle)
La Lune est le Soleil des statues
Jean Cocteau

La Mort et la résurrection

Lune, horreur de la nuit.
Fernando de Herrera
Lune, coquelune, prête-moi tes souliers gris pour aller au Paradis
Comptine du Poitou

Aspect néfaste

Là est l’erreur de la Lune. Elle s’approche plus que de coutume de la Terre et rend les hommes fous.
Shakespeare (Othello)
Frénésie démoniaque, sombre mélancolie, frénésie lunaire.
Milton
Si la symbolique lunaire est très largement utilisée par les écrivains et les poètes, tant pour vanter l’amour que les angoisses métaphysiques qu’elle anime, il ne s’agit pas seulement d’effets de style. Nous verrons dans le chapitre suivant que les différentes facettes de ce symbole, ont été et sont parfois encore très présentes dans de nombreuses civilisations et, au cœur de la mémoire collective.

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Table des matières

INTRODUCTION
I- APPROCHE SCIENTIFIQUE DE LA LUNE
I-1- Distance, taille et masse
I-2- Mouvements lunaires
I-2-1) Révolutions
I-2-2) Rotation
I-3- Influence de la lune sur la terre
I-3-1) Action sur les marées
I-3-2) La lune et les phénomènes météorologiques
I-4- Influence de la lune sur les êtres vivants
I-5- Hypothèses biophysiques des modalités d’action de la Lune
I-5-1) Forces de gravitation
I-5-2) Champs électromagnétiques
I-5-3) Théorie des marées biologiques
II- LE SYMBOLE LUNAIRE
II-1- Caractéristiques
II-2- Symbolisme de la lune
II-3- La lune et le verbe
II-3-1) Etymologie
II-3-2) Littérature et poésie
III- LE SYMBOLISME LUNAIRE AU SEIN DES CIVILISATIONS
III-1- La lune support de la chronologie
III-1-1) La lune et le calendrier
III-1-2) La lune et les jours fériés
III-2- La lune, mère universelle
III-2-1) Les cultes de la lune mère
III-2-2) Croyances et rites
III-3- Mort et résurrection
III-3-1) La mort
III-3-2) La résurrection
III-3-3) Lieu de séjour des âmes
III-4- La Connaissance indirecte
III-4-1) Astrologie
III-4-2) Magie
III-4-3) Alchimie
III-4-4) Sorcellerie
III-4-5) Aspects néfastes
IV ETUDE DE L’INFLUENCE DE LA LUNE SUR LES VÊLAGES ET LES NAISSANCES
IV-1 Données expérimentales
IV-1-1) Naissances humaines
IV-1-2) Vêlages
IV-1-3) Analyse des informations
IV-1-4) Contrôles
IV-2- Influence du cycle synodique
IV-2-1) Ensemble du cycle
IV-2-2) Lune croissante et lune décroissante
IV-2-3) Quartiers lunaires
IV-3 Influence du cycle sidéral, position d’apogée et de périgée
IV-4- Influence du cycle draconitique
IV-4-1) Position par rapport à l’écliptique
IV-4-2) Mouvements ascendants et descendants
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE

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