Histologie du sein
D’un point de vue histologique, le sein se compose de deux parties séparées par une lame basale : une partie épithéliale fibreuse constituée à la fois par les lobules et les canaux galactophores et une partie stromale composée de tissus conjonctifs et adipeux permettant la séparation de chaque lobe et de chaque canal (Hassiotou and Geddes, 2013).
La composante épithéliale
La composante épithéliale des canaux et des lobules est formée suite à la différenciation des cellules souches mammaires (MaSCs). Ces cellules multipotentes sont localisées dans la partie inférieure de la composante épithéliale au contact de la lame basale . Les MaSCs sont à l’origine des progéniteurs luminaux et myoépithéliaux et sont indispensables à la formation de l’arborescence de la glande mammaire (Shackleton et al., 2006; Visvader and Stingl, 2014).
Les progéniteurs luminaux se différencient en cellules canalaires et alvéolaires. Les cellules canalaires forment la couche de cellules internes des canaux alors que les cellules alvéolaires forment celle des lobules (Hassiotou and Geddes, 2013; Visvader and Stingl, 2014).
❖ Les cellules canalaires présentent une expression hétérogène des récepteurs aux œstrogènes, une partie l’exprime alors que l’autre non (Visvader and Stingl, 2014). Ces cellules présentent également une forte expression du syndécane-1 qui est un protéoglycane transmembranaire fortement exprimé dans leur partie baso-latérale (Stanley et al., 1999).
❖ Les cellules alvéolaires sont elles-mêmes capables de se différencier en lactocytes afin de permettre la synthèse du lait lors de la lactation (Hassiotou and Geddes, 2013). Ces cellules n’expriment pas le syndécane-1 (Stanley et al., 1999) et sont globalement ER-, n’exprimant pas le récepteur aux œstrogènes (Sleeman et al., 2007; Visvader and Stingl, 2014).
Les progéniteurs myoépithéliaux se différencient en cellules myoépithéliales. Ces cellules constitutives de la couche externe des canaux et des lobules ont la particularité d’être contractiles (Hassiotou and Geddes, 2013; Visvader and Stingl, 2014).
La lame basale
La lame basale sépare la composante épithéliale de la composante stromale. Elle est majoritairement composée de fibres de collagène de type IV , de laminine, de nidogène et de perlecan (Insua-Rodríguez and Oskarsson, 2016).
Il apparaît également que l’imprégnation hormonale lors de la grossesse et du cycle menstruel modifie les caractéristiques de la lame basale (Ferguson et al., 1990; Hassiotou and Geddes, 2013). Au cours de la carcinogenèse, la lame basale subit des modifications de sa composition (Albrechtsen et al., 1981; Ferguson et al., 1990; Ioachim et al., 2002). Le collagène IV peut par exemple être dégradé par différentes enzymes dont les métalloprotéinases et les cathepsines (Insua-Rodríguez and Oskarsson, 2016). Ainsi, l’augmentation de l’expression de ces enzymes protéolytiques induit le remodelage de la lame basale qui devient perméable aux cellules mésenchymales lors de la TEM.
La composante stromale
La composante stromale de la glande mammaire est constituée par de nombreuses cellules telles que les adipocytes, les fibroblastes, les cellules endothéliales ainsi que les cellules impliquées dans l’immunité (macrophages et leucocytes) mais aussi par des fibres nerveuses et des vaisseaux sanguins et lymphatiques (Hassiotou and Geddes, 2013; InsuaRodríguez and Oskarsson, 2016).
Les cellules mésenchymateuses ne sont pas à l’origine du cancer du sein cependant elles sont impliquées dans le développement des carcinomes mammaires. Par exemple, les adipocytes peuvent synthétiser des œstrogènes, une hormone sexuelle ayant un rôle oncogénique, et permettre l’initiation et la progression tumorale. Le système lymphatique et le système veineux sont quant à eux responsables de la dissémination métastatique. Le microenvironnement cellulaire est également composé d’éléments de la matrice extracellulaire (fibronectine, fibres de collagènes (I, III, V), protéoglycanes (décorine, biglycane et syndécane)) et par leurs enzymes associées. Lors de la tumorigenèse et de la progression tumorale, des changements de la composition de la matrice extra-cellulaire sont observés (Insua-Rodríguez and Oskarsson, 2016).
Le remodelage physiologique du sein
Tout au long du cycle de la vie d’une femme, sous le contrôle des hormones, la glande mammaire subit des modifications lui permettant d’achever la mammogenèse et de la rendre fonctionnelle. L’imprégnation hormonale du sein contrôle en partie : le développement de la glande mammaire à la puberté, son remodelage lors de la grossesse et sa régression (appelé involution) à la ménopause . De plus, à chaque cycle menstruel, le sein peut subir un remodelage (Hassiotou and Geddes, 2013; Russo and Russo, 2006).
À la naissance, la structure du sein est rudimentaire. Elle ne comporte aucune structure acino-lobulaire mais présente 15 à 25 canaux lactifères par sein (chez le garçon et la fille). À ce stade et jusqu’à l’allaitement, la grande mammaire ne présente aucune fonctionnalité (Hassiotou and Geddes, 2013; Roux, 2013).
À la puberté, la glande mammaire se développe chez les filles sous l’influence des hormones stéroïdiennes (17β-œstradiol, progestérone) mais, aussi des hormones gonadotropes (lutéinisante (LH) et folliculo-stimulante (FSH)). L’augmentation du tissu adipeux s’accompagne d’un accroissement du volume des seins. Les canaux se développent et se ramifient (segmentation galactophorique), à leur extrémité apparaît des bourgeons terminaux constitués de cellules épithéliales. La maturation de ces bourgeons, dite maturation ducto-lobulaire, permet la formation d’acini non fonctionnels. À ce stade, les acini se regroupent (groupe de 11) pour former des lobules de type 1 qui sont peu différenciés (Hassiotou and Geddes, 2013; Roux, 2013; Russo and Russo, 2006).
À partir de l’âge adulte, les lobules de type 1 se différencient en lobules de type 3. Chacun d’entre eux est formé par le regroupement d’approximativement 80 acini, cependant, ils n’ont pas de fonction sécrétoire.
Lors de la grossesse, les seins atteignent le stade le plus abouti (lobules de type 4). Ils acquièrent leur fonctionnalité notamment sous le contrôle du 17β-œstradiol (E2) et de la progestérone (synthétisés par le placenta). Avant l’accouchement, la prolactine active la lactogenèse qui se met ainsi en place dans les acini. Ces derniers synthétisent et stockent des vacuoles de sécrétion constituées de lipides, glucides et protéines. L’ocytocine permet quant à elle l’excrétion du lait en induisant la contraction des cellules myoépithéliales. Il a été montré que les femmes ayant eu une maturation complète des lobules lors de la grossesse et de la lactation pouvait bénéficier d’un effet protecteur contre l’apparition et le développement d’une tumeur mammaire (Hassiotou and Geddes, 2013; Roux, 2013; Russo and Russo, 2006).
À la fin de l’allaitement, le lait resté dans les canaux induit l’involution de la glande mammaire. Les cellules sécrétrices rentrent en apoptose, les différentes structures lobulaires (de type 4) et canalaires composant le sein régressent au profit du tissu adipeux. La glande mammaire perd ainsi sa fonction sécrétrice jusqu’à une prochaine grossesse (Hassiotou and Geddes, 2013; Roux, 2013).
À la ménopause, l’arrêt de la fonction ovarienne entraîne une diminution de la concentration plasmatique en progestérone et 17β-œstradiol (90 %). Cependant, la baisse de la concentration en E2 ne se reflète pas dans le sein. Cette absence de diminution peut être expliquée par une synthèse endogène d’œstradiol et par l’apport d’œstradiol sérique (Geisler, 2003). La composante épithéliale de la glande mammaire fibreuse diminue (apoptose des cellules épithéliales) au profit du tissu adipeux. Les canaux galactophores sont maintenus tandis que les acini et les lobules régressent (Russo and Russo, 2006).
Malgré un rôle majeur des hormones sexuelles (œstrogènes et progestérone), les hormones de croissance ainsi que les glucocorticoïdes sont nécessaires au développement de la glande mammaire. Par exemple lors de la puberté, l’IGF-1 (insulin-like growth factor-1) et l’EGF (epidermal growth factor) permettent le développement des canaux galactophores en stimulant la prolifération des cellules canalaires (Stull et al., 2002).
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Table des matières
Introduction
Chapitre 1 : Le cancer du sein
Le tissu sain
I.1 Anatomie du sein
I.2 Histologie du sein
I.3 Le remodelage physiologique du sein
Le cancer du sein
II.1 Prévalence du cancer du sein
II.2 Etiologie et facteurs de risque
II.3 Caractéristiques génétiques des tumeurs mammaires
II.1 Caractérisation et classification des tumeurs mammaires
Chapitre 2 : La signalisation œstrogénique dans la carcinogenèse mammaire
Les œstrogènes et la signalisation œstrogénique
I.1 Les œstrogènes
I.2 Les récepteurs aux œstrogènes
I.3 La signalisation œstrogénique
I.4 Régulation transcriptionnelle
Implication des œstrogènes dans la carcinogenèse mammaire
II.1 La carcinogenèse mammaire
II.2 Implication d’ERα dans la carcinogenèse mammaire
II.3 Dérégulation des acteurs de la signalisation œstrogénique dans le cancer du sein
II.4 Traitement du cancer et hormonothérapie
Chapitre 3 : Le syndécane-1
Généralités
Expression du SDC-1
II.1 Le gène
II.2 Expression du SDC-1 au cours de l’embryogenèse
II.3 Régulation transcriptionnelle du SDC-1
II.4 Régulation post-transcriptionnelle du SDC-1
Le SDC-1 : un protéoglycane à héparane sulfate
III.1 La partie glucidique du SDC-1
III.2 L’axe protéique : structure et fonction
Le clivage de l’ectodomaine : « shedding » du SDC-1
IV.1 Généralités
IV.2 L’héparanase
IV.3 Clivage de l’axe protéique : les protéases matricielles
La localisation nucléaire du SDC-1
V.1 Mécanisme
V.2 Rôle
Le syndécane-1 et le cancer du sein
Objectifs
Matériel et Méthodes
Liste de fournisseurs
Culture cellulaire
II.1 Lignées cellulaires
II.2 Entretien des cellules
II.3 Privation des cellules et traitements
Analyse des messagers
III.1 Extraction des ARN totaux
III.2 Dosage et évaluation qualitative des ARN extraits
III.3 Digestion de l’ADN bactérien
III.4 Transcription inverse
III.5 PCR en temps réel
Analyse protéique
IV.1 Extractions des protéines totales
IV.2 Dosage protéique Bradford/ préparation des échantillons
IV.3 Western blot
IV.4 Immunocytochimie
IV.5 Microscopie électronique en transmission
IV.6 Analyse du clivage protéolytique du SDC-1 par cytométrie en flux
Tests cellulaires
V.1 Etude de la prolifération cellulaire : coloration au cristal violet
V.2 Test de migration par blessure
Analyse du cycle cellulaire en cytométrie en flux
Analyse statistique
Table des matières
Résultats
Conclusion