Le rôle du collagène in vivo

Le rôle du collagène in vivo

Le collagène est la protéine structurale par excellence chez les vertébrés. Chez les mammifères, il s’agit même de la protéine la plus abondante [1, 2] puisqu’on la retrouve dans toutes les matrices extracellulaires. Le collagène, par ses propriétés d’auto-association, forme la trame de la plupart des tissus conjonctifs. Il est ainsi à l’origine de la forme, de la structure microscopique et de la résistance mécanique de la cornée, du tendon, de la peau, du poumon, de la paroi du vaisseau sanguin ou même encore du cartilage [1]. Cette ubiquité du collagène provient de sa capacité à former divers assemblages hiérarchisés à partir d’une seule et même molécule.

Au cours des dernières décennies, notre équipe a tenté de reproduire, in vitro, ces structures à partir du collagène de type I purifié. Cette approche, de type bottom-up, a permis l’obtention de matériaux dont l’organisation est similaire à celle de l’os [3] ou encore de la cornée [4]. Elle a également contribué à mieux caractériser les phases cristallines liquides du collagène. Ces aspects d’auto-organisation des phases denses du collagène sont l’objet de la seconde partie de ce manuscrit. On y aborde également l’effet de l’ajout de gélatine, la forme dénaturée du collagène, sur la structure de ces phases denses.

Le collagène de type I est également un constituant majoritaire du derme. Il y forme un réseau de fibrilles sur lequel se fixe diverses protéines (ex : fibronectine) et polysaccharides (ex : acide hyaluronique). Ce réseau sert également de support pour les fibroblastes, les cellules du derme . Le collagène garde ici son rôle structural mais il joue également un rôle dans la communication intercellulaire [5]. Les fibrilles permettent de relier physiquement les cellules entre elles et de transmettre des stimuli mécaniques. Ce réseau est à la base des phénomènes de mécano transduction. La matrice de collagène assure aussi la rétention/diffusion de messagers cellulaires tels que des facteurs de croissance. Dans une approche biomimétique, le collagène semble donc un candidat intéressant pour reconstituer le derme [8, 9]. Il a été beaucoup utilisé afin de réaliser des pansements pour les plaies cutanées chroniques [10]. Notre équipe a d’ailleurs réalisé des matériaux hybrides, collagène/silice, permettant la libération contrôlée d’antibiotiques sur plusieurs semaines. Dans cette optique, nous avons récemment mis au point un procédé de conjugaison du collagène par un antibiotique, la rifamycine. La protéine, ainsi modifiée, a ensuite été utilisée pour réaliser des hydrogels aux propriétés originales. L’étude de ces gels et de la conjugaison du collagène constitue le sujet de la troisième partie de cette thèse.

La superfamille des collagènes

La superfamille des collagènes est constituée des protéines présentant une séquence peptidique caractéristique. Il s’agit de la répétition d’un triplet « Gly-X-Y » (X et Y étant des acides aminés aléatoires) capable de s’associer avec deux autres chaines pour former une triple hélice. Au sein de cette superfamille, on compte 56 protéines. Parmi elles, seulement 28 portent le nom de collagène.  En effet, on attribue le nom de collagène aux protéines comportant la séquence caractéristique (Gly-X-Y)n et dont la fonction principale est structurale [12]. Les  autres protéines de la superfamille ont été nommées en fonction de leur rôle biologique . On distingue deux types de collagène : les collagènes fibrillaires et les collagènes non-fibrillaires. Comme leur nom l’indique, les collagènes fibrillaires sont capables de s’associer sous forme de fibrilles dans les conditions physiologiques (cf Partie B – Chapitre 3). Ces fibrilles forment alors le réseau à l’origine des propriétés mécaniques et morphologiques des tissus. Dans le cadre de cette thèse, nous nous sommes intéressé à une variété de collagène fibrillaire, le collagène de type I. Chez l’Homme, le collagène de type I est omniprésent. On le retrouve dans la peau, le tendon, la cornée, l’os, le poumon ou encore dans les parois vasculaires. Ainsi, cette protéine se trouve être à l’origine de matériaux aux propriétés et structures extrêmement variées mais c’est également le collagène le plus abondant. En effet, le collagène de type I représente, en quantité, 90% des collagènes.

Propriétés physico-chimiques du collagène de type I

Le collagène est également composé d’environ 15% d’acides aminés ionisables  . On compte à peu près autant de résidus basiques (lysine, arginine, etc.) que de résidus acides (glutamate, aspartate). D’un point de vue physico-chimique, le collagène est donc un polyélectrolyte amphotère : il peut à la fois jouer le rôle d’un acide ou d’une base. Le calcul de la charge nette du collagène est par conséquent assez complexe. Elle dépend de la force ionique, de la concentration en collagène, du pH, etc.

la conformation du collagène dépend de sa charge nette. Une caractérisation par dichroïsme circulaire a montré que les chaînes α du collagène présentent, en milieu acide (pH = 2,5), une conformation en hélice gauche de type PPII [16, 17]. Cette même étude a également permis d’établir que la conformation en PPII est stabilisée par l’association des chaînes α. Il est admis qu’en milieu acide, les chaînes α sont également associées sous forme de triple hélice. Toutefois, notre équipe a démontré récemment qu’en augmentant le pH d’une solution acide de collagène concentré, on observe une modification de la conformation d’un grand nombre de résidus du collagène. En particulier, un quart des résidus proline et 40% des résidus hydroxyprolines changent de conformation lorsque l’on passe d’un pH 2,5 à un pH 8,5 [18]. Il s’agit essentiellement d’une modification du plissement de cycle (ou puckering) de ces acides iminés. Pourtant, ce sont ces acides iminés qui sont à la base de la structure type PPII des chaînes α et donc de l’association sous forme de triple hélice [19]. Ces résultats semblent indiquer que les chaines α adoptent une structure plus stable que l’hélice PPII ou plus favorable à l’association sous forme de fibrilles. En effet, la fibrillogenèse (ou association du collagène sous forme de fibrilles) s’opère généralement entre pH = 6 et pH = 10 [20]. Elle coïncide avec la plage de pH pour laquelle la charge nette du collagène est faible (PI entre 6,5 et 8,5 selon le tampon utilisé).

En conclusion, le comportement du collagène en tant que polyélectrolyte a été assez peu étudié [21, 22]. On est parti du postulat que la conformation en triple hélice, observé en condition physiologique, est conservée dans des conditions de pH et de force ionique dramatiquement différentes. La plupart des études récentes utilisent des polypeptides, mime de collagène « collagen-like », sans résidus ionisables afin de rendre compte de la structure du collagène [19]. D’un autre côté, la fibrillogenèse complique l’étude de la conformation du collagène en solution puisqu’elle ne peut être dissociée de la variation de la charge nette de cette protéine.

Synthèse du collagène de type I

Synthèse « naturelle » du collagène

Comme pour toutes les protéines, la synthèse in vivo du collagène débute par la transcription d’un gène. Les gènes codant pour les chaînes α1(I) et α2(I) sont transcrits et les ARNm résultants sont exportés dans le cytoplasme, au niveau du réticulum endosplasmique granuleux. L’ARNm est alors traduit par des ribosomes en surface du réticulum et la nouvelle protéine est transloquée, de manière concomitante dans le lumen du réticulum. Afin d’éviter une fibrillation prématurée du collagène dans la cellule, les chaînes α1(I) et α2(I) nouvellement synthétisées comportent un propeptide à chaque extrémité. Ces propeptides jouent également un rôle important dans la trimérisation des chaînes α et la formation de la triple hélice . Dans le réticulum, les chaînes α subissent une première série de modifications post traductionnelles. Une partie des prolines et des lysines sont tout d’abord hydroxylées en hydroxyproline et hydroxylysine. Ces réactions sont effectuées par des hydroxylases qui utilisent l’acide ascorbique (vitamine C) comme cofacteur. En cas de carence en vitamine C, ou scorbut, la synthèse du collagène est donc rendue impossible ce qui explique le déchaussement des dents observé chez les patients. L’hydroxylation de la proline, essentiellement en position Y du triple Gly-X-Y, permet de stabiliser la conformation en hélice gauche de la chaine α. En effet, sans hydroxylation des prolines, la température de dénaturation du collagène chute de 30°C [12, 23, 24]. Cette stabilisation a deux origines. La présence d’un groupement hydroxyle permet l’établissement de liaisons hydrogènes supplémentaires à travers la couche de solvatation [14]. De plus, en position Y, l’effet inductif attracteur de l’oxygène favorise le plissement de cycle exo, conformation nécessaire afin de permettre l’établissement de la triple hélice [19, 23, 25]. L’hydroxylation des lysines est l’origine de futures modifications post-traductionnelles. C’est au niveau des hydroxylysines que les lysyl-oxydases agissent afin de réticuler chimiquement les molécules de collagène préalablement fibrillées  . Les hydroxylysines peuvent également être O-glycosylées sur leur fonction hydroxyle, modifiant ainsi la surface du collagène et donc les interactions avec son environnement. Cette étape de O glycosylation est spécifique de la superfamille des collagènes et elle s’effectue juste après les hydroxylations.

Les chaînes α hydroxylées et glycosylées s’associent ensuite par trois. Cette trimérisation passe d’abord par une étape de reconnaissance moléculaire afin d’assurer une bonne stoechiométrie. Cette étape est d’autant plus importante dans le cas d’un collagène hétérotrimérique comme le collagène de type I. Cette reconnaissance est permise par une petite séquence située au niveau du propeptide C-terminal. C’est également au niveau de ce propeptide que les chaînes vont tout d’abord se lier. Le propeptide C comporte quatre domaines en hélice α (à ne pas confondre avec les chaines α). Ces hélices présentent une face hydrophile (acides aminés chargés) et une face hydrophobe (acides aminés apolaires). Dans le réticulum, les hélices α s’associent par trois sous forme de superhélices, permettant ainsi de limiter l’interaction entre l’eau et les faces hydrophobes. La trimérisation des chaînes α est aussi assurée par l’établissement de pont disulfures intra et intercaténaires au niveau des propeptides N et C. La formation de ces liaisons est facilitée par l’action d’une enzyme, la PDI (Protein Disulfide Isomerase). A partir de ces zones de fixation, les chaînes α peuvent alors s’associer en triple hélice.

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Table des matières

Introduction générale
Chapitre 1 – Pourquoi encore étudier le collagène
I. Le rôle du collagène in vivo
II. La superfamille des collagènes
III. La structure du collagène de type I
IV. Propriétés physico-chimiques du collagène de type I
V. Synthèse du collagène de type I
1. Synthèse « naturelle » du collagène
2. Vers la production d’un collagène recombinant
a. Expression du collagène par des hôtes procaryotes
b. Expression du collagène par des hôtes eucaryotes
c. Production du collagène par des animaux transgéniques
d. Production du collagène par des plantes transgéniques
VI. Production du collagène de type I au laboratoire
1. Protocole d’extraction du collagène
2. Dosage des solutions de collagène
3. Caractérisation de la pureté : électrophorèse en condition dénaturante
Bibliographie
Chapitre 2 – Les techniques d’observations
I. Microscopie électronique à transmission (MET)
1. Principe du MET
2. Contraintes associées à l’utilisation d’un faisceau d’électron
3. Préparation des matériaux denses pour l’observation MET
4. La cryo-microscopie électronique : principe
II. Microscopie multiphoton
1. Microscopie de fluorescence à deux photons (2-PEF)
2. Microscopie SHG résolue en polarisation (P-SHG)
a. Origine moléculaire du signal SHG : l’harmonophore
b. De la molécule à l’ensemble d’harmonophores
c. Le collagène, un harmonophore endogène
d. Effet de l’orientation du collagène sur l’intensité du signal SHG
e. Microscopie SHG résolue en polarisation
f. Description du microscope
III. Imagerie par Résonnance Magnétique
1. Origine du signal de résonnance magnétique nucléaire (RMN)
2. Relaxation longitudinale et relaxation transversale
Bibliographie
Conclusion générale

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