Le spinelle MgAl2O4
Les céramiques transparentes
Les céramiques transparentes polycristallines suscitent beaucoup d’intérêts dans de nombreuses applications, principalement militaires, où elles peuvent être utilisées pour la conception de dômes de missiles, fenêtres de caméras ou de visée, et blindage transparent. Cet intérêt se justifie par d’excellentes propriétés thermomécaniques jusqu’à de hautes températures (<1000°C), une transparence possible dans le domaine du visible et de l’InfraRouge. En effet pour ces applications les matériaux sont soumis à des conditions extrêmes présentant des chocs thermiques, et une exposition à de hautes températures[1]–[4]. Ces céramiques sont également utilisées dans la joaillerie et l’horlogerie de luxe en remplacement du verre. Pour ces utilisations seule la transparence dans le visible et la résistance aux chocs et aux rayures est requise. On retrouve également les céramiques transparentes dans les applications laser où elles font office de cristal hôte[5]. Les céramiques transparentes les plus citées dans la littérature sont le fluorure de magnésium (MgF2)[1], [6], le grenat d’alumine yttrié Y2Al5O12 (YAG [7], [8], l’alumine polycristalline Al2O3 [9], [10], l’oxynitrure d’aluminium AlNxAl2O3(1-x) (ALON)[11], [12], et enfin le spinelle MgAl2O4 [1], [6], [13], [2]. Les propriétés comparées de ces matériaux sont reportées en table1.
Parmi ces matériaux, le fluorure de magnésium et l’alumine ne présentent pas de structure cubique, et présentent un caractère biréfringent qui limite leurs propriétés optiques, et implique leur utilisation sous forme monocristalline (ou polycristalline si la taille des grains est suffisamment petite[14], [15]). L’AlON présente de bonnes propriétés mécaniques, cependant sa haute dureté le rend plus difficile à usiner et à polir que le spinelle. De plus, sa production est également plus coûteuse. Enfin, le YAG bien qu’ayant un plus large intervalle de transmittance dans l’IR, présente de moins bonnes propriétés mécaniques que le spinelle. Ainsi, le spinelle MgAl2O4 ressort comme étant le matériau présentant le meilleur compromis entre les coûts de fabrication, les qualités optiques et les propriétés mécaniques.
Propriétés optiques
Les propriétés optiques des céramiques sont caractérisées par la transmittance. Cette grandeur dépend de la longueur d’onde étudiée, et se mesure par un spectrophotomètre. Cette mesure est effectuée en comparant l’intensité d’un faisceau transmis au travers des échantillons par rapport à l’intensité du faisceau incident. Il existe plusieurs façons de caractériser la transmittance d’un matériau. La transmission totale (TFT) se mesure à l’aide d’une sphère d’intégration et détecte la lumière transmise et diffusée par l’échantillon (Fig. 1. a). La transmission en ligne (IT) est mesurée avec un spectromètre doté d’une ouverture angulaire comprise entre 3° et 5° (Fig. 1. b), et enfin la transmission réelle en ligne (RIT) est mesurée avec une ouverture angulaire de 0,5°. Cette dernière est considérée par certains auteurs comme le paramètre unique le plus pertinent pour quantifier la transparence d’un matériau [15]. En effet, lors d’une mesure de transmittance réelle en ligne, seule la lumière transmise sans être diffusée est détectée.
Mécanismes de Diffusion au sein des céramiques
Le second phénomène influençant la transmittance d’une céramique transparente polycristalline est la diffusion. Bien que les centres diffusant au sein d’une céramique puissent être multiples, la diffusion du rayonnement électromagnétique est toujours la conséquence d’un changement local d’indice de réfraction au cours de son trajet au sein du matériau . Ainsi, les défauts susceptibles de provoquer de la diffusion sont les joints de grains, les pores, les phases secondaires, et la rugosité de surface. Dans le cas du spinelle, en le considérant pur et parfaitement poli, la diffusion liée aux phases secondaires n’intervient pas et l’on peut négliger la rugosité de surface. Il subsiste donc les phénomènes de diffusion liés aux pores et aux joints de grains.
La diffusion aux joints de grains est un phénomène qui est rencontré principalement pour les matériaux présentant des structures cristallines optiquement anisotropes. Le caractère biréfringent de ces céramiques implique deux indices de réfraction qualifiés d’ordinaire (n0) et d’extraordinaire (ne)[15]. Ainsi, l’orientation des grains les uns vis-à-vis des autres étant aléatoire, les joints de grains viennent délimiter des milieux d’indices de réfraction différents. Ce phénomène de diffusion peut être limité avec une taille de grain suffisamment faible. Dans le cas du spinelle, ce mécanisme de diffusion n’intervient pas du fait de la structure cubique du matériau et de son indice optique isotrope. Le seul mécanisme de diffusion sera donc la diffusion par les pores et les éventuelles phases secondaires. Concernant les pores, le mécanisme de diffusion a pour origine la différence d’indice de réfraction entre le pore (n ≈ 1) et les grains de céramiques (n ≈ 1,73 pour le spinelle[13]). Il s’agit donc de la source majoritaire de diffusion au sein des céramiques polycristallines. Apetz et al. ont développé un modèle pour décrire la diffusion par la porosité [15].
Comportement mécanique des céramiques
Une fois ces concepts établis, il est possible de décrire les comportements mécaniques généraux des solides. Les propriétés mécaniques des matériaux sont traditionnellement définies par les réactions macroscopiques des matériaux soumis à une contrainte ; les solides étant généralement considérés comme des corps homogènes. La réponse d’un matériau céramique soumis à une force extérieure est de se déformer élastiquement et, si la contrainte excède la résistance du matériau, la rupture sera observée. Pour les céramiques sous contrainte uniforme et à température ambiante cette fracture est généralement soudaine et totale (avec pas ou peu de déformation plastique). S’agissant des céramiques, il est utile de rappeler qu’elles possèdent un domaine de déformation élastique très étroit. De plus, à température ambiante, le domaine plastique est généralement inexistant (comportement dit fragile).
La déformation élastique est définie par le rapprochement ou l’éloignement des atomes et ainsi par la récupération totale et instantanée de la déformation une fois la contrainte relâchée. L’élasticité d’un matériau est définie par son module d’Young E (en Pa). Ce module permet de relier la contrainte et la déformation de la façon suivante :
? = ??
Caractérisation mécanique des céramiques
Leurs propriétés mécaniques sont également caractérisées par la dureté, la ténacité et la résistance mécanique. La dureté est définie comme étant la résistance à la pénétration d’un matériau. Celle-ci est mesurée en enfonçant une pointe, ou un cône (un indenteur), de dureté élevée à la surface du matériau avec une force connue pendant un temps donné. Cet essai laisse une empreinte dont la taille permet de quantifier la dureté du matériau testé. Il existe plusieurs méthodes de mesure de la dureté. Les principales méthodes sont la dureté Vickers, Knoop, et Brinell [18]. La mesure de dureté Vickers se réalise avec une pointe en diamant de base carrée et d’angle au sommet entre faces de 136°.
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Table des matières
Introduction
Chapitre I : Bibliographie
I.1 Le spinelle MgAl2O4
I.1.1 Les céramiques transparentes
I.1.2 Propriétés optiques
I.1.2.1 Réflexion et réfraction
I.1.2.2 Mécanismes de Diffusion au sein des céramiques
I.1.3 Propriétés mécaniques
I.1.3.1 Comportement mécanique des céramiques
I.1.3.2 Caractérisation mécanique des céramiques
I.1.4 Production de spinelle transparent
I.2 Théorie du frittage
I.2.1 Le frittage naturel
I.2.1.1 Stade initial
I.2.1.2 Stade intermédiaire
I.2.1.3 Stade final
I.2.1.4 Croissance granulaire
I.2.1.5 Théorie des stades de frittage combinés
I.2.1.6 Identification des paramètres des modèles de frittage
I.2.1.7 Théorie du frittage continue
I.2.1.8 Formulation analytique du modèle de frittage libre
I.2.2 Frittage Micro-ondes
I.3 Conclusion
I.4 Bibliographie
Chapitre II : Modélisation de la croissance granulaire du spinelle MgAl2O4
Chapitre III : Détermination des énergies d’activation des mécanismes de frittage par MSC
Chapitre IV : Modélisation des trajectoires de frittage du spinelle MgAl2O4
Chapitre V : Frittage micro-ondes sous charge pour l’obtention de spinelle MgAl2O4 transparent
Chapitre VI : Conclusion générale