Le reflux gastro-oesophagien et l’oesophagite par reflux

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Interactions médicamenteuses

Les inhibiteurs de la pompe à protons peuvent interagir avec d’autres molécules de plusieurs façons différentes. Nous retrouvons des interactions dues à la modification du pH gastrique ainsi que des interactions dues à une inhibition compétitive au niveau des CYP2C19.
En effet, de par leur mécanisme d’action qui repose sur la diminution du pH gastrique, les IPP interagissent avec les médicaments dont l’absorption est pH dépendante. La modification du pH gastrique peut entrainer soit une augmentation soit une diminution de l’absorption. Parmi les médicaments dont la prise concomitante d’IPP augmente l’absorption, nous pouvons noter la présence de la digoxine. Cela peut donc entrainer une augmentation des concentrations plasmatiques et de la toxicité de cette dernière. Pour éviter cela, un dosage de la digoxinémie doit être réalisé en début et en fin de traitement par inhibiteurs de la pompe à protons.
A l’inverse, lorsque la prise d’IPP diminue l’absorption de certaines molécules, cela expose les patients à un défaut d’efficacité de ces médicaments. Cela se produit en cas de prise simultanée d’IPP et :
– D’ulipristal (contraception d’urgence)0
– D’antinéoplasiques inhibiteurs de tyrosine kinase [ITK] (sauf imatinib et régorafénib)0
– D’antifongiques azolés0
– D’antirétroviraux, cela conduit même à une contre-indication dans le cas du nelfinavir car la prise d’IPP peut entrainer un échec thérapeutique.
En dehors des interactions dues à la modification du pH gastrique, les IPP réalisent également une inhibition compétitive au niveau des CYP2C19. Ce phénomène a un impact sur la métabolisation des substrats de ce cytochrome qui sont, entre autres, le clopidogrel, les anti-vitamine K, la phénytoïne et le diazépam.

Indications et recommandations de la HAS

Comme tout médicament, les inhibiteurs de la pompe à protons ont reçu une autorisation de mise sur le marché pour des indications précises. Les indications des IPP sont au nombre de 4, que nous allons détailler.

Le reflux gastro-oesophagien et l’oesophagite par reflux

Le reflux gastro-oesophagien ou RGO se définit comme la remontée intermittente du contenu gastrique dans l’oesophage, en dehors d’efforts de vomissements. Il se traduit typiquement par des sensations de brûlures remontant derrière le sternum, que l’on nomme pyrosis, et/ou par des régurgitations acides. Les symptômes apparaissent généralement après les repas, la nuit ou en position allongée. La prévalence du pyrosis fréquent (plus ou une fois par semaine) est de l’ordre de 8% dans la population adulte française, soit environ 3 800 000 personnes concernées.
Le RGO évolue souvent de façon chronique et récidivante, la plupart du temps sans complication. Les conséquences graves sont l’oesophagite par reflux, la sténose peptidique, l’endobrachyoesophage exposant à un risque de cancer ou plus rarement d’hémorragie digestive. Le diagnostic du RGO se pose de manière différente en fonction du contexte physiopathologique. On distingue ainsi, 4 cas différents :
– Présence de symptômes typiques du RGO sans signe d’alarme (amaigrissement, dysphagie, hémorragie digestive, anémie) chez un sujet de moins de 50 ans : aucun examen complémentaire n’est réalisé.
– Symptômes de RGO chez un sujet âgé de 50 à 60 ans : l’endoscopie oesogastro-duodénale est recommandée s’il existe des facteurs de risque néoplasique associés (tabac ou alcool). Sinon il n’existe pas de consensus pour la réalisation de l’endoscopie.
– Présence de symptômes de RGO chez un sujet âgé de plus de 60 ans ou résistance au traitement médical ou récidive rapide des symptômes ou présence de signes d’alarme : dans ces cas, l’endoscopie oesogastro-duodénale est indiquée. En effet, chez un sujet ayant un reflux chronique, l’endoscopie peut fournir des renseignements sur la présence ou non d’une oesophagite, la sévérité de celle-ci, l’existence d’une hernie hiatale ou de lésions anatomiques favorisant le reflux.
– En cas de symptômes extra-digestifs isolés ou prédominants que l’on suspecte d’être en rapport avec un RGO, l’endoscopie et la pHmétrie sont utilisées pour affirmer ou infirmer l’existence d’un RGO.
Une fois le diagnostic de reflux gastro-oesophagien sans oesophagite établi, le traitement mis en place va différer en fonction de la symptomatologie. Si les symptômes typiques du RGO ne sont que rarement présents (moins d’une fois par semaine), les inhibiteurs de la pompe à protons ne sont pas indiqués. On mettra en place un traitement par anti-acides, alginates ou anti-H2.
Au contraire, si les symptômes sont rapprochés (une fois par semaine ou plus), le traitement de première intention est l’instauration d’un IPP pendant 4 semaines à demi-dose. Tous les IPP sont indiqués dans la prise en charge symptomatique du RGO sans oesophagite. Nous pouvons noter qu’en cas de réponse insuffisante par un traitement à demi-dose, un traitement à pleine dose par oméprazole ou lansoprazole peut être instauré.

Lésions gastroduodénales dues aux AINS

Environ un tiers des ulcères gastro-duodénaux sont attribués à la prise d’anti-inflammatoires non stéroïdiens ou d’aspirine à faible dose. Le mécanisme d’action des AINS non sélectifs repose sur l’inhibition des cyclooxygénases (COX 1 et 2) qui sont des enzymes qui transforment l’acide arachidonique en prostaglandines. L’activation de COX-1 « conduit à la production de prostacycline qui, […] libérée par la muqueuse gastrique, protège les cellules d’un excès d’acidité et active la synthèse de mucus »(4). Les lésions ulcéreuses causées par la prise d’AINS sont donc dues à l’inhibition de la COX-1 qui entraine un arrêt de la sécrétion du mucus protecteur de l’estomac. Les AINS sélectifs (coxibs) qui inhibent la COX-2 en préservant l’activité COX-1 réduisent le risque de complications ulcéreuses sans toutefois le supprimer. L’aspirine administrée à faible dose, à visée antiagrégante, conserve un potentiel ulcérogène et expose au risque de complications hémorragiques.
Dans cette indication-là, les IPP peuvent être utilisés en prévention des lésions gastroduodénales. La mise en place d’un co-traitement par IPP est recommandée uniquement chez les sujets à risque.
– Patients de plus de 65 ans.
– Patients ayant des antécédents d’ulcère gastroduodénal.
– Patients déjà traités par antiagrégants plaquettaires, anticoagulant ou corticoïdes.

Ulcères gastroduodénaux

L’ulcère gastroduodénal concerne l’estomac (ulcère gastrique) ou le duodénum (ulcère duodénal) et se caractérise par une perte de substance importante de la paroi interne gastrique ou duodénale creusant en profondeur cette paroi digestive jusqu’à sa couche externe musculeuse. Dans cette partie, nous allons aborder les ulcères gastroduodénaux liés à la colonisation du tube digestif par Helicobacter pylori et les autres types d’ulcères.
Dans le cas des ulcères dus à Helicobacter pylori, le diagnostic est posé après réalisation d’un test à l’urée qui met en évidence la présence de ces bactéries dans l’estomac. Pour prendre en charge cette infection bactérienne à l’origine d’ulcère, les IPP sont associés à une antibiothérapie appropriée. En général, nous retrouvons la clarithromycine à 1g/j, associée à l’amoxicilline à 2g/j. Pour compléter la trithérapie recommandée dans l’éradication de cette bactérie, nous pouvons utiliser l’oméprazole, le lansoprazole, le pantoprazole ou le rabéprazole à pleine dose matin et soir pendant 7 jours ou l’ésoméprazole à demi-dose matin et soir pendant 7 jours.
D’autre part, nous avons également des ulcères gastroduodénaux évolutifs qui ne sont pas liés à une infection par Helicobacter pylori. Ils sont assez rares, mais leur proportion est croissante du fait de la régression du nombre d’UGD liés à H. pylori. Nous retrouvons ce type de lésions chez les personnes atteintes de morbidités lourdes, notamment cardio-vasculaires, rénales, hépatiques ou pancréatiques. Elles sont liées à une altération des mécanismes de défense de la muqueuse digestive. Il faut distinguer ce type d’ulcère des ulcères de stress, qui surviennent chez les patients hospitalisés ayant une ou plusieurs défaillances viscérales.
Dans ce type d’ulcère, les IPP qui peuvent être prescrits sont les suivants : lansoprazole, oméprazole, pantoprazole et rabéprazole à pleine dose pendant 4 à 8 semaines (voire 12 semaines pour le rabéprazole) en cas d’ulcère gastrique. Si le patient présente un ulcère duodénal, nous pouvons utiliser les mêmes IPP à pleine dose mais la durée de traitement recommandée est plus faible : 4 semaines, voire 8 semaines pour le rabéprazole. L’ésoméprazole n’a pas d’indication dans la prise en charge des ulcères évolutifs sans infection à Helicobacter pylori. Une fois cette durée de traitement dépassée, la prise en charge de l’acidité gastrique se fait par anti-H2. Si ces molécules n’ont pas d’efficacité, alors nous pouvons instaurer un traitement d’entretien, au long cours, par oméprazole (seul IPP à avoir cette indication) à la dose minimale efficace.

Le syndrome de Zollinger-Ellison

Le syndrome de Zollinger-Ellison (SZE) est caractérisé par une « maladie peptique sévère (ulcère/maladie oesophagienne) due à une hypergastrinémie secondaire à un gastrinome entraînant une hypersécrétion gastrique acide »(6).
C’est une maladie qui touche environ 1-2/1 000 000 personnes chaque année. Le SZE est en général diagnostiqué dans la 5ème décennie. Les manifestations les plus fréquentes sont une douleur abdominale (typiquement épigastrique) et une diarrhée. Dans 44 % des cas, des brûlures d’estomac sont présentes. Les autres signes incluent nausée, vomissements, malabsorption et perte de poids. Un ulcère compliqué peut être la première manifestation (hémorragie, perforation, pénétration gastro-intestinales). Le SZE est dû à une tumeur (gastrinome) secrétant de la gastrine, en général localisée dans le duodénum (50-85 %), pancréas, ganglions lymphatiques abdominaux ou, d’autres sites (coeur, ovaires, foie…).
Le SZE est sporadique (75 %) ou associé à la néoplasie endocrinienne multiple de type 1 (NEM1), de transmission autosomique dominante et due à des mutations du gène MEN1 (11q13), codant pour la ménine liant et régulant l’activité de facteurs de transcription.
Le diagnostic est suspecté à partir du tableau clinique. La gastrinémie à jeun (GJ) est presque toujours augmentée. Si la GJ est augmentée 10 fois ou plus et que le pH gastrique est inférieur à 2, le diagnostic est établi.
L’hypersécrétion acide gastrique doit être contrôlée de manière constante et durable. Les inhibiteurs de la pompe à protons sont un traitement de choix étant donné leur efficacité longue durée (une ou deux doses quotidiennes). Les antagonistes des récepteurs H2 à l’histamine sont aussi efficaces mais nécessitent souvent l’administration de fortes doses. La prise en charge inclut également le traitement de la tumeur car 60-90 % sont malignes. Chez les patients non-NEM1 avec une tumeur localisée, une chirurgie est recommandée. Chimiothérapie, biothérapie (analogues de la somatostatine/interféron), embolisation des métastases hépatiques et chirurgie sont utilisées en cas de métastases.
Le pronostic est favorable (survie à 10 ans de 90-100 %) s’il n’y a pas de métastase hépatique (65-75 % des cas). Sinon, la survie à 10 ans est de 20-40 %. Les patients avec une NEM1 sont rarement opérés car les tumeurs sont multiples et métastasent dans les ganglions lymphatiques. Cependant, seuls 15 % ont une évolution agressive et la survie à 10 ans est de 80-98 %.
Dans cette pathologie rare, les IPP ont donc une place centrale dans la prise en charge globale du patient. Chez ces patients, la posologie doit être ajustée individuellement et le traitement poursuivi aussi longtemps que nécessaire. La posologie minimale, à mettre en place en première intention est de 60mg/j d’oméprazole, de lansoprazole, de rabéprazole ou de 80mg/j d’ésoméprazole ou de pantoprazole.

Recommandations générales françaises sur les prescriptions d’IPP

Nous venons d’énoncer les indications principales des inhibiteurs de la pompe à protons, celles pour lesquelles des études ont été menées et ont prouvé leur efficacité et leur innocuité. Dans le cadre des indications citées précédemment, il n’a été prouvé aucune différence d’efficacité entre les différents IPP. C’est pourquoi la prescription doit observer la plus stricte économie d’après les recommandations de l’assurance maladie.
Ci-dessous, nous retrouvons les coûts de traitement au 1er janvier 2010. Nous pouvons donc dire que les IPP qu’il est recommandé de prescrire sont le lansoprazole, le pantoprazole et l’oméprazole. Nous notons également que pour chaque indication et chaque molécule, le coût de traitement par générique d’IPP est inférieur au coût du traitement par le princeps.
Nous relevons également certains points importants des recommandations sur les prescriptions des IPP comme le fait que ces molécules ne doivent en aucun cas être prescrites comme traitement d’épreuve ou test thérapeutique dans le soulagement de manifestations extradigestives isolées pouvant être liées à un RGO.
De même, chez la personne âgée, les IPP ne doivent pas être prescrits sans preuve d’endoscopie, pour un ulcère gastroduodénal documenté il y a plusieurs années, ni pour la prévention des lésions en parallèle à un traitement par acide acétylsalicylique à dose antiagrégante plaquettaire.
Il convient également, chez tous les patients, de réévaluer les prescriptions d’IPP à la fin de la durée de traitement recommandée, et de toujours rechercher la dose minimale efficace dans les prises en charge au long cours, voire le traitement à la demande qui constitue la meilleure alternative.
L’assurance maladie préconise qu’à chaque renouvellement d’IPP, ou au moins 2 fois par an, il est nécessaire de se poser 3 questions :
– Peut-on diminuer les doses ?
– Peut-on passer à un traitement à la demande ?
– Est-ce le bon moment pour essayer d’arrêter ?

Effets indésirables et leurs impacts

Utilisation dans l’indication

Comme nous l’avons détaillé dans un précèdent paragraphe, les durées d’utilisation recommandées des IPP peuvent varier en fonction des indications, elles sont en général de 4 semaines et dépassent très rarement les 8 semaines. Quand les IPP sont utilisés dans ce contexte là, ce sont des molécules relativement bien tolérées, avec une fréquence de survenue d’effets indésirables assez faible.
Les effets indésirables qui peuvent survenir le plus fréquemment lors de l’utilisation d’IPP, même lorsque la durée de prise est conforme aux recommandations, sont :
– Des troubles digestifs, qui peuvent se manifester par l’apparition de diarrhées, constipation, douleur abdominales, nausées et/ou vomissements.
– Des céphalées et vertiges.
– Des troubles cutanés qui peuvent être de simples éruptions, urticaires ou prurit isolés mais qui peuvent aller jusqu’à une photosensibilisation, un syndrome de Stevens-Johnson ou un syndrome de Lyell.
En dehors de ces effets indésirables qui sont considérés comme fréquents, nous pouvons également retrouver des cas de confusion mentale, particulièrement chez les patients âgés, suite à la prise d’inhibiteurs de la pompe à protons. Nous notons aussi des cas isolés d’élévation réversible des transaminases qui peuvent évoluer en atteintes hépatiques aigues. Pour finir, il est décrit de rares cas de gynécomastie suite à un traitement par inhibiteurs de la pompe à protons.

Utilisation au long cours

Nous venons de voir dans le paragraphe précédent, que le nombre d’effets indésirables qui peut apparaitre suite à un traitement par inhibiteurs de la pompe à protons, d’une durée conforme aux recommandations de prescription, est assez faible.
Cependant, en pratique, les traitements par IPP sont très rarement réévalués. Cela conduit à une chronicité de la prise du traitement, qui peut durer plusieurs années voire toute la vie du patient. De ce fait, la prescription de ces molécules sur des durées si longues, entraine des effets indésirables totalement différents et souvent bien plus graves que ceux qui sont liés à une durée de traitement conforme aux recommandations.
L’utilisation des IPP en traitement chronique constituant une utilisation non conformes aux recommandations, et donc un mésusage, nous détaillerons les effets indésirables dus à l’utilisation au long cours des IPP dans le paragraphe traitant de ce sujet.

Problèmes de santé publique et iatrogénie médicamenteuse

Définition du bon usage

Le bon usage des médicaments peut être défini simplement comme l’utilisation du bon médicament, à la bonne dose, pendant la durée nécessaire, pour un patient donné qui le tolère correctement. Un médicament est donc bien utilisé quand il est prescrit, délivré et administré dans des conditions qui ont été étudiées et définies dans des référentiels officiels tels que l’autorisation de mise sur le marché. Ce sont ces circonstances qui garantissent la sécurité d’emploi du médicament et assurent au patient que, dans ces conditions, les avantages de prendre ce médicament sont supérieurs aux risques qu’il peut encourir avec ce traitement.
Si le médicament est utilisé en dehors de ce cadre, on parle alors de mésusage.

Mésusage

Le mésusage est une utilisation intentionnelle et inappropriée d’un médicament ou d’un produit, non conforme à l’autorisation de mise sur le marché ou à l’enregistrement ainsi qu’aux recommandations de bonnes pratiques.
On peut donc parler de mésusage lorsqu’un traitement est prescrit en dehors des indications pour lesquelles il a été mis sur le marché, ou bien quand les durées de prescription et d’administration sont largement supérieures à celles qui figurent dans les recommandations d’utilisation.

Conséquences cliniques

Les inhibiteurs de la pompe à protons sont une classe de médicament qui est souvent soumise à un mésusage de la part des prescripteurs. Cela se matérialise par des prescriptions en dehors des indications de mise sur le marché et des recommandations de la Haute Autorité de Santé mais également par le fait que les prescriptions ne sont pas réévaluées aussi souvent qu’il le faudrait, ce qui conduit à des traitements d’une durée excessive. Cela entraine l’apparition d’effets indésirables nombreux et parfois graves, chez les patients.

Ostéoporose et risque de fracture

Parmi les effets indésirables qui peuvent apparaitre suite à la prise d’un traitement par IPP au long cours, nous retrouvons le plus fréquemment une augmentation du risque de fracture. Cet effet indésirable est majoré chez les personnes âgées et est dû à un défaut d’absorption du calcium par modification du pH gastrique. Cette conséquence de la prise d’inhibiteurs de la pompe à protons au long cours est largement décrite dans la littérature(8,9). Il a été mis en évidence une augmentation de 30% du risque de fracture suite à traitement par IPP d’une durée de plus 2 ans, par rapport aux personnes ne suivant pas de traitement par IPP dans l’étude de Corley. De plus, il a été montré que les articulations les plus touchées sont la hanche, le poignet et les vertèbres.

Effet rebond de la sécrétion acide

En dehors d’une augmentation du risque de fracture, la prise d’inhibiteurs de la pompe à protons pendant une durée supérieure à 4 semaines, entraine un rebond de l’acidité gastrique à l’arrêt du traitement(10,11). La proportion de cas de dyspepsie, de brûlures d’estomac ou de régurgitation acide dans le groupe des patients sous IPP était de 22% après arrêt du traitement contre 7% pour le groupe placebo dans une de ces études. Ce rebond d’acidité apparait environ 15 jours après l’arrêt du traitement et peut durer de quelques jours à plusieurs semaines mais est toujours réversible.
Ce phénomène est dû au fait que les IPP entrainent une diminution de l’acidité stable et importante, et une augmentation de la gastrine circulante (par inactivation du rétrocontrôle négatif). La gastrine est une hormone qui a une action trophique sur les cellules entérochromaffines de la muqueuse fundique. Ces cellules sécrètent de l’histamine, qui active donc les récepteurs H2 des cellules pariétales, responsables de la sécrétion d’acide gastrique. Pendant un traitement par IPP, cette hypersécrétion acide est inhibée et l’action de la gastrine est régulée. Mais lorsque le traitement est arrêté, les cellules pariétales produisent une grande quantité d’acide gastrique, qui est responsable de l’effet rebond.
Une des alternatives serait de proposer une diminution graduelle de l’utilisation des IPP sur plusieurs semaines jusqu’à arriver à un sevrage durant lequel il serait possible d’utiliser uniquement une « méthode barrière » grâce aux alginates, tels que le Gaviscon®.

Troubles électrolytiques et carences

Hypomagnésémie

Il est également prouvé que la prise à long terme d’inhibiteurs de la pompe à protons induit une hypomagnésémie chez les patients(12). Parmi les patients de l’étude, les utilisateurs d’IPP (n = 207) avaient un taux moyen de Mg de 1,91mg/dL, et les non-utilisateurs (n = 280) 2,00mg/dL, Ce trouble électrolytique serait dû à une modification de l’absorption du magnésium mais aucun mécanisme n’a été clairement mis en évidence et plusieurs théories s’opposent. Un taux faible de magnésium dans l’organisme est responsable de fatigue, d’irritabilité, de spasmes et contractures musculaires mais également de troubles plus graves comme une arythmie cardiaque ou des convulsions. C’est pour cela qu’aux Etats-Unis, la FDA recommande aux médecins de surveiller les taux de magnésium pour les patients suivant un traitement par IPP au long cours (de plus d’un an), et à l’instauration du traitement.
L’hypomagnésémie se corrige lorsque le traitement par inhibiteurs de la pompe à protons est arrêté et grâce à une supplémentation orale ou intraveineuse de magnésium.

Carence en vitamine B12

Tout comme une diminution d’absorption du magnésium, un traitement au long cours par IPP peut entrainer une modification de l’absorption de la vitamine B12. En effet, pour que la vitamine B12 soit séparée des protéines auxquelles elle est liée, un milieu acide est nécessaire. La diminution de l’acidité gastrique par les IPP empêche la libération de la vitamine B12 qui ne peut donc pas être absorbée au niveau de l’iléon. Ce phénomène est majoritairement observé chez les personnes âgées qui sont traitées chroniquement par IPP(13).
Au vu du mécanisme d’action de la carence, nous pouvons donc penser qu’à très long terme, cette diminution d’absorption puisse entrainer une anémie mégaloblastique par carence en vitamine B12.

Infections digestives

Le but d’un traitement par inhibiteurs de la pompe à protons est d’augmenter le pH gastrique. Cependant, l’acidité gastrique est un mécanisme de défense de l’organisme contre les infections par des agents pathogènes exogènes. De ce fait, la prise d’IPP pendant des durées supérieures à celles recommandées, constitue une altération des défenses de l’organisme qui est donc plus vulnérable aux infections, notamment les infections communautaires à Clostridium difficile(14). Certaines études ont montré que le risque d’infection par cette bactérie sous IPP est multiplié par 2 ou 3. Il a également été mis en évidence un lien entre la dose d’IPP et l’intensité des diarrhées à C. difficile. Le risque de rechute suite au traitement des diarrhées à C. difficile est également augmenté d’environ 40% chez les patients sous IPP(15).
D’autres infections gastro-intestinales semblent plus fréquentes chez les patients consommant des inhibiteurs de la pompe à protons. On note une augmentation des infections à Salmonelle, Campylobacter et Shigella chez ces personnes-là(16).

Infections pulmonaires

De même que les infections digestives, il semblerait que la prise d’un traitement par IPP augmenterait le risque d’infection pulmonaire(17). Cependant, l’augmentation du risque d’infection pulmonaire ne serait pas corrélée à la durée de traitement par IPP, mais à la dose prise par le patient, avec un sur-risque d’environ 50% pour des doses élevées.
Le mécanisme mis en cause serait l’augmentation de la prolifération bactérienne dans l’estomac suite à la diminution de l’acidité, qui, par des phénomènes de reflux du liquide gastrique, contaminerait les poumons avec des germes normalement absents de l’estomac.

Néphrite tubulo-interstitielle

La néphrite tubulo-interstitielle est une inflammation de la région du rein appelée interstitium, qui consiste en un ensemble de cellules, de matrice extracellulaire et de liquide entourant les tubules rénaux. Ce phénomène fait partie des effets indésirables des inhibiteurs de la pompe à protons, et est lié à la classe thérapeutique entière.
Plusieurs études(18,19) démontrent que ce phénomène serait dû à une réaction immuno-allergique, impliquant une réaction non dose-dépendante, non spécifique du sexe et/ou de l’âge des patients. La seule façon fiable de diagnostiquer une néphrite interstitielle est de réaliser une biopsie rénale. La fonction rénale revient à la normale dans la plupart des cas décrits après l’arrêt du traitement par IPP et la mise sous corticostéroïdes du patient. Cependant, dans quelques rares cas, l’insuffisance rénale se chronicise en dépit des traitements mis en place.

Développement de cancers digestifs

Depuis la mise en place du traité européen de Maastricht en 2012, les patients qui prennent un traitement par inhibiteur de la pompe à protons sont considérés comme personnes à risque de cancer gastrique. On ne retrouve pas de lien de causalité entre la prise d’IPP et la survenue de cancers digestifs dans la littérature. Cependant, de par leur mode d’action antiacide, les IPP favorisent l’implantation d’Helicobacter pylori dans l’estomac en masquant les symptômes caractéristiques de cette infection. Or, nous savons que la présence d’H. pylori est un facteur d’inflammation chronique des muqueuses de l’estomac qui peut causer des lésions évoluant en carcinome.
Les IPP sont également cités comme facteurs de risque dans le développement des cancers de l’oesophage ou colorectaux, mais aucun lien direct n’a été établi à ce jour du fait de la complexité des mécanismes cancéreux et du nombre important d’autres facteurs de risque.

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Table des matières

PREAMBULE :
PARTIE 1 : LES INHIBITEURS DE LA POMPE A PROTONS :
1. Généralités
2. Structure des molécules
3. Pharmacodynamie
4. Pharmacocinétique et interactions médicamenteuses
4.1. Absorption
4.2. Distribution
4.3. Métabolisme
4.4. Elimination
4.5. Interactions médicamenteuses
5. Indications et recommandations de la HAS
5.1. Le reflux gastro-oesophagien et l’oesophagite par reflux
5.2. Lésions gastroduodénales dues aux AINS
5.3. Ulcères gastroduodénaux
5.4. Le syndrome de Zollinger-Ellison
5.5. Recommandations générales françaises sur les prescriptions d’IPP
6. Contre-indications
7. Effets indésirables et leurs impacts
7.1. Utilisation dans l’indication
7.2. Utilisation au long cours
8. Problèmes de santé publique et iatrogénie médicamenteuse
8.1. Définition du bon usage
8.2. Mésusage
8.3. Conséquences cliniques
8.3.1. Ostéoporose et risque de fracture
8.3.2. Effet rebond de la sécrétion acide
8.3.3. Troubles électrolytiques et carences
8.3.3.1. Hypomagnésémie
8.3.3.2. Carence en vitamine B12
8.3.4. Infections digestives
8.3.5. Infections pulmonaires
8.3.6. Néphrite tubulo-interstitielle
8.3.7. Développement de cancers digestifs
8.3.8. Sur-risque de mortalité
8.3.9. Risque de démence
8.4. Conséquences économiques
PARTIE 2 : ETUDE OBSERVATIONNELLE A L’HOPITAL :
1. Contexte
1.1. Présentation du CHU de la Timone
1.2. Activités de pharmacie clinique
1.3. Présentation Equipe Mobile de Gériatrie
2. Matériel et méthode
2.1. Objectif de l’étude
2.2. Critères d’inclusion
2.3. Recueil des données
2.4. Caractéristiques étudiées
2.5. Durée de l’étude
3. Résultats
3.1. Population étudiée
3.2. Prescriptions d’IPP
3.3. Recommandations de l’EMG
4. Discussion
5. Conclusion
PARTIE 3 : ETUDE OBSERVATIONNELLE A L’OFFICINE :
1. Présentation de l’environnement officinal
2. Matériel et méthode
2.1. Objectif de l’étude
2.2. Critères d’inclusion
2.3. Recueil des données
2.4. Caractéristiques étudiées
2.5. Durée de l’étude
3. Résultats
3.1. Population étudiée
3.2. Prescriptions d’IPP
4. Discussion
5. Conclusion
PARTIE 4 : SYNTHESE DES ETUDES ET PERSPECTIVES :
1. Mise en parallèle des situations à l’officine et à l’hôpital
2. Limites des études
2.1. L’échantillon
2.2. Le recueil des données
3. Voies d’amélioration
3.1. Le médecin généraliste
3.2. L’hôpital
3.3. Le patient
3.4. Le pharmacien d’officine
3.4.1. Inhibiteurs de la pompe à protons sur ordonnance
3.4.2. Inhibiteurs de la pompe à protons sans ordonnance
3.4.3. Arrêt du traitement par IPP
3.4.4. Solutions de remplacement des IPP
3.4.4.1. Règles hygiéno-diététiques
3.4.4.2. Autres traitements antiacides
CONCLUSION :
BIBLIOGRAPHIE :

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