La plupart des études présentées dans ce document ont été entièrement réalisées au Burkina Faso ou en partie à partir d’échantillons collectés dans des sites du Burkina Faso .
Présentation générale du cadre d’étude
Le Burkina Faso est un pays soudano-sahélien et continental totalement enclavé au cœur de l’Afrique de l’Ouest. Il couvre une superficie de 274 000km2 . Il est à l’intérieur de la boucle du fleuve Niger entre 10° et 15° de latitude Nord et entre 2° de longitude Est et 5°30’ de longitude Ouest. En 2003, sa population était estimée à plus de 12 millions d’habitants inégalement repartis avec une densité maximale dans le plateau central . Le Burkina Faso dans son ensemble est un pays plat. L’altitude moyenne ne dépasse pas 400 mètres et la moitié du pays se situe entre 250 et 350 mètres avec quelques variations locales . Quoique relativement peu arrosé, le Burkina Faso a un réseau hydrique assez important avec trois grands bassins : bassin de la Volta, de la Comoé et du Niger. Chaque bassin est parsemé de petits cours d’eau permanents à semi permanents qui permettent de maintenir les activités agro-pastorales.
Le climat
Le Burkina Faso situé au cœur du sahel possède dans son ensemble un climat de type sahélien caractérisé par deux saisons : une saison sèche et une saison des pluies ou hivernage. La durée de la saison sèche qui peut s’étaler de 6 à 8 mois est caractéristique des 3 zones climatiques que connaît le pays et couvre en moyenne d’Octobre à Avril. Cette saison sèche est dominée par les vents secs d’harmattan qui touchent toute l’étendue du territoire avec une transition vers la saison des pluies qui s’amorce en Avril avec l’arrivée de la mousson. La saison des pluies va de Mai à Septembre, le mois d’Août étant le mois le plus pluvieux.
En fonction des isohyètes, on distingue trois zones climatiques :
La zone sahélienne: elle s’étend au Nord du pays entre les latitudes 13°5’N à 15°3’N. Elle est caractérisée par une pluviométrie faible de moins de 600mm, des températures élevées > 30°C et une végétation d’arbustes épineux qui en fait une zone d’élevage par excellence. La saison sèche dure souvent plus de 8 mois.
La zone soudano-sahélienne: elle est située entre 11°3’N et 13°5’ N. Elle connaît une pluviométrie moyenne de 750mm avec des températures relativement élevées autour de 30°C. La durée de la saison sèche varie entre 6 et 7 mois. Cette zone soudano-sahélienne est l’aire géographique la plus vaste du Burkina s’étendant du Nord Ouest à l’Est et couvrant tout le plateau central du pays.
La zone soudano-guinéenne: elle est située entre les latitudes 9°3’ et 11°3’N. Elle est caractérisée par des pluies relativement abondantes en moyenne >900mm et des températures plus douces comparées à celles des régions précédentes. Elle couvre la partie Ouest et SudOuest du pays. La saison des pluies dure plus de 6 mois toutefois avec quelques variations à l’intérieur de la même zone.
La pluviométrie annuelle connaît des variations importantes à l’intérieur de chaque zone climatique mais aussi au cours des années ce qui modifie continuellement la limite des isohyètes. Il est aussi noté une tendance globale des températures due au réchauffement climatique à l’instar de ce qui est observé au niveau mondial.
La végétation
La végétation est typique des trois zones climatiques du pays . Dans la zone sahélienne stricte, on y rencontre la steppe arbustive dominée par les épineux parsemées de quelques arbres et arbustes sillonnée de galeries forestières minces. Dans la zone sahélo-soudanienne, les espèces végétales sahéliennes et soudaniennes y interfèrent avec cependant une allure générale dominée par les espèces sahéliennes herbacées donnant une apparence de fourrés à allure de brousse tigrée. La zone soudanienne à soudano-guinéenne est le secteur de grandes savanes à faciès multiples parsemées de reliques de forêts façonnées par les feux de brousse et d’intenses activités agricoles et pastorales. On y rencontre quelques forêts classées et les « bois sacrés » qui sont encore préservés par endroits tout le long des cours d’eau permanents. C’est la zone de grands marécages surtout dans sa partie Sud-Ouest. L’abondance relative des pluies maintient encore des savanes humides et boisées très sollicitées par les activités agropastorales. Quelques rares aires de forêts sont encore rencontrées à l’extrême Ouest du pays.
Les pratiques agricoles
On distingue deux grandes pratiques agricoles: les cultures vivrières ou/et en rotation avec les cultures de rente que sont le coton, l’arachide et le sésame. Le coton est cultivé essentiellement à l’Ouest du pays qui constitue depuis plus de 40 ans le bassin cotonnier du pays. Avec la relance de cette filière, de nouvelles aires ont été emblavées surtout à l’Est et centre Est du pays constituant la seconde zone cotonnière depuis 1990. A cette zone classique, s’ajoute la région extrême du Sud-Ouest réputée jadis pour sa production de tubercules et jusqu’alors épargnée par le coton qu’elle expérimente depuis 1996. A côté de ces cultures liées à la pluviométrie, l’installation des hydro-aménagements soutient essentiellement la production de riz qui devrait connaître un accroissement de rendement avec deux récoltes par an (figure 7). Depuis l’an 2000, l’ensemble du pays en particulier les zones à potentiel hydrique favorable, connaît un essor des cultures de contre-saison en en l’occurrence la production de maïs et d’arachide à la faveur d’un grand programme gouvernemental dénommé «la petite irrigation». Ce programme qui vise à vulgariser cette pratique a mis en place de petits aménagements par la création des points d’eau provenant des cours d’eau déjà existants. Toute cette modification du milieu (augmentation et aménagement des aires cotonnières et des hydro-aménagements) a un impact sur la bio-écologie des vecteurs et leur résistance aux insecticides et par conséquent sur la transmission du paludisme et sur les stratégies de lutte antivectorielle.
Les sites d’étude
Toutes les études sur la transmission du paludisme présentées dans ce document ont été pour la plupart menées dans la partie ouest du pays qui coïncide avec la zone soudanienne caractérisée par une saison de pluies relativement longue allant de Mai à Octobre. Cette saison de pluie qui couvre plus de 6 mois et qui correspond à la période intensive de la transmission du paludisme en a fait un faciès endémique où la transmission du paludisme est stable. Il s’agit des sites de Soumousso, de la Vallée du Kou et de Léna, tous situés dans la partie Ouest du pays. A ceci s’ajourent les sites pilotes du Programme National de Lutte contre le paludisme (PNLP) comprenant Gaoua en zone soudanienne, Nanoro en zone soudano-sahélienne et Dori en zone sahélienne. Les études sur la bio-écologie des vecteurs en saison sèche ont été réalisées à Ouagadougou en Avril 2006 tandis que celles portant sur le comportement de reproduction d’An. gambiae s.s. à travers les essaims ont été menées à Bama (VK7) et à Soumousso à l’Ouest du pays.
La capture sur appât humain
Cette méthode a permis de capturer les spécimens ayant servi à de mesurer l’agressivité des moustiques vis-à-vis de l’homme ou taux de piqûre lequel paramètre est utilisé pour le calcul du taux de transmission du palustre. Ces captures nocturnes se déroulent entre 19h et 6h. Les volontaires ou «captureurs» jouant le rôle d’appât humain, munis de torche, capturent les moustiques qui se posent sur les jambes dénudées avant que ceux-ci ne les piquent, à l’aide de tubes à hémolyse (Illustration 1). Les spécimens collectés sont référencés et regroupés en fonction de certaines informations que sont la localité, la date, l’heure de capture, la maison et le lieu de capture (à l’intérieur ou à l’extérieur des maisons). Ces caractéristiques permettent outre le taux de piqûre de déterminer d’endophagie/exophagie ainsi que les rythmes d’activité. Chaque poste de capture est assuré par deux captureurs qui se relayent l’un entre 19h et 0h et l’autre de 0h à 6h. Avant de les enrôler, chaque captureur est informé des procédures de capture et en cas de consentement, une prophylaxie est fournie suivant les recommandations de l’OMS tenant compte du contexte local de chimiosensibilité des parasites. Les ovaires des spécimens capturés sont ensuite disséqués pour la lecture de la parité (âge physiologique des femelles). La recherche des parasites (sporozoïtes) qui se faisant auparavant par dissection des glandes salivaires et détection microscopique se réalise dorénavant au laboratoire à l’aide de la technique ELISA – CSP pratiquée sur la tête et le thorax des femelles à analyser, ce qui permet d’évaluer le taux d’infection des femelles (Burkot et al., 1984). Cette méthode de capture a été principalement utilisée pour la mesure du taux d’inoculation entomologique (TIE, voir chapitre 3 pour les détails de la formule du TIE) dans les études de la transmission à l’Ouest du pays. Mais pour des raisons essentiellement éthiques, cette technique d’échantillonnage tend vers un abandon progressif favorisant l’utilisation des pièges lumineux tels les pièges CDC.
Capture par les pièges CDC
La capture sur homme a été remplacée par les captures à l’aide des pièges CDC pour l’étude de la bio-écologie des vecteurs dans la ville de Ouagadougou en avril 2006 (Illustration 2).
Cette méthode consiste à placer un piège lumineux CDC à côté d’un dormeur couché sous une moustiquaire non traitée aux insecticides. Les moustiques agressifs qui cherchent à piquer sont déviés vers le piège. La suite du protocole (tranche horaire, référence des tubes par date, localité etc) reste inchangé.
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Table des matières
INTRODUCTION
CHAPITRE 1: PRESENTATION DU CADRE D’ETUDE- MATERIELS ET METHODES
1.1. Présentation du cadre et des zones d’étude
1.2. Méthodes d’échantillonnage des vecteurs
CHAPITRE 2: LA BIO-ECOLOGIE DES VECTEURS DU PALUDISME EN AFRIQUE
2.1. Le complexe Anopheles gambiae
2.2. Le cycle de développement
2.3. De la barrière génétique entre les formes moléculaires M et S d’An. gambiae s.s.
2.2.1. Hypothèse d’isolement reproductif pré-copulatoire
2.2.2. Hypothèse d’isolement reproductif post-copulatoire
2.4. Le groupe funestus
2.4.1. Distribution des espèces du groupe funestus
2.4.2. Distribution des formes chromosomiques Kiribina et Folonzo dans les savanes humides à l’Ouest du Burkina Faso
2.5. Les autres vecteurs
2.5. La distribution des vecteurs au Burkina Faso
CHAPITRE 3: LA TRANSMISSION DU PALUDISME
3.1. Les Plasmodium
3.2. Les cycles de développement du Plasmodium
3.3. La mesure de la transmission
3.4. La typologie du paludisme
3.4.1. Notion de faciès épidémiologiques primaires
3.4.2. Quelques exemples de transmission
a. faciès équatorial
b. faciès tropical
– transmission dans les savanes à l’Ouest du Burkina Faso
c. faciès sahélien
– transmission dans le sahel Burkinabé: Dori
3.4.3. Faciès épidémiologiques secondaires ou locaux
a. en milieu rizicole
– cas de la plaine rizicole de la Vallée du Kou au Burkina Faso
b. en milieu urbain
– La distribution des vecteurs du paludisme en zone urbaine au Burkina
Faso, cas de la ville de Ouagadougou
Présentation du cadre de l’étude
CHAPITRE 4: LA RESISTANCE DES VECTEURS AUX INSECTICIDESCONSEQUENCES SUR LES STRATEGIES DE LUTTE ANTIVECTORIELLE
4.1. Historique de la lutte contre le paludisme
4.2. La lutte antivectorielle
4.2.1. La lutte anti-larvaire
4.2.2. La lutte contre les stades adultes
4.3. Les Moustiquaires imprégnées d’insecticide (MII)
4.4. Les insecticides utilisés
Les organochlorés
Les organophosphorés
Les carbamates
Les pyréthrinoïdes
Autres insecticides
Les régulateurs de croissance
Les bio-larvicides
Les répulsifs
4.5. Les mécanismes de résistance des vecteurs aux insecticides
4.5.1. La résistance métabolique
4.5.2. La résistance par modification de la cible
L’acétylcholinestérase (AChE)
Le canal sodium dépendant (CNaVdp) et les mutations kdr
4.5.3. Les mécanismes secondaires de la résistance
4.6. La résistance des vecteurs aux pyréthrinoïdes en Afrique
4.6.1. La résistance aux pyréthrinoïdes
En Afrique de l’Ouest
En Afrique Centrale, de l’Est et du Sud
4.6.2. La résistance aux carbamates et aux organophosphorés en Afrique
4.7. La résistance des vecteurs aux insecticides au Burkina Faso
4.8. Quelques perspectives de lutte
4.8.1. Les LLINs et les nouvelles combinaisons d’insecticides
-L’efficacité des LLINs en zone de semi-résistance au Burkina Faso
4.8.2. Les ITPS
4.8.3. La lutte génétique
CONCLUSION
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQES
ANNEXES