Le Microcèbe mignon (Microcebus murinus)
Place du Microcèbe dans l’ordre des primates et particularités biologiques
L’espèce Microcebus murinus est un Lémurien au sens large. Il fait partie de l’infraordre des Lémuriformes, famille des Cheirogaleidae et genre Microcebus (Figure 1). Le genre Microcebus regroupe les plus petites espèces de Lémuriens. Depuis ces deux dernières décennies avec la multiplication d’études génétiques, le nombre d’espèces répertoriées chez les Microcèbes ne cesse d’augmenter. On dénombre actuellement 21 espèces (Schäffler et Kappeler, 2014) (Tableau 1). Toutes ces espèces sont arboricoles et endémiques à Madagascar. Le Microcèbe mignon est observé exclusivement dans les forêts du sud-ouest. Leur durée de vie en milieu naturel est de 8 à 10 ans, allant jusqu’à 13 ans en captivité. Les Microcèbes sont physiquement caractérisés par des membres courts et de larges yeux. Plus précisément, le Microcèbe mignon mesure environ de 12 cm de long, de la base du front à la base de la queue et pèse en moyenne en saison sèche 50 g et jusqu’à 200 g en saison humide.
Son pelage est gris-brun avec une large zone blanchâtre en région ventrale (Figure 2). Il possède de fines incisives et canines inférieures, particularité dentaire adaptée à une longue activité de toilettage. hiérarchie entre les mâles s’établit uniquement lors de la période de reproduction. La reproduction est saisonnière. Elle a lieu entre novembre et avril, lors de la saison des pluies, en photopériode des jours les plus longs. C’est une espèce polyoestrienne. Elle peut présenter jusqu’à trois oestrus lors de la saison sexuelle. Les accouplements sont de type polygame, un mâle pouvant s’accoupler successivement avec plusieurs femelles et inversement pour les femelles. La gestation dure 60 à 63 jours. Les portées sont composées de deux à trois petits. Le sevrage intervient après 40 jours d’allaitement et la maturité sexuelle s’observe vers 8 à 9 mois (Guignard, 2009). Les Microcèbes vivent la nuit. Ils se regroupent le jour pour dormir dans des nids, les mâles séparés des femelles. Ils sont généralement omnivores, se nourrissant d’insectes, de fruits, de feuillages et de petits mammifères.
Le Microcèbe :
un modèle primate du vieillissement Les primates non-humains partagent avec l’Homme une proximité génétique, physiologique et anatomique plus grande que les modèles animaux de laboratoires classiques (rongeurs, lagomorphes…). Les modèles animaux primates non-humains de petite taille sont de plus en plus utilisés en recherche, notamment dans les études du vieillissement. Callitrix jacchus, un singe du nouveau monde communément appelé ouistiti à toupets blancs, et Microcebus murinus en font partie (Austad et Fischer, 2011). Les intérêts du Microcèbe en recherche expérimentale sont son petit format, une maturité sexuelle rapide et une fécondité relativement élevée pour des primates, permettant de créer rapidement, maintenir et entretenir une colonie (Languille et al., 2012). Sa durée de vie en captivité est en moyenne de 10 à 13 ans. Lors d’études sur les mécanismes du vieillissement, des données sont plus rapidement obtenues avec le Microcèbe par rapport à d’autres primates non-humains (Galas et al., 2012). L’utilisation de macaques ou tout autre primate de l’ancien monde dans ce type d’études nécessiterait une attente d’au moins 25 ans avant d’obtenir des résultats expérimentaux (Austad et Fischer, 2011). De plus à poids équivalent, le Microcèbe vit deux à trois fois plus longtemps que le rat (Stuart et Page, 2010). De nombreux marqueurs biologiques du vieillissement ont été validés chez le Microcèbe pour des recherches sur les maladies neurodégénératives. Ainsi, Microcebus murinus est utilisé comme modèle animal dans l’étude de la maladie d’Alzheimer. Environs 5% de ces animaux présentent après l’âge de 5 ans des plaques amyloïdes denses en région corticale, une atrophie corticale et une dilatation ventriculaire. Ces lésions sont ainsi appelées Alzheimer disease-like (Galas et al., 2012 ; Bons et al., 2006). Le laboratoire d’Ecologie Générale du Muséum National d’Histoire Naturelle à Brunoy est considéré comme le plus grand centre d’élevage de Microcèbes d’Europe. La colonie comprend plus de 500 animaux, descendants d’individus importés du sud de Madagascar entre 1967 et 1972. Une hétérogénéité génétique comparable à celle retrouvée dans la population humaine est préservée. Cet élevage fonctionne depuis plus de 35 ans et a permis l’accumulation de nombreuses données biologiques, notamment physiologiques et comportementales (UMR 7179 du CNRS, Mécanismes adaptatifs et évolution. L’élevage des Microcèbes à Brunoy).
Le projet «Restrikal» : effet de la restriction calorique et de l’utilisation du resvératrol chez le Microcèbe Il a été démontré chez différentes espèces animales à courte durée de vie que la restriction calorique (RC) est l’unique moyen, hors manipulation génétique, permettant un ralentissement de l’apparition des maladies liées à l’âge et l’augmentation de la durée de vie (Marchal et al., 2012a). L’allongement de la vie humaine a entraîné l’apparition et l’augmentation d’un certain nombre de maladies liées à l’âge. Dans ce contexte, l’étude d’une application à l’Homme de la RC semble pertinente. Cependant, les effets positifs de ce type de régime alimentaire sur des espèces à longue durée de vie restent à démontrer et son extension à l’Homme semble difficile. C’est pourquoi des alternatives doivent être développées. Le resvératrol est un composé polyphénolique présent dans de nombreuses plantes et fruits, dont le raisin. Il a été observé chez l’homme que l’ingestion de resvératrol limite le développement de maladies cardio-vasculaires et neurodégénératives, ainsi que l’apparition des tumeurs (Frombaum et al., 2012 ; Petrovski et al., 2011 ; Richard et al., 2011 ; Li et al., 2012). De plus, dans différentes espèces, incluant la souris, son ingestion permet d’augmenter la durée de vie (Agarwal et Baur, 2011). Cela le place au centre de nombreuses recherches, dont le projet «Restrikal». Le projet «Restrikal» emploie le Microcèbe comme modèle animal. Les animaux étaient répartis en trois groupes : les animaux nourris ad libitum, les animaux recevant du resvératrol et les animaux subissant une restriction calorique (RC). Les objectifs étaient de tester le potentiel mimétique à la RC du resvératrol et d’étudier les effets sur le long terme de la RC (Agence Nationale de la Recherche. Projet RESTRIKAL ; Marchal et al., 2012b ; Dal-Pan et al., 2011).
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Table des matières
LISTE DES FIGURES ET ILLUSTRATIONS
LISTE DES TABLEAUX
LISTE DES ABRÉVIATIONS
INTRODUCTION
ÉTUDE BIBLIOGRAPHIQUE
Le Microcèbe mignon (Microcebus murinus) : son utilisation en recherche
Place du Microcèbe dans l’ordre des primates et particularités biologiques
Le Microcèbe : un modèle primate du vieillissement
Le projet «Restrikal» : effet de la restriction calorique et de l’utilisation du resvératrol chez le Microcèbe
Le pancréas endocrine chez les mammifères
Organisation générale du pancréas
Les îlots de Langerhans : un « micro-organe » à part entière
Topographie des îlots de Langerhans chez l’Homme et les animaux de laboratoire
Chez l’Homme
Chez un primate non-humain : exemple du Macaque crabier (Macaca fascicularis)
Chez un carnivore : exemple du chien
Chez un rongeur : exemple de la sourisChez un artiodactyle : exemple du porc
Développement embryonnaire du pancréas
Physiologie du pancréas endocrine
Les lésions du pancréas endocrine
Lésions dégénératives des îlots de Langerhans
Atrophie, nécrose, sclérose et amyloïdose
Diabète sucré
Hyperplasie des îlots de Langerhans
Lésions tumorales des îlots de Langerhans
ÉTUDE EXPÉRIMENTALE
Matériel et méthode
Animaux utilisés
Préparation des lames histologiques
L’immunohistochimie enzymatique
Principe de l’immunohistochimie enzymatique
Protocole d’immunomarquage
Analyse morphométrique
Résultats
Coloration hémalun-éosine-safran
Immunomarquages anti-insuline, anti-glucagon et analyse morphométrique
Répartition des cellules α et β dans le pancréas endocrine des Microcèbes
L’hyperplasie des îlots de Langerhans
Les animaux sous restriction calorique
Les animaux sous resvératrol
Les animaux sous régime ad libitum
Discussion
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE
ANNEXE 1
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