De Descartes à Husserl
L’histoire de la pensée occidentale accorde à Descartes la paternité de la philosophie du sujet, car sa philosophie est en rupture avec la scolastique, cette philosophie héritée d’Aristote et de Saint Thomas dont il utilise pourtant la terminologie. Descartes est considéré comme le père de la pensée moderne, en ce sens qu’il est le premier à détourner l’objet de la philosophie traditionnelle, laquelle philosophie donnait la prééminence à l’être en général, au détriment de cet être particulier qui pense sa vie et cherche la vérité. C’est lorsqu’il a douté de tout que Descartes découvre le cogito (la pensée ou la conscience) qui est la pierre angulaire de toute son édifice intellectuel. Chez Descartes, le cogito ne fait qu’un seul mouvement ; le retour chez soi, puisque pour ce père de la philosophie moderne, lorsque je pense, je ne découvre qu’une seule chose : mon existence « je pense donc je suis », « je suis, j’existe ». C’est justement à ce niveau qu’il faut retourner vers Saint Augustin, qui a d’ailleurs, bien avant Descartes, découvert le cogito (bien que la tradition philosophique ne lui en accorde pas la paternité). Le cogito augustinien s’inscrit dans le cadre du doute et de l’existence1 . En effet, douter de l’existence de quelque chose me donne une certitude. C’est que ce quelque chose existe dans ma pensée, et que j’existe pour douter de l’existence de ce quelque chose. Il est aussi impossible de se tromper, si on n’existe pas. C’est là surtout qu’il faut voir le cogito augustinien sous cette forme : « Si fallos sum, signifie « si je me trompe, j’existe ». Dans cette perspective, nous pouvons dire que ni les animaux, ni les objets ne peuvent se tromper, car ils sont dépourvus d’intellect, de pensée. Il n’y a donc que l’homme qui peut se tromper, qui peut penser. Dans ce sens, se tromper est synonyme de penser. Et c’est là qu’il est permis de dire que le cogito cartésien est une inspiration augustinienne. En fait, le caractère propre du cogito veut que toute pensée s’accompagne du savoir de celui qui pense. Cela signifie que le cogito certifie surtout le primat du sujet sur tout objet. Ainsi, cette démarche cartésienne donne au sujet son fondement, puisque c’est la conscience qui s’affirme elle-même en tant qu’existence. En réalité, si on analyse ce cogito de Descartes, on constate qu’il lui manque un réalisme. C’est pour cela que sa philosophie du sujet a été critiquée par des penseurs ultérieurs, notamment Husserl, qui voit dans le cogito de Descartes un certain solipsisme. Chez Husserl, tout cogito a besoin de son cogitatum, puisque « toute conscience est conscience de quelque chose ». En fait, c’est effectivement cette critique du cogito de Descartes qui conduit Husserl à découvrir la phénoménologie. C’est la raison pour laquelle également il pose cette question : « Nous demandons : quel est ce moi qui a le droit de poser de telles questions transcendantales ?puis-je le faire en tant qu’homme naturel ?puis-je sérieusement me demander comment sortir de l’ile de ma conscience, comment ce qui, dans ma conscience, est vécu comme évidence, peut acquérir une signification objective ? En m’appréhendant moi-même comme homme naturel, j’ai d’ores et déjà effectué l’aperception du monde de l’espace, je me suis saisi moi-même comme me trouvant dans l’espace où je possède déjà un monde qui m’est extérieur. La valeur de l’aperception du monde n’est-elle pas présupposée dans la question même du problème ? […]. Il faut manifestement effectuer consciemment la réduction phénoménologique pour arriver au moi et à la conscience susceptible de poser des questions transcendantales concernant la possibilité de la connaissance transcendante ». Dans l’affirmation précédente, il est important de montrer que selon Husserl, l’homme naturel, c’est-à-dire le cogito de Descartes, n’a aucune réalité concrète pour affirmer la certitude de toute chose, car dans ce cogito, on constate une affirmation gratuite de l’existence de la pensée, sans le mettre en rapport avec le monde extérieur, qui est la vrai réalité de la conscience, puisque c’est dans ce monde que la conscience trouve le sens de toute chose. Il est sans doute incontestable que le terme phénoménologie n’a pas été créé par Husserl. Mais, il faut signaler que même si cet auteur des Méditationscartésiennes n’a inventé le mot phénoménologie (certes on le trouve chez Hegel), ce dernier a eu le mérite de lui donner une signification tout à fait nouvelle. Avec Husserl, La phénoménologie se veut être une » science rigoureuse « . Elle est la science des phénomènes, c’est-à-dire de ce qui apparaît dans l’expérience. C’est ainsi que pour Husserl, le cogito doit s’ouvrir vers l’extérieur afin de viser les objets du monde. Ici, il faut décrire la façon dont les choses se donnent à la conscience, la façon dont elles apparaissent là, devant nous. Sur ce, la conscience n’est donc pas un produit physiologique ou social dont le contenu est commun à tous les hommes, elle est essentiellement source de sens : « toute conscience est donatrice, fondatrice de sens ». Elle fait exister le monde pour nous, elle impose et développe tout un réseau de significations autour de nous, orientant notre perception du monde. Husserl lutte contre le psychologisme1 (selon lequel les lois logiques se ramènent aux lois psychologiques régissant l’esprit humain) et contre le positivisme (qui prétend éliminer la philosophie au profit des sciences), courants qui dominaient à l’époque. La véritable connaissance c’est la vision d’idées ou essences. Pour atteindre les idées, il faut éliminer les éléments empiriques. La réduction eidétique (du grec eidos qui signifie idée ou essence) consiste donc à éliminer les éléments empiriques pour atteindre ces réalités ultimes que sont les essences. Pour cela, on fera varier imaginairement les points de vue sur l’essence pour faire apparaître l’invariant. Par exemple, le triangle, quel que soit le point de vue que j’ai sur lui, a toujours trois côtés, qui font donc partie de son essence, mais il n’existe pas indépendamment de la conscience qui le vise. La vision de l’essence (et non l’essence elle-même) est originaire et non dérivée. La réduction phénoménologique consiste à ne pas croire naïvement à ce que nous offre le monde. Le monde dépasse la simple conscience que j’en ai. À la manière de Descartes, nous devons suspendre notre jugement à propos de l’existence du monde. Découvrant alors la certitude de l’existence du sujet ou de l’ego transcendantal, nous pouvons formuler le vrai concept d’intentionnalité : « toute conscience est conscience de quelque chose». Daniel Christoff confirme aussi cette idée en disant : « Le mot intentionnalité ne signifie rien d’autre que cette particularité foncière et générale qu’a la conscience d’être conscience de quelque chose, de porter, en sa qualité de cogito, son cogitatum en elle-même ». La conscience n’est jamais vide. La conscience est toujours la visée d’autre chose qu’elle-même. Pour exister, elle doit être conscience d’autre chose que soi. La conscience ne doit donc pas se perdre dans le solipsisme. En ce sens, L’homme est capable de prendre du recul par rapport à ce qui lui est extérieur et de l’envisager comme un objet à connaitre, à admettre ou à transformer à chaque nouveau regard. Cela suppose en effet qu’une conscience de soi ait déjà permis à l’homme de s’identifier et de se positionner par rapport au monde extérieur. Ce système d’intentionnalité husserlienne donne un primat à la conscience qui vise l’objet, Sartre a bien su le mettre en évidence. Mais il affirme tout de même que le « Je » de Descartes et le « Je » de Husserl est un « Je transcendantal » c’est-à-dire conçu d’une manière abstraite et déterminé par son essence. Avec Sartre, le « Je » va recevoir une nouvelle détermination à savoir « l’existence précède l’essence ». C’est ce que nous allons voir dans le sous-titre suivant
La conscience comme fondement du Néant
Comme nous l’avons analysé précédemment, l’homme ne se détermine pas par son intériorité, mais par son extériorité. Il est un existant conscient, il est conscient du monde et de lui-même. Mais chez Sartre, le terme de conscience ne doit pas être pris dans un sens étroit et limité, réduit à la connaissance, il faut le saisir dans son sens large de conscience interprétée dans une perspective existentielle, à partir des principes d’intentionnalité de la phénoménologie de Husserl, lesquels : « toute conscience est conscience de quelque chose ». Puisque pour l’homme, il existe des manières très différentes d’être consciente de quelque chose, sur un mode affectif, par exemple : perceptive, imageant, connaissant…etc. Mais malgré cette profonde orientation husserlienne de la transcendance de l’Ego, dans son premier essai phénoménologique, Sartre montre sa ferme volonté de révolutionner la réduction phénoménologique de Husserl. La réduction phénoménologie est une véritable conversion qui permet de passer d’une attitude dite naturelle à une attitude phénoménologique suspendant la thèse du monde. Elle a permis à Husserl de montrer que la connaissance est une visée de chose par la conscience, un certain rapport entre l’objet et l’acte qui le vise. Elle doit permettre de dévoiler des essences, des significations. Le moi psychologique1 est réduit au profit d’un moi pur, échappant à la réduction. C’est cette relation entre un Je, pur source du sens, un ego transcendant constituant, et une chose qui se donne elle-même, par profit, que Husserl nomme intentionnalité. Autrement dit, l’intentionnalité est simultanément visée et pensée d’un objet, mais aussi mise en jeu d’une signification, puisque l’objet ne survient que grâce au projet signifiant de la conscience vers lui. On peut donc dire que ce principe d’intentionnalité est un des points fondateurs de l’ontologie sartrienne. Pour Sartre, la philosophie de Husserl a permis de renvoyer dos à dos les deux positions réductrices du matérialisme et de l’idéalisme. La conscience n’est pas dans le monde, et le monde n’est pas dans la conscience. Les deux formes qui composent la philosophie de l’immanence, qui sont pour Sartre le matérialisme et l’idéalisme doivent être écartées pour instaurer une philosophie de la transcendance. Chez Sartre, la notion de transcendance ne doit pas être prise comme la transcendance de Dieu au sens où Dieu est considère comme extérieur au monde. Tout comme chez Levinas, chez Sartre, le mot transcendance doit être pris d’une manière conforme à l’étymologie latine du terme c’est-à-dire construire à partir de trans (au-delà) et scandere (monter). Il doit être compris comme une relation dynamique, comme un mouvement, comme l’acte même de la conscience intentionnelle qui vise le monde. De ce fait, la transcendance sartrienne désigne ce mouvement de la conscience qui va au-delà d’elle-même et de ce qu’elle est. La conscience ne saisit donc pas l’objet tel qu’il est, mais l’appréhende dans son incomplétude et en le dépassant, vers ce qu’elle n’est pas. La conscience est alors considérée comme une spontanéité impersonnelle, c’est à-dire tout est rejeté en dehors de la conscience. Etre conscient de quelque chose, c’est être en face d’une présence concrète et pleine, qui n’est pas la conscience. La transcendance est une structure constitutive de la conscience. Et la conscience qui n’a rien de substantiel n’existe qu’en tant qu’elle vise activement l’être en-soi. La conscience n’a rien de substantielle, elle est un néant, car le néant ne peut être conçu à partir d’un être qui est plénitude ; c’est donc par la conscience seule que le néant peut venir au monde : la conscience est en effet néantisante, c’est-à dire, qu’elle peut nier l’en-soi. Ce néant n’est pas un néant métaphysique, comme celui de Parménide qui oppose radicalement l’être du non-être et qui parait constituer pour lui une sorte d’envers absolu du premier. Sartre en donne une interprétation à la fois plus phénoménologique et humaniste. Pour lui, le néant est relatif à l’en-soi, qui est à la fois mouvement vers l’en-soi, visée de l’en-soi et acte de détachement, d’arrachement à l’en-soi. Autrement dit, la conscience est donc néant mais néant d’être. C’est l’être qu’elle dévoile de front, ne s’appréhendant elle-même, latéralement, que sur lui. Et elle s’y projette d’autant plus passionnément qu’elle ne peut le dévoiler d’un bloc : n’étant que point de vue, elle manque de tout ce qu’elle ne néantise pas. Le monde, fond sur lequel chaque « ceci » se détache, lui apparait comme le champ infini d’autres néantisations possibles, parmi lesquelles, étant un point de vue spontané, elle choisit ses possibles. La conscience est arrachement au monde par néantisation. Conception clé de l’ontologie sartrienne, la néantisation n’est pas la négation qui, à l’instar de l’affirmation, est dès lors du discours. Elle est comme la structure du réel. Elle n’est pas non plus synonyme d’anéantisation c’est-à-dire le contraire de la création, mais production au sein de l’être de néant ou non-être. Le verbe néantiser introduit par Sartre désigne la suppression par la visée de la conscience, de tout ce qui ne correspond pas à son projet ou à son intention ; par exemple, j’ai un rendez-vous avec un ami dans un lieu public. Je néantise tous les autres visages, parce qu’ils ne correspondent pas à celui que je recherche. Ainsi, la néantisation désigne l’acte (l’interrogation, le doute, la destruction, l’attente, le regret…), par lequel l’homme introduit du néant au cœur de l’être. C’est dans cette perspective que l’auteur affirme ceci : « L’homme est l’être par qui le néant vient au monde ». Bien entendu, dans l’être brut ne peuvent préexister des relations ou des significations proprement dites : il faudrait alors qu’il cesse d’être « en-soi », qu’il conçoit des projets par rapport auxquels des relations pourraient se définir ; bref, qu’il devienne conscience et existe « pour-soi ». Il n’y a vraiment de substance, d’avant, d’après, de droite ou de gauche qu’en fonction des projets humains. Mais pour qu’une liberté les fasse surgir, il faut bien, puisqu’elle n’est que néantisation et que s’y révèle quelque chose. C’est ce que Sartre a tenté d’exprimer en parlant des quasi-différenciations de l’en-soi : « quasiavant », « quasi-après », « quasi-affirmation ».
Les limites du concept du regard sartrien
Bien entendu, Sartre, dans ses premières investigations philosophiques sur le regard, n’avait pas pu éviter cette dimension objective du regard. Nous retiendrons surtout l’exemple suivant, révélé par Sartre lui-même : « […], la relation première par quoi autrui se découvre est l’objectivité »1. Ce constat de Sartre justifie très bien cette objectivité du regard. C’est dans et à travers cette dimension objective qu’autrui se découvre. Ainsi, il est clair que jusqu’ici, l’interprétation sartrien du regard n’a pu franchir l’objectivable. L’autre reste toujours celui qui, par son regard, me transforme en objet et me vole mon monde. Toutefois, ce n’est qu’après que Sartre améliore ses analyses pour dépasser cette position du regard d’autrui. Ce dernier va se rendre compte que la voix qu’il entend, c’est celle d’un homme et non le chant d’un phonographe. En plus, selon toujours notre auteur : « […], Il est infiniment probable que le passant que j’aperçois soit un homme et non un robot perfectionné »2. Cela montre que Sartre est en train de dépasser l’objectivable. Il a opéré des rectifications dans ses analyses du regard. Le regard va donc devenir, pour lui, un regard communicatif lié à la notion de solidarité. Ce passage qui suit, nous montre très bien cette reconnaissance de Sartre envers autrui. Ce dernier, n’est pas uniquement celui qui m’objective, mais il est aussi un sujet. Sartre dira que : « Dans le phénomène du regard, autrui est par principe ce qui ne peut être objet »1. Sartre, après avoir dépassé la dimension objective du regard, s’aperçoit que réduire autrui seulement à son regard, c’est méconnaitre son sujet qu’est l’homme. Le fait de le traiter comme un sujet, comme un être présent, c’est reconnaitre aussi que je ne peux non seulement le définir, mais aussi que je ne peux le classer. Autrui apparait comme étant inépuisable, gonflé d’espoir, et qu’il est seul à disposer de ses espoirs. En revanche, Sartre pense que le regard ne se limite pas aux yeux, dans la mesure où il a un caractère transcendant, il va au-delà de nous. Derrière les yeux, il y a une conscience qui juge. Le passage suivant illustre bien cette idée : « Si j’appréhende le regard, je cesse de percevoir les yeux […] ce n’est pas quand les yeux nous regarde qu’on peut les trouver beaux ou laids qu’on peut remarquer leur couleur »2. Aux prises avec le regard d’autrui, je cesse de percevoir ces yeux comme des objets. Cette méfiance sartrienne au surgissement du regard met en évidence sa séparation avec Husserl sur la manière de concevoir l’autre. Husserl déclare qu’autrui est une condition indispensable à la constitution d’un monde et de moi-même. De ce fait, mon expérience me permet de percevoir les autres comme sujets existant dans le monde. C’est dans ce sens que Husserl stipule : « J’ai en moi, dans le cadre de ma vie de conscience pure transcendentalement réduite, l’expérience du monde et des autres »1. Chez Husserl, la reconnaissance d’autrui ne pose pas de problème. Il suffit de voir un autre homme, le corps vivant nous donne déjà un indice que c’est une autre conscience.
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Table des matières
INTRODUCTION
PREMIÈRE PARTIE : A LA SOURCE DE LA PHILOSOPHIE SARTRIENNE
CHAPITRE I : LE PROBLEME DU COGITO
I-DE DESCARTES A HUSSERL
II- L’ANALYSE SARTRIENNE DU COGITO
CHAPITRE II : LE COGITO SARTRIEN A LA LUMIERE DE SA DIFFERENCE FONDAMENTALE AVEC L’EN-SOI ET L’EN-SOI-POUR-SOI
I-LA CONSCIENCE COMME FONDEMENT DU NEANT
II- LE PROJET DU POUR-SOI
CHAPITRE III : L’APPARITION D’AUTRUI ET L’EPREUVE DU SUJET
I- LE POUR-AUTRUI
II- LE POUR-SOI FACE AU REEL
DEUXIEME PARTIE : LA THEMATIQUE DU REGARD ET SES SIGNIFICATIONS
CHAPITRE I: SENS ET SIGNIFICATION DU REGARD
I- LE JEU DU SYMBOLISME DU REGARD COMME CONCEPT PHILOSOPHIQUE
II- INSTRUMENT D’OBJECTIVATION
III- PUISSANCE DIVINE DU REGARD
CHAPITRE II : EFFETS DU REGARD SARTRIEN
I-ALIENATION D’AUTRUI
II- SOURCE DE CONFLITS
III-RELATION DE MEFIANCE AVEC L’HOMME ET AVEC DIEU
CHAPITRE III : CRITIQUE DU REGARD SARTRIEN
I- LES LIMITES DU CONCEPT DU REGARD SARTRIEN
II- LE REGARD DE SARTRE, UN REGARD SANS VISAGE
III- POUR UNE POSITIVITE DU REGARD
TROISIEME PARTIE: BREF COMMENTAIRE
BIBLIOGRAPHIE COMMENTEE
GLOSSAIRE
FUTURE PLAN DE THESE
CONCLUSION
RECHERCHES BIBLIOGRAPHIQUES
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