Le SIDA, Syndrome d’Immunodéficience Acquise
Découverte de la maladie et de son agent étiologique
En Juin 1981, des cliniciens américains ont rapporté un nombre de cas de pneumocystose due au parasite chez cinq hommes homosexuels . Or aux Etats Unis, ce type de pathologie rare était presque exclusivement limitée à des patients sévèrement immunodéprimés. L’apparition de pneumocystose associée à des candidoses buccales, de multiples infections virales, et au sarcome de Kaposi chez de jeunes individus préalablement sains était l’évidence d’un nouveau type d’immunodéficience acquise . En effet, tous les patients présentaient une anergie et une lymphopénie caractérisée notamment par une baisse significative du nombre de lymphocytes T CD4+.
Par la suite, les premiers cas de ce qui sera reconnu plus tard comme le syndrome d’immunodéficience acquise apparaissent en France. En Décembre 1982, l’équipe du Pr. Luc Montagnier à l’Institut Pasteur fut contactée par des cliniciens français dans le but d’isoler un nouveau virus humain associé à une lymphoadénopathie (LAV), à partir de biopsie de ganglion lymphatique d’un patient français homosexuel. A cette époque, le seul rétrovirus connu était le HTLV, Human T lymphotropic virus, capable de causer la transformation de cellules T chez l’Homme. Or, en Mai 1983, Françoise Barré-Sinoussi démontrait qu’il n’y avait pas ou peu de cross-réactivité entre les protéines du nouveau virus et celles du HTLV-1, et décrivait une de ses protéines, la p25, indiquant ainsi qu’il s’agissait bien d’un nouveau virus . Afin de déterminer si ce virus nouvellement isolé était vraiment responsable de la maladie affectant les patients atteints de syndrome d’immunodéficience acquise, un test sérologique a été mis au point et utilisé dans des études séro-épidémiologiques impliquant un réseau de collaborations entre cliniciens, immunologistes et biologistes moléculaires . De manière cruciale, ce même test a été utilisé comme outil de diagnostique pour des tests sanguins.
En 1984, Gallo et al. et Levy et al. confirmaient que l’agent étiologique responsable du SIDA était un nouveau rétrovirus, le virus de l’immunodéficience acquise humaine ou VIH . Bien que quelques cas de SIDA associés au VIH-2 aient été observés , nous nous limiterons ici au VIH-1 responsable de la pandémie du SIDA.
Le virus de l’immunodéficience humaine 1 ou VIH-1
Le VIH-1 est un rétrovirus (virus à ARN), membre de la famille des lentivirus (du latin lenti qui signifie lent) qui ont pour caractéristiques essentielles d’avoir une longue période d’incubation et d’être cytopathogènes.
Structure du VIH-1
Un virion du VIH-1 infectieux contient deux copies simple brin d’ARN viral génomique de 9.2kb associées à des enzymes virales, l’intégrase (p32) et la transcriptase inverse (p66/p51) et étroitement liées à une nucléocapside (p7). L’ARN est protégé des nucléases par une capside virale protéique (p24) de forme conique entourée d’une matrice qui résulte de l’association de protéines, dont la p17, qui assure aussi l’intégrité du virion. Autour de la matrice deux couches de phospholipides forment l’enveloppe virale, Env ; elle est de même nature que la membrane de la cellule infectée et contient deux glycoprotéines virales, gp120 et gp41. Le complexe trimérique gp120/gp41 permet au virus de s’attacher et de fusionner avec la membrane de la cellule cible, et d’initier le cycle infectieux. Dès l’entrée du virus dans la cellule, l’ARN est soumis à l’action de la transcriptase inverse qui produit l’ADN double brin correspondant. Celui-ci entre alors dans le noyau et intègre le génome de la cellule hôte pour générer un provirus grâce à une autre enzyme virale, l’intégrase. Le provirus intégré devient une matrice pour la transcription des gènes de structure, de régulation et des gènes accessoires du virus.
Organisation génomique du VIH-1
L’intégration du génome du VIH-1 au génome de la cellule hôte conduit à l’expression de neuf gènes (gag, pol, env, tat, rev, nef, vif, vpr, vpu) qui codent pour seize protéines (HIV sequence compendium 2008, NIH).
Gag, pol et env sont des gènes communs à tous les rétrovirus , (HIV sequence compendium 2008, NIH). Ces trois gènes contiennent l’information nécessaire à la synthèse de protéines de structure et enzymatiques. Le gène gag code notamment pour des protéines constitutives des nucléocapside (p7), capside (p24) et matrice (p17) du virion. Le gène pol (polymérase) code pour plusieurs enzymes du virion impliquées dans la réplication du virus comme la transcriptase inverse , la RNase et l’intégrase (p32). Le gène env code pour les précurseurs des glycoprotéines de l’enveloppe gp41 et gp120. La gp41 sert de souche ancrée dans la membrane ; elle est liée à la gp120 qui forme un chapeau au dessus de cette protéine d’ancrage. Ce complexe glycoprotéique a la capacité de s’accrocher aux lymphocytes T CD4+ par l’intermédiaire de récepteurs aux chimiokines comme CCR5 et CXCR4 qui facilitent l’entrée et l’infection des cellules T CD4+, des macrophages et des cellules dendritiques (Cf Introduction, II.3.Les cellules cibles du VIH-1).
Les gènes tat, rev codent pour des protéines régulatrices qui contrôlent la capacité du VIH-1 à infecter les cellules et à produire de nouvelles copies du génome viral (réplication). La synthèse des protéines Tat, Rev et Nef est précoce. Ensuite, la présence de Rev favorise l’expression plus tardive des gènes codant pour les protéines structurales.
Les gènes nef, vif, vpr et vpu codent pour des protéines accessoires dans la mesure où elles ne sont pas indispensables à la réplication virale. Elles jouent cependant des rôles essentiels au cours du cycle viral (notamment dans le relargage des particules virales infectieuses) et contribuent à la progression de la maladie .
Les cellules cibles du VIH-1 : Tropisme cellulaire
La capacité du VIH à pénétrer dans des types précis de cellules, appelée tropisme cellulaire, est déterminée par l’expression de récepteurs spécifiques à la surface des cellules hôtes, qui sont utilisés par le virus pour initier son cycle infectieux. Les cellules qui expriment à leur surface une glycoprotéine appelée CD4 (« cluster » de différenciation 4) sont susceptibles d’être infectées par le VIH-1:
– les lymphocytes T CD4+ auxiliaires,
– les lymphocytes T régulateurs,
– les monocytes et les macrophages,
– et une sous population des cellules dendritiques .
Cependant, l’interaction entre le complexe gp120/gp41 et CD4 n’est pas suffisante et l’intervention de co-récepteurs est nécessaire pour induire un changement conformationnel de la gp41 qui conduit à la fusion des bicouches lipidiques de l’enveloppe virale et de la cellule hôte (Figure 3). Parmi ces corécepteurs figurent les récepteurs aux chimiokines: CCR5, récepteur des chimiokines RANTES, MIP-1α et MIP-1β, et CXCR4, récepteur de l’ α-chimiokine SDF-1 ont été les premiers décrits et restent les plus importants .
L’utilisation sélective de ces deux corécepteurs définit les différents tropismes des isolats du VIH-1. CCR5 sert de corécepteur aux souches R5 monocytotropiques du VIH-1 alors que CXCR4 est utilisé par les souches X4 lymphotropiques .
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Table des matières
INTRODUCTION
CHAPITRE 1 : Le SIDA, Syndrome d’Immunodéficience Acquise
I. Découverte de la maladie et de son agent étiologique
II. Le virus de l’immunodéficience humaine 1 ou VIH-1
II.1. Structure du VIH-1
II.2. Organisation génomique du VIH-1
II.3. Les cellules cibles du VIH-1 : Tropisme cellulaire
II.4. Le cycle de réplication du VIH-1
II.5. Variabilité génétique du VIH-1
II.6. Diversité du VIH-1
II.7. La distribution géographique des différentes formes du VIH-1
III. Epidémiologie
CHAPITRE 2 : Pathogenèse du SIDA
I. Evolution immunobiologique de l’infection par le VIH-1
II. Evolution clinique de l’infection par le VIH-1
III. Profils d’évolution particulière et de résistance naturelle au VIH
III.1 Patients non progresseurs à long terme (LTNP)
III.2. Personnes hautement exposées au virus et séronégatives (HEPS)
IV. La réponse immunitaire
IV.1.Généralités
IV.2. La réponse immunitaire contre le VIH-1
IV.2.1. La réponse innée à l’infection par le VIH-1
IV.2.2. La réponse adaptative à l’infection par le VIH-1
IV.2.2.1. La réponse humorale
IV.2.2.2. La réponse cellulaire
V. Les traitements actuels
V.1. Thérapies antirétrovirales
V.2. Diverses stratégies vaccinales contre le VIH-1
CHAPITRE 3 : Diversité clonale des lymphocytes T CD8+ générés après immunisations ou infection par le VIH-1
I. Modèle animal et SIDA
II. Réponse immunitaire des lymphocytes T CD8+
II.1. Identification de lymphocytes T CD8+ par leur TCR
II.1.1. Vβ répertoire d’une population de lymphocytes T CD8+
II.1.2. Séquençage des CDR3 du TCRβ de lymphocytes T CD8+
II.1.3. Capacité des lymphocytes T CD8+ à reconnaître différents variants d’un même épitope: Plasticité du TCR
II.2. Fonctions des lymphocytes T CD8+
OBJECTIF DU TRAVAIL DE THESE
MATERIEL ET METHODES
I. Immunisations et infections des singes rhésus
I.1. Phénotype des singes
I.2. Immunisations
I.3. Infections des singes
II. Evaluation de la capacité de liaison de variants peptidiques de p41A au complexe majeur d’histocompatibilité de classe I, Mamu-A*01
III. Evaluation de la capacité de différents types d’immunisations à générer des lymphocytes T CD8+ capables de reconnaître différents isolats de VIH-1
III.1. Fabrication des tétramères
III.2. Culture cellulaire et stimulation peptidique de PBMC
III.3. Identification de CTL capables d’interagir avec des tétramères spécifiques d’un variant de p41A : Immunophénotypage (1)
III.4. Mesure du potentiel cross-réactif de CTL capables de reconnaître des variants de p41A: double marquage – Immunophénotypage (2)
IV. Etude de la diversité clonale de CTL générés après vaccinations utilisant l’enveloppe du VIH-1 comme immunogène ou après infection par SHIV de singes rhésus MamuA*01+
IV.1. Réalisation d’une banque d’ADNc relatifs à chaque population de lymphocytes T CD8+ spécifiques d’un variant de p41A
IV.2. Vβ répertoire de chaque population de lymphocytes T CD8+ spécifiques d’un variant de p41A
IV.3. Clonotypage des CTL par le séquençage des CDR3 du TCRβ impliqué dans la reconnaissance de l’épitope
V. Etude fonctionnelle des lymphocytes T spécifiques de différents variants de p41A générés après immunisations et infections de singes rhésus Mamu-A*01+
V.1. IFN-γ ELISpot
V.2. Marquage Intracellulaire des cytokines (ICS)
V.2.1. Culture cellulaire et stimulation des PBMC
V.2.2. Marquage des PBMC stimulées
RESULTATS
ARTICLE 1 : “Diverse cross-reactive potential and Vβ gene usage of an epitope specific CTL population in monkeys immunized with diverse HIV-1 Env immunogens”
ARTICLE 2 : “Vaccine-induced CD8+ T lymphocytes of rhesus monkeys recognize variant forms of a viral epitope but do not mediate optimal functional activity after binding to the variant epitope peptides”
DISCUSSION
CONCLUSION