Le recrutement leucocytaire et l’adhésion dans l’inflammation

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Thérapeutiques

Il n’existe pas de traitement curatif de la SEP. La thérapeutique repose ainsi sur 3 axes : le traitement des poussées (pour réduire leur durée et intensité), le traitement de fond (ayant pour objectif d’être adapté à la forme clinique) et le traitement des symptômes (pour améliorer la qualité de vie).

Le traitement des poussées

Le traitement classique de la poussée, ponctuel, repose sur l’administration intraveineuse (IV) d’un bolus de méthylprednisolone, le Solumédrol. Cette perfusion se fait à forte dose (de 500 mg à 1g par jour) sur trois heures pendant 3 à 5 jours. Une hospitalisation s’impose, elle peut être traditionnelle, de jour ou à domicile. Pendant cette période, une supplémentation en potassium est nécessaire pour contrer les effets minéralocorticoïdes de classe du Solumédrol et donc l’hypokaliémie. La courte durée du traitement ne justifie pas de régime sans sel strict pour l’hypernatrémie. Un protecteur gastrique est cependant nécessaire (19).
Une alternative à la perfusion existe il s’agit du Médrol, de la méthylprednisolone par voie orale, toujours à forte dose entre 500 mg et 1g par jour. Ceci correspond à 5 à 10 comprimés par jour pour une cure de 3 à 5 jours. L’avantage est que la surveillance peut se faire en hôpital de jour ou à domicile par une infirmière. Une adjonction concomitante de potassium et d’un protecteur gastrique est également nécessaire (19).

Les traitements de fond

Les traitements de fond reposent sur plusieurs principes. Tout d’abord leur indication est propre à chaque patient et dépends du moment de l’histoire de sa maladie. Ensuite, il est primordial de traiter tôt et enfin de traiter efficacement.
Parmi les molécules disponibles, certaines sont plus ou moins récentes et ont marquées une avancée majeure dans la prise en charge de la SEP comme le natalizumab, un anticorps monoclonal. Nous allons donc voir dans cette partie, ce que ce médicament a apporté à la thérapeutique de la SEP.

Classiques (avant le natalizumab)

Avant l’arrivée du natalizumab (AMM en 2006 en France), les traitements de fond reposaient sur deux lignes. La première ligne, constituée d’immunomodulateurs avec les interférons β et l’acétate de glatiramère, des médicaments d’exception et la deuxième ligne comportant un immunosuppresseur : la mitoxantrone, réservé à l’usage hospitalier. Il s’agit toutes de biothérapies injectables.

2ème ligne : les immunosuppresseurs :

➢ La Mitoxantrone (Elsep®) :
Indiquée dans la SEP depuis 2003, c’est une molécule de la famille des anthracyclines antérieurement déjà connue et utilisée en cancérologie sous un autre nom de spécialité, le Novantrone® pour ses propriétés cytotoxiques. Ses propriétés immunosuppressives sur les LT, les LB et les macrophages ont été démontrées par L’EAE, puis mises en évidence dans les différents stades et sur les différentes lignées cellulaires de la démyélinisation auto-immune, via l’inhibition des cytokines inflammatoires comme le TNF, l’IL-2 et l’IFN (30).
Elle est indiquée en 2ème intention dans les formes hautement agressives de SEP de types récurrentes-rémittentes ou secondairement progressives. Son efficacité est très significative sur la fréquence des poussées (-70 %), le risque de progression du handicap (-83 %) et sur les lésions actives visibles sur l’IRM. Ces effets s’observent jusqu’à cinq ans sur les poussées et quatre ans sur le handicap (27), (24).
Cependant, la limite de son utilisation réside dans sa toxicité cardiaque de classe avec une dose totale cumulée de 120 mg maximum. Ceci correspond à 6 perfusions intraveineuses réparties en une injection intraveineuse par mois pendant 6 mois. Au-delà de cette dose, le traitement ne pourra plus être réadministré (31).
Les effets indésirables sont rares mais graves avec une leuconeutropénie, une leucémie aiguë ou encore une défaillance cardiaque.
Les contre-indications sont nombreuses :
− Allergie à l’un des composant..
− Insuffisance cardiaque.
− Troubles de l’hémogramme.
− Patients ayant déjà reçu un traitement à base de mitoxantrone ou d’anthracyclines.
− Grossesse et allaitement (31).

Introduction du Natalizumab (Tysabri®)

Le natalizumab a obtenu son AMM le 27 juin 2006 en France et auparavant en 2004 aux Etats-Unis (32). Il vient agrandir la 2ème ligne de traitements de la SEP en se plaçant comme un nouveau représentant chez les immunosuppresseurs.
Il s’agit d’un anticorps monoclonal, le premier utilisé dans le traitement de la SEP. Son suffixe « -zumab » indique qu’il s’agit d’un anticorps monoclonal humanisé, c’est-à-dire qu’on a fixé sur une immunoglobuline humaine, les parties hypervariables d’un anticorps murin.
Son mécanisme d’action est le blocage sélectif de l’intégrine 4β1 connue aussi sous le nom de VLA-4 (Very Late Antigen 4) et très fortement exprimée à la surface de certains sous-types de lymphocytes T. La liaison avec ses ligands, des molécules d’adhérence présentes sur les cellules endothéliales ne peut donc plus se faire, ayant pour effet un blocage de l’adhésion lymphocytaire et empêchant ainsi leur passage au travers de la BHE (33).
Le natalizumab est indiqué en monothérapie dans les formes très actives de SEP rémittentes-récurrentes malgré un traitement par interféron β ou acétate de glatiramère, mais aussi dans les SEP rémittentes-récurrentes sévères d’évolution rapide (34). Son efficacité est très bonne avec une réduction des poussées à 2 ans de 68% et une diminution de 42% de la progression de la maladie selon une étude anglaise (35). Une autre étude française, sortie en Avril 2019 et menée sur une période de 10 ans semble confirmer la très bonne efficacité du natalizumab allant jusqu’à la conclusion d’une inflexion de la maladie sur le long cours (36).
Réservé à l’usage hospitalier, il s’administre en voie intraveineuse à une dose mensuelle de 300 mg (34).
Ses effets indésirables sont rares mais graves avec un risque de réactivation du virus JC pouvant conduire à une leuco-encéphalite multifocale progressive (LEMP) potentiellement fatale (34), (37).
Ses contre-indications concernent notamment ce dernier effet indésirable avec :
− Les patients à risque de développer une LEMP ou présentant déjà cette affection.
− Les sujets immunodéprimés.
− Les pathologies cancéreuses évolutives.
− Et la grossesse et l’allaitement (34).

Après le natalizumab :

Après le natalizumab c’est l’arsenal thérapeutique des immunosuppresseurs qui s’est élargi en premier avec de nouveaux anticorps monoclonaux comme l’alemtuzumab ou l’ocrelizumab. Il y a eu également l’apparition des premières thérapies orales avec le fingolimod chez les immunosuppresseurs mais également le tériflunomide et le diméthylfumarate chez les immunomodulateurs.

1ère ligne : du côté des immunomodulateurs :

Le tériflunomide (Aubagio®) et le diméthylfumarate (Tecfidera®) ont obtenus leur AMM en 2014. Il s’agit de deux thérapies orales, 1 prise par jour pour l’Aubagio® et 2 prises par jour pour le Tecfidera®, représentant ainsi une option très attractive aux immunomodulateurs injectables, ceux-ci étant disponibles pour la même indication : les formes rémittentes de SEP.
Par leur action anti-inflammatoire et immunomodulatrice, ils ont tous les deux montrés leur efficacité sur la réduction du taux annuel de poussées et l’apparition de nouvelles lésions à l’IRM. Des effets indésirables non graves sont attendus à l’induction du traitement comme des troubles gastro-intestinaux ou des bouffées vasomotrices (38).
On note deux contre-indications : l’hypersensibilité et la grossesse (tératogénicité de l’Aubagio®) (39) .

2ème ligne : du côté des immunosuppresseurs :

Le fingolimod (Gilenya®) a obtenu son AMM en 2011. Il s’agit d’un médicament d’exception, la 1ère thérapie orale à émerger dans le cadre de la SEP. Modulateur des récepteurs à la sphingosine-1-phosphate, il engendre une immunodépression périphérique en empêchant la sortie des lymphocytes des ganglions lymphatiques (40). Il est indiqué dans les SEP très actives, au même titre que le natalizumab.
Il peut provoquer des effets indésirables sérieux comme des cancers cutanés ou mammaires. Il est contre-indiqué en cas d’immunodéficience, d’infections sévères actives, de cancers diagnostiqués et de grossesse et d’allaitement (41).
Deux anticorps monoclonaux humanisés ont aussi vu le jour :
L’alemtuzumab (Lemtrada®), un anticorps monoclonal anti-CD52, a obtenu son AMM en 2013. Il est indiqué dans les formes sévères de SEP rémittentes-récurrentes. Le CD52 est un antigène fortement exprimé à la surface des LT, LB, NK, monocytes et macrophages. Un anticorps dirigé contre cet antigène induit donc une déplétion lymphocytaire périphérique profonde et prolongée. Ses propriétés sont de diminuer les poussées annuelles et de stabiliser la maladie.
On note la possibilité d’effets indésirables graves de type auto-immuns par formation d’anticorps : Purpura thrombopénique immunologique, néphropathies à anticorps…La contre-indication est la SEP sans activité ou stabilisée (42).
L’ocrelizumab (Ocrevus®), le dernier sorti avec l’obtention de son AMM en 2018, est un anticorps monoclonal anti-CD20 et a donc comme cible spécifique les lymphocytes B (puisqu’ils expriment fortement le CD20). Il est réservé au traitement des SEP progressives primaires.
Les premières études réalisées montrent une efficacité significative versus placebo, mais étant donné sa nouveauté, un plus grand recul est nécessaire pour montrer son efficacité et sa sécurité à long terme (43). Par ailleurs, des cas de neutropénies (44) et de pancréatites aiguës (45) ont été rapportés.

Les traitements symptomatiques

Les traitements symptomatiques permettent d’améliorer la qualité de vie des patients. Ils nécessitent avec la conjonction des autres traitements, un accompagnement multidisciplinaire adapté à chaque patient. Ils sont variés, de nature médicamenteuse ou non médicamenteuse et dans ce dernier cas, basés sur l’hygiène de vie des patients. Le rôle d’accompagnement du pharmacien est essentiel. Nous allons en voir quelques exemples pour les symptômes les plus fréquemment rencontrés :
➢ Fatigue : Mantadix® (Amantadine), temps de repos, éviter le surmenage.
➢ Douleurs : anti-épileptiques, antidépresseurs, massages et relaxation.
➢ Spasticité : utilisation de myorelaxants comme le Zentiva® (Baclofène), étirements.
➢ Constipation : marche, hydratation, consommation de fibres, laxatifs doux.
➢ Troubles urinaires : famille des -bloquants comme le Xatral® (Alfuzosine) ou anticholinergiques comme le Ditropan® (Oxybutinine).
➢ Dépression : rompre l’isolement, psychothérapie, antidépresseurs (19), (26).

Le recrutement leucocytaire et l’adhésion dans l’inflammation

Lorsqu’un agent étranger est reconnu dans l’organisme, la réaction inflammatoire se déclenche. Celle-ci active directement la réponse immunitaire innée, de première ligne, avant de laisser place à la réponse immunitaire adaptative, plus tardive mais plus spécifique. Cette dernière permet l’activation des lymphocytes et circulants dans le sang avec les polynucléaires neutrophiles et les monocytes sont attirés vers les sites inflammatoires. Ils vont devoir traverser l’endothélium vasculaire afin de rejoindre ces sites concernés. Ce passage se décompose en plusieurs étapes mettant en jeu des phénomènes d’adhésion.
Nous allons donc voir dans cette partie, premièrement ce qui se passe dans un phénomène inflammatoire de façon classique, avant de s’intéresser aux spécificités du SNC pour ensuite parler de ces mêmes évènements dans le cas de la SEP.

L’immunité innée et l’immunité adaptative

L’efficacité de la réponse immunitaire nécessite l’étroite collaboration entre nos deux types d’immunités : l’immunité innée et l’immunité adaptative. L’immunité innée ou immunité naturelle, constitue notre 1ère ligne de défense face aux agents étrangers. De mise en place très rapide mais manquant de spécificité et donc vite dépassée, elle est le pilier de la cascade d’évènements immunitaires qui permettra l’élimination de l’agent étranger par la mise en marche de l’immunité adaptative. De nombreuses cellules en sont actrices toutes équipées de récepteurs spéficiques : les PRR (Pattern Recognition Receptor) capables de reconnaitre des PAMPs (Pathogen Associated Molecular Patterns), des motifs moléculaires exprimés sélectivement par les pathogènes. Il existe différentes sortes de PRR de localisation membranaires ou cytoplasmiques. Ces cellules de l’immunité innée qui en sont équipées, sont les polynucléaires, les cellules endothéliales, les cellules NK, les cellules dendritiques et les macrophages. À la suite de l’activation d’un PRR il y a production de cytokines pro-inflammatoires (47). Après avoir reconnu, dégradé et apprêté un antigène, les cellules dendritiques et les macrophages, cellules présentatrice d’antigène (CPA) professionnelles, migrent vers les organes lymphoïdes secondaires pour initier la réponse immunitaire adaptative, représentée par les LT (CD4 et CD8) et les LB.
L’activation des LT naïfs dans les ganglions lymphatiques se fait à l’aide de 3 signaux simultanés : − Un signal d’activation par présentation des peptides antigéniques, associés aux molécules du CMH de classe II pour les lymphocytes T CD4 (lymphocytes effecteurs) et aux molécules du CMH de classe I pour les lymphocytes T CD8 (lymphocytes cytotoxiques).
− Un signal de costimulation par interaction de B7 (sur la CPA) et de CD28 (sur le LT).
− Et un signal de différenciation selon les cytokines sécrétées par les CPA pour orienter le type de réponse immune.
Selon la réponse immunitaire à initier, on compte plusieurs voies de différenciation pour les LT CD4.
− Le profil Th1 : pour une immunité à médiation cellulaire avec activation des macrophages, des NK et des LT CD8 (les lymphocytes cytotoxiques) à l’aide de l’interleukine 12 et favorisant ainsi la réponse inflammatoire.
− Le profil Th2 : médié par l’interleukine 4, pour une immunité à médiation humorale avec activation des LB qui se différencient en plasmocytes et produisent des anticorps.
− Le profil Th17 : de découverte récente, une voie de différenciation sous l’effet de l’interleukine 17.
Une fois les lymphocytes matures, ils rejoignent le pool de lymphocytes activés déjà matures et circulants dans le sang. De-là, il ne leur reste plus qu’à rejoindre les sites inflammatoires. Pour cela, ils vont devoir migrer au travers de l’endothélium vasculaire, le recrutement lymphocytaire commence (48).

L’endothélium vasculaire

L’endothélium vasculaire tapisse l’ensemble des vaisseaux et constitue une interface dynamique entre la circulation sanguine et l’espace périvasculaire. L’unité de base de l’endothélium est la cellule endothéliale, polarisée, avec son pôle apical du côté de la circulation sanguine et son pôle basolatéral en contact avec une membrane basale. Son contact direct avec les éléments circulants du flux sanguin à l’état physiologique, impose une régulation contrôlée de sa perméabilité qui peut être modulée. Ceci est en partie assuré par la présence de différents types de jonctions. On distingue alors :
− Les jonctions adhérentes qui permettent le lien entre les cellules endothéliales voisines mais également l’ancrage de ces cellules à la matrice extracellulaire. Elles sont donc prépondérantes en position basale et formées par l’interaction des domaines extracellulaires de deux VE – cadhérines (Vascular Endothelial Cadherin) et reliées au cytosquelette de la cellule par des caténines. La participation à la formation de ces jonctions peut également se faire de manière similaire via une autre protéine nommée PECAM (Platelet Endothelial Cell Adhesion Molecule).
− Les jonctions serrées, en forte concentration au niveau du pôle apical des cellules permettant l’imperméabilité directe vis-à-vis de la circulation sanguine. Elles sont formées par l’interaction entre des cadhérines et des occludines ou des cadhérines et des claudines. Les occludines et les claudines sont reliées au cytosquelette de la cellule par les protéines ZO 1, 2 et 3. Citons aussi la protéine JAM (Junctional Adhesion Molecule) permettant le maintien de la structure de ces jonctions mais jouant également un rôle dans la transmigration des leucocytes (49), (50).

Les étapes du recrutement leucocytaire

Le recrutement leucocytaire est la résultante de divers mécanismes effecteurs décrits en général de manière séquentielle, mais qui en réalité se recouvrent dans le temps et dans l’espace.
La première étape du recrutement, est l’adhésion initiale entre les leucocytes et l’endothélium. Le stimulus inflammatoire déclenche à la surface de l’endothélium l’expression de sélectines : les sélectines P et E. Les P sélectines préformées, apparaissent rapidement en premier en étant libérées des grains de Wiebel Palade dans lesquels elles sont stockées. Les E sélectines, étant synthétisées de novo, apparaissent plus tardivement. Ces sélectines se lient à un motif sialyl-Lewis X de la molécule PSGL-1, présente sur les microvillosités leucocytaires. Cette adhésion est transitoire et met en jeu des liaisons faibles, mais produit un ralentissement des cellules qui se retrouvent à proximité de la paroi endothéliale.
Ce ralentissement est appelé le « rolling », la deuxième étape, où les leucocytes roulent le long des cellules endothéliales à vitesse lente, ce qui leur permet la détection des chimiokines sur la paroi vasculaire. Les intégrines leucocytaires sont alors à la portée de leurs ligands endothéliaux mais sont inactives pour le moment et les récepteurs aux chimiokines leucocytaires sont en contact avec les chimiokines inflammatoires sécrétées. Ce dernier contact entre les chimiokines et leurs récepteurs présents à la surface des leucocytes permet l’activation des intégrines leucocytaires telles que LFA-1 et VLA-4. Celles-ci se lient avec une forte affinité à leurs ligands endothéliaux respectivement ICAM-1/ICAM-2 et VCAM-1, eux aussi exprimés à la suite des stimuli inflammatoires à la surface de l’endothélium.
La résultante de ces liaisons est l’arrêt total des leucocytes sur l’endothélium. Une fois les cellules arrêtées, l’étape final a lieu avec la traversée de l’endothélium par diapédèse à l’aide, entre autre, de PECAM-1 aussi appelée CD31, par une interaction homodimérique (54), (55).

Spécificités du SNC

La transmission de l’influx nerveux dépend des neurones enveloppés de myéline. La myéline est formée par les oligodendrocytes dans le SNC, qui entourent et isolent les axones des neurones. Elle est composée d’une bicouche lipidique dans laquelle s’insère des protéines spécifiques comme MOG (Myelin Oligodendrocyte Glycoprotein) ou PLP (Proteo Lipid Protein) (56). Entre deux zones de myélinisation, se trouve des segments amyéliniques appelés noeuds de Ranvier où se concentrent les canaux ioniques voltage-dépendants. La conduction de l’influx nerveux via la myéline est ainsi saltatoire et la vitesse de transmission est accélérée.
Pour assurer ses fonctions, le SNC doit s’assurer d’un microenvironnement hautement contrôlé. Richement vascularisé, le cerveau perçoit presque un quart du débit sanguin cardiaque total et chaque neurone possède son propre capillaire sanguin. Une vasculature spécialisée est à l’interface entre le sang et le SNC : la barrière hémato-encéphalique, qui permet le maintien de l’homéostasie du SNC. Elle assure des échanges et contrôles stricts entre le SNC et le compartiment sanguin via des systèmes de transports spécialisés pour les apports énergétiques et nutritifs, participe à l’évacuation des déchets et modère la transmigration des leucocytes vers le SNC. Cette barrière étanche isole le SNC du reste de l’organisme, par un endothélium spécifique (57).
Cette spécificité endothéliale résulte tout d’abord de l’établissement d’un nombre très important de jonctions entre les cellules endothéliales. Les jonctions serrées sont prépondérantes au niveau de la BHE et permettent avec les jonctions adhérentes une étanchéité importante, plus restrictive que dans les autres organes, ne permettant même pas la simple diffusion passive de petites molécules (49). Cette imperméabilité est quantifiable électriquement par une mesure de la différence de potentiel entre deux électrodes. La valeur mesurée représente la résistance électrique trans-endothéliale ou TEER pour Trans Endothelial Electrical Resistance et plus les jonctions sont serrées, plus la valeur obtenue est importante. La caractéristique de la BHE est que cette valeur est beaucoup plus élevée que pour n’importe quel autre endothélium présent dans l’organisme (58). Elle confère ainsi au SNC un rôle primordial dans la régulation des phénomènes inflammatoires, puisqu’à l’état physiologique on ne retrouve qu’un tout petit nombre de cellules immunitaires dans le milieu extra-vasculaire du cerveau. Le système immunitaire du SNC se limite aux cellules microgliales, au rôle de macrophages.
Ensuite, une autre spécificité réside dans la localisation unique des cellules endothéliales entre le sang et les cellules du SNC. Il en découle des interactions complexes entre les cellules endothéliales, les neurones et les cellules gliales qui participent à l’étanchéité de la BHE. Les cellules endothéliales sont entourées d’une double membrane basale façonnant une matrice extra-cellulaire composée de fibronectine, de collagène et de protéoglycanes sur laquelle viennent se poser les pieds astrocytaires, prolongements des astrocytes, afin de stabiliser la structure de la BHE. Les astrocytes sont des cellules gliales aux multiples fonctions allant de la régulation neuronale au recyclage des neurotransmetteurs et aux phénomènes de réparations (59). Leur fonction dans le maintien de la BHE est capitale et connue depuis de nombreuses années, depuis qu’il a été montré, chez les souris transgéniques, que leur ablation provoquait une rupture de la BHE (60). Enfin, entre les astrocytes et les cellules endothéliales se retrouve des cellules contractiles, les péricytes, jouant un rôle dans le contrôle du débit sanguin. Ils ont également une fonction de macrophages secondaires dans le SNC en pouvant exercer l’endocytose. Ils participent également à la formation des jonctions serrées des cellules endothéliales et jouent donc un rôle majeur dans les propriétés restrictives de la BHE (61).

Le cas de la SEP

Dans la SEP, les lymphocytes T CD4 autoréactifs migrent à travers la BHE pour atteindre le SNC. Il y a création et maintien d’un environnement inflammatoire qui attirerait les autres cellules immunitaires. La transmigration à travers la BHE ne peut se faire que par une activation préalable de ces lymphocytes en périphérie. L’acquisition de cette autoréactivité est un phénomène qui suscite de nombreuses questions aujourd’hui.
Plusieurs hypothèses perdurent et concernent les sous populations Th1 et Th17 des LT CD4. Une, prédominante, est celle du mimétisme moléculaire par présentation d’épitopes antigéniques proche de la myéline. Ces épitopes ressemblant à la myéline seraient la conséquence d’infection par des pathogènes notamment par l’EBV. Ceci aurait pour conséquence l’activation en périphérie des LT Th1 autoréactifs, qui migrent vers le SNC et induisent un environnement inflammatoire créant secondairement un afflux des autres cellules immunitaires (16).
Une deuxième hypothèse est également celle d’un mimétisme moléculaire, mais mettrait en jeu les LT Th17 qui, par un défaut de régulation inhérents aux patients atteints de SEP, migreraient dans le SNC par les plexus choroïdes via le CCR6 (C-C Chemokine Receptor 6) puis activeraient les cellules endothéliales afin de permettre l’entrée d’autres LT Th17 et des LT Th1 (62).
Le recrutement lymphocytaire T CD4 pathologique dans le SNC dans le cas de la SEP peut se décomposer en deux étapes, la première correspond au passage de l’endothélium de la BHE par les LT par les mêmes mécanismes que ceux décrit plus haut pour le recrutement leucocytaire. Les molécules d’adhésions mises en jeu entre l’endothélium cérébral et les LT pour l’étape de capture, sont spécifiques de ces derniers et mettent en jeu des interactions fortes entre le VLA-4, aussi appelée l’intégrine 4β1 et VCAM-1 exprimée à la surface de l’endothélium dans des conditions inflammatoires (63).
La deuxième étape plus spécifique correspond au passage de la glia limitans formée par les pieds astrocytaires et la membrane basale. Cette étape nécessite l’intervention des métalloprotéinases MMP2 et MMP9 (Matrix MetalloProteinases 2 et 9) qui dégradent la membrane basale et les jonctions intercellulaires (63).
Une fois dans le cerveau, les LT CD4 rencontrent les CPA qui leur présentent des fragments de la myéline par le CMH de classe II. Ceci aboutit à la sécrétion de cytokines par les LT CD4 et les CPA telles que l’IL-23 et l’IFN et entretien la réaction inflammatoire locale. La conséquence est l’endommagement des cellules gliales, des neurones et des oligodendrocytes qui produisent à leur tour des médiateurs inflammatoires. L’inflammation est ainsi entretenue dans un véritable cercle vicieux et se traduit, en plus des dommages aux constituants du SNC, par une accumulation pathologique des LT CD4 dans l’espace périvasculaire (64).
Sous l’effet de l’inflammation chronique, la BHE subit également d’importants dommages la rendant perméable, on parle alors d’une véritable rupture de celle-ci.
On note premièrement à sa surface, une dégradation du glycocalyx conjuguée à une expression des molécules d’adhésion sous l’effet du TNF et des interleukines (65).
Il se produit également une perte de la quiescence des cellules endothéliales avec des anormalités au niveau des jonctions serrées qui ne jouent plus leur rôle et se laisse infiltrer. Une explication de cette perte de fonction se trouve au niveau moléculaire où l’on observe une diminution voire une perte sélective de l’expression des protéines ZO-1 et de l’occludine, normalement présentes dans les jonctions serrées (66), (67).
La synthèse des molécules composants la membrane basale est également diminuée, ce qui l’amincit et la fragilise (57). L’addition de tous ces évènements concourent à l’infiltration anormale des cellules immunitaires dans l’espace péri-vasculaire du SNC.

Le natalizumab, les intégrines et leurs ligands

Structure du natalizumab

Le natalizumab a été le premier anticorps monoclonal utilisé en thérapeutique en neurologie. Produit par génie génétique, il s’agit d’un anticorps monoclonal humanisé, c’est-à-dire qu’on a fixé sur une immunoglobuline humaine de classe G, les parties hypervariables d’un anticorps murin. Il est donc à 90-95 % humain (68).
Les immunoglobulines de classe G sont des glycoprotéines formées de deux chaines lourdes (H) et de deux chaines légères (L), elles présentent donc une structure divalente.
Au sein de chaque chaine se trouvent un domaine variable, servant à la reconnaissance de l’antigène et des domaines constants, au rôle d’interaction avec d’autres éléments cellulaires. Les chaines légères comportent ainsi deux domaines dont un variable (VL) et un constant (CL). Les chaines lourdes sont, elles, formées par un domaine N-terminal variable (VH) et 3 ou 4 domaines constants : CH1, CH2 et CH3 (et CH4).
L’association d’un VH et d’un VL constitue le site de reconnaissance et de liaison de l’antigène, appelé le paratope. La divalence des anticorps confère donc deux sites de liaison antigénique par anticorps.
Un anticorps se divise donc schématiquement en deux parties fonctionnellement différentes :
− Le fragment Fab (fragment antigen binding), variable, pour la fixation de l’antigène.
− Le fragment Fc (fragment crystallizable), constant et cristallisable qui interagit avec ses récepteurs présents à la surface de certaines cellules ou le complément.
Il est possible, par clivage enzymatique, d’isoler ces deux fragments.
Comme les autres anticorps monoclonaux, le natalizumab a la particularité d’être produits par un clone unique de LB. Il a donc la propriété d’être homogène et monospécifique, c’est-à-dire qu’il ne reconnait et n’est dirigé contre un seul type unique de site antigénique : l’intégrine 4β1 (68).

Les différentes conformations et l’affinité pour le ligand

Dans les années 2000, des données de cristallographie ont montrées que les intégrines pouvaient exister dans une conformation compacte repliée en plus de la forme dépliée, déjà connue. D’autres études ont été menées et il en a été conclu que cet état replié représentait une conformation inactive tandis que la forme dépliée était active. Cette hypothèse a ensuite été réfutée par la découverte de la capacité des intégrines en forme repliée de lier des ligands de petite taille. Par la suite, on a donc défini des états de faible et de forte affinité de l’intégrine pour le ligand qui dépend de la conformation de celle-ci. Ainsi, la forme compacte repliée représente un état de faible affinité pour le ligand et la forme dépliée, un état de forte affinité (69).
Une des caractéristiques du VLA-4 est qu’il ne subit pas de surexpression en réponse à des stimuli inflammatoires, celui-ci étant déjà exprimé sur les cellules immunitaires au repos. En revanche, un changement de sa conformation va se produire lors de l’activation des lymphocytes, pour qu’il passe d’un état de faible affinité à un état de forte affinité pour le ligand.
Les intégrines peuvent elles-mêmes moduler leur affinité au ligand par divers mécanismes et il semblerait que les cations divalents augmentent l’affinité des intégrines en déclenchant un changement de conformation. En effet, il existe sur la chaine β des intégrines un site adjacent au MIDAS, le site ADMIDAS qui fixe les cations divalents et est capable de moduler l’état d’affinité de l’intégrine au ligand. En état de faible affinité, ce site est occupé par du calcium et à un effet inhibiteur. En état de forte affinité, ce site est lié au manganèse (69), (72).
Ces changements de conformation requièrent un dépliement et une séparation des chaines 4 et β1.
L’initiation du mouvement est un changement d’orientation de l’hélice β qui est couplé à un mouvement du domaine hybride. Ce mouvement entraine avec lui les domaines EGF et le PSI qui sont raccordés au domaine hybride et qui s’activent. La séparation des domaines cytoplasmiques des chaines  et β permet les phénomènes de signalisation cellulaire et la liaison de protéines cytosoliques sur ceux-ci (75).
Tous ces changements donnent lieu à des équilibres réversibles et peuvent s’opérer dans les deux directions.

Les ligands de l’intégrine 4β1

L’intégrine 4β1 interagit avec différents ligands aux localisations diverses.
Ainsi, son ligand primaire est la molécule VCAM-1 exprimée sur l’endothélium activé. Elle est également capable de se lier avec un composant de la matrice extracellulaire, la fibronectine, sur un fragment spécifique appelé le fragment CS-1. Enfin elle possède un ligand constitutif des jonctions serrées des cellules endothéliales, la molécule JAM- 2 (74).

VCAM-1

VCAM-1 est une glycoprotéine appartenant à la superfamille des immunoglobulines. Il s’agit d’une glycoprotéine transmembranaire de 110 kDa avec une région intracellulaire courte, un segment transmembranaire classique de type I et une grande partie extracellulaire composée de domaines immunoglobulines. Ces domaines sont formés de deux feuillets β reliés entre eux par un pont disulfure interne ce qui leur confère une structure similaire à celle des domaines globulaires des anticorps.
Il existe deux formes de VCAM-1, dépendant du nombre de domaines aux immunoglobulines sur son fragment extracellulaire. La première forme, la plus abondante, comporte 7 domaines de type immunoglobuline avec deux domaines de fixation pour l’intégrine 4β1 portés par les domaines 1 et 4. La deuxième forme est, quant à elle, moins abondante et ne comporte que 6 domaines aux immunoglobulines du fait de l’absence du domaine 4 retrouvé dans la forme à 7 domaines. Cette deuxième forme ne comporte donc qu’un seul site de liaison avec l’intégrine 4β1 sur le domaine 2 (76).
Figure 14 Structure de VCAM-1, ligand de VLA-4 d’après S. Jalkanen et M. Salmi, Encyclopedia of Life Science, John Wiley and Sons 2007. Représentation de VCAM-1 dans sa forme à 7 domaines de types immunoglobulines, les domaines 1 et 4 de fixation à VLA-4 sont représentés en violet. VCAM-1 est exprimé lors de phénomènes inflammatoires à la surface de l’endothélium activé. Sa régulation par les cellules endothéliales est sous un contrôle transcriptionnel dépendant de la voie NFκΒ. Cette voie de transcription génique est activée par le TNF, l’IL-1 et l’IL-4 sécrétés par les LT activés et les monocytes résidents de l’endothélium lors de l’inflammation (77).

La fibronectine

La fibronectine est une glycoprotéine présente dans la matrice extracellulaire sous forme fibrillaire.  Elle a un haut poids moléculaire de 500 kDa environ. Elle est impliquée dans la communication cellulaire par l’intermédiaire d’un complexe formé avec les intégrines et module ainsi les interactions entre la matrice extra-cellulaire et les cellules (78).
Elle est composée de deux brins identiques et flexibles liés entre eux de manière covalente par deux ponts disulfures du côté de leurs extrémités C-terminales. Chaque chaine est organisée par une répétition de modules de type I, II ou III. On compte ainsi, sur chaque brin, 12 répétitions de modules de type I (nommées FN1), 2 répétitions de modules de type II (nommées FN2) et 15 à 17 répétitions de modules de type III (nommées FN3). Ces répétitions de modules occupent 90 % de l’espace sur un brin de fibronectine. Les composants restants sont des connecteurs entre certains modules de fibronectine, mais également une partie variable (V) qui ne présente aucune homologie avec les autres motifs répétitifs et est une région d’épissage alternatif. Au sein de cette région variable, se trouve une séquence particulière de trois acides aminés : leucine – acide aspartique – valine (séquence LDV) qui détient l’activité de liaison pour l’intégrine 4β1. L’acide aspartique (D) occupe notamment un rôle central, puisqu’en étant chargé négativement, il se lie avec les cations du site MIDAS de l’intégrine (79).

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Table des matières

I. Introduction
1. La sclérose en plaques
1.2.1 Incidence et prévalence
1.2.2 Répartition géographique
1.2.2.1 Dans le monde
1.2.2.2 En France
1.3.1 La susceptibilité génétique
1.3.2 Les facteurs environnementaux
1.3.2.1 Vitamine D et exposition aux UV :
1.3.2.2 Le virus d’Epstein-Barr (EBV) :
1.3.2.3 Tabac :
1.3.2.4 Hygiène :
1.4.1 L’encéphalomyélite aiguë expérimentale
1.4.2 Les plaques de démyélinisation et l’inflammation
Evolution et complications
Thérapeutiques
1.7.1 Le traitement des poussées
1.7.2 Les traitements de fond
1.7.2.1 Classiques (avant le natalizumab)
a. 1ère ligne : les immunomodulateurs :
b. 2ème ligne : les immunosuppresseurs :
1.7.2.2 Introduction du Natalizumab (Tysabri®)
1.7.2.3 Après le natalizumab :
a. 1ère ligne : du côté des immunomodulateurs :
b. 2ème ligne : du côté des immunosuppresseurs :
c. L’Avenir… La neuroprotection et la remyélinisation :
1.7.3 Les traitements symptomatiques
2. Le recrutement leucocytaire et l’adhésion dans l’inflammation
2.1.1 L’immunité innée et l’immunité adaptative
2.1.2 L’endothélium vasculaire
2.1.3 Les étapes du recrutement leucocytaire
Le cas de la SEP
3. Le natalizumab, les intégrines et leurs ligands
L’intégrine 4β1
3.2.1 Structure
3.2.2 Expression
3.2.3 Les différentes conformations et l’affinité pour le ligand
3.3.1 VCAM-1
3.3.2 La fibronectine
3.3.3 JAM-2 (ou JAM-B)
3.3.4 Le cas de Madcam-1
4. Méthodes d’exploration de l’adhésion cellulaire
La chambre à flux laminaire
5. Principe de l’étude
II. Matériel et méthodes
1. Préparation des cellules T
2. Préparation des surfaces
3. Culture des cellules endothéliales
4. Systèmes complet matériel et microscopes
5. Logiciels
III. Résultats
1. Sur surfaces modèles recouvertes de VCAM-1 (données préalables du laboratoire)
1.1 Avec les LTM traités par natalizumab
1.1.1 Expérience de capture
1.1.2 Expérience de migration
1.2 Avec les LTM traités par un Fab de natalizumab
1.2.1 Expérience de capture
1.2.2 Expérience de migration
2. Sur surfaces modèles recouvertes de fibronectine (expériences réalisées en partie durant cette thèse)
3. Culture des cellules endothéliales
IV. Discussion
V. Conclusion
VI. Liste des abréviations
VII. Liste des figures
VIII. Bibliographie

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