Le profil des généablogueurs

Le profil des généablogueurs

L’AMATEUR AU PROFESSIONNEL, LA GÉNÉALOGIE A L’HEURE DU WEB

ans l’Ancien Régime, la pratique de la généalogie ne se limitait qu’à une faible partie de la population, soit pour légitimer son rang social, soit pour obtenir certains honneurs. C’est ainsi que pour bénéficier de certains privilèges, « les plus anciennes maisons du royaume acceptent alors de se soumettre à l’examen des généalogistes du roi »1. De même, la légitimité familiale permettait d’accéder à certains ordres restreints, tels que l’Ordre de Malte où les membres devaient faire « preuve de noblesse éclatante, d’autant plus qu’elle témoigne d’une pureté maximale, à la fois par les hommes et par les femmes »2. De nombreux dictionnaires ou nobiliaires ont ainsi été réalisés, afin de valoriser toujours plus une famille, son rang et ses alliances3. Après la Révolution française et le déclin d’une noblesse de sang, la généalogie devient un instrument au service de classes aisées, lesquelles cherchent à montrer leur réussite sociale aux yeux de tous. Il faut véritablement attendre la seconde moitié du XXe siècle pour que la recherche des ancêtres se démocratise dans tous les échelons de la société. Vue comme une nouvelle passion, cette activité de détente est alors perçue comme un exercice réservé aux retraités.

La pratique passait alors essentiellement par des déplacements dans les services d’archives, en mairie ou encore dans les paroisses. Papiers de famille, souvenirs des anciens, autant d’éléments utiles pour poursuivre la quête de ses ancêtres. Face à cet engouement, les centres d’archives réaménagent leurs locaux pour accueillir toujours plus de lecteurs. Au cours de ces dernières décennies cependant, la généalogie connaît de nombreuses évolutions. La numérisation permet aux individus une consultation à distance, rendant la généalogie accessible à l’ensemble de la population. L’âge moyen décline grâce à l’arrivée de pratiquants plus jeunes. Ces mutations s’expliquent notamment par l’arrivée du web et de sa réappropriation par les généalogistes, lesquels développent des outils spécifiques pour l’exercice de leur activité. De même, une partie des amateurs se spécialisent peu à peu, se professionnaliser, laissant place à deux mondes aussi proches qu’éloignés. Il convient de savoir comment le web a influencé la diffusion de la généalogie et les pratiques des chercheurs d’ancêtres. Pour ce faire, nous nous intéresserons à la diffusion des connaissances au moyen des outils informatiques. Ces derniers interviennent notamment dans la construction de l’amateur et de sa diversité. Parfois, ces généalogistes transforment leur passion en source de revenus en s’établissant généalogiste professionnel.

L’internet au coeur de la diffusion des connaissances L’internet modifie considérablement le rapport qu’entretiennent les individus avec la culture. Alors que traditionnellement, celle-ci nécessitait de se déplacer en bibliothèque, en musée ou au théâtre, une simple connexion et quelques clics permettent aujourd’hui d’accéder au même contenu. Le monde professionnel de la culture doit se réinventer face à ces technologies, développer de nouvelles pratiques lui permettant de rester attractif. En effet, l’arrivée massive d’individus sur des sujets culturels modifie les relations entre professionnels et amateurs. « Le découpage par domaines ou filières est rendu en partie caduc par la diffusion de la culture numérique où textes, images et musiques sont souvent imbriqués, le clivage amateur/professionnel devient plus incertain »4. Parmi les sites les plus connus figure en bonne place celui de Wikipédia. Fondée en 2001 par deux Américains, cette encyclopédie collaborative permet aux internautes de trouver rapidement une information sur un sujet déterminé. En tant que système libre, les contributions sont réalisées sous licence Common, permettant à la fois des modifications utiles tout en garantissant la gratuité du projet. La particularité de ce site est d’être disponible en plusieurs langues, d’où une volonté de diffusion des connaissances au niveau international.

Majoritairement anglais, le site compte « un million d’articles écrits par 300 000 contributeurs francophones en 2011 »5. N’étant pas le fruit de seuls professionnels, cette encyclopédie fait l’objet de nombreuses critiques. Les contributeurs ne seraient pas légitimes, réalisant des articles plus ou moins bien rédigés. L’étude menée par Laure Endrizzi liste ainsi plus de vingt-quatre critiques, la première résumant parfaitement l’état d’esprit à l’encontre de ce projet : « les contributeurs sont au mieux des amateurs, au pire des perturbateurs, des vandales ou des fanatiques »6. Par ailleurs, le projet peut être détourné au profit d’une valorisation de l’image d’une personne ou d’une société, lesquels « se servent de cet outil pour assurer leur propre publicité ou modifier anonymement les données objectives qui les concernent »7. Wikipédia apparaît parfois comme le centre de discussions politiques et idéologiques au sein d’articles polémiques, faisant de cette encyclopédie un lieu d’échange et de construction des connaissances. Malgré les critiques formulées au cours de toutes ces années d’existence, force est de constater un progrès toujours plus important afin d’assurer le meilleur contenu.

Un média jugé comme manquant de fiabilité, le Daily Mail, se retrouve ainsi banni de cette contribution collaborative8. Par ailleurs, Wikipédia semble être désormais entré dans les bonnes grâces d’une partie du monde scientifique, gagnant ainsi « en crédibilité »9. La multiplication du nombre de contributeurs sur un même sujet entraîne inexorablement une hausse des divergences de points de vue. Outre le côté parfois polémique susmentionné, les discutions entre amateurs et professionnels peuvent amener à des modifications dans l’interprétation, élargissant ainsi la réflexion tout en l’enrichissant. Par ailleurs, il convient de préciser que si l’objectif était de s’en tenir aux seuls apports de spécialistes professionnels, alors le projet n’aurait pas été différent de la pratique encyclopédique traditionnelle ni garanti la gratuité de cette entreprise…

L’encyclopédie collaborative devient ainsi un véritable outil pédagogique. Christian Vandenlorpe souligne ainsi son utilité, à la fois pour l’apprentissage d’une « lecture critique », mais aussi pour montrer l’importance de la présence de « sources crédibles en comparant divers états d’un article » en fonction des langues ou d’autres écrits10. Les encyclopédies gratuites ne sont pas les seules à permettre un accès aux connaissances depuis chez soi. De nombreuses bases de données, à l’initiative de sociétés privées ou d’institutions, constituent de véritables laboratoires de savoirs. Dans le cadre des sociétés, il convient de citer Google Scholar, moteur de recherche qui permet de trouver des articles contenus dans de nombreuses autres bases de données, de langues et d’origines variées. Dans le cas de la France, l’accès à l’information se développe grâce à des initiatives privées, comme Cairn info et Hypothèses, ou publiques comme Persée. La première est fondée par quatre maisons d’édition, afin de prendre « en charge la publication et la diffusion de revues de sciences humaines et sociales » et d’améliorer « leur présence sur l’internet »11. Cependant, l’accès est ici limité, en ce qu’il nécessite un abonnement annuel. Deux bases du même type fonctionnent sur un système gratuit, à savoir Hypothèses et Persée. Ces deux portails également spécialisés en sciences humaines et sociales sont accessibles aussi bien à « des spécialistes, mais également au grand public »12.

L’accès à l’information par le biais de ces bases n’est plus à démontrer.

Pour Hypothèse, le nombre de visites passe de 3,5 millions de connexions en 2011 à 24,4 millions en 2016, signe d’une tendance plus forte des internautes, professionnels ou non, d’accéder à des renseignements spécifiques, considérés comme fiables. Dans le cadre universitaire, des bases de données sont également mises en oeuvre, permettant à tout un chacun d’accéder à des travaux universitaires, tels que des mémoires soutenus dans certaines formations. C’est notamment le cas de l’université d’Angers qui dispose ainsi d’une plateforme permettant le dépôt universitaire numérique des étudiants13. Si la diffusion des connaissances s’accroît grâce au web, certains auteurs parlent cependant de crise de légitimité des « valeurs culturelles »14, de « choc culturel »15, nécessitant la mise en place de politiques spécifiques ou encore comme cause d’une déprofessionnalisation16. La question de l’accès au savoir par le web pose également quelques difficultés. Jacques Perriault relève ainsi que c’est « un savoir conditionnel, en tant que soumis à la condition de fonctionnement du dispositif numérique. Cette condition le rend fragile parce que soumise à des pannes possibles et très probablement à des restrictions d’accès dans l’avenir, par la transformation d’une partie du réseau public en réseaux propriétaires, c’est-à-dire nantis d’un code d’accès et d’un droit de péage »17. L’actualité récente montre d’ailleurs les limites de la diffusion par le web, notamment avec la remise en cause de sa neutralité, principe par lequel les fournisseurs d’accès s’engagent à traiter, théoriquement, les flux de données sans distinction. La fin de cette neutralité pourrait entraîner un web culturel réorienté, voire manipulé.

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Table des matières

INTRODUCTION
PARTIE I : DE L’AMATEUR AU PROFESSIONNEL, LA GÉNÉALOGIE A L’HEURE DU WEB
1. La démocratisation de l’apprentissage individuel
1.1. L’internet au coeur de la diffusion des connaissances
1.2. Le numérique dans le monde de la culture
1.3. L’autodidaxie : entre tradition et institutionnalisation
2. La diversité du milieu amateur
2.1. Les généalogistes, un groupe homogène ?
2.2. Une communauté web en généalogie
3. Les généalogistes professionnels
3.1. Le généalogiste, entre professionnalisation et légitimation
3.2. La formation d’aujourd’hui pour les professionnels de demain
3.3. La légitimation d’une profession en devenir
BIBLIOGRAPHIE
1. Ouvrages sociologiques
2. Univers numérique
2.1. Les réseaux sociaux et le Web 2.0
2.2. Le numérique et la culture
2.3. L’activité de blogging et l’écriture-web
3. Enseignement, formation et professionnalisation
4. Ouvrages de généalogie
5. Méthodologie
ÉTAT DES SOURCES
1. Le questionnaire d’enquête
2. Les entretiens
3. Blogs participants au challenge (2013-2017)
PARTIE II : LES GÉNÉABLOGUEURS ET LE DÉVELOPPEMENT DU CHALLENGE AZ
1. L’émergence d’une idée
1.1. Le profil des généablogueurs
1.2. Une communauté propre aux généablogueurs du challenge ?
1.3. Quelle pérennité attendre de ce projet ?
2. L’influence du challenge sur les blogs participants
2.1. L’activité de blogging antérieurement au challenge
2.2. Le challenge AZ ou l’art de se réinventer
3. Les généablogueurs et leurs archives
3.1. Existe-t-il une conscience d’archivage électronique personnelle ?
3.2. Une sauvegarde systématique des articles du challenge AZ
CONCLUSION
ANNEXES
TABLE DES ILLUSTRATIONS
TABLE DES ANNEXES
TABLE DES MATIERES

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