La pluriactivité se développe
La direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques (DARES) du ministère du Travail rapporte que le nombre de travailleurs qui déclarent travailler pour plusieurs employeurs voire qui exercent plusieurs professions était de 1,4 million en 2014 . Parmi eux, 1,2 million sont salariés dans leur profession principale et 200 000 se déclarent pluriactifs en exerçant une activité non-salariée à titre principal.
Logiquement, la multi-activité se retrouve majoritairement chez les travailleurs à temps partiel dans leur emploi principal (et c’est le cas pour près de 75 % des pluriemployés). Près de 50 % des pluriactifs déclarent être à temps partiel car ils n’ont pas la possibilité de travailler davantage avec leur emploi : le temps partiel est donc majoritairement contraint.
Ce constat est toutefois plus nuancé pour ceux qui exercent plusieurs professions différentes, puisque 55 % d’entre eux exercent une activité principale à temps complet. Il corrobore l’observation qu’un nombre croissant de travailleurs aspirent à associer leurs passions à leur vie professionnelle. Ces slasheurssont des travailleurs qui cumulent des activités parfois très éloignées les unes des autres : journalisme, conseil, cuisinier, enseignant, coach… Le salon des micro-entreprises leur a consacré une étude en 2015. Il y est estimé que la majorité des slasheursle sont par choix (64 %) et que près d’un tiers exerce une deuxième activité entrepreneuriale.
Il s’agit là finalement tant d’une réponse à l’instabilité de l’emploi de nos jours, et à une forme de précarité, qu’une volonté de faire de ses passions un métier. L’étude précise d’ailleurs que cette démarche est parfois née de la contrainte, notamment financière, même si elle a pu ensuite se transformer en un choix.
Les politiques et stratégies des entreprises évoluent
De l’entreprise industrielle à la plateforme
Après la révolution industrielle, le modèle des rapports de domination et de production suivait assez bien la description marxiste d’un système capitaliste distinguant apporteurs de capital et apporteurs de travail.
Le XXe siècle a été marqué par la civilisation de l’usine, où fordisme et taylorisme ont façonné l’organisation du travail, selon des principes d’organisation scientifique. Une des clés de succès était de maîtriser l’offre et la capacité de production, au meilleur coût. Cela passait par la forte mécanisation, la standardisation et le contrôle de toute la chaine de valeur.
Pour accroître la productivité et permettre de répondre à une demande qui dépassait l’offre, il s’agissait alors de poursuivre la mécanisation des usines qui, en quelque sorte, guidait les procédures et les savoir-faire. Le travailleur était d’une certaine manière asservie à l’outil de production dont il fallait tirer le meilleur profit.
Les managers organisaient la production pour la rendre la plus efficiente et maitriser une complexité technique nouvelle. Le moteur de l’innovation était, selon la description d’Armand Hatchuel et Blanche Segrestin , un projet collectif porté par des ingénieurs et techniciens, tous les acteurs de l’entreprise, en particulier les ouvriers, formant un pacte consistant dans l’engagement de chacun dans une « création collective » inscrite dans la durée. Nous en détaillerons les implications en termes de relations de travail dans la deuxième partie de cet ouvrage.
Dans ce modèle, très majoritaire après la deuxième révolution industrielle, la grande entreprise est le moteur de l’économie et concentre de nombreux pouvoirs: un pouvoir économique capable d’influer sur l’offre et la demande, un pouvoir politique qui pèse dans les jeux démocratiques, un pouvoir d’influence des comportements des consommateurs. L’entreprise concentre les pouvoirs et ses dirigeants ne sont finalement soumis qu’à un contrôle limité d’un actionnariat diffus.
Le capitalisme financier a pris naissance dans les années 1980. La théorie de l’agence en fournit un cadre d’analyse : l’entreprise est constituée d’une multitude d’intérêts de différentes parties prenantes, elle est un « nœud de contrats ».
L’actionnaire tient une place centrale dans la gouvernance et la rentabilité à court terme prend une importance croissante. Dans un contexte où les perspectives d’investissement étaient moins favorables, les restructurations et rachats d’entreprises ont été encouragés par des réformes juridiques initiées notamment aux États-Unis. On assiste donc, à partir de cette période, à des vagues d’externalisations, de recentrages stratégiques et, dans une moindre mesure, au recours massif à l’intérim ou aux contrats courts. L’entreprise est un centre de contractualisation entre diverses parties prenantes pour concourir à la fourniture d’un produit ou d’un service. Ce sont des mécanismes marchands qui deviennent prépondérants dans les prises de décision.
Les cycles technologiques s’accélèrent avec les technologies numériques
Notre époque est marquée par ce que certains appellent la « révolution numérique » qui a des impacts concrets sur les entreprises et sur l’emploi. Les conséquences de la robotisation, notamment, font l’objet de débats nourris et de publications multiples. Mais ces débats anciens ne convergent toujours pas. En septembre 2013, Carl Frey et Michael Osborne, chercheurs à l’université d’Oxford, ont beaucoup fait parler d’eux, en estimant que 47 % des emplois aux États-Unis avaient une forte probabilité d’être automatisés à l’échéance d’une à deux décennies. L’OCDE, publiant une étude en mai 2016, estimait quant à elle que ce risque portait sur 9 % des emplois des 21 pays membres de l’Organisation. La nature même desemplois concernés ne fait pas un plein consensus, même si les emplois les moins qualifiés sont plus directement visés.
Les prédictions sont donc plus que hasardeuses. En outre, il ne s’agit pas de la première révolution technologique que le monde industriel connaît. L’introduction de la machine à vapeur ou celle des automates avaient fait l’objet de controverses équivalentes.
Les technologies numériques présentent toutefois quelques particularités. Se pose tout d’abord la question du rythme de leur diffusion. Il a fallu 38 ans à la radio pour toucher 50 millions d’Américains, contre seulement 3 ans pour le téléphone mobile et 88 jours pour Google plus . Des géants comme Google, Amazon ou Facebook se sont développés en des temps très courts par rapport aux entreprises industrielles de taille comparable. L’âge moyen des GAFA est de 23 ans.
La pénétration des technologies numériques, y compris la robotisation et l’automatisation, est ni plus ni moins l’expression de phénomènes d’innovation que l’économie a déjà vécus par le passé. Elles apportent des atouts indéniables, à la fois aux entreprises et aux consommateurs, tant par les gains de productivité précités que par l’amélioration de la qualité des services ou produits.
Le micro-entrepreneuriat est souvent un régime d’activité de complément
Nous l’avons vu, le statut d’auto-entrepreneur a connu un succès significatif dès son entrée en vigueur au 1 er janvier 2009 et a joué un rôle déterminant dans le regain d’intérêt pour l’emploi non salarié. Malgré une sensible érosion, son succès ne se dément pas puisque près d’une création d’entreprise sur deux l’a été sous ce régime en 2015 et que plus du quart des non-salariés sont des micro-entrepreneurs.
L’examen des données de l’INSEE relatives aux micro-entrepreneurs révèle certains enseignements utiles. Tout d’abord, une partie des créateurs de microentreprises n’exercent pas d’activité. La facilité d’accès à ce statut peut expliquer que l’examen préalable du marché soit parfois insuffisant ce qui se traduit par une part significative de micro-entrepreneurs ne démarrant concrètement jamais d’activité à proprement parler. Depuis la création du régime, plus d’un tiers n’aurait pas commencé d’activité selon les données de l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale (Acoss), rapportés par l’INSEE. En 2014, 60 % des immatriculés du premier semestre avaient démarré leur activité dans l’année.
Le régime du micro-entrepreneuriat est adopté pour l’accès à une activité de complément dans 46 % des cas, pour les micro-entrepreneurs ayant débuté leur activité en 2014. Toujours en 2014, l’observatoire des micro-entrepreneurs indiquait que, pour 75 % d’entre eux, les revenus générés sous ce régime représentaient moins de 50 % des revenus du foyer.
Des enjeux nouveaux
Le salariat, un marqueur social qui ne protège plus
Le CDI reste, plus qu’un statut juridique, un marqueur social important. Il s’est imposé comme une forme de Graal à conquérir pour s’assurer certaines sécurités. Il est un outil d’insertion encore très important en France. La facilité d’accès au logement ou l’accès à la propriété, par la nécessité de recourir à des prêts bancaires, restent encore largement liés au statut professionnel, en particulier au CDI.
Pourtant le CDI protège de moins en moins. Les formes de CDI que sont le CDI intermittent ou le CDI de chantier sont presque des appellations antinomiques.
Les entreprises ne s’engagent plus sur des recrutements de long terme en intégrant leur intérêt de former leurs salariés et de développer leur potentiel. Elles sécurisent un volume de main d’œuvre pour une durée limitée même si elle est a priori indéterminée.
Hors du salariat, la question des protections sociales se pose de manière encore plus accrue puisque la majorité des systèmes de protection sont assis sur le salariat, malgré la création de l’assurance maladie universelle. Pour les micro-entrepreneurs, l’assurance contre les risques professionnels et contre les impacts sur leur activité des « risques de la vie » reste un sujet non résolu. Dans l’hypothèse du développement du travail non salarié, c’est même l’équilibre des systèmes de protection sociale qui peut se poser, ceux-ci étant assis sur les cotisations sociales des salariés. Se posera à terme la question de la réorganisation des transferts de solidarité.
Les sublimes et les contraints de l’indépendance
L’auto-emploi recouvre, on l’a vu, des réalités très contrastées. Les plus autonomes, souvent ceux qui ont les compétences les plus prisées, choisissent l’autoemploi pour répondre à leur aspiration d’une plus grande autonomie et d’une plus grande flexibilité. Ils jouissent d’une réelle indépendance, savent trouver des clients et gérer leur activité.
Les rapports au travail : liberté, sécurité, dignité
Très schématiquement, deux camps s’affrontent de nos jours sur les rapports au travail. Le premier défend becs et ongles un CDI décrit comme idéal et protecteur et ne voit dans les formes d’emplois atypiques que le retour à un esclavage moderne.
Le second, au contraire, voit ces emplois atypiques, et en premier lieu l’autoentrepreneuriat, comme un progrès vers l’indépendance et l’autonomie de chacun, et le CDI comme un héritage dépassé emprisonnant les individus dans une subordination déresponsabilisante. Cette dichotomie constitue une impasse. Pour en sortir, il faut revenir à l’essence de ce qui constitue et définit les rapports au travail.
Des attentes multiples
Nous avons souvent tendance à télescoper deux notions pourtant très différentes : le travail et l’emploi. Avoir un emploi, c’est grossièrement échanger sa force de travail contre une rémunération. Comme nous avons tendance à le dire familièrement, « il faut bien un emploi pour payer les factures ». La notion d’emploi est dans tous les esprits. Elle dicte, notamment, les politiques de l’emploi : le gouvernement doit créer de l’emploi parce que l’emploi est nécessaire, pour des raisons de subsistance, peu importe d’ailleurs sa nature et sa qualité. Cette importance donnée à l’emploi a masqué la représentation qu’on se fait, dans le même temps, du travail.
La rémunération fait bien partie de notre rapport au travail, mais nous ne travaillons pas uniquement pour gagner de l’argent. Les attentes à l’égard du travail sont multiples, et souvent différentes selon les individus :se sentir en sécurité face aux risques de la vie, éprouver le plaisir d’être rémunéré pour exercer une activité qui plaît, acquérir de nouvelles compétences, exprimer ses idées, développer ses capacités et son potentiel, participer à une aventure collective, être au service d’une mission porteuse de sens, etc. Chacun aura des priorités différentes. La sécurité d’un salaire stable, par exemple, n’est pas toujours celle qui l’emporte. Les artistes sont souventprêts à y renoncer pour exercer leur créativité, qui pour eux donne un sens à leur vie.
Créer une entreprise ou une startup demande souvent de sacrifier cette même sécurité dans un premier temps, mais une telle démarche permet à celui qui l’entreprend d’avoir la liberté et la dignité de concrétiser ses idées afin de créer une activité économique et d’être son propre patron. Au contraire, d’autres individus ont besoin de se sentir couverts contre les risques de la vie (le chômage, la maladie, la vieillesse, etc.) pour se sentir bien, et c’est pour eux la priorité absolue. Il importe donc de prendre en compte et de concilier tous ces besoins dans les rapports de travail. Nous allons pour cela proposer un cadre d’analyse permettant de caractériser les différents rapports de travail en termes d’attentes et de besoins. Bien sûr, les employeurs ont eux aussi des besoins spécifiques, qui peuvent venir contraindre les précédents.
La sécurité
Le travail a toujours été étroitement lié à l’idée même de sécurité. Chasser, cueillir et, des siècles plus tard, cultiver étaient des travaux dont l’objectif premier était de pouvoir se nourrir, c’est-à-dire d’assurer sa sécurité alimentaire vitale. À long terme, le travail est le seul moyen pour les individus de se nourrir, de se loger, de se soigner, etc. Mais si le travail est nécessaire pour être en sécurité, il n’est pas en soi suffisant, ce qui a nourri de nombreuses luttes sociales dans l’histoire afin d’améliorer les conditions de vie des travailleurs. L’assurance maladie, l’assurance chômage, les systèmes de solidarité pour la retraite… sont autant d’acquis pour la sécurité des individus construits à l’origine, et encore aujourd’hui pour certains, sur le travail ou plus exactement sur le salariat.
Aujourd’hui encore, nombre de débats sur le travail sont focalisés sur cette notion de sécurité. Les défenseurs du CDI par exemple, sont très virulents envers les autres formes d’emplois, comme le travail indépendant, du fait de l’absence d’un certain nombre de protections (stabilité du salaire, droit au chômage, indemnités journalières en cas de maladie…). De même, les manifestations contre le projet de loi El Khomri en France, en 2016, étaient motivées en partie par la crainte de voir la précarité des travailleurs augmenter du fait d’une flexibilisation du marché du travail.
La dignité
Les rapports au travail dépassent la volonté de se sentir libre et en sécurité. Ne cherche-t-on pas également à s’exprimer à travers son travail ? L’ergon(l’œuvre), pour les Grecs de l’antiquité, c’est aussi le travail qui permet à l’homme de s’incarner à travers celui-ci. Un artisan qui fabrique des souliers de grande qualité ne ne fait pas uniquement que produire des articles vestimentaires. Il y a fondamentalement dans son travail une dimension créative et même artistique qui lui permet de s’exprimer et de se perfectionner, de mettre une partie de sa personnalité dans le fruit de son travail.
De même, ne peut-on pas considérer qu’un ouvrier chaudronnier qui fabrique les cuves de nos sous-marins ne travaille pas uniquement pour gagner sa vie mais aussi pour la noblesse que son travail lui apporte ? Les ouvrières d’un atelier de maroquinerie de luxe font fondamentalement un travail usant et répétitif. Mais leurs savoir-faire, leurs compétences, et la finalité de leur travail – un objet luxueux et recherché par les clients les plus exigeants–sont tels qu’elles peuvent tirer de leur travail une légitime fierté.
Le travail est aussi vecteur d’intégration et de lien social. Les entreprises sont des lieux collectifs, où nous sommes en permanence en lien avec d’autres individus tant dans le travail lui-même que de manière informelle. La machine à café et la cantine sont souvent d’ailleurs des lieux privilégiés de contact humain entre les travailleurs. Et, au-delà de ce lien social, le travail peut aussi correspondre à une véritable aventure collective. Les équipes ayant conçu le Concorde, par exemple, se sentent pour toujours les pères de ce « bel oiseau ».
On peut enfin travailler pour une cause qui nous est chère. Pour un médecin par exemple, soigner des gens et parfois sauver des vies va bien au-delà des notions de liberté et de sécurité qui nous décrivions plus haut. Le médecin travaille pour une cause porteuse de sens, la santé des autres. Ingénieurs, assistants sociaux, avocats, artisans, psychologues, enseignants, etc. sont autant de professions dans lesquelles les individus peuvent se sentir au service d’une mission qui a du sens. Travailler comme ingénieur en mécanique des fluides chez Space X, ce n’est pas simplement résoudre des équations, c’est œuvrer à son échelle à ce que l’humanité marche un jour sur Mars.
Les besoins des employeurs
Pour comprendre la complexité des rapports au travail et surtout cerner la nature des tensions qu’ils renferment, il nous faut prendre en compte l’autre acteur essentiel des relations de travail, à savoir l’employeur ou donneur d’ordre.
Les attentes des travailleurs sont contraintes par celles des employeurs, souvent dans un rapport de forces. L’assurance d’un salaire stable pour le travailleur, par exemple, implique que l’employeur lui garantisse une relation stable et durable, réduisant ainsi sa propre faculté à pouvoir s’en séparer facilement. De la même manière, un employeur peut vouloir fidéliser un travailleur, en particulier s’il possède des compétences critiques, ce qui nécessitera de construire une relation durable mais limitera certaines des libertés de ce dernier (par exemple celle de cumuler plusieurs emplois). Ainsi, la sécurité des travailleurs sera souvent acquise au détriment de la liberté des employeurs et la liberté des travailleurs aura pour réciproque une faible sécurité des employeurs par rapport au « risque de main d’œuvre ». Travailleurs et employeurs ont des aspirations étroitement liées en ce qui concerne la troisième et dernière dimension de la dignité, puisque c’est en grande partie la nature de l’entreprise (sa culture, son modèle d’organisation et de gouvernance) qui conditionnera les possibilités pour les travailleurs d’exprimer leur potentiel, de se former, de participer à une aventure collective ou encore d’être au service d’une mission porteuse de sens.
Chaque employeur cherchera à maximiser les dimensions prioritaires à la bonne marche de son entreprise. Toute la difficulté sera alors de trouver un juste équilibre entre ces attentes et celles des travailleurs, qui sont par certains aspects contradictoires. Lorsque le rapport de force entre les attentes de l’entreprise et celles des travailleurs débouche sur un « équilibre » alors un nouveau « pacte » émerge et permet de répondre au mieux aux attentes des deux parties.
Parfois, au contraire, le rapport de forces s’ajoute aux précédentes dimensions et les attentes de l’un pouvant prendre le pas sur les aspirations de l’autre. Par exemple, une entreprise plateforme, pour qui l’essentiel est la flexibilité de sa main d’œuvre, recrutera le moins possible de travailleurs en CDI. À l’inverse, une entreprise fortement capitalistique, pour qui la durée de vie du capital et la maximisation de son potentiel sont primordiales, aura intérêt à embaucher en CDI une grande partie des travailleurs afin de les fidéliser sur le long terme.
Les besoins de travailleurs et des employeurs étant liés, tout l’enjeu sera donc de construire des équilibres mutuellement satisfaisants entre ces différents besoins.
Prendre préférentiellement en compte les besoins de l’un ou l’autre entraînera un déséquilibre source de tensions, entre travailleurs et entreprises mais également à l’intérieur même de ces deux groupes. Par exemple, dans un pays ne proposant qu’un salariat extrêmement contraignant face au licenciement, certaines entreprises ne pourront répondre correctement à leur besoin de flexibilité. Les employeurs non satisfaits, pour survivre à la concurrence mondiale, répondront à leurs besoins en délocalisant, en ayant recours à des travailleurs détachés ou en détournant de leur utilité d’origine des régimes de travail (multiplication des contrats précaires), etc. Ce même cadre contraignant pourrait d’ailleurs mécontenter aussi certains travailleurs souhaitant travailler de manière différente, par exemple des entrepreneurs individuels qui préfèreraient s’exiler. À l’inverse, un pays qui prendrait exclusivement en compte le besoin de flexibilité serait condamné à mécontenter les travailleurs pour qui la sécurité est essentielle et même les entreprises ayant besoin de construire des relations de travail sur le long terme.
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Table des matières
Partie 1. Le monde du travail de nos jours : entre illusions, idées reçues et mutations réelles
I. Nous ne vivons pas la fin du salariat
a. Un salariat encore omniprésent
b. Les indépendants, une catégorie ancienne et hétéroclite
c. Le secteur tertiaire, gisement des travailleurs indépendants ?
d. La création du régime d’auto-entrepreneur
II. Un besoin des entreprises de plus de flexibilité
a. La fin du CDI ?
Dans le salariat, des contrats et des catégories de travailleurs se multiplient
La pluriactivité se développe
b. Les politiques et stratégies des entreprises évoluent
De l’entreprise industrielle à la plateforme
Plusieurs types d’organisations
Les cycles technologiques s’accélèrent avec les technologies numériques
III. Une soif d’indépendance des travailleurs au prix d’une grande précarité
a. L’indépendance est une aspiration sociétale
b. L’indépendance est aussi une réponse au chômage
c. Le micro-entrepreneuriat est souvent un régime d’activité de complément
IV. Des enjeux nouveaux
a. Le salariat, un marqueur social qui ne protège plus
b. Les sublimes et les contraints de l’indépendance
c. La parasubordination
d. La précarité derrière l’indépendance
I. Les rapports au travail : liberté, sécurité, dignité
II. Une perspective historique sur la naissance d’un équilibre
III. Vers un éclatement de la répartition bipolaire traditionnelle
Partie 3 : À la recherche de nouveaux équilibres
I. Comparaisons européennes
II. Une méthode pour construire des rapports au travail équilibrés
a. Réformes horizontales
Favoriser les sociétés coopératives d’activité et d’emploi
Responsabiliser les plateformes
Faire évoluer le salariat pour répondre au besoin d’autonomie des travailleurs
b. Réformes verticales
Réformes prévues par le programme d’Emmanuel Macron lors de la campagne présidentielle 2017
Créer des droits de tirage sociaux
Universaliser la stabilité du revenu
Donner du sens au travail