Contamination des plantes par Claviceps purpurea
Toxicité expérimentale
En 1978, Griffith et al. ont déterminé les DL50 d’un certain nombre d’alcaloïdes de l’ergot, naturels et semi-synthétiques chez le rat, la souris et le lapin. Différentes voies d’administration : intraveineuse (i.v.), sous-cutanée (s.c.) et per os (Tableau 2). La toxicité par voie orale est toujours inférieure chez les trois espèces. La DL50 par voie orale est toujours supérieure à la DL50 par voie i.v. pour la même espèce ce qui reflète la faible absorption par voie orale et l’intense premier passage hépatique suite à l’administration par voie orale. On peut aussi noter que la sensibilité n’est pas la même pour toute les espèces, avec le lapin qui est le plus sensible. Les signes cliniques de l’intoxication aigue sub-létal sont des signes de neurotoxicité, incluant de l’agitation, un myosis ou une mydriase, une faiblesse musculaire, des tremblements et une rigidité. Une gangrène de la queue a été observée 5-7 jours après une unique exposition à un mélange d’alcaloïdes de l’ergot (ergocornine, α- et β- ergocryptine et ergocristine) à 25 mg/kg pc (intra-péritonéale).
Dihydroergotoxine et dihydroergocristine
La dihydroergotoxine et la dihydroergocristine sont des dérivés hydrogénés d’alcaloïde naturel. Elles permettent une stimulation des récepteurs centraux, une vasodilatation périphérique et possèdent une action régulatrice du métabolisme neuronal. Cette pharmacologie complexe permettrait d’expliquer leurs effets bénéfiques dans le traitement des troubles comportementaux de la sénescence cérébrale. L’évaluation clinique de la dihydroergotoxine n’apporte pas de preuve de son intérêt clinique chez les personnes âgées souffrant d’un déficit cognitif et neurosensoriel. Le service médical rendu de ces deux alcaloïdes a été jugé insuffisant par la Commission de la transparence.
Le mésilate de dihydroergotoxine est habituellement associé à un adréno-sympatholytique tel que la raubasine (= ajmalicine). Les deux alcaloïdes ont des utilisations voisines ; ils sont proposés, par voie orale, comme traitement d’appoint à visée symptomatique du déficit pathologique et neurosensoriel chronique du sujet âgé à l’exclusion de la maladie d’Alzheimer et des autres démences, ainsi que comme traitement d’appoint des baisses d’acuité et trouble du champ visuel présumé d’origine vasculaires [Bruneton, 2009].
Intoxication de l’Homme
Les premiers témoignages d’intoxication à l’ergot chez l’Homme remontent à 600 avant J.-C. En 1951, en France, a lieu « l’affaire du pain maudit ». Cette année, un petit village du sud de la France, Pont Saint-Esprit, plus de 300 personnes manifestèrent un comportement anormal caractérisé entre autre par des hallucinations visuelles et sensorielles, une violente hystérie et une hyperactivité motrice. Tous les individus touchés avaient ingérés du pain de la même origine, fait de farine contaminée par des alcaloïdes de l’ergot de seigle ; c’est pour cette raison que l’ergotisme a été mis en avant pour expliquer ces symptômes, cet épisode reste encore aujourd’hui non confirmé. D’autres hypothèses avaient été envisagées comme un empoisonnement au méthyl mercure (contenu dans un agent fongicide utilisé pour conserver le grain) ou à Aspergillus fumigatus qui est capable de produire des mycotoxines neurotropes [Gorini, 2006]. L’intoxication à l’ergot est devenue rare maintenant, et les principaux symptômes de l’ergotisme sont actuellement dus à un surdosage de traitement contre la migraine à base d’ergotamine [Merhoff et al., 1974].
Deux formes principales d’ergotisme sont décrites chez l’Homme : la forme gangréneuse et la forme convulsive. Ce classement en deux formes d’ergotisme dérive des observations faites lors des grandes épidémies. Cependant, il existe des symptômes communs à toutes les formes dont une lassitude, des vomissements, de la diarrhée, des douleurs musculaires en région lombaire, des vésicules cutanées ischémiques sur la main ou le pied, une soif intense et une fonction mentale réduite. Les épidémies dues à l’ingestion de farines contaminées étaient purement gangréneuses ou purement convulsives même si certains cas d’épidémies mixtes ont été rapportés en Russie [Merhoff et al., 1974].
Appareil locomoteur
Le premier symptôme qui apparait généralement est une boiterie des membres pelviens, apparaissant après 2 à 6 semaines d’exposition à un aliment contaminé. Un gonflement des articulations est visible, puis il y a perte de sensibilité et une gangrène sèche se développe. La boite cornée des onglons peut, dans les cas extrêmes, se détacher. Les oreilles et la queu peuvent aussi subir le même sort. Par temps froid, ces signes vont être exacerbés puisqu’il se produit en plus une vasoconstriction périphérique physiologique.
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INTRODUCTION
PARTIE 1. L’ERGOT : UN CHAMPIGNON PARASITE
1. Contamination des plantes par Claviceps purpurea
1.1. Classification
1.2. Plantes hôtes
1.3. Biologie de Claviceps purpurea
1.3.1. Description morphologique
1.3.2. Reproduction
1.4. Conditions de développement
1.4.1. Effet du climat
1.4.2. Effet des pratiques culturales
1.4.3. Nature du sol
1.5. Conclusion
2. Moyens de lutte
2.1. Pourquoi lutter contre C. purpurea ?
2.1.1. Protection contre l’intoxication par les alcaloïdes de l’ergot
2.1.2. Pertes économiques
2.2. Moyens de lutte culturaux
2.2.1. Mesures sanitaires
2.2.2. Choix des cultivars
2.2.3. Précautions au semis
2.2.4. Précautions à la récolte
2.2.5. Rotation des cultures
2.2.6. Travail du sol
2.2.7. Utilisation de fongicides
2.2.8. Utilisation d’insecticides
2.3. Moyens de lutte physique
2.4. Moyens de lutte biologique
2.5. Conclusion
PARTIE 2. PHARMACOLOGIE ET TOXICOLOGIE DE CLAVICEPS PURPUREA
1. Les alcaloïdes
1.1. Les différents alcaloïdes et leur structure
1.2. Biosynthèse
1.3. Déterminisme génétique
2. Toxicocinétique
2.1. Exposition
2.2. Absorption
2.3. Distribution
2.4. Métabolisme
2.5. Elimination
3. Base moléculaire de la toxicité
3.1. Toxicité expérimentale
3.2. Effets toxiques
4. Pharmacologie et utilisation médicale
4.1. Ergométrine et obstétrique
4.2. Ergotamine et migraine
4.3. Sénescence cérébrale
4.4. Maladie de Parkinson
PARTIE 3. L’INTOXICATION PAR CLAVICEPS PURPUREA
1. Historique
2. Intoxication de l’Homme
2.1. Forme gangréneuse
2.2. Forme convulsive
3. Intoxication des bovins
3.1. Dose toxique
3.2. Symptômes
4. Intoxication des petits ruminants
4.1. Dose toxique
4.2. Symptômes
5. Intoxication des porcins
5.1. Performances
5.2. Appareil digestif
6. Intoxication des chevaux
6.1. Forme nerveuse
6.2. Forme gangréneuse
6.3. Reproduction
6.4. Signes digestifs
7. Intoxication des carnivores domestiques
8. Intoxication des oiseaux
8.1. Dose toxique
8.2. Symptômes
9. Risques pour le consommateur
PARTIE 4. ETUDE DE CAS CLINIQUE
1. Cas 1 : Episode de dyspnée dans une exploitation laitière (1999)
2. Cas 2 : Episode d’hyperthermie en élevage laitier au Brésil (1999-2000)
3. Cas 3 : Episode de gangrène sèche dans un troupeau de bovins en Afrique du Sud
4. Cas 4 : Syndrome d’hyperthermie dans un élevage laitier en Afrique du Sud
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE
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