Le Paléolithique moyen en Afrique de l’ouest

Le Paléolithique moyen en Afrique de l’ouest

Les industries du Paléolithique moyen sont bien présentes dans la sphère ouest africaine ou elles sont relativement anciennes. Elles sont de nature diverse comme en témoigne la subdivision en type de faciès. Cette réalité s’observe à l’échelle de l’Afrique de l’Ouest et notamment au Sénégal.

Connaissances sur le Paléolithique moyen en Afrique de l’ouest

Dans la littérature préhistorique africaine, nous notons l’usage des expressions de «Paléolithique moyen » et de « Middle Stone Age » qui renvoient toutes à la même période. Ces choix terminologiques sont en partie fonction des héritages linguistiques francophone et anglo-saxon. Pour ce travail portant sur la partie ouest africaine majoritairement francophone, nous utiliserons le vocable de « Paléolithique moyen ». Cette période a longtemps été située approximativement entre 35 000 et 15 000 ans (Show, 1989). Mais, les récents travaux archéologiques à Ounjougou, dans le pays dogon au Mali ont replacé la chronologie du Paléolithique moyen d’Afrique de l’ouest à la fin du Pléistocène moyen, autour de 150 000 ans (Soriano et al., 2010a). Cependant, l’Afrique de l’ouest est composée d’une riche variété de zones écologiques et les données d’une seule localité ne peuvent être généralisées pour toute la région (Niang et al., 2015).

A l’échelle africaine, le Paléolithique moyen se caractérise par un foisonnement d’industries lithiques. Certaines sont souvent liées à des contextes environnementaux spécifiques et expliquent en partie la variabilité des traditions régionales (McBrearty et al., 2000). Généralement, le Paléolithique moyen regroupe les industries Levalloiso-moustériennes (notamment au sud du Sahara) ; l’Atérien dans le Sahara (renferme également les débitages Levalloiso-moustériens) ; le Sangoen et le Lupembien d’Afrique centrale, australe, orientale présence du débitage Levallois associé aux bifaces, pics, rabots et haches (Robert et al., (2003 ; Bordes, 1968 ; Bayle des Hermens, 1989 ; Clark, 1988 ;1989 ; Sutton, 1989, Shaw, 1989 ; Chavaillon, 1992 ; Vernet, 2004, Barham et al., 2008).

Plusieurs sites du Paléolithique moyen sont reconnus en Afrique de l’Ouest notamment au Nigéria, où il apparaît sous forme de faciès d’origine locale et étrangère. Les faciès d’origine étrangère du Paléolithique moyen signalés au Nigéria sont le Sangoen et sa forme évoluée débouchant sur le Lupembien (Chavaillon, 1992 ; Soper, 1965).

Le Sangoen tire son nom du site éponyme de Sango Bay situé sur la rive ouest du lac Victoria en Tanzanie (Bayle des Hermens, 1989). Le Sangoen se caractérise par la présence de pics, de bifaces, d’éclats et nucléus Levallois (Davies, 1954 ; 1967). Au Nigéria, ce faciès est très présent et se localise au sud, à l’ouest et nord-ouest du Plateau de Jos et quelques traces à l’est. Près de la ville de Nassarawa, la rive droite de la rivière Haderi a fourni un outillage sangoen fait de pics, choppers et bifaces sur la surface d’un dépôt de galets et de gravats attribué au Pluvial Kamasien (fig.1).

Dans la même zone, du matériel sangoen constitué d’un fin biface, d’un pic et d’une boule de pierre sphéroïde enfoncée dans la dure latérite apparaît sur la rive du fleuve Kurafe (Soper, 1965). Au nord-est de Jebba, un Sangoen comprenant de lourds pics (fig.1) et choppers, un biface, des éclats et nucléus fut découvert non stratifié (à l’exception d’un éclat retrouvé en place) (Soper, 1965). Le site le plus occidental de la région, sur la rivière Waléli au sud de Gummi, met en évidence une industrie sangoenne qui se spécifie par la rareté voire l’absence de pics, et la présence de bifaces, de choppers, de nucléus coniques et irréguliers ainsi que quelques racloirs. Cette industrie particulière dans la région a probablement connu un développement parallèle, mais pas directement apparenté au Sangoen tel qu’il est connu en Afrique de l’Est et Centrale (Soper, 1965).

C’est sur les dépôts miniers des terrasses de la rivière Lumba, dans la province du Kasai, en République démocratique du Congo que le Lupembien fut défini (Barham et al., 2008). Ces terrasses ont fourni des lames et des pointes allongées à retouche bifaciales (Barham et al., 2008). Forme évoluée du Sangoen, le Lupembien est signalé au nord du Nigeria par la présence de pièces foliacées, lancéolées, de grattoirs, et de racloirs (Chavaillon, 1992 ; Davies, 1967). Davies a signalé le caractère dispersé du Lupembien dans la partie nord du Nigeria (Davies, 1967).

Le Sangoen et le Lupembien ont longtemps été considérés comme des faciès typiques des environnements forestiers d’Afrique centrale, oriental et australe pour le travail du bois (Bayle des Hermens, 1989 ; Sutton, 1989 ; Clark, 1989 ; Chavaillon, 1992 ; Soper, 1965). Néanmoins certains auteurs comme Davies (1967), pensent que cette hypothèse reste discutable, car ces outillages se retrouvent en dehors de ces zones localisées du continent.

En plus des industries dites Sangoen et Lupembien généralement grossières et considérées comme des faciès de transition du mode 2 au mode 3, le Nigeria a également fourni de véritables industries de type Paléolithique moyen qui marquent l’abandon de l’outillage lourd et grossier au profit d’un petit outillage sur éclat (Soper, 1965).

Ce Paléolithique moyen apparaît au nord du plateau de Jos avec l’outillage de Zénabi découvert dans les dépôts alluviaux du fleuve Gaya. Le matériel comprend des racloirs, une pointe projectile triangulaire cassée, quelques burins irréguliers, quelques matériaux lourds (pics) et 23,6% de nucléus préparés (fig.2) (Soper, 1965). Dans le nord du Plateau de Jos, le Faciès Maï Lumba grandement dominé par les éléments Levallois, constitue également une variante locale du Paléolithique moyen nigérian (Allsworth-Jones, 1986). Ces deux faciès à proportion de débitage Levallois différente (Zénabi et Maï Lumba) incluent également le débitage discoïde et un outillage typologiquement caractéristique du Moustérien (Allsworth-Jones, 1986). Le Paléolithique moyen du Nigéria a probablement connu une variation chronologique et fonctionnelle compte tenu de la présence d’autres sites de la zone du Plateau de Jos et de la région de Nok renfermant des pourcentages variables de nucléus Levallois (Barham et al., 2008).

Le Paléolithique moyen au Sénégal 

L’essentiel des sites du Paléolithique moyen sénégalais se retrouve particulièrement à l’ouest (Dakar et environ) en raison de sa proximité et de son accessibilité, au nord dans la vallée du Fleuve Sénégal, dans la vallée de la Falémé et près du Fleuve Gambie (fig.12) (Corbeil et al., 1948 ; Descamps, 1979 ; Diop, 1976 ; 2000 ; Camara et al., 1987 ; Bessac, 1953 ; 1955 ; Scerri et al., 2015 ; 2017 ; Chevrier et al., 2016). Dans toutes ces régions, des artéfacts ont été retrouvés hors contexte stratigraphique du fait de l’intense activité des processus d’érosion (Niang et al., 2015).

Les abords de la Vallée de la Falémé sont de ces lieux qui ont livré des industries attribuées au Paléolithique moyen (Chevrier et al., 2016 ; Huysecom et al., 2014 ; 2015 ; Lebrun et al., 2016). Ce Paléolithique moyen se caractérise en partie par la mise en place du façonnage bifacial dont les datations attestent une relative ancienneté dans le Sénégal Oriental. Dans le site de Toumboura III (fig.12), ce choix de taille bifaciale privilégié s’accompagne d’éclats de débitage et de pointes importées dans le site. Les datations OSL situent cette industrie à 33± 3 Ka (Lebrun et al., 2016). Cependant, au ravin de Missira (ravin sud), le façonnage bifacial au niveau de la Falémé peut être beaucoup plus ancien car il y est daté à 63±5 Ka (terminus ante quem) (Lebrun et al., 2016). Mais, en l’absence d’un véritable assemblage lithique significatif (une seule pièce bifaciale cassée, roulée et isolé), l’attribution véritable au Paléolithique moyen du site de Missira reste à confirmer (Chevrier et al., 2016).

Dans le nord du Sénégal, un bon nombre de sites de la Vallée du Fleuve Sénégal (Ndiayène Pendao, Njidéri, Madina Ckeikh Omar, Ngnith, Mbane, Dabia, etc.) sont attribués au Paléolithique moyen (Scerri et al., 2015 ; 2017) (fig.12). L’analyse de leur matériel (notamment en place à Ndiayène Pendao) a permis d’identifier les débitages Levallois, discoïde et SSDA, ainsi qu’un outillage fait de pointes Levallois, de denticulés, de pièces foliacées, d’éclats corticaux et d’éclats débordants. Une date OSL réalisée dans le site de Ndiayène Pendao situe cette industrie à environ 11Ka (Scerri et al., 2017). Le Paléolithique moyen sénégalais se divise actuellement en deux faciès principaux : le Moustéroïde et le Tiémassassien (Niang et al., 2015). Le terme « moustéroïde » s’applique aux industries se rapportant au moustérien et pour lesquelles, les caractéristiques typiques ne sont pas comparables au moustérien d’Europe. Ce moustéroïde se spécifie par l’alliance des méthodes de débitage Levallois et discoïde (moustérien) ainsi que des formes du Paléolithique supérieur (Guédé, 1995).

Plusieurs sites de la presqu’île du Cap-Vert ont été attribués au Moustéroïde (Corbeil et al., 1948 ; Descamps, 1979 ; Diop, 1976 ; 2000). C’est notamment le cas de Bargny (fig.13) où l’industrie se compose généralement d’un fort pourcentage d’éclats bruts, de nucléus globuleux et discoïdes, de petits bifaces cordiformes, des couteaux à dos, d’une faible présence d’éclat Levallois et d’une faible proportion d’outils (grattoirs, denticulé, coches) quoique dominé par les racloirs (Diop, 2000). La faiblesse des pièces retouchées, la rareté des outils de facture médiocre et les nombreux accidents de taille suggèrent que le site de Bargny fut un atelier de taille (Diop, 1976). Néanmoins, certains des critères retenus par cet auteur (Diop) pour qualifier la fonction du site de Bargny nous paraissent peu pertinents.

En effet, le but de la retouche étant de rendre l’outil performant, les éclats bruts ayant un ou des bords tranchants très efficaces peuvent ne pas nécessiter une retouche supplémentaire, ce qui peut justifier le peu d’éclats retouchés. Concernant les nombreux accidents de taille, ils peuvent intervenir au cours du fractionnement, mais aussi durant leur usage pour accomplir des tâches du quotidien dans les lieux d’habitat.

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Table des matières

Introduction générale
Première Partie L’état des connaissances sur le Paléolithique moyen en Afrique de l’Ouest
Chapitre I : le Paléolithique moyen en Afrique de l’ouest
Introduction
I.1. Connaissances sur le Paléolithique moyen en Afrique de l’ouest
II.2. Le Paléolithique moyen au Sénégal
Chapitre II : Présentation générale de la zone d’étude (la Petite Côte)
II.1. Le cadre géographique
II.1.1. Le climat de la Petite Côte (zone de Mbour)
II.1.2. Le relief
II.2. Le cadre géologique du Cap-Vert et Petite Côte
II.2.1. L’ère Secondaire ou Mésozoïque
II.2.1.1. Le Crétacé supérieur
II.2.2. Le Tertiaire ou Cénozoïque
II.2.2.1. Le Paléocène
II.2.2.2. L’Eocène inférieur : l’Yprésien
II.2.2.3. L’Eocène moyen : le Lutétien
II.2.3. Les formations Post-éocènes à la fin du Tertiaire
II.2.3.1. Le Miocène
II.2.3.2. Le Continental terminal
II.2.4. Le Quaternaire
II.2.4.1. Le Quaternaire marin
II.2.4.2. Le Quaternaire continental
Chapitre III : la Problématique du Tiémassassien
III.1. Présentation du site de Tiémassas
III.2. Historique des recherches
III.3. Problématique et approche technologique
III.4. Les objectifs de l’étude
Deuxième partie Analyse du matériel de Tiémassas
Chapitre IV : la méthodologie
IV.1 Définition des termes et concepts
IV.1.1. Les débitages avec prédétermination
IV.1.2. Le débitage avec absence de prédétermination
IV.1.3 Les accidents de taille
IV.2. La méthodologie
Chapitre V : Analyse techno-typologique du matériel lithique de Tiémassas
V.1. Les caractéristiques de la collection
V.1.1. Présentation
V.1.3. La matière première
V.2. Etude du T2
V.2.1. La décortication
V.2.2. Le débitage opportuniste
V.2.3. Le débitage Kombéwa
V.2.4. Le débitage Levallois
V.2.5. Le débitage discoïde
V.2.6. Les ébauches
V.2.7. Les types d’outils
V.3. Etude du T3
V.3.1. La décortication
V.3.2. Le débitage opportuniste
V.3.3 Le débitage Kombéwa
V.3.4. Le débitage Levallois
V.3.5. Le débitage discoïde
V.3.6. Les ébauches
V.3.7. Les types d’outils
V.4. Etude du T4
V.4.1. La décortication
V.4.2. Le débitage opportuniste
V.4.3. Le débitage Kombéwa
V.4.4. Le débitage Levallois
V.4.5. Le débitage discoïde
V.4.6. Les ébauches
V.4.7. Les types d’outils
V.5. Etude du T5
V.5.1. La décortication
V.5.2. Le débitage opportuniste
V.5.3. Le débitage Kombéwa
V.5.4. Le débitage Levallois
V.5.5. Le débitage discoïde
V.5.6. Les ébauches
V.5.7. Les type d’outils
V.6. Reconstitution des chaînes opératoires du Tiémassassien
V.6.1. Réflexion sur l’approvisionnement en matière première
V.6.2. Reconstitution des schémas de débitage du Tiémassassien
V.6.2.1. La chaîne opératoire opportuniste
V.6.2.2. La chaîne opératoire du débitage Kombéwa
V.6.2.3. Chaîne opératoire du débitage Levallois
V.6.2.4. La chaîne opératoire du débitage discoïde
V.7. Conclusion générale
Conclusion générale

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