Définition du PBVE
Le pied bot varus équin (PBVE) n’est pas une malformation embryonnaire. Le pied normal au cours de son développement se transforme en PBVE au deuxième trimestre de la grossesse. Ainsi, tout comme la maladie luxante de la hanche c’est une malformation congénitale [1]. Broca [3] a donné au PBVE la définition suivante : « attitude vicieuse et permanent tel que le pied ne repose plus sur le sol par ces points d’appuis normaux » Le pied bot varus équin, comme son nom l’indique, se définit par l’association d’un varus, équin de l’arrière pied, adduction de l’avant-pied (médiotarse) et surtout de l’arrière pied (articulation sous-talienne). Ainsi, la plante du pied s’oriente vers l’arrière et le dedans (supination) [2]. Cette déformation est complexe, tridimensionnelle, à la fois osseuse (hypoplasie et désorientation des surfaces articulaires) et fibreuse par rétraction des parties molles (capsules, ligaments, tendons) au niveau de véritables verrous ou noeuds fibreux [2]. Le PBVE congénital est une déformation connue depuis l’antiquité avec le pharaon égyptien Siptah et le dieu du feu grec Héphaïstos, et Hippocrate en affirmait l’origine congénitale par compression in utero, et il recommandait les manipulations et les bandages en position de réduction dès la naissance [4].
En 1741 : définition du terme « pied bot » comme étant le pied qui ressemblait à celui d’un cheval encore appelé « pedesequinae », cette difformité devient célèbre et effrayante pour les parents [5]. Au XVIe siècle : la description des premiers appareillages par Ambroise Paré, tandis que la première ténotomie d’Achille fut réalisé par Lorenz en 1782 à Frankfort, et en 1831 fut la première ténotomie percutané du tendon d’Achille par Stromeyer [4]. Le traitement chirurgical par voie percutanée était développé par Delpech à Montpellier, et par Stromeyer à Hanovre qui avait opéré le fameux patient Little. Puis, diffusion de la technique en Grande Bretagne, ce geste ne corrigeait cependant que la composante « équin » [5]. A la fin du XIXe siècle : proposition de la libération postéro interne des parties molles par Streckeisen puis Phelps. Dès lors, de nombreuses tendances se dégagèrent, soit en faveur du traitement orthopédique avec Thomas, Elmslie, Browne, Kite et Ponseti, soit en faveur du traitement chirurgical par libération des parties molles (Zadek, Codivilla, Ober ou Turco), ou par ostéotomies (Evans, Dwyer) [5].
En 1975, une table ronde de la SOFCOT dirigée par P. Masse définit les lésions anatomiques et leur interprétation radiologique qui sont aujourd’hui unanimement admises (travaux menés par R. Seringe, puis décrits en 1982 aux USA par Mc Kay) [5]. Selon l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), l’incidence du pied bot varus équin congénital varie de 0,42 à 1,85 pour 1000 naissances vivantes. Cette grande variation de l’incidence peut s’expliquer par l’inclusion des déformations posturales mineures avec les véritables déformations structurelles [6]. Un chiffre plus exact pour l’Europe est de 6,4 pour 10 000 naissances vivantes. En Inde, l’Afrique du Sud, et la Thaïlande, l’incidence est plus élevée, à 13, 15 et 16 pour 10 000 naissances vivantes, respectivement. Les enfants dont l’un des parents est touché au premier degré ont 25 fois plus de probabilité de naître avec cette malformation [6]. Le PBVE est deux fois plus fréquent chez les garçons et au moins la moitié des cas sont bilatéraux. Quand cela se produit, les pieds peuvent être de gravité différente [7].
Diagnostic anténatal
Le diagnostic anténatal du PBVE est devenu aujourd’hui possible à l’aide de l’échographie trans-vaginale, réalisée à 13-14 semaines d’aménorrhée, ou par échographie transabdominale, réalisée à partir de 16 semaines d’aménorrhée [29] (fig.36). L’étude du pied in utero est relativement facile car le liquide amniotique est abondant et le pied est suffisamment petit pour être vu dans son ensemble [30]. Le pied bot apparaît extrêmement déformé : la coupe frontale du squelette jambier montre en même temps le tibia, le péroné et la palette des 5 métatarsiens disposés en rayons horizontaux sur le côté interne de la jambe. Le contour cutané souligne le varus de l’arrière pied, le calcanéum est fuyant et pratiquement invisible car son noyau d’ossification apparaît très tardivement. La vue plantaire est irréalisable, quant à la coupe sagittale, elle est ininterprétable [8]. En fin de grossesse, l’analyse du pied est plus difficile [8]. Une grande prudence doit néanmoins dominer le diagnostic anténatal, en particulier au stade très précoce car le pied normal semble être spontanément en varus. Mais lorsque le diagnostic de PBVE est établi, l’échographiste doit s’efforcer de rechercher une autre anomalie et de découvrir un syndrome polymalformatif qui justifiera l’indication d’une amniocentèse [31]. L’intérêt de la découverte d’un pied bot en anténatal est double [30] :
• Rechercher d’autres malformations associées, qui peuvent être compatibles ou non avec la vie extra-utérine, et justifier l’indication d’une amniocentèse.
• Information et acceptation par les parents aussi bien de l’anomalie du foetus, que des modalités thérapeutiques, proposées par le chirurgien orthopédiste lors de la consultation prénatale.
Le diagnostic postnatal : Dès la naissance, le diagnostic clinique d’un PBVE ne pose pas de réelle difficulté en raison de la déformation caractéristique de l’arrière-pied associée à celle de l’avant-pied [31]. Le pied bot associe : varus et supination (plan frontal), adduction (plan horizontal), équin et parfois varus (plan sagittal) [31] (fig. 37, 38, 39). A l’inspection, certains pieds sont courts, trapus et élargis avec des sillons supra-calcanéen postérieur et médio-plantaire très profonds tandis que d’autres pieds sont plus graciles et effilés. L’équin et le varus calcanéen sont notés [31]. La face inférieure du talon regarde certes en bas, mais surtout en dedans et d’autant plus en arrière que l’équin astragalien est sévère [19]. L’orientation spatiale du calcanéum est en effet fortement conditionnée par l’équin tibio-astragalien qui ajoute une fausse supination d’autant plus marquée que l’adduction est forte. Selon le principe de Mac Connail, la correction de l’équin supprime cette fausse supination de l’avant-pied [19]. La palpation situe la grosse tubérosité du calcanéum par rapport au sillon cutané et L’atrophie plus ou moins sévère du mollet est notée.
L’examen dynamique passif permet de classer le PBVE en fonction de l’angle obtenu en position de correction, soit de profil en flexion dorsale, soit de face en abduction [32]. La réductibilité de l’équin doit faire récuser le diagnostic de pied bot, au profit de celui de « pieds varus » dont le pronostic est bien meilleur. Cette confusion augmente les bons résultats de certaines séries de la littérature [32]. Le manque de réductibilité du pied sépare un pied bot vrai du pied bot doux postural. Les manifestations douces représentent une déformation posturale in utero, identifié par le fait qu’il est entièrement (ou presque) corrigible passivement et par l’absence remarquée des contractures importantes et des plis profonds de la peau d’un pied bot vrai. Un pied bot postural ne présente en aucun cas l’atrophie et la rigidité du pied bot varus équin vrai. Cette difformité posturale peut souvent être corrigée passivement à l’évaluation initiale par plusieurs minutes de légers étirements [32]. Dans Notre série, le diagnostic anténatal de PBVE s’est fait dans 1,4% des cas, alors que l’échographie a fait le diagnostic dans 44,6% des cas dans la série française de C. Bronfen [33], et dans 24,13% des cas la série turque de SerkanIltar [34]. Le diagnostic postnatal du PBVE est facile, et se fait en majeur partie à la naissance. Dans notre série, on a diagnostiqué 98,6% de pied bot en poste natal, ce qui rejoint la série indienne de Mazhar Abbas [35] où le diagnostic s’est fait en post natal à 1OO% des cas (tableau XII). La prédominance du PBVE chez l’enfant de sexe masculin est bien connue [36], ceci est noté dans notre étude et concorde avec toutes les publications [33, 34, 35, 37] où le PBVE touche environ les 2/3 des garçons. Les chiffres ne sont pas équivoques et varient entre 73% et 82% (fig. 40).
Comment confectionner les plâtres ? (fig. 55). Le plâtre doit impérativement être confectionné sur un enfant détendu dans une pièce calme, l’enfant est laissé à jeun de telle sorte que le biberon soit donné par un des parents au cours du geste. La confection du plâtre succède à une brève manipulation et est réalisée dans la position d’étirement ligamentaire maximal alors obtenu. Seul le plâtre de Paris, facile à modeler doit être utilisé. Une seule couche de coton ou de Velband®appliquée sur la peau de l’enfant sans jersey permet un bon ajustement du plâtre et une excellente tolérance cutanée Tandis que l’opérateur maintient le pied dans la position souhaitée, la bande de plâtre est déroulée par l’aide de distal à proximal, dans le sens horaire pour un pied gauche, antihoraire pour un pied droit, en se limitant dans un premier temps au segment jambier. L’opérateur peut alors mouler et positionner le pied en rotation sous le talus, tandis que l’aide exerce un contre-appui sur la face dorsale de la cuisse ; la voûte plantaire est protégée par le pouce de la main « de maintien ». La zone pré-malléolaire interne est modelée par le pouce de la main « modelante », aucun contact avec le talon n’est réalisé. La botte plâtrée étant terminée, la contention est prolongée sur le genou et la cuisse. En effet seule une prise cruro-pédieuse permet de prévenir la perte de correction par rotation de la cheville et du talus. Le plâtre Cruro-pédieux genou fléchi à 90′ a pour autre avantage de détendre les jumeaux (action anti-équin), et d’éviter que le nouveau-né ne perde son plâtre (forme conique des segments). La réalisation d’une contention par simple botte plâtrée serait pour l’auteur une erreur fondamentale. La découpe distale vient achever la procédure. La face dorsale des orteils est dégagée, sans en dépasser la commissure (risque d’oedème). Il faut bien conserver le plâtre sous les orteils au-delà des pulpes pour permettre un étirement des fléchisseurs.
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Table des matières
INTRODUCTION
PATIENTS ET METHODE
I- Type d’étude
II- Population étudiée.
1- Critères d’inclusion
2- Critères d’exclusion
3- Les variables étudiées
III- La collecte des données
IV- Analyse statistique
V- Ethique
VI- Outils diagnostic
1- Diagnostic positif
2- Diagnostic de gravité
VII- technique thérapeutique
1- La réalisation des plâtres
2- La ténotomie du tendon calcanéen
3- Le plâtre post ténotomie
4- L’attelle d’immobilisation
VIII- Critères d’évaluation
RESULTATS ET ANALYSES
I- Epidémiologie
1- Répartition selon l’âge de consultation
2- Répartition selon le sexe
II- Etude clinique
1- Le diagnostic positif
2- La localisation de l’atteinte
3- Le diagnostic de gravité
III- Le traitement
1- Le début de la prise en charge
2- Le nombre de plâtres effectué pour chaque pied
3- Le nombre de plâtres réalisé selon le grade de sévérité du pied
4- La durée de chaque plâtre
5- La ténotomie du tendon calcanéen (TC)
6- Le plâtre post ténotomie
7- L’attelle d’immobilisation
IV- Les complications
1- Les complications liées aux plâtres
2- Les complications liées à la ténotomie
V- Evaluation des résultats globaux de notre série
1- Les critères d’évaluation
2- Les résultats globaux
3- Analyse des résultats
4- Analyse et devenir des cas d’échec de notre série
DISCUSSION
I- Définition du PBVE
II- Etiopathogenie du PBVE
III- Anatomie pathologique du PBVE
1- Notions modernes d’anatomie et de physiologie du pied
2- Déformations osseuses
3- Les attitudes vicieuses articulaires
4- La rétraction des parties molles
IV- Démarche diagnostic
1- Diagnostic positif
2- Diagnostic étiologique
3- Diagnostic de gravité : classification du PBVE
V- Imagerie du PBVE
1- Radiographie
2- Echographie post-natale
3- Tomodensitométrie
4- Imagerie par résonance magnétique
VI- Le traitement du PBVE
1- Les objectifs
2- Le traitement orthopédique
2.1- La technique fonctionnelle
2.2- La technique de Ponseti
2.3- La technique mixte
VII- Evaluation des résultats
1- Le Fonctional Rating System (F.R.S) de Laavag et Ponseti
2- La classification de Ghanem et Seringe
3- La classification de J. Gonzales-Ferre et J. Lloret
4- La classification de A. Dalmonté
5- Notre technique d’évaluation
6- Analyse des résultats
7- Analyse des cas d’échec
CONCLUSION
RESUMES
BIBLIOGRAPHIE
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