La place de l’écrit avant l’entrée en CP
Dans sa thèse, Jérome Riou (2017) retrace les différentes évolutions des programmes de l’école maternelle concernant la place de l’écriture. En effet, les élèves doivent être confrontés à l’écrit dès le plus jeune âge pour en comprendre ses intérêts et arriver en cours préparatoire avec des outils en main afin de développer au mieux les compétences dans ce domaine. Depuis 2006, les programmes de l’école maternelle incitent « les enseignants à donner aux élèves les moyens de construire progressivement le principe alphabétique, autrement dit de comprendre qu’à une lettre isolée ou à un groupe de lettres correspond un phonème. Ils citaient notamment l’exemple de la dictée à l’adulte qui rend visible le passage du langage oral vers les signes de l’écrit (MEN, 2006). Quelques années plus tard, les instructionsofficielles faisaient de la discrimination des sons et de la découverte du principe alphabétique deux compétences à atteindre en fin de grande section (MEN, 2008, p.13 et 14) » (Riou, 2017, p.130). Depuis 2015, les nouveaux programmes visent ces mêmes compétences, soit la découverte du principe alphabétique en lien avec le développement de la conscience phonologique. L’un des attendus de fin de cycle 1 étant de « discriminer des sons (syllabes, sons-voyelles ; quelques sons-consonnes hors des consonnes occlusives) » (MEN, 2015, p.11). Nous constatons donc que l’entrée dans l’écrit ne se fait pas qu’à l’arrivée en CP, il est indispensable que les élèves aient commencé à comprendre le rôle de l’écrit,sa fonction, et qu’ils l’utilisent dans diverses situations d’apprentissage mises en place par l’enseignant. La découverte du principe alphabétique, la conscience phonologique, l’écriture de lettres isolées ou de son prénom, l’écriture provisoire (capacité à utiliser les relations entre les lettres et les sons pour transcrire l’oral) sont autant d’activités menées en maternelle qui permettent « de conduire un premier questionnement sur la morphologie de la langue » (Jérome Riou).
En lien avec l’apprentissage de l’orthographe
Comme le précise André Ouzoulias, « les connaissances orthographiques sont aussi utilisées en situation de lecture, pas seulement en écriture » (2014). Donc quand un élève écrit, il doit prendre en compte celui qui reçoit, qui lit sa production. Pour cela, il faut lui donner les moyens de comprendre ce qu’il lit et donc d’utiliser la bonne orthographe. En effet pour accéder au sens d’un texte et le lire de manière efficace et fluide, celui-ci doit être écritavec une orthographe correctement maitrisée. En effet avoir de bonnes connaissances enorthographe amène l’élève à lire une plus grande quantité de textes et à les comprendre davantage. De fait, il est amené à rencontrer plus fréquemment des mots nouveaux et donc à enrichir son vocabulaire. André Ouzoulias parle de « spirale d’auto-perfectionnement » qui permet aux élèves d’améliorer leurs habiletés de lecteurs. Il préconise trois principes pour apprendre l’orthographe :
– Répétition des rencontres avec l’orthographe correcte (lire beaucoup aide à mémoriser l’orthographe des mots)
– Pas de connaissances orthographiques sans connaissances graphophonologiques
– Rencontre avec des mots qui seront des modèles d’autres nouveaux mots
Il est donc nécessaire d’inciter les élèves à utiliser les outils qu’ils ont à disposition pour écrire sans inventer. L’orthographe ne doit pas être oubliée et doit être apprise en même temps que la graphophonologie, elle est complémentaire à l’enseignement de l’encodage. L’une des compétences de français au cycle 2 est de « s’initier à l’orthographe lexicale » (MEN, 2018), au CP, il est attendu des élèves qu’ils sachent « mémoriser l’orthographe du lexique le plus couramment employé », « mémoriser les principaux mots invariables » et qu’ils soient « capable de regrouper des mots par séries (familles de mots, mots reliés par des analogies morphologiques) » (MEN, 2019, p.9). Ces attendus sont en lien avec l’apprentissage de l’encodage, puisque certains mots ne peuvent être écrits par simple correspondance graphophonologique. En effet, il existe de nombreux graphèmes pour un seul phonème, ou encore des lettres muettes en fin de mots qui ne peuvent être encodés si l’élève n’a pas mémorisé leur orthographe.
La dictée
J’ai fait le choix de proposer une dictée en prenant appui sur le document d’accompagnement de français « La dictée au CP » (MEN, 2017). Les auteurs de ce document expliquent qu’il faut différents temps d’apprentissage pour mener une dictée :
– « de structuration de savoirs orthographiques », c’est-à-dire des activités d’apprentissage où l’élève s’exerce pour intérioriser un nouveau savoir orthographique
– « de réflexion sur la manière d’écrire (seul ou à plusieurs) », autrement dit des activités sous forme de situation-problème dans lesquelles l’élève s’interroge sur comment il écrit tel mot et pourquoi
– « de verbalisation sur cette manière d’écrire avec l’ensemble du groupe », en expliquant aux autres par la verbalisation orale, l’élève utilise le métalangage qui l’aide à construire son savoir
– « de confrontation à la norme écrite », il y a ici l’importance pour l’élève d’être face à des mots correctement orthographiés pour ne pas que ses erreurs persistent.
En ce qui concerne le dispositif que j’ai mis en place, nous sommes sur des temps de réflexion sur la manière d’écrire et de verbalisation sur cette manière d’écrire. Nous pouvons aussi retrouver, dans ce document, l’importance « de s’appuyer sur la fréquence des graphèmes et leur pertinence d’apparition pour rendre l’orthographe du français la plus transparente possible » (p.1). Les auteurs de cette ressource rappellent aussi que « les programmes insistent sur la priorité à accorder à l’apprentissage des mots les plus fréquents de la langue française » (p.2). Il existe des listes de mots fréquents sur le site éduscol du Ministère de l’Education Nationale par ordre alphabétique, par nature, par fréquence décroissante. Pour choisir les mots à dicter, je me suis alors renseigné sur les correspondances graphophonologiques que les élèves avaient déjà étudiées en classe. J’ai aussi fait attention à utiliser des mots courants dans leur vocabulaire. Différents types de dictée sont proposés dans ce document d’accompagnement (La dictée au CP) avec une progressivité à suivre. Concernant mon dispositif de recherche, il s’agit donc des dictées suivantes :
– dictée de mots usuels
o attention portée au choix des mots (régularité et fréquence)
o apprentissage : enseignement explicite de méthodes pour mémoriser l’orthographe
– dictée à l’adulte
o conduire avec les élèves des échanges autour des problèmes orthographiques, de favoriser le recours aux analogies, les procédures de segmentation syllabiques des mots, l’oralisation des productions, l’usage des référents présents dans la classe et construits avec les élèves, le recours aux dérivations.
– dictée négociée
o fin CP
o phase de dictée individuelle
o les élèves se regroupent par deux ou trois et se mettre d’accord sur la graphie des mots pour ne rendre qu’un seul écrit.
o Discussion, négociation, argumentation
o Il faut se situer dans la zone de compétences des élèves pour ce genre de dictée.
Les enregistrements audio
Les étapes deux et trois du dispositif de recherche seront enregistrées. Cela me permettra alors d’analyser les interactions, les échanges que les élèves ont entre eux et avec moi qui leur permettent de verbaliser, de confronter et d’expliquer les choix faits en fonction des connaissances qu’ils ont à leur disposition. De par ces enregistrements, je pourrai me rendre compte de l’intérêt de ces situations d’encodage, comprendre le rôle des interactions langagières et la nature des échanges.
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Table des matières
Introduction
1. Cadre théorique
1.1. L’encodage au cours préparatoire
1.1.1. La place de l’écrit avant l’entrée en CP
1.1.2. Apprendre à encoder en CP
1.1.3. En lien avec l’apprentissage de l’orthographe
1.2. Les stratégies d’encodage
1.3. Les interactions
1.3.1. Entre l’enseignant et l’élève
1.3.2. Entre pairs
2. Méthodologie
2.1. Contexte
2.2. Question de recherche
2.3. Hypothèses
2.4. Dispositif de recueil de données
2.5. Les outils pour la mise en place du dispositif de recherche
2.5.1. La dictée
2.5.2. Le livret des consignes de l’évaluateur
2.5.3. Les ateliers de négociation graphique
2.5.4. Les enregistrements audio
2.6. Corpus
2.6.1. L’école
2.6.2. La classe
2.6.3. L’échantillon choisi
3. Analyse des résultats
3.1. Première étape du dispositif : évaluation 0
3.2. Deuxième étape du dispositif : ateliers de négociation graphique
3.3. Troisième étape du dispositif : interactions maitre-élève
3.4. Quatrième étape du dispositif : évaluation finale
3.5. Evolution entre la première et la dernière évaluation
4. Discussion des résultats
4.1. Vérification des hypothèses
4.1.1. Hypothèse 1
4.1.2 Hypothèse 2
4.1.3 Hypothèse 3
4.2. Les limites de la recherche
Conclusion
Bibliographie
Annexes
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