L’érosion
Nous pensons que la compréhension du phénomène d’érosion est avant tout importante afin de lutter convenablement. Le mot érosion dérive du verbe « erodere » qui signifie « ronger », comme une maladie ronge un corps ; l’érosion peut dénaturer la terre en décapant l’horizon humifère (le plus fertile et le plus vivant) et en arrachant sélectivement les éléments nutritifs, les particules fines et les matières organiques capables à la fois de stocker l’eau utile et les nutriments, et de nourrir les éléments vivants dans le sol tels que : les micro-organismes, la mésofaune, les racines, etc …(Eric Roose, 1984). On distingue principalement deux formes d’érosion selon les agents causaux : l’érosion éolienne provoquée par le vent et l’érosion hydrique, provoquée par l’action de la pluie. Pour la première forme, les phénomènes d’érosion éolienne ne peuvent se manifester de façon importante que sur sol peu rugueux, peu cohérent (nappes sableuses remaniées), dans les régions où les précipitations annuelles moyennes sont inférieures à 600 mm, où la saison sèche dure plus de 5 mois et où les vents soufflent à plus de 20 km à l’heure. Donc, la lutte contre cette forme d’érosion présente un intérêt important dans le sud seulement de Madagascar, car dans cette région les vents violents de l’alizé du Sud-Est y soufflent tout au long de l’année avec des périodes de grande intensité au début de la saison sèche.
En outre, la saison sèche dure huit mois et la pluviométrie annuelle est inférieure à 600mm. L’érosion hydrique, par contre, est due principalement à l’action de l’eau de pluie qui arrache et entraîne le sol. Notre étude va surtout se focaliser sur cette forme d’érosion car le milieu d’étude est caractérisé par l’abondance de pluie.
Le processus de « splash »
Le sol se présente en général sous forme d’un assemblage d’éléments, de taille et de forme variables. Les agrégats constituent les particules élémentaires, et leur assemblage forme les mottes. Les gouttes de pluie tombant sur le sol possèdent une certaine énergie cinétique. L’impact des gouttes provoque ainsi la dégradation des agrégats et des mottes en particules fines transportables par le ruissellement. Celles-ci se détachent en rejaillissant dans toutes les directions de l’espace. Ce processus de rejaillissement est appelé « splash ». Au cours d’une pluie, ce phénomène prend son intensité maximale pendant la phase d’imbibition du sol, c’est à dire au début de la pluie quand le ruissellement n’apparaît pas encore. Il est d’autant plus fort que le sol est dénudé. Lorsque le ruissellement apparaît, l’énergie des gouttes de pluie est dissipée par la lame d’eau recouvrant le sol. Le phénomène de « splash » diminue ainsi au fur et à mesure que le ruissellement s’accroît. La naissance du ruissellement. La battance du sol par les gouttes de pluie provoque la destruction progressive de la structure de la surface du sol. Dans une première phase, il se forme une pellicule de battance superficielle appelé « croûte de battance » due au tassement et à l’humectation interne de la surface du sol. La capacité d’infiltration du sol diminue ainsi par suite de la réduction de la porosité. A un moment donné de la pluie, une partie de celle-ci ne s’infiltre plus, le ruissellement apparaît alors et augmente au cours du temps. Dans une deuxième phase, il se forme une croûte de dépôts dans les zones en dépression. Les particules solides détachées par les gouttes ou transportées par le ruissellement s’y accumulent et contribuent aussi à la réduction de la perméabilité du sol.
Le facteur causal de l’érosion par l’eau : les précipitations atmosphériques. L’érosion hydrique a pour source d’énergie la pluie : énergie des gouttes d’eau de pluie pour arracher les particules et déclencher le processus de destruction des agrégats, énergie de l’eau de ruissellement qui assure le transport des particules détachées. L’étude de l’action des précipitations atmosphériques nécessite celle des relations entre leurs caractéristiques (hauteur, intensité, fréquence). Si l’on désigne par E le potentiel érosif d’une pluie, on a la relation : E = f (i, h, P) ; c’est une fonction à trois variables : « i », l’intensité de la pluie ; « h », la hauteur d’eau résultant de la pluie, et « P », sa période de retour. La durée « t » de chute de la pluie se trouve implicitement contenue dans les variables «i » et « h », puisque i = h.t-1. (NEUVY Guy, 1995).
Influence de la hauteur des pluies « h ». Il n’existait pas de relation directe entre les valeurs annuelles de hauteur de pluie, de ruissellement et d’érosion (Hudson N.W et Jackson D.C, 1959). Si l’on étudie l’ampleur des phénomènes d’érosion en fonction des hauteurs de pluie individuelles, on peut constater que la relation hauteur de pluie / érosion ne peut, seule, expliquer le phénomène. Pour une même classe de pluie individuelle avec des conditions de milieu qui ne varient pas, on observe des ruissellements et de pertes en terres extrêmement variables (Roose, 1984). En revanche, si nous considérons le temps de chute « t », lié à la hauteur h, il n’en est plus de même. La relation h = i x t montre qu’une valeur de h peut résulter d’une pluie de faible intensité mais de longue durée ou d’une forte pluie mais de courte durée.
Influence de l’intensité « i » L’intensité, c’est la hauteur de pluie tombée pendant un temps donné (exemple : mm/h ; mm/mn). C’est le facteur primordial de l’érosion. Une pluie intense est formée de grosses gouttes serrées ; dans ces conditions, leur énergie cinétique est très forte, puisqu’elle est proportionnelle au produit de leur masse par le carré de leur vitesse (1/2 mv2) ; or cette vitesse est d’autant moins freinée par la résistance de l’air que le poids des gouttes est élevé. Il en résulte une rupture de la structure du sol, en surface, et une saturation rapide de sa porosité, entraînant une quasi totale imperméabilité. L’action mécanique, appelée battage du sol, est donc proportionnelle à « i » ; les fortes pluies provoquent la pulvérisation des particules terreuses, cela d’autant plus facilement que cellesci sont humectées. Les particules fines qui en résultent, sont facilement entraînées par les ruissellements ou alors elles s’enfoncent dans la terre avec l’eau d’infiltration et diminuent ainsi la porosité de la couche superficielle du sol.
La nature du sol. Les sols ne présentent pas la même résistance à l’érosion, et cette résistance varie avec les propriétés chimiques et surtout physiques des différents types de sol ; tout particulièrement leur structure et leur perméabilité. Mais ces deux derniers facteurs varient considérablement suivant que le sol est couvert ou non de végétation. Pourtant, un sol, même dénudé, se comporte différemment sous l’action de la pluie, suivant qu’il est ou non labouré. Une terre dénudée, non cultivée est caractérisée par un fort tassement, c’est à dire un faible perméabilité ; d’où un ruissellement plus intense, au cours d’une précipitation. Dans un sol cultivé, on est donc amené à considérer au moins deux zones, même s’il est homogène sur une grande profondeur ; la couche supérieure, rendue meuble donc plus poreuse, par les instruments aratoires, et la couche inférieure plus compacte, donc moins perméable. Plus le sol est poreux, et plus le coefficient d’infiltration est élevé, ce qui diminue d’autant le ruissellement.
La composition granulométrique du sol est aussi un facteur important de l’érosion ; selon Hudson, l’érosion sur un sol sableux est proportionnelle au ruissellement, car la stabilité structurale du sol est alors faible. Par contre, l’érosion, sur un sol argileux, est proportionnelle à l’intensité de la pluie. Ceci semble en accord avec ce qui a été dit précédemment, l’argile se dégrade facilement en petits éléments, sous l’action de grosses gouttes, lorsqu’elle est humide et les fragments colloïdaux sont alors dilués et transportés par l’eau. Certains éléments du sol sont des facteurs de cohésion ; c’est le cas des colloïdes humiques et argileux qui soudent entre elles les particules sableuses. La composition chimique du sol exerce d’autre part un rôle : par exemple, la nature des bases fixées sur le complexe peut déterminer sa floculation (calcium, magnésium) ou sa dispersion (sodium).
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Table des matières
INTRODUCTION
PARTIE I : CONTEXTE GENERAL DE L’ETUDE.
1.1 Présentation du milieu d’expérimentation : Hautes Terres de Madagascar,
Antsirabe et Andranomanelatra.
1.1.1. Localisation géographique.
1.1.2. Climat.
1.1.3. Relief
1.1.4. Pédologie.
1.1.5. L’Agriculture dans la région de Vakinankaratra.
1.2. L’érosion.
1.2.1. Les mécanismes de l’érosion hydrique.
1.2.1.1. L’attaque du sol en surface.
1.2.1.2. L’attaque du sol sur une épaisseur de son profil « mouvement de masse »
1.2.2. Les facteurs de l’érosion hydrique.
1.2.2.1. Le facteur causal de l’érosion par l’eau : les précipitations atmosphériques.
1.2.2.2. Les facteurs conditionnant l’érosion du sol par l’eau
1.2.3. Les différentes formes d’érosion.
1.2.3.1. L’érosion en nappe.
1.2.3.2. L’érosion en rigoles et en griffes.
1.2.3.3. L’érosion en ravines.
1.2.4. Les conséquences de l’érosion.
1.2.4.1. Les conséquences directes.
1.2.4.2. Les conséquences indirectes.
1.2.5. Les moyens de lutte antiérosive.
1.2.5.1. La conservation du sol par la modification de ses propriétés.
1.2.5.2. La conservation du sol par le contrôle de la végétation.
1.2.5.3. La conservation du sol par le contrôle de l’eau : l’aménagement des terres et la modification de la topographie.
1.3. L’érosion sur les hautes terres de Madagascar.
1.3.1. Les facteurs naturels de l’érosion dans les Hautes Terres.
1.3.2. Les activités paysannes aggravant les phénomènes de l’érosion.
1.3.2.1. Les feux de brousse.
1.3.2.2. Le surpâturage.
1.3.2.3. Le travail du sol.
1.3.3. Causes socio-économiques.
1.3.4. Le rôle du semis direct pour résoudre les problèmes des Hautes Terres
Malgaches.
1.3.4.1. Généralités sur le semis direct
1.3.4.2. Les processus agrobiologiques mis en jeu par les SCV.
1.3.4.3. Les avantages du semis direct sur couverture végétale.
1.3.4.4. Conclusion partielle.
PARTIE II : MATERIELS ET METHODES
2.1. Cadre de l’étude.
2.2. Objectifs.
2.3. Méthodologie de travail.
2.4. Sites et traitements
2.4.1. Site de l’URP SCRID : dispositif principal.
2.4.2. Site de TAFA.
2.5. Mesures.
2.5.1. La mesure de la pluviométrie.
2.5.2. Mesures du ruissellement et érosion.
2.5.2.1. Description des dispositifs de mesures
2.5.2.2. Les mesures de ruissellement et prises d’échantillons pour l’érosion.
2.5.2.3. Les traitements des échantillons : détermination des pertes en terres
2.5.2.4. Traitement des données
2.5.3. Les mesures des pentes
2.5.3.1. Sur les lots d’érosion.
2.5.3 .2. Sur les micro lots
2.5.4. Les rendements des cultures.
2.5.4.1. Rendements des haricots.
2.5.4.2. Rendements de maïs.
PARTIE III : RESULTATS ET DISCUSSIONS.
3.1. La pluviométrie.
3.2. Ruissellements et érosions.
3.2.1. Sur le site de URP.
3.2.1.2. Lots d’érosion.
3.2.2. Sur le site TAFA.
3.2.3. Conclusion partielle.
3.3. Les rendements de la culture.
3.4. Limites de travail.
CONCLUSION
Bibliographies
Annexes
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