Le mouvement international vers l’inclusion scolaire
ÉLÈMENTS THÉORIQUES
Le contexte Le questionnement de départ est indissociable du contexte scolaire neuchâtelois, qui a évolué dans la prolongation des injonctions internationales puis des diverses législations nationales. Le mouvement vers l’inclusion scolaire a effectivement amené la Suisse à se redéfinir sur le plan des textes légaux et de son organisation scolaire, comme les sections suivantes le décrivent de manière succincte.Le mouvement international vers l’inclusion scolaire Aux diverses déclarations et conventions des droits de l’enfant de la Société des Nations (SDN, 1924) puis de l’Organisation des Nations Unies (ONU, 1959, 1989) succèdent des déclarations ou programmes relatifs aux droits des personnes handicapées (ONU, 1971, 1975, 1982). La reconnaissance recherchée ne concerne certes qu’une population spécifique mais revendique l’intégration scolaire et semble dessiner les « contours d’une école inclusive » (Ramel & Vienneau, 2016, p.29). Après 1990, où l’UNESCO revendique une éducation de base pour tous, puis 1993 où l’ONU préconise l’égalité des chances en éducation pour les personnes handicapées, c’est en 1994 qu’est proclamée la « déclaration internationale la plus ambitieuse en matière d’inclusion scolaire pour les enfants ayant des besoins éducatifs spéciaux » (Ramel & Vienneau, 2016, p.31). Il s’agit de la Déclaration de Salamanque et cadre d’action pour l’éducation et les besoins spéciaux, qui leur reconnaît le droit d’être scolarisés comme tous les autres enfants, dans des écoles dont la « création représente un pas en avant décisif, en ce qu’elles contribuent à changer les attitudes discriminatoires, et à créer des communautés accueillantes et des sociétés intégratrices » (UNESCO, 1994, p.6). Les représentants de 92 gouvernements et organisations non gouvernementales énoncent la légitimité de l’éducation inclusive, car « depuis trop longtemps, les problèmes des personnes handicapées sont aggravés par une société débilitante, qui met l’accent sur leurs handicaps plutôt que sur leur potentiel » (UNESCO, 1994, p.7). Les revendications ciblent tantôt les besoins éducatifs spéciaux exclusivement, tantôt tous les enfants. Mémoire de Master – Rachel Tardon-Farine Page 13 sur 119 D’autres « injonctions internationales » (UNESCO, 2000, 2001, 2005, 2009; ONU, 2006) incitent les pays occidentaux à se responsabiliser envers « l’établissement de systèmes scolaires plus inclusifs » (Ramel & Vienneau, 2016, p.34). Ainsi, les Principes directeurs pour l’inclusion : Assurer l’accès à « L’Éducation pour tous » (UNESCO, 2005) rappellent que l’inclusion implique « une attention particulière […] aux groupes d’apprenants susceptibles d’être exposés à un risque de marginalisation, d’exclusion ou d’échec scolaire » (p.16). En outre, la Convention relative aux droits des personnes handicapées et Protocole facultatif (ONU, 2006) fait remarquer l’évolution du terme handicap, qui « résulte de l’interaction entre des personnes présentant des incapacités et des barrières comportementales et environnementales qui font obstacle à leur pleine et effective participation à la société » (Préambule, cité par Ramel & Vienneau, p.34).
Les impacts en Suisse et dans le Canton de Neuchâtel
La législation helvétique suit ces injonctions internationales. En 2002 est adoptée la Loi fédérale sur l’élimination des inégalités frappant les personnes handicapées. Puis, en 2007, la CDIP encourage l’école obligatoire à se doter de solutions intégratives plutôt que séparatives. Ensuite, en 2008, La Réforme de la péréquation financière et de la répartition des tâches entre la Confédération et les cantons (RPT) rend les cantons responsables de la scolarisation des enfants et des jeunes qui bénéficient de mesures de pédagogie spécialisée. Dans le Canton de Neuchâtel, le concordat HarmoS, entré en vigueur en 2009, ainsi que la ratification, en 2013, de l’Accord intercantonal sur la collaboration dans le domaine de la pédagogie spécialisée de la CDIP (2007) conduisent les autorités à prendre diverses mesures. L’Arrêté relatif aux mesures d’adaptation et de compensation destinées aux élèves de la scolarité obligatoire ayant des besoins éducatifs particuliers en est une (République et Canton de Neuchâtel, 2014). Initiée en août 2015, la rénovation du cycle 3 de la scolarité obligatoire qui arrive à son terme en 2018 en est une autre (République et Canton de Neuchâtel, 2017). Une conséquence est la disparition des filières, au profit de classes plus hétérogènes, avec des niveaux introduits progressivement (niveaux 1 ou 2, dans deux disciplines en 9ème année puis dans cinq disciplines en 10ème et 11ème années). Au vu de la nécessité de compléter la Loi sur l’organisation scolaire (LOS) datant de 1984, le Conseil d’Etat de la République et Canton de Neuchâtel adopte en 2017 le Règlement transitoire d’exécution de la loi fédérale concernant l’adoption et la modification d’actes dans le cadre Mémoire de Master – Rachel Tardon-Farine Page 14 sur 119 de la RPT en matière de formation scolaire spéciale (REFOSCOS). Il y est arrêté que l’office de l’enseignement spécialisé gère l’octroi des mesures renforcées aux élèves présentant des difficultés d’apprentissage ou comportementales et répond aux demandes de scolarisation en école spécialisée. À l’échelle des sept cercles scolaires neuchâtelois, les directions poursuivent leur réflexion quant aux mesures susceptibles de favoriser l’intégration de tous les élèves. Comme le soulignent Benoit et Angelucci (2016), « les nouvelles formes de prestation de l’enseignement spécialisé impliquent notamment une augmentation des pratiques collaboratives entre enseignants réguliers et enseignants spécialisés » (p.48). Notons que ce sont tantôt les termes « intégration » et « inclusion » que les déclarations internationales et autres textes légaux susmentionnés utilisent. Or, l’Accord intercantonal sur la collaboration dans le domaine de la pédagogie spécialisée (CDIP, 2007) ne parle pas d’« inclusion ». C’est en effet d’« intégration » dont il est question en Suisse, où la situation « illustre […] qu’une représentation de l’intégration scolaire encore très ancrée dans la défense d’une catégorie d’élèves peut faire oublier la nécessité de prendre en compte les besoins de l’ensemble des enfants » (Ramel, Vienneau, Pieri & Arnaiz, 2016, p.49). Or, l’inclusion scolaire ne se préoccupe pas seulement des élèves ayant des besoins éducatifs particuliers mais de tous les individus, qui sont « comme tous les autres, comme certains autres, et comme personne d’autre » (Ducette, Sewell & Poliner Shapiro, 1996, traduction libre, cités par Prud’homme et al., 2016, p.126). Beauregard et Trépanier (2010) proposent un continuum qui aligne trois approches de l’intégration scolaire, de la plus ségrégative (mainstreaming) à la plus inclusive (inclusion totale) en passant par l’approche modérée (inclusion ou inclusion partielle). Au vu de son fonctionnement scolaire, la Suisse se situe vraisemblablement encore dans une approche mainstreaming, où « on reconnaît les mêmes droits à la personne handicapée ou en difficulté qu’aux autres membres de la société » et où les « services mis en place permettent de [les] respecter » (Beauregard & Trépanier, p.39). Finalement, « l’intégration des personnes différentes ou en situation de handicap est souvent considérée comme un premier pas indispensable vers leur inclusion », comme l’expose la figure 1 (CSPS, 2017).
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Table des matières
RÉSUMÉ ET MOTS CLÉS
LISTE DES FIGURES
LISTE DES TABLEAUX
1. INTRODUCTION
1.1. Choix de la thématique générale
1.2. Sujet spécifique et questions de départ
2. ÉLÈMENTS THÉORIQUES
2.1. Le contexte
2.1.1. Le mouvement international vers l’inclusion scolaire
2.1.2. Les impacts en Suisse et dans le Canton de Neuchâtel
2.2. Problèmes de comportement : une définition écosystémique
2.3. Les enseignants face à l’inclusion scolaire
2.3.1. Conséquences des défis posés par l’inclusion scolaire
2.3.2. Le sentiment d’efficacité personnelle de l’enseignant
2.3.3. Les attributions causales de l’enseignant
2.4. Le soutien à l’inclusion scolaire
2.4.1. Les pratiques conseillées et les modèles d’intervention possibles
2.4.2. L’importance du rôle de la direction scolaire
2.4.3. Le soutien social reçu et le soutien social perçu
3. PROBLÉMATIQUE
3.1. Relations entre les problèmes de comportement et l’attitude des enseignants envers l’inclusion scolaire
3.2. Impacts du sentiment d’efficacité personnelle et des attributions causales sur l’attitude des enseignants à l’égard de l’inclusion scolaire
3.3. Les dispositifs de soutien adressés aux enseignants et aux élèves
3.4. Persistance d’attitudes négatives malgré l’offre de soutien existante
3.5. La perception du soutien : une variable explicative ?
3.6. Objectif de recherche, questions et hypothèses
3.6.1. L’ objectif de recherche
3.6.2. Les questions de recherche
3.6.3. Les hypothèses de recherche
4. MÉTHODOLOGIE
4.1. Fondements méthodologiques
4.2. Nature du corpus
4.2.1. Échantillon
4.2.3. Données sociodémographiques des participants
4.3. Méthodes de collecte des données
4.3.1. Premier instrument : le questionnaire
Mémoire de Master – Rachel Tardon-Farine Page 4 sur 119
4.3.2. Second instrument : l’entretien semi-directif
4.3.3. Protocole
4.3.4. Administration du questionnaire
4.4. Démarche d’analyse des données
4.4.1. Opérationnalisation des concepts
4.4.2. Schéma d’analyse
5. RÉSULTATS ET ANALYSE
5.1. Résultats descriptifs
5.1.1. Sentiment d’efficacité personnelle
5.1.2. Attributions causales
5.1.3. Soutien social perçu
5.1.4. Soutien social reçu
5.2. Analyses inférentielles : liens entre les dimensions
5.2.1. Liens entre sentiment d’efficacité personnelle et soutien social perçu
5.2.2. Liens entre attributions causales et soutien social perçu
5.2.3. Liens entre sentiment d’efficacité personnelle et attributions causales
5.2.4. Liens entre niveau de formation des enseignants et soutien social perçu
5.2.5. Liens entre soutien social reçu et modèles de développement inclusif
5.2.6. Liens entre soutien social reçu et soutien social perçu
6. DISCUSSION
6.1. Synthèse des résultats
6.2. Discussion en rapport avec les questions et hypothèses de recherche
6.2.1. Première hypothèse
6.2.2. Deuxième hypothèse
6.2.3. Troisième hypothèse
6.2.4. Retour à l’objectif de recherche
6.3. Limites du travail
7. CONCLUSION
7.1. Autoévaluation critique de la démarche
7.2. Apports envers ma pratique professionnelle
7.3. Perspectives de recherches ultérieures dans la continuité du travail
RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES
ANNEXE 1. Questionnaire pour les enseignants du cycle 3
ANNEXE 2. Grille d’entretien semi-directif
ANNEXE 3. Invitation à participer au questionnaire
ANNEXE 4. Opérationnalisation du 2ème modèle théorique
ANNEXE 5. Conventions de transcription .
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