Le stockage électrochimique de l’énergie

Le stockage électrochimique de l’énergie 

Généralité

Suite aux dérèglements climatiques et l’appauvrissement des ressources terrestres, un effort international est adopté par les accords de Paris signé en 2016 visant à réduire la production de gaz à effet de serre (Fig I.1). Bien que cela n’apparaisse pas dans ces accords, l’extraction des énergies fossiles est une des principales causes d’émission de gaz à effet de serre. Afin de résoudre ce problème, la transition énergétique visant à diminuer voire remplacer la production d’énergie fossile et nucléaire par des énergies renouvelables (solaire, éolien, géothermie, hydroélectricité et biomasse) semble être la meilleure solution. La production d’énergie et sa consommation étant intermittente (ex : pas de production d’énergie solaire la nuit et pas d’éclairage la journée), l’énergie produite doit être stockée puis redistribuée lors des demandes. Pour cela, le stockage de l’énergie doit être efficace en présentant le meilleur rendement de conversion tout en minimisant la pollution générée. Le stockage de l’énergie et donc un des thèmes majeurs de la transition énergétique.

Il existe de nombreuses façons de stocker l’énergie : hydraulique, mécanique, hydrogène, … Parmi toutes ces solutions, le stockage électrochimique semble être une voie séduisante. Alessandro Volta présenta en 1800 la première pile composée de tissus imbibés de chlorure de sodium (NaCl) séparant des disques de zinc et de cuivre (Fig I.2), montrant pour la première fois la possibilité de créer des dispositifs de stockage de l’énergie utilisant des procédés électrochimiques. Depuis, de nombreuses études ont été menées afin de mieux comprendre ce type de stockage et d’en améliorer d’efficacité.

Les dispositifs de stockage électrochimique de l’énergie 

Il existe plusieurs types de dispositifs de stockage de l’énergie, dont les performances peuvent être comparées sur un diagramme appelé diagramme de Ragone (Fig I.3) sur lequel les axes représentent la densité de puissance et la densité d’énergie1 normalisée par unité de masse. Nous pouvons voir les trois familles de dispositifs : les batteries, possédants une densité de puissance faible mais une grande densité d’énergie ; les condensateurs diélectriques, à l’inverse ont une grande densité de puissance pour une faible densité d’énergie ; et les supercondensateurs, démontrant des performances intermédiaires. Sur ce graphique ont été ajoutés les temps de décharge des dispositifs où nous voyons que plus le composant aura une densité de puissance élevée, plus les temps de charge/décharge seront faibles.

Les condensateurs diélectriques

Les condensateurs diélectriques sont des dispositifs composés de deux électrodes séparées par un diélectrique. Le stockage de l’énergie dans ce type de dispositif est dit électrostatique car l’application d’une différence de potentiel sur les électrodes permet l’accumulation de charges à l’interface électrode/diélectrique et n’implique pas de réactions chimiques (Fig I.4a). Durant la décharge, les charges vont se déplacer vers l’électrode opposée (Fig I.4b) jusqu’à obtenir un équilibre à la décharge totale du condensateur diélectrique (Fig I.4c).

La quantité de charges électriques Q (en Coulomb, 1 C = 1 A.s) pouvant être stockée dans ce type de dispositif est en fonction de la capacité C (en Farad) et de la différence de potentiel E (en Volt) appliquée aux électrodes suivant l’équation suivante :

? = ?. ? Equation I.1

Les matériaux les plus utilisés dans la composition des condensateurs diélectriques sont le tantale et l’aluminium comme électrode ainsi que les oxydes de tantale (Ta2O5) ou d’aluminium (Al2O3) comme diélectrique (permittivité relative Ɛ? de 9 et 25 respectivement). Le stockage de charge étant électrostatique, les phases de charges et décharges sont très rapides (< 1 ms) et réversibles, générant une grande densité de puissance (< 105 W.kg-1) au détriment d’une faible densité d’énergie (>10-1 Wh.kg-1 ) sur un très grand nombre de cycles. Les condensateurs diélectriques sont utilisés pour des applications de puissance, comme capacité de découplage, comme élément de filtrage ou dans le cadre de résonateurs … En plus de la faible densité d’énergie pouvant être délivrée par ces dispositifs, ils sont limités en tension par leur tension de claquage. Cette tension représente la limite pour laquelle a lieu la perte irréversible des propriétés isolant du diélectrique. Si la tension appliquée aux bornes des électrodes est supérieure au potentiel de claquage du diélectrique, celui-ci devient alors conducteur, ce qui a pour effet de détruire le condensateur. La tension de claquage dépend de la rigidité diélectrique du matériau. Par exemple, la rigidité du Al2O3 est de 11-16 kV.mm-1.

Les accumulateurs électrochimiques

Un accumulateur électrochimique (batterie secondaire) est composé de deux électrodes et d’un électrolyte liquide, le plus souvent organique, qui sépare les électrodes. Cet électrolyte a pour but de permettre la conduction des ions de l’électrolyte qui circuleront entre les électrodes. Contrairement aux condensateurs diélectriques, le stockage de charge dans une batterie ne n’est pas électrostatique mais électrochimique. Le transfert de charges s’effectue par réactions d’oxydoréduction simultanées entre les ions contenus dans l’électrolyte et les deux électrodes. Lors de la décharge, l’oxydation de l’anode va libérer des électrons alors que la cathode va subir une réaction de réduction. Pour la charge, les phénomènes sont inversés. L’exemple le plus connu de ce type de système sont les batteries lithium-ion, largement utilisées dans de nombreuses applications (automobiles, smartphones, ordinateurs portables, …) dont les réactions d’oxydoréduction à la décharge sont décrites en figure I.5. Le plus souvent, ce type de batterie est composée d’oxyde de métal de transition (ex : LiCoO2) comme cathode et de graphite (C) à l’anode. Les réactions d’oxydoréductions ayant lieu dans l’ensemble du matériau, les batteries possèdent une densité d’énergie élevée mais une faible densité de puissance dû à la lenteur de ces réactions. De plus, les réactions d’oxydoréduction impliquent des phénomènes d’irréversibilités, dégradant les performances de la batterie et la durée de vie.

Les supercondensateurs électrochimiques
Les supercondensateurs sont des dispositifs intermédiaires aux batteries et condensateurs diélectriques. Tout comme les batteries secondaires, les supercondensateurs sont formés de deux électrodes séparées par un électrolyte liquide. Sur le diagramme de Ragone (Fig I.3), nous pouvons voir qu’il existe deux types de supercondensateurs suivant le type de réaction utilisée pour permettre le stockage de charges. Ces supercondensateurs constituant la pierre angulaire de mon doctorat, le prochain paragraphe sera entièrement dédié à l’étude de ces systèmes.

Les supercondensateurs électrochimiques 

Plusieurs caractéristiques fondamentales sont à connaitre afin de comparer les différents systèmes de stockage de l’énergie.

Il existe plusieurs critères importants à prendre en compte dans la réalisation de supercondensateurs :
• La densité d’énergie (en Wh), représentant l’énergie pouvant être stockée dans le supercondensateur dépend de la capacité du dispositif (en Farad) et de la tension de cellule (V) (Equation I.3).
• La densité de puissance (en W) est la faculté qu’a le supercondensateur à délivrer l’énergie stockée en un temps Δt (en s) (équation I.4), la puissance maximale pouvant être délivrée est calculée en fonction de la résistance série équivalente (ESR pour Equivalent Serie Resistance) (Equation I.5).
• L’ESR représente pas résistance totale du dispositif. Elle regroupe la résistance du matériau d’électrode, du collecteur de courant ainsi que les résistances d’interfaces. Afin d’obtenir la plus grande densité de puissance et puissance maximale, l’ESR doit être le plus faible possible.
• Le temps de charge/décharge étant court, les supercondensateurs doivent posséder de longue durée de vie (>1 000 000 cycles).
• La capacité de rétention, le rapport de la capacité de décharge sur la capacité de charge, doit être proche de 1 afin de permettre une longue durée de vie du supercondensateur.
• Lorsqu’un dispositif chargé n’est pas utilisé, il subit des effets d’autodécharges. Cela peut être dû à la redistribution de charge à la surface de l’électrode, la présence d’impuretés ou à la température .

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Table des matières

INTRODUCTION GENERALE
CHAPITRE 1 : INTRODUCTION AU STOCKAGE ELECTROCHIMIQUE DE L’ENERGIE A LA MICROECHELLE
I Le stockage électrochimique de l’énergie
I.1 Généralité
I.2 Les dispositifs de stockage électrochimique de l’énergie
II Les supercondensateurs électrochimiques
II.1 Le collecteur de courant
II.2 L’électrolyte
II.3 Le séparateur
II.4 Fonctionnement et matériaux d’électrode de EDLC
II.5 Fonctionnement et matériaux d’électrodes pseudocapacitives
II.5 Les dispositifs asymétriques et hybrides
III La miniaturisation des supercondensateurs
III.1 Applications
III.2 Les supercondensateurs à maturité industriel
III.3 Etat de l’art des micro-supercondensateurs
CHAPITRE 2 : OBJECTIFS DE LA THESE, MATERIAU ET TECHNIQUES EXPERIMENTALES
I Objectifs de la thèse
II Electrodes de VN pour supercondensateur
III Techniques de dépôts utilisées durant cette thèse
III.1 De la synthèse de poudres pour électrodes massives à la formation de couches minces
III.2 La pulvérisation cathodique magnétron
III.3 Dépôt par couche atomique (ALD)
IV Photolithographie et gravure du nitrure de vanadium
IV.1 La photolithographie
IV.2 La gravure
V Techniques de caractérisations
V.1 Caractérisations morphologiques et structurales
VI.2 Mesures électriques par courant de Foucault
VI.3 Mesures électrochimiques
CHAPITRE 3 : LE NITRURE DE VANADIUM PAR PULVERISATION CATHODIQUE MAGNETRON
I Etudes préliminaires
I.1 Paramètres de dépôt fixes
I.2 Préparation des substrats
I.3 Limite des bornes de potentiel électrochimiques
II Etude des performances des films minces en fonction de la température de dépôt
II.1 Caractérisations morphologiques
II.2 Caractérisations structurales
II.3 Caractérisations électriques
II.4 Caractérisations électrochimiques
II.5 Conclusion de l’étude en température
III Etude des performances des films minces en fonction de la pression de dépôt
III.1 Caractérisations morphologiques
III.2 Caractérisations structurales
III.3 Caractérisations électriques
III.4 Caractérisations électrochimiques
III.5 Conclusion de l’étude en température
IV Optimisation de la température et pression de dépôt
V Effet de l’augmentation de l’épaisseur
V.1 Caractérisation morphologique
V.2 Caractérisation électrique
V.3 Caractérisation structurale
V.4 Caractérisation électrochimique
VI Transfert technologique vers un autre bâti
VI.1 Etude en pression
VI.2 Etude en température
VII Conclusion
CONCLUSION GENERALE

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