Le mentorat comme révélateur de la jeunesse

Le mentorat comme révélateur de la jeunesse

Comme expliqué précédemment, l’adolescence représente une période essentielle de la construction identitaire. Le sentiment d’utilité et le besoin de reconnaissance sociale est important. Or, un jeune ayant arrêté prématurément sa scolarité ou sa formation, quelle qu’en soit la raison, peut vite se sentir dévalorisé et exclu. Comme le dit Lamamra et Masdonati « (…) la société actuelle demeure une société salariale et l’intégration sociale se fait toujours largement par le biais de l’activité professionnelle. » (Lamamra & Masdonati, 2009, p. 30) Erikson nous dit que « En général, c’est l’incapacité de s’établir dans une identité professionnelle qui perturbe une grande partie des jeunes. » (1970, p. 137) L’identité personnelle se crée donc en lien avec l’identité professionnelle. Ne pas avoir d’emploi dans une société fondée sur le travail correspond à ne pas avoir de statut social et d’être exclu. Les jeunes dont nous parlons tout au long de notre travail sont les premiers touchés par cette crise d’identité.

De plus, nous pouvons dire que la construction de l’individu n’est pas qu’un processus individuel. Il est influencé par le milieu familial et économique, ainsi que par le système social dans lequel la personne évolue. Simmel (1988, cité dans, Paugam, 2008, p. 53) spécifie que l’homme est un être de liaison. Paugam ajoute que « S’il n’existe pas, comme le soulignait Durkheim, de partie qui ne soit partie d’un tout, et que celui-ci est plus que la somme de ces parties, on peut convenir que l’homme doit ce qu’il est, en tant qu’individu, à l’association humaine. » (Paugam, 2008, p. 34) Dans le cadre de ce travail de recherche, nous partons de l’hypothèse que le mentorat pourrait servir de lien entre la jeunesse d’aujourd’hui en manque de repères et notre société exigeante. Le mentorat est, par ailleurs, une méthode d’accompagnement ancestrale encore peu connue en Suisse. « Le mentor est une personne d’expérience qui fournit volontairement une aide à une personne moins expérimentée, à titre de guide, de conseiller, de modèle, et qui partage avec celle-ci son vécu, son expertise et sa vision. Le mentoré représente la personne jumelée à un mentor, qui bénéficie de l’aide de celui-ci pour acquérir des compétences, accroître sa confiance, ses aptitudes et ses chances de succès dans la réalisation de ses objectifs personnels et professionnels. » (Latour, 18.12.2015) Nous pensons que le besoin d’avoir une figure mentorale est toujours d’actualité. Il s’agit d’une relation duale entre deux individus. Aussi, des programmes de mentorat se créent dans le domaine social et permettent à des jeunes de s’inscrire dans une relation privilégiée et d’avoir une figure d’identification pour s’inscrire dans le monde des adultes. Plusieurs structures et institutions helvétiques utilisent déjà le mentorat comme outil d’insertion ou de réinsertion socio-professionnelle.

Les tensions et la problématique de l’approche mentorale

Le mentorat de base appelé aussi mentorat naturel part du principe que le jeune et le mentor se choisissent. Or dans une méthode d’accompagnement social cela semble difficile, car les rencontres ne sont pas spontanées comme c’est le cas pour le mentorat naturel. Lorsqu’une personne souhaite s’engager comme mentor, elle s’adresse au coordinateur du programme. Ce dernier forme le mentor. Puis, il le met en contact avec un jeune en difficulté. C’est grâce à cette action de pairage (le jumelage), que le duo est créé. On parlera alors de couple imposé. La relation peut alors débuter et prendre forme. Toutefois, si le couple n’arrive pas à trouver d’entente ou si l’alchimie entre le duo ne prend pas, cela peut avoir un impact négatif sur la réussite de la démarche. A notre avis, le seul échec possible serait que le duo ne fonctionne pas et que les rencontres s’interrompent de manière prématurée. Il n’est pas nécessaire d’arriver à terme du projet pour parler de réussite. En effet, tout au long du processus de mentorat, il peut se construire une relation de confiance et cela aura certainement des retombées positives chez les deux protagonistes. En pensant au mentorat comme moyen de prévention pour la jeunesse en difficulté, nous avons repris les définitions des différents niveaux de prévention.

D’une manière générale, la prévention est une notion commune que ce soit pour évoquer les accidents de la route, l’alcool au volant, la maladie ou encore l’exclusion. Nos politiques sociales parlent de passer d’une action réparatrice à une action préventive, mais il existe différents niveaux de prévention. Dans le social, la prévention primaire s’emploie pour parler d’une amélioration des conditions de vie de la population en général. Il pourrait être mis en place des séances d’informations dans les établissements scolaires sur les différentes formations existantes. La prévention secondaire intervient lorsqu’une action est mise en place afin de renforcer des ressources auprès de groupes à risque. Par exemple, des mesures pour éviter qu’un jeune ayant des difficultés familiales n’arrête sa formation. Pour finir, il y a la prévention tertiaire où la problématique est déjà présente. Il s’agit alors d’accompagner des personnes exclues vers une réinsertion sociale par des mesures spécifiques. Nous nous sommes demandées si cette méthode était plutôt axée sur la prévention primaire, secondaire ou tertiaire ? A ce stade, nous pensons qu’elle peut s’appliquer aux trois niveaux. Pour finir, les jeunes dont nous parlons dans notre recherche sont pour la plupart passés par plusieurs dispositifs de réinsertion et ont déjà vécu plusieurs échecs. Le mentorat se base sur la démarche volontaire. Comment faire alors pour que les jeunes aient envie de s’engager dans cette relation afin de leur donner la possibilité d’acquérir une autonomie ? Un autre enjeu porte sur le mentor. Il s’agit d’une personne bénévole, n’ayant pas nécessairement une formation de base dans le social. N’y a-t-il pas un risque de surengagement de la part du mentor qui pourrait mettre en péril la relation ?

Nos aprioris sur le mentorat

Lorsque nous avons dû définir ce qu’était le mentorat, nous visualisions cette relation mentorale de manière très naturelle, les parties se choisissent en fonction de leurs intérêts. Nous sommes nombreux à avoir eu dans notre vie, une personne de notre entourage que nous avons identifié comme un modèle, un mentor qui a su nous guider et nous accompagner, qu’il ait été nommé comme tel ou non. En débutant notre recherche, nous avons découvert le mentorat dit institutionnel. Les personnes ne se choisissent plus naturellement et ne se connaissent pas. Un tiers, communément appelé coordinateur met en relation et jumelle les couples mentor-mentoré. Dans cette relation, qui selon nous est « non naturelle », un lien fort tel que le mentorat peutil se créer ? Peut-on définir cet accompagnement comme du mentorat ou s’agit-il d’un autre type accompagnement ? D’autre part, au début de notre recherche, nous trouvions que l’approche du mentorat était très innovante pour les jeunes désaffiliés. Nous y avons vu principalement des aspects positifs. Elle permettait de soulager les travailleurs sociaux surchargés, en offrant aux jeunes un accompagnement parfaitement adapté à leurs besoins, leur permettant de prendre le temps de trouver leur voie en lien avec leurs aspirations. Nous pensions que cette approche ne s’axait pas seulement sur l’insertion professionnelle. Le mentor pouvait alors faire profiter le jeune de son réseau personnel, par exemple pour le recommander pour un appartement.

Au fur et à mesure de notre travail, des questions apparaissaient, nous avons pris grand soin de les noter pour alimenter notre réflexion. Tout d’abord, l’image du mentor était pour nous celle d’une personne avec une forte identité, avec un certain vécu, une maturité et un parcours permettant de répondre au besoin de connaissance du novice. Nous imaginions une personne avec un fort charisme permettant à un tiers de s’identifier à elle. Est-ce que n’importe qui peut s’improviser mentor ? Devient-on mentor ou cela est-il inné ? Pour nous, le mentor est une personne avec une bonne capacité d’écoute et de questionnements. Le mentor n’apporte pas les solutions, mais questionne, oriente et soutient. Il est optimiste, dans le sens où il parvient à identifier les capacités et compétences chez le jeune et sait les mettre en évidence. D’autre part, nous nous sommes interrogées sur ce qui pousserait une personne à vouloir être mentor. Est-ce un acte purement altruiste ? Nous pensons que non. Dans la relation mentorale, le don est réciproque. Chacun apprend de l’autre et apprend avec l’autre. La curiosité pourrait être une raison qui pousse une personne à devenir mentor, aller à la rencontre d’une nouvelle génération, peut-être aussi pour déconstruire ses préjugés. Mais ce qui prédomine selon nous c’est l’envie de transmettre à la génération future ce qui a été acquis par le biais de sa propre expérience. Dans le cadre de notre travail, nous nous sommes axées sur le mentorat pour les jeunes en difficulté. Le mentor peut être une personne lambda, qui n’a pas forcément une formation dans l’accompagnement. Il est en relation avec des personnes qui ont besoin de soutien, d’accompagnement et qui ont bien souvent déjà vécu de nombreux échecs. Elles peuvent être vulnérables et fragilisées par leurs parcours de vie. Le mentor qui est face à une personne avec des difficultés est-il suffisamment outillé?

Le rapport de stage ou le pfe est un document d’analyse, de synthèse et d’évaluation de votre apprentissage, c’est pour cela chatpfe.com propose le téléchargement des modèles complet de projet de fin d’étude, rapport de stage, mémoire, pfe, thèse, pour connaître la méthodologie à avoir et savoir comment construire les parties d’un projet de fin d’étude.

Table des matières

Introduction
1. La thématique de la jeunesse et l’insertion socio-professionnelle des jeunes
2. Le mentorat comme révélateur de la jeunesse
3. Les tensions et la problématique de l’approche mentorale
4. Nos aprioris sur le mentorat
5. Notre question de recherche et nos hypothèses
6. Notre méthodologie
Phase de construction de notre travail
Phase de rencontre du terrain
Phase d’entretien
Phase de retranscription de nos entretiens
Phase de l’élaboration de notre dispositif de mentorat
Phase d’analyse
7. La démarche éthique
8. A qui s’adresse notre travail de recherche ?
Cadre théorique
1. L’histoire du mentorat
2. La définition du mentorat
3. Le bénévolat et le volontariat dans le mentorat
4. Les différentes formes d’accompagnement
La différence entre le coaching et le mentorat
5. Les différents types de mentorat
Le mentorat entrepreneurial
Le mentorat de vie et le mentorat de carrière
Le mentorat développemental et le mentorat instrumental
6. Le programme de mentorat
7. Le jumelage de la dyade
8. Les rôles et compétences de chacun
9. Le concept de Rêve de vie
10. Les dimensions de la relation mentorale
Le soutien
Le défi
Le projet
11. Les phases de la relation mentorale
Le commencement de la relation
Le déroulement de la relation
Le dénouement de la relation
Les autres représentations de ces phases
12. De quoi dépend le succès du mentorat ?
13. Les effets positifs et négatifs du mentorat
14. Le lien avec le travail social
Méthodologie
1. Phase de création de notre dispositif
Phase de lancement
Phase de rencontre avec le terrain concerné par notre recherche
Phase de rencontre avec les jeunes
Phase de déroulement du programme
Phase de clôture du dispositif
2. Les modalités de notre dispositif de mentorat
3. Les outils à disposition du mentor
L’intervision comme dispositif de partage
Le journal de bord comme support personnel de réflexion
4. La tierce personne comme régulateur dans la relation
5. Nos questionnements et nos craintes
6. Le type de mentorat pratiqué dans notre dispositif
7. Les vignettes des mentorés
Analyse des résultats
1. Introduction
2. Le bénévolat dans le mentorat
3. Les différents types de mentorat et leurs domaines d’application
4. Le couple imposé
5. Les phases de la relation mentorale
Le commencement
Le déroulement
Le dénouement et la fin
La transformation de la relation
6. Les compétences du mentoré et du mentor
Le mentoré
Le mentor
7. La dimension mentorale
Le soutien
Le défi
Le projet
8. Le Rêve de vie
9. Le retour sur notre dispositif
La pose du cadre aux parties
Les lieux des rencontres
La durée du suivi
La fréquence des rencontres
10. Une formation et un suivi pour le mentor
L’intervision
Le journal de bord
11. La nécessité d’un tiers dans la relation
12. Les retours sur la relation entre le mentor et le mentoré
13. L’interruption du suivi
14. Les effets positifs et négatifs du mentorat
15. Le lien avec le travail social
Conclusion
1. Le retour sur nos hypothèses
2. La réponse à notre question de recherche
3. Les limites de notre recherche
4. Les apports de notre recherche pour le travail social et nos préconisations
5. Nos apprentissages et compétences développés en matière de recherche
Remerciements
Bibliographie
Annexes

Le mentorat comme révélateur de la jeunesseTélécharger le rapport complet

Télécharger aussi :

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *