Le partage des informations et des savoirs pour le développement durable
La circulation des informations pour le développement durable
Les particuliers, les groupes et les organisations doivent avoir accès à l’information se rapportant à l’environnement et au développement que détiennent les pouvoirs publics, y compris des informations sur les produits et les activités qui ont ou sont susceptibles d’avoir des incidences sensibles sur l’environnement, ainsi que des informations sur les mesures de protection de l’environnement » . Cela définit un véritable droit à l’information lié à l’exercice de la démocratie, mais aussi les besoins d’information d’acteurs qui participent directement à la mise en œuvre du développement durable .
Christian Brodhag (2004, in l’information pour le développement durable dans l’espace francophone) a représenté schématiquement ces différentes conceptions de circulation de l’information.
Comme on peut le constater, l’Agenda 21 hésite entre trois visions de la circulation de l’information : descendante (top down), ascendante (bottom up) et celle qui circule au sein des réseaux. Il propose la mise en place de programmes Action 21 à l’échelon des collectivités appelés aussi Agendas 21 locaux qui introduisent des processus d’échange d’information et de savoirs. « La concertation et la recherche d’un consensus permettraient aux collectivités locales de s’instruire au contact des habitants et des associations locales, civiques, communautaires, commerciales et industrielles, et d’obtenir l’information nécessaire à l’élaboration des stratégies les plus appropriées. Grâce au processus de concertation, les ménages prendraient davantage conscience des questions liées au développement durable » . Les travaux de J. MELESE (in Lebraty, 2008) met nettement en lumière le fait que l’on doive prendre en compte l’information au travers de ses complexes relations avec l’individu, l’organisation et son environnement. Tous ces éléments impliquent donc la mise en œuvre d’informations spécifiques à destination de chacun des acteurs. Il ne s’agit pas d’opposer des approches ascendantes (bottom up) ou descendantes (top down) mais de proposer une combinaison des deux. La communication horizontale, les réseaux d’échange d’expérience, doivent compléter ce dispositif.
Les catégories d’acteurs impliqués dans les échanges pour la circulation de l’information pour le développement
Pour entrer réellement en application, les savoirs pour le développement durable doivent être partagés par quatre communautés : la communauté de recherche et de formation, qui joue un rôle central mais pas unique, les collectivités publiques de tous niveaux depuis les organismes internationaux jusqu’aux collectivités locales, la société civile à travers les associations et ONG et surtout la population locale.
Dans cet ordre d’idée, Le principe de la gouvernance que nous avons évoqué plus haut nécessite un partage des informations et des savoirs. Breuil et Brodhag l’ont défini ainsi : « Dans le contexte du développement durable, on considère que la gouvernance est un processus de décision collectif n’imposant pas systématiquement une situation d’autorité. Dans un système complexe et incertain, pour lequel les différents enjeux sont liés, aucun des acteurs ne dispose de toute l’information et de toute l’autorité pour mener à bien une stratégie d’ensemble inscrite dans le long terme. Cette stratégie ne peut donc émerger que d’une coopération entre les institutions et les différentes parties intéressées, dans laquelle chacune exerce pleinement ses responsabilités et ses compétences » .
Nous pouvons constater qu’ici encore il est question d’interaction, de mise en commun de l’information. Le développement durable fait intervenir une multiplicité d’acteurs tant au niveau de la construction du savoir qu’au niveau de son échange, ce qui implique la gestion d’informations nombreuses, variées et hétérogènes.
Les liens sociaux dans la circulation des informations pour le développement durable
Les relations entre les acteurs, au-delà des systèmes d’intérêt et des jeux d’alliance et de concurrence sont conditionnées par des systèmes de valeurs. Ces règles (normes et valeurs) normalisent leurs comportements. Elles ne sont pas nécessairement formalisées, elles peuvent être tacites. Ces règles partagées correspondent à un ensemble d’institutions invisibles, comme le démontre des chercheurs (Angeon et al.) en développement durable, qui limitent les capacités d’anticipation des acteurs et régulent leur liberté de conduite et d’action. Selon ces chercheurs, le fait de connaitre les structures relationnelles favorisent une meilleure compréhension entre les acteurs, encourageant la transparence et la circulation d’informations, ces règles facilitent la coopération. Elles permettent, en outre, de déboucher sur des régularités de comportement et préviennent les défections ou les comportements opportunistes. Elles contribuent ainsi à stabiliser ou à renforcer les liens en favorisant le développement de signes qui limitent les problèmes d’asymétrie d’information, d’incertitude et les dissensions. Dans leur recherche, ces chercheurs ont orienté plus leur exemple sur le cas d’un acteur particulier : les techniciens/les agents de terrain qui sont conduits à prendre des décisions inefficaces par manque d’informations. Ils mettent en évidence la qualité des coordinations locales dans le partage et la diffusion de l’information. Ces informations, qu’elles concernent la transmission d’une technique de production ou d’un apprentissage, etc (savoir-faire), L’accès de ces acteurs à de telles informations se solde par une meilleure connaissance de leur environnement économique et social.
La Banque mondiale (cité par Angeon et al) a, par exemple, proposé une typologie des liens sociaux en 2000, elle qualifie les liens sociaux en termes de « bonding », « linking », « bridging » (respectivement : unit, lie et relie). Les liens de type « bonding» unissent des individus au sein d’une même communauté. Ces liens sont encore qualifiés parfois d’horizontaux. Dans ce type de structure sociale, les acteurs sont de statut identique : ils appartiennent au même groupe. On y range les relations familiales et amicales, les réseaux sociaux de type communautaire, les organisations, etc. Les liens de type « linking » caractérisent des interactions entre des acteurs appartenant à des groupes différents. Ces liens sont également dits verticaux. Dans ce type de relation, les acteurs occupent des places (ou des statuts) différents. Enfin, dans les relations de type « bridging », les agents sont distants les uns des autres. Cette dernière notion désigne à la fois leur éloignement physique (les liens de type bridging sont extraterritoriaux). Pour notre part, nous prenons les liens sociaux pris en compte dans la théorie de Granovetter qui sont considérés comme étant symétriques et réciproques et comme étant «positifs».
Les affirmations des différents auteurs comme Putnam, Lazega, etc. sont surtout affiliés avec ce que Mark Granovetter , dans la théorie des liens faibles, affirment, en distinguant les liens sociaux en 2 catégories : les liens forts et liens faibles (in the strenght of weak ties : a network theory revisited : 1983). Le sociologue américain distingue les liens forts qui désignent des relations régulières comme les relations familiales, amicales voire professionnelles, aux liens faibles qui concernent des relations occasionnelles. Il souligne l’importance des réseaux sociaux, plus particulièrement les liens faibles, sur l’influence dans le développement de l’action collective.
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Table des matières
Introduction
Partie I : cadrage général de l’étude
1- Information et développement durable
2- Le partage des informations et des savoirs pour le développement durable
3- Information et développement durable dans le contexte malgache et local
4- Cadre Conceptuel de la recherche
Partie II : cadre théorique et méthodologique
1- Théorie des liens faibles de Granovetter
1-1- Présentation de la théorie
1-2- Les variables clés retenus de la théorie de Granovetter pour notre recherche
1-3- Approche systémique des communications : l’approche appropriée
2- Méthodologie de travail
Partie III : Cadre analytique de la recherche
1- Présentation des résultats
1-1- Caractéristiques du terrain de recherche
1-2- Le processus informationnel
1-3- Représentation sociale sur la conservation des ressources naturelles et caractérisation des rôles respectives des acteurs dans cette action de conservation des ressources naturelles
1-4- Les référents culturels influant sur les relations entre les acteurs
2- Réseaux sociaux et circulation des informations
2-1- Modélisation des échanges dans les cercles sociaux
2-2- Analyse des liens entre les cercles sociaux
2-3- Les contextes spatiales de la circulation des informations entre les acteurs
3- Perspective de la recherche : activation des liens faibles par la médiation de savoirs pour une mobilisation des acteurs
3-1- Relation entre médiation de savoirs et mobilisation sociale pour le développement
3-2- Apports de la médiation de savoirs pour la mobilisation sociale
Conclusion
Tables des matières
Bibliographie
Liste des tableaux et des figures
Annexes
Annexe 1 : présentation du complexe Mangoky Ihotry : le terrain de recherche
Annexe 2 : journal d’information sur les activités de ASITY pour la conservation des ressources
Annexe 3 : organigramme de la plateforme MIARO