L‟éducation a toujours été considérée comme un processus obligatoire pour accéder à une place importante dans la société. Les premières grandes civilisations ont pris conscience de son importance. « Les Grecs furent les premiers à considérer le problème de l‟éducation : comment préparer la jeunesse à l‟avenir ?». Pourtant, tout le monde ne pouvait bénéficier de cette éducation. En Grèce antique, « l‟éducation alliait le développement physique des enfants à celui des arts et des valeurs morales antiques de force et de vertu. Elle était marquée par trois constantes : le rejet total des enfants faibles et malades, la mise à l‟écart des filles de cet idéal, et la pédérastie ». En Egypte, seuls les enfants des élites issues de la noblesse, de la prêtrise et l‟administration allaient à l‟école. Il semblerait qu‟il y ait eu une exception pour certains garçons particulièrement doués de certains villages.
Dans l‟Antiquité romaine, l‟éducation a subi une forte influence grecque surtout après la conquête de la Grèce par les Romains. Les enfants de familles romaines riches sont, soit élevés à la maison par un précepteur, soit ils vont à l‟école (« ludus ») pour être instruits par le maître. Filles et garçons vont ensemble à l‟école mais les filles doivent arrêter leurs études un peu plus tôt que les garçons afin d‟apprendre les tâches ménagères avec leur mères.
HISTORIQUE DU SYSTEME SCOLAIRE A MADAGASCAR
De la naissance de l‟école formelle jusqu‟à la colonisation
Au XIXème siècle, c‟est par le biais de la London Missionary Society que les écoles ont vu le jour à Madagascar. En effet, les missionnaires britanniques « David Jones et Thomas Bevan ont commencé dans les environs de Tamatave la diffusion de la religion chrétienne. Débarqués dans le port de l‟Est le 18 août 1818, ils ouvrent à Manangareza, quelques jours plus tard, la première école protestante de Madagascar » mais « son fonctionnement fut de courte durée car le personnel enseignant ne supportait pas le climat » .Bevan meurt avec toute sa famille et Jones rentre à Maurice après avoir perdu sa femme et sa fille.
Le système scolaire de 1820 à 1835
Après l‟échec de Tamatave, David Jones retourne à Madagascar et obtient du roi Radama I, l‟autorisation de s‟installer à Tananarive. Il a comme principal objectif de christianiser le royaume. Dans l‟objectif de moderniser son royaume, le roi annonce à son peuple « Je veux faire venir les Européens pour équiper et instruire nos soldats qui seront les cornes du pays et de l‟Etat » . La première école à Tananarive est ainsi créée par Jones en 1820 ; il a comme élèves les fils de familles aristocratiques et le neveu du roi.
La deuxième école est ouverte en 1821 par David Griffiths, lui aussi missionnaire de la LMS. Les deux écoles voient les effectifs de leurs élèves augmenter : «certains élèves attirés par la curiosité, essaient éventuellement d‟apprendre, mais la plupart assistent au cours sur ordre de leurs familles, pressées par le roi ». Ceci nous amène à dire que Radama I a donné à l‟école « un caractère obligatoire » ; certains parlent d‟une « nouvelle forme de corvée » mais cette fois, pour les enfants.
Mais tous les enfants ne fréquentent pas l‟école car il y a des parents qui sont hostiles à la civilisation occidentale. Pour ne pas envoyer leurs enfants à l‟école, ils déclarent qu‟ils n‟ont pas d‟enfants ou que leurs enfants ne possèdent pas de vêtements propres . Parfois même, certaines familles préfèrent envoyer les enfants de leurs esclaves. Constatant le développement de l‟alphabétisation à Tananarive, en 1824, le roi demande aux missionnaires de créer des écoles dans les principaux « bourgs » de l‟Imerina et la même année des écoles sont créées un peu partout en Imerina. Le tableau suivant nous présente la situation scolaire en Imerina en 1826.
La mort de Radama I en 1828 constitue un tournant dans les relations entre Madagascar et les Anglais car la nouvelle reine, Ranavalona I était une reine xénophobe qui s‟accrochait aux valeurs traditionnelles. Elle n‟appréciait pas l‟action spirituelle des missionnaires ; mais consciente des avantages qu‟elle pouvait en tirer, elle tolérait leur présence. Sous son règne, on voit la création des écoles d‟enseignement technique et de formation professionnelle, parmi les enseignants, il y a le missionnaire James Cameron qui,« après avoir enseigné l‟écriture sainte jusqu‟en 1828, s‟adaptait à la situation et créait des ateliers vers 1832, et son établissement comptait jusqu‟à 600 apprentis. La formation technique dispensée fut orientée entre autres, vers la fabrication des briques et des tuilesen argile, la taillerie des pierres, la confection des bêches et autres outils de fer, la fabrication du savon, le perfectionnement du tissage » .
Mais le principal objectif des missionnaires n‟était pas de promouvoir le progrès matériel mais de christianiser la population, ainsi ils continuent à traduire et imprimer la bible ce qui amène la reine en 1835 à rompre définitivement la relation entre Madagascar et les Anglais ; tous les missionnaires sont alors expulsés et les écoles fermées. Cette année là, la mission avait scolarisé près de 15000 enfants . Suite à l‟expulsion des missionnaires, il ne restait plus en Imerina que quelques écoles clandestines sous la responsabilité de quelques maîtres malgaches qui ont été formés par les missionnaires.
Le système scolaire de 1861 jusqu‟à la loi d‟annexion
L‟enseignement sous Radama II
Ranavalona Ière meurt en 1861 et c‟est son fils Radama II qui lui succède au trône. Ce dernier adopte une politique d‟ouverture permettant aux missionnaires de revenir à Madagascar afin de continuer l‟évangélisation donc de reprendre la scolarisation. Dès 1961, de nombreuses écoles sont rouvertes par la LMS et d‟autres missions telles que :
– Les Missions françaises constituées par les protestants français mais aussi les missions catholiques : les Frères des écoles chrétiennes (Tananarive et Tamatave), les Sœurs de St Joseph de Cluny (Tananarive et Ambositra), les Jésuites (Tananarive et dans le pays Betsileo).
– La Society for the Propagation of the Gospel (SPG), la FriendForeign Mission Association (FFMA) et la Mission Luthérienne Norvégienne (MLN). Comme au temps de Radama I, l‟enseignement allait de pair avec l‟évangélisation, donc les élèves apprenaient à lire et à écrire à partir des textes religieux. Mais la période est trop courte pour une mise en œuvre effective des intentions. Toutefois, les acteurs se mettent en place et rivalisent en astuces pour avoir la faveur et pour convertir le roi à sa religion.
L‟enseignement sous le gouvernement Rainilaiarivony
Après l‟assassinat du roi Radama II, trois reines se sont succédé au trône :
– Rasoherina qui régna de 1864 à 1868
– Ranavalona II souveraine à partir de 1868 jusqu‟en 1883
– Ranavalona III, la dernière des souverains malgaches qui régna de 1883 à 1896.
Il est cependant très important de préciser que le pouvoir de ces trois reines n‟était que symbolique puisqu‟il se trouvait entre les mains du premier ministre Rainilaiarivony qui va les épouser successivement. Ainsi, pendant le gouvernement Rainilaiarivony, on constate l‟épanouissement de la scolarisation suite à la promulgation de la loi sur l‟obligation scolaire. En effet le code des 305 articles de 1881 prévoit des amendes pour les parents qui ne respecteraient pas cette obligation. L‟article 273 du code stipule que « Toute personne qui ne mettra pas ses enfants à l‟école lorsqu‟ils auront atteint l‟âge prescrit, ou ne leur laissera fréquenter la classe que d‟une façon irrégulière, sera punie d‟une amende d‟une piastre par enfant se trouvant dans l‟un de ces deux cas ; elle sera astreinte en outre, à les mettre à l‟école. Si le contrevenant ne peut payer l‟amende, il sera mis en prison à raison d‟un « sikajy » par jour jusqu‟à concurrence de sa valeur ».
Mais les mesures prises concernant l‟obligation scolaire ne pouvaient être généralisées « car de nombreux endroits, dans les régions périphériques surtout, mais aussi en Imerina, restaient dépourvus d‟établissements et d‟instituteurs, elle avait fait augmenter le nombre d‟élèves là où ces établissements existaient » . Il y aussi le fait que « la monarchie n‟avait pas les moyens financiers suffisants pour ouvrir des écoles d‟Etat, ni une idéologie particulière pour élaborer une politique scolaire propre ». Ce qui signifie que les missions, qu‟elle soit protestante ou catholique, avaient la pleine liberté de concevoir et d‟organiser les écoles selon leurs guises. Elles ont alors favorisé les Hautes Terres (l‟Imerina et le Betsileo) alors que les régions côtières ont été négligées : les écoles existent dans ces régions mais elles sont infiniment plus clairsemées. Les missionnaires justifient cette négligence par l‟insalubrité des côtes ainsi que par la pénurie de missionnaires. Mais Esoavelomandroso avance l‟idée d‟un choix stratégique des missionnaires. En effet, « les Indépendants, les Jésuites et les Anglicans, ont tous cherché, pour mener à bien leur œuvre d‟évangélisation, à s‟adresser en priorité aux dirigeants » .
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Table des matières
INTRODUCTION GENERALE
PREMIERE PARTIE : ETAT DES LIEUX
Chapitre I : HISTORIQUE DU SYSTEME SCOLAIRE A MADAGASCAR
I- De la naissance de l‟école formelle jusqu‟à la colonisation
I.1 Le système scolaire de 1820 à 1835
I.2 Le système scolaire de 1861 jusqu‟à la loi d‟annexion
I.2.1 L‟enseignement sous Radama II
I.2.2 L‟enseignement sous le gouvernement Rainilaiarivony
II- L‟éducation pendant la période coloniale
III- Le système éducatif malgache depuis l‟indépendance
III.1 Le système scolaire malgache pendant la première République
III.2 Le système scolaire pendant la IIème république
III.2.1 L‟effectif des élèves
III.2.2 Le taux net de scolarisation
III.2.3 Le taux brut de scolarisation
III.3- Le système scolaire depuis 1992
III.3.1 De 1992 à 2002
III.3.2 Le système scolaire depuis 2002
Chapitre II : LA SITUATION EDUCATIVE DE MADAGASCAR DANS LE CYCLE PRIMAIRE
I- Les indicateurs de l‟éducation
I.1 Les effectifs des élèves
I.1.1 Les effectifs par âge des élèves
I.1.2 Les disparités de genre
I.2 Les Taux Net de Scolarisation ou TNS
I.3 L‟abandon scolaire dans les écoles primaires malgaches
I.4 Le redoublement
II- Les enseignants du cycle primaire
II.1 les effectifs des enseignants
II.2 Les enseignants non fonctionnaires
II.3 Le ratio maître- élèves
III- Les infrastructures scolaires
III.1 les établissements
III.1.1 Les établissements à cycles incomplets
III.1.2 Les établissements à classes multigrades
III.2 Les salles de classe
Conclusion de la première partie
DEUXIEME PARTIE : L’EXCLUSION SCOLAIRE : OBSTACLE A L’ATTEINTE DES OBJECTIFS DE L’E.P.T.
Chapitre I : MADAGASCAR ET LE PLAN EDUCATION POUR TOUS
I- Les différentes conférences sur l‟EPT et ses objectifs
I.1 Les différentes conférences
I.1.1 La conférence de Jomtien
I.1.2 La conférence d‟Amman
I.1.3 La conférence de Dakar
I.2 Les objectifs de l‟EPT
I.2.1 Les objectifs fixés à Jomtien
I.2.2 Les objectifs révisés à Dakar
II- La mise en œuvre du Plan EPT dans les écoles primaires malgaches
II.1 La première décennie de mise en œuvre
II.1.1 Les stratégies de mise en œuvre
II.1.2 Les bailleurs de fonds et les partenaires de Madagascar dans la mise en œuvre du plan EPT
II.1.3 Le bilan de la première mise en œuvre l‟EPT
II.2 Le Plan EPT depuis l‟année 2000
II.2.1 Les stratégies de mise en œuvre
II.2.1.1 L‟augmentation de la part de l‟éducation dans les dépenses de l‟Etat
II.2.1.2 La restructuration du système scolaire
II.2.1.3 Le recrutement d‟enseignants non fonctionnaires, la construction scolaire et l‟amélioration des conditions d‟enseignement
II 2.1.4 L‟introduction de l‟APC
II.2.1.5 La politique linguistique et l‟Amélioration de la Gestion de l‟Education
II.2.2 Les financements de l‟EPT
II.2.2.1 L‟Initiative FastTrack
II.2.2.2 Les fonds catalytiques
II.3 Le bilan de l‟EPT
II.3.1 Le bilan positif de la mise en œuvre du plan EPT à Madagascar
II.3.2 Les inconvénients du plan EPT
Chapitre II : L’EXCLUSION SCOLAIRE DANS LES ECOLES PRIMAIRES DE MADAGASCAR
I- Les facteurs pouvant amener à l‟exclusion scolaire
I.1 Les facteurs familiaux
I.1.1 Les difficultés financières
I.1.2 Le comportement de la famille
I.1.2.1 La dévalorisation de l‟école
I.1.2.2. Les caractéristiques de la famille
I.1.3 Les problèmes de santé
I.2 Les facteurs institutionnels
I.2.1 L‟école en tant que facteur d‟exclusion
I.2.1.1 L‟environnement physique
I.2.1.2 Les enseignants
I.3Les problèmes politiques et le blocage administratif
I.3.1. Les problèmes politiques
I.3.2. Le blocage administratif
II- Les conséquences de l‟exclusion scolaire
II.1 Les conséquences de l‟exclusion scolaire sur le plan individuel
II.2 Les conséquences socio-économiques de l‟exclusion scolaire
Chapitre III : LES PERSPECTIVES AFIN D’ENDIGUER L’EXCLUSION SCOLAIRE
I- La prise de responsabilité de l‟Etat
II- Les rôles des parents
III- Les rôles de l‟école
IV- La collaboration entre les différents acteurs
IV.1 Les parents et l‟enseignant
IV.2 Le directeur d‟école et les parents
IV.3 Collaboration avec le FRAM, le directeur et les enseignants
Conclusion de la deuxième partie
CONCLUSION GENERALE