Le montage comme intégration du désir : muer le film en corps

De la lumière comme dévoilement et cache de la matière : le corps abstrait

Nous l’avons énoncé plus tôt, l’érotisme fait état, par sa terminologie, d’une ambiguïté qui le circonscrit à la fois à un régime de présence – la matérialisation de l’érotisme prenant souvent racine dans un corps – et à un régime d’absence – son trouble ne pouvant trouver une représentation concrète et définitive. Dans cette première partie où nous proposons une étude, à travers une typologie, des rapports qu’entretiennent les films avec le corps, il s’agira donc de faire valoir les manifestations plastiques de ce corps, ses révélations par la mise en scène. La lumière fait alors sujet : elle peut tout à la fois « prélever, supposer, élaborer, donner ou soustraire un corps ». Pour rendre cette analyse plus pertinente, nous avons choisi un seul plan de Persona qui conjugue ces différentes modalités d’action delà lumière sur le corps.

Pleine présence du corps figuré

Dans Persona, notre intérêt se situe à l’échelle d’un plan qui pourrait, éventuellement, faire séquence par son autonomie dans l’enchaînement du film. L’infirmière Alma (Bibi Andersson) après avoir rencontré Elisabeth Vogler (Liv Ullman), actrice de théâtre ayant subitement décidé de devenir muette, et pris connaissance de sa situation, quitte la chambre de la malade, allumant le poste-radio sur un concerto de Jean-Sébastien Bach et fermant tour à tour deux portes derrière-elle. Elisabeth se trouve alors seule, allongée dans un lit d’hôpital. Le plan est fixe, la cadre en gros plan, le regard du personnage perdu dans le hors-champ, offrant presque un regard-caméra. Son visage traverse le champ à l’horizontale, et déjà, le corps se trouve supposé autrement : rompant la verticalité, il fend le cadre comme un paysage, occupe tout l’espace par sa grandeur mais également par le peu de profondeur de champ qui l’en découpe. La lumière tombe sur lui, trouvant sa source au-dessus de la tête, dessinant chaque contour avec netteté. Dès lors, sa visibilité est totale : le cadre en propose une vision micro, sa texture révélée par la lumière atteignant un certain paroxysme du détail – nous pouvons apercevoir sans mal les taches de rousseur d’Elisabeth, contraste discret du noir et blanc qui, loin d’aplatir les reliefs, révèle une palette de nuances de couleurs.
De ses cheveux à ses yeux, de ses lèvres à ses sourcils, les gris se distinguent, accomplissant davantage encore cette visibilité totale. Son immobilité achève de rendre perceptible le corps, l’absence de mouvement dans le plan rejouant l’absence de mouvement du plan. C’est, une nouvelle fois, le micro qui fait évènement : dans ce figement, seule la respiration anime le corps comme une vague, faisant très légèrement osciller les lèvres et la peau. Si le plan pourrait s’en trouver ramené à une réalité photographique, ce sont, d’une part, ces micromouvements qui l’en éloignent mais aussi, et surtout, la lumière.

La visibilité en crise

La lumière se manifeste subitement, interrompant leregard dans l’appréciation du plan mais pourtant présente, imperceptiblement, dès son commencement : lentement, elle décline, semblable à un crépuscule. Alors qu’elle plonge peuà peu le cadre dans l’obscurité, le visage perd ses nuances, les couleurs s’uniformisant à mesure que la pénombre contamine chaque parcelle de peau. Ainsi, la lumière se fait duelle : alors qu’elle révélait pleinement le corps, lui offrant, avec la mise en scène, une présence totale, elle disparaît, partiellement, et le ramène avec elle vers une absence. Déjà segmenté par le gros plan, le corps se trouve encore découpé dans une plus petite mesure : l’aplat du visage – nez, bouche, sourcils, yeux – se trouve avalé, et seul un coin de joue subsiste, éclairant tour à tour desparties de bouche, yeux, nez, et sourcils. Le corps devient, par l’esthétique, le lieu d’une abstraction. Cette idée, nous la retrouvons chez Pascal Bonitzer qui dit qu’avec le gros plan « un cinéma ‘abstrait’ devient possible », de même que Jean Epstein affirmait la tragédie comme anatomique.

Du son comme disparition de la matière : le corps sonore

Nous venons de le voir, « au cinéma, le corps peut s’affirmer incompatible avec un modèle organique », se révélant par d’autres moyenset pouvant pourtant « relever de la plus troublante exactitude». Qu’en est-il lorsque la présence visuelle du corps se dissout au profit d’une présence sonore, qui conjoindrait à la fois une absence par sa dispersion et son abstraction ? Pour poursuivre cette typologie, nousnous attarderons sur un autre plan de La Pianiste de Michael Haneke et sur l’usage du son comme apparition problématique du corps désiré – celui de Walter, élève amoureux d’Erika, qui essaye de se dérober à ce désir.

Le gros plan : soustraction du corps figuré

Dans la séquence qui nous intéresse, Erika et Walter accompagnent une jeune pianiste à une prestation. Le plan que nous nous proposons d’analyser est celui où Erika observe Anna jouer aux côtés de Walter, assis près d’elle pour la rassurer. Nous le convoquons, dans un premier temps, parce qu’il fait état d’une déconnexion avec le reste de la séquence. Jusqu’alors, la caméra est mobile, affluant du côté de Walter comme du côté d’Erika et des autres personnages. Par plusieurs propositions de cadres, la caméra présentifie tant par le champcontre champ – Erika et Walter – que par les plans d’ensemble – les joueurs sur la scène – les différentes actions simultanées de la séquence. Les regards d’Erika et de Walter sont accompagnés des raccords qui font apparaître ce surquoi leur attention se porte.
Lorsqu’Anna se met à jouer, Erika feint de ne pas écouter, de ne pas regarder mais son regard se reporte inévitablement sur la scène. Un plan plus tard, le contre-champ disparaît définitivement de la séquence et le cadre se resserre. D’une part, nous avons un gros plan immobile qui porte inévitablement l’attention sur le visage d’Erika, placé au centre du cadre, les lignes de fuite se trouvant absentées par la perspective. D’autre part, l’aplat de blanc de la porte découpe ce visage, l’oppose chromatiquement par la couleur de la peau – légèrement orangée – et la rougeur des lèvres. À une quasi-absence de formes s’oppose le visage dans un excès de figurabilité. Comme pour Elisabeth dans Persona, les détails de la peau apparaissent grandis, portés à l’évènement. La moindre secousse de la peau, de même que les froncements de sourcils, clignements des yeux et la montée lacrymale qui lesaccompagne, apparaissent extrêmement perceptibles par le régime figuratif employé.

Du mouvement ralenti comme exposition contrariée de la matière : le corps fragmenté

En définitive, ce que ces précédentes analyses nous ont permis d’établir se situe dans la révélation par le film d’un corps, le prélèvement d’un corps par la matière. Considérée comme « substance corporelle », la matière est un ensemble de « choses matérielles », « qui concerne l’aspect extérieur, immédiatement sensible ». Le film, en ce qu’il est une « surface sensible », perceptible, peut ainsi s’adjoindre cette définition de la matière par Nicolas Malebranche : « La matière ou l’étendue renferme en elle deux propriétés ou deux facultés : la première faculté est celle de recevoir différentes figures, et la seconde est la capacité d’être mue. »
Le film reçoit le corps comme figure et s’en trouvemu, entraînant de fait la mutation de corps, comme nous avons déjà pu l’établir avec Persona: lorsque la lumière décline, elle entraîne avec elle la défiguration du visage d’Elisabeth. Ainsi, cette propension à se mouvoir, nous la retrouvons également dans ce que dit Joseph de Maistre : « la matière n’a d’action que par le mouvement ». Dans les films que nous avons étudiés, nous avons pu voir, en effet, que l’inaction de la mise en scène n’est qu’apparente, puisqu’à l’immobilité est toujours conjuguée un mouvement dans le plan – la lumière dans Persona– ou un mouvement sonore. Ces actions sont de l’ordre de l’esthétique, conjuguant le cinéma à autre chose qu’à sa simple narration, faisant de la forme le véritable fait du film. Ces mouvements, toujours, se lient au corps : ils agissent sur ces-derniers, les rendent visibles de différentes manières, en modifient le rythme.
Cette dialectique entre le mouvement de la mise en scène et le mouvement du corps viendra clôturer cette première partie, en synthétisant par la matière ce lien qu’entretiennent corps filmés et corps filmique.
Nous ne serons plus jamais seuls de Yann Gonzalez. Nous nous intéresserons au ralenti, interrogeant une nouvelle fois une ambiguïté que partagent films et érotisme : en décomposant les mouvements du corps, comment la mise en scène –matière – parvient-elle à mener le corps comme figure dans une nouvelle présence, une nouvelle invention, la soustrayant ainsi à sa première présence ?

L’évènement formel : détachement du corps

Nous ne serons plus jamais seuls met en scène une fête d’adolescents et les évènements qui la jalonnent, de l’amour à la danse, jusqu’à undénouement fantastique. Le plan qui suscite notre intérêt est celui de l’apparition d’une danseuse, faisant évènement par sa rupture dans le déroulement de la séquence : le plan qui précède est celui d’une adolescente accoudée contre un mur, buvant au goulot d’une bouteille ; celui qui lui succède présente un couple s’embrassant.
Ainsi, le surgissement de ce plan fixe au ralenti sur une jeune-fille dansant de manière effrénée se dissocie de l’ensemble : avant comme après, le mouvement dans le plan suit une vitesse de défilement normale ou accélérée. Nous dirons alors de ce plan qu’il est un évènement formel, en ce qu’il « tend irrésistiblement à arrêter le regard, à troubler l’économie de son parcours».
Cette distinction, nous la précisons d’une part parl’accélération du rythme de la musique mais aussi par la place qui est faite au corps dans le cadre. Habituellement traversés par des ombres, leurs gestes rompus par d’autres personnages traversant le cadre, les corps sont flous ou décadrés, saisis dans des micro-plans et ramenés à un régime du visible perturbé. Ils laissent entrevoir une communauté – les adolescents – qui s’érige en agglomérat de corps mais laisse rarement la place à une affirmation singulière. Quand bien même cette singularité voudrait se frayer une place dans le cadre, elle s’en trouve contrariée par le parasitage énoncé plus haut. Au contraire, ce plan-ci présente une danseuse, entourée de ces corps indistincts, que la mise en scène focalise : elle se trouve au centre du cadre, baignée d’une lumière frontale, filmée au ralenti. Elle vient ainsi absenter ce qui l’entourepar ses mouvements effrénés qu’accentuent le ralenti, ses cheveux et ses gestes fragmentant les autres corps. L’évènement se situe dans cette différence : alors que les corps peinent à se faireune place, bataillant pour leur place dans le cadre, absentés par la lumière ou le mouvement, cette danseuse est, au contraire, en position de force dans le cadre. La mise en scène offre à son corps une figuration différente, supposant par la plasticité une présence totale. Néanmoins, de quelle présence totale peut-on parler pour ce corps, et quelle est la plasticité à son service ?

Du contraste : figurer l’infigurable

La manière dont la mise en scène prend le corps et prend corps tout à la fois avec lui inclut une série de contrastes qui font problème. D’abord, le mouvement du corps est saisi en un seul plan d’une durée assez longue pour s’inscrire dans le temps et tout à la fois donner au rythme une régularité. L’immobilité ainsi créée par l’absence de montage fait émerger un rythme lent qui s’accorde au ralenti, décomposant les mouvements du corps, les gestes se trouvant étirés. Pourtant, ce premier régime de figuration du corps entre en tension avec un second : comme nous l’avons dit, les mouvements de la danseuse sont effrénés, la musique suivant avec elle une accélération à ce moment de la séquence.
De même que le ralenti cherche à saisir le corps, le corps se dérobe à ce saisissement par un rythme qui le fait, par intermittence, sortir du cadre. Le visage se dérobe à la vue, les cheveux le cachent. Ce n’est pas seulement les autres corps que celui de la danseuse rend indistincts mais son propre corps qui semble se soustraire à cette visibilité. La confrontation de ces deux flux, on la retrouve également dans la musique : une voixsuave et lente chante par-dessus un son cadencé. Ainsi, la mise en scène rejoue l’ambiguïtéqui suscite notre intérêt : d’une part, elle capte, d’autre part, ce qu’elle capte semble être l’impossible captation du corps. D’un même mouvement, elle figure ce qui se défigure. Elle entre en conflit avec ce que suppose le ralenti : elle ne permet plus de contempler les détails, de révéler les micromouvements, mais leur offre seulement une visibilité partielle, troublée.

Conclusion

Avec l’analyse de ces trois plans fixes, nous avons pu mettre à jour la mobilisation du corps par la matière, et inversement, de la matièrepar le corps. Qu’il s’agisse de la lumière, du son ou du mouvement, nous y avons retrouvé cette ambiguïté qui fait sujet dans notre travail : ils peuvent dévoiler tout autant qu’ils cachent le corps, et ce dans une simultanéité. Il ne s’agit pas simplement de voir ou de ne plus voir le corps : celui-ci est porté vers d’autres apparitions, qui absentent ses formes mais le font exister autrement. Le visage devient aplat noir, le corps devient musique ou mutant, passant d’un état à l’autre. Pour autant, cette défiguration reste une attention particulière portée à la matière du corpspar la matière du film, attention qui se déplace d’une visibilité à une présence plastique. Nous nous référons alors aux mots de Michel Foucault sur la peinture de Francis Bacon :
« Le brouillage des figures obtenu soit par le mouvement du modèle, soit par le frottement de l’épreuve a pour effet de dissocier –comme chez Bacon – la présence et la forme ; celle-ci est distordue, effacée, méconnaissable, mais la présence est rendue d’autant plus intense que sont annulés toutes les lignes, tous les traits qui permettraient au regard de la fixer : du visible effacé surgit l’insaisissable présence. »
Dans ces films, l’esthétique invente un possible pour l’érotisme : à l’instar de sa particularité terminologique – qui le circonscrit à une définition problématique – elle recrée le trouble qui lui est inhérent. En déchirant le corps entre figuration et défiguration, netteté et éclatement de ses contours, présence et absence, l’esthétique fait naître la sensation érotique. Nous nous référons alors à la phrase de Georges Bataille : « ce qui est en jeu, dans l’érotisme, c’est toujours une dissolution des formes constituées ». Si, d’une part, les formes s’érigent – je reconnais un corps – c’est leur mutation, au profit d’autres formes, qui font ressentir les forces à l’œuvre de l’érotisme – je ne suis plus capable de reconnaîtrele corps. Pour autant, ce n’est pas seulement l’esthétique qui se fait lieu de présence du corps mais le corps qui, à son tour, fait muer l’esthétique. D’une part, comme nous venons de l’expliciter, la mise en scène révèle le corps,d’autre part, c’est par ce mouvement que la mise enscène, à son tour, fait évènement. Ainsi, le corps et la mise en scène agissent simultanément et pourraient devenir une même matière.
L’érotisme serait-il à même de se localiser dans lefilm comme corps, plutôt que simplement dans le corps filmé ?
Nous l’avons mentionné en terminant notre analyse de Nous ne serons plus jamais seuls, cette première typologie constituait une limite : l’érotisme que nous avons traqué jusqu’à présent est immédiat. Entre le corps filmé et le spectateur, ledésir ne concède aucun détour. Nous nous demanderons alors par quelle entremise cet érotismepourrait se déplacer du simple corps filmé à sa conjonction avec le corps filmique. La réponse, nous la trouvons dans ce qui manque à cette première typologie de l’ambiguïté : le montage. À partir de cette exploration du montage comme intégration du désir du spectateur, nous tenterons de démontrer comment le film peut alors se muer en corps.

Le corps filmique : une semblance ?

Selon le dictionnaire des sciences médicales, « on appelle corps en général, tout ce qui, dans la nature, a une existence indépendante, et qui frappe nos sens par des qualités qui lui sont propres ». Le Trésor de la langue françaisele définit quant à lui de la manière suivante : « ensemble des parties matérielles constituant l’organisme ». Ainsi, le corps est un ensemble de parties qui forment un organisme indépendant capable de s’adresser à nos sens d’une manière propre. Pour être le plus précis possible, il conviendrait de revenir sur la définition d’organisme selon le Littré, cette fois : « qui a rapport à l’organisation ». Or, la mise en scène, de manière très littérale, pourrait être la manièrede rendre possible, sur la « scène » – devant la caméra– un ensemble imaginaire convoqué par un auteur. De fait, serait-il possible d’assimiler cet organisme qu’est le corps à l’ensemble qui compose le dispositif cinématographique, en ce qu’il a de matériel et de sensible ? Nous venons devoir que le film, s’il peut présenter le corps, est également capable de lui-même faire corps. Noustenterons maintenant, dans cette seconde sous-partie, de mesurer cette semblance et de voir jusqu’où elle peut être conduite.

D’une semblance à un indiscernable

Dans Les Amours imaginaires, nous avons pu mettre à jour un déplacement du désir qu’induit la mise en abyme : simultanément, les personnages regardent et désirent le corps de Nicolas comme des spectateurs, spectateurs qui regardent et désirent ce qu’ils voient – le film – à leur tour. Le film, par ce rapprochement entre spectateur et personnage, fait corps. Ce que permet cette analyse, c’est de s’interroger sur la semblance qui pourrait unir le film au corps.

Penser autrement

En déterminant une indiscernabilité entre le corps filmé et la mise en scène comme composition du corps du cinéma, nous avons tracé unéloignement avec le corps auquel nous entendions d’abord le comparer : celui humain. Si le corps de Nicolas dans Les Amours imaginaires agit sur les personnages de la même manière que le corps du film agit sur les spectateurs, peut-on pour autant conclure à une similitude ? Pour nous en approcher à nouveau, nous poursuivons notre attention portée autravail de Raymond Bellour : « Tel serait proprement l’effet-réalité de l’émotion du cinéma : un saisissement d’idée à travers un saisissement du corps.»
Le saisissement du corps par les films que nous avons analysés tend, comme nous venons de l’étayer, à présenter un irreprésentable : dans Persona, c’est un corps qui devient informe, dans
La Pianiste c’est un corps sans support, dans Nous ne serons plus jamais seuls, c’est un mouvement qui déchire le corps dans deux vitesses et enfin, dans les Amours imaginaires, c’est un corps réinventé et démultiplié. Si l’on devait s’intéresser à la texture de ces corps filmiques, pourrait-on parler d’idée ? Il convient de revenir sur la définition du terme : une idée est une « représentation qui se fait de quelque chose dans l’esprit, soit que cette chose existe au dehors, ou qu’elle soit purement intellectuelle ». De fait, si nous avons tendu à démontrer que chaque apparition du corps qui mobilise notre attention est complice d’une disparition de ce corps figuré au profit de son « épreuve », il nous est impossible de conjuguer ces corps à un saisissement d’idée. Nous rencontrons alors une première limite : si ce qui traverse le corps du cinéma n’est pas rattachable à une idée, quelle texture peut-on lui opposer ? Nous l’avons vu, le corps qui nous intéresse est celui esthétique, qui s’affranchit d’un ordre. Un corps fort des sensations. C’est donc une nouvelle fois du côté deDeleuze que nous trouverons une réponse.

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Table des matières
Introduction 
I. Prendre (un) corps 
A. De la lumière comme dévoilement ou cache de la matière : le corps abstrait
a. Pleine présence du corps figuré
b. La visibilité en crise
c. Vers une abstraction du corps
B. Du son comme disparition de la matière : le corps sonore
a. Le gros plan : soustraction du corps figuré
b. Le son : réinvestissement défiguré du corps
C. Du mouvement ralenti comme exposition contrariée de la matière : le corps fragmenté
a. L’évènement formel : détachement du corps
b. Du contraste : figurer l’infigurable
c. Le ravissement : réinvention du corps
II. Le film (fait) corps 
A. Le montage comme intégration du désir : muer le film en corps
a. Redéfinition du corps
b. Création d’un personnage esthétique : le spectateur
B. Le corps filmique : une semblance ?
a. D’une semblance à un indiscernable
b. Penser autrement
C. Comment pensent les films ?
a. Le montage figuratif comme construction
b. Le désir comme agencement : la limite avec le corps
III. Le corps (comme) intervalle 
A. Devenir autre : le corps entre-deux
a. La dissolution
b. L’animalité
B. L’entre-deux : un corps transgressé
a. Le microscopique et le macroscopique comme rupture en germe
b. Rupture
c. La fin d’un corps
C. Du figuratif au figural : l’érotisme au sens fort
a. Entre figuration et abstraction
b. Une transgression érotique : du désir et du figural
c. Le cinéma : un art ontologiquement érotique ?
Conclusion : vers une création dans l’ivresse 
Bibliographie et filmographie

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