Le Méditation space au sein de l’Unesco 

Analyse transversale des trois lieux de méditation retenus

Il y a 12 ans, j’ai découvert les idées, la philosophie et les oeuvres d’Ando TADAO au travers d’un voyage d’environ 1 mois avec deux amis, où j’ai notamment pu visiter le « Temple de l’eau » et l’ « Eglise de l’eau ».
Il s’agit là de deux des trois oeuvres retenues dans le cadre du présent projet. Quant à la 3ème, « l’Espace Méditation » au sein des bâtiments de l’Unesco à Paris, j’ai pu récemment le visiter au début de l’année 2013.
Ces trois édifices seront analysés ici sous différents aspects qui permettent d’en comprendre au mieux toute l’essence et les déclinaisons, et qui évoqueront successivement des questions essentielles concernant :
– ce que l’on dénomme « Sukiya », conception très caractéristique des constructions japonaises dont l’étude est nécessaire à la compréhension des oeuvres d’Ando TADAO et notamment des trois retenues ;
– la conception de la composition spatiale selon Ando TADAO ;
– le lien entre la nature et le bâtiment : des plans d’eau extérieurs et des arbres omniprésents
– les jeux de lumières : des ouvertures sur des espaces intermédiaires ;
– la géométrie : l’utilisation par Ando TADAO de l’orientation et sa conception des lieux ;
– les parcours d’accès : des longs chemins destinés à l’entrée en méditation ;
– l’agencement et l’élévation des murs ;
– l’utilisation du béton ;
– les symboles imaginés en osmose avec les lieux de méditation.

Analyse transversale des trois lieux de méditation retenus

Le style « Sukiya », conception caractéristique des constructions japonaises ayant influencé les oeuvres d’Ando TADAO
Dans sa jeunesse, Ando TADAO s’est souvent rendu à Kyôto et à Nara, parcourant les édifices anciens réputés de l’architecture « SUKIYA » ainsi que les « Machiya »6. C ependant, lorsqu’il a commencé ses constructions, il s’est tourné vers l’Occident pour concevoir ses prototypes architecturaux, estimant que faire de l’architecture n’était rien d’autre que bâtir une architecture occidentale et reniant ainsi l’architecture traditionnelle japonaise.
Malgré tout, cette dernière n’a jamais cessé d’imprégner conscience du « Sukiya ». Il a beau avoir fait le tour de l’architecture étrangère, et particulièrement occidentale, sa vue de l’architecture japonaise traditionnelle se ressent toujours manière assez inexplicable.
Il reprend conscience du fait qu’au Japon existent de nombreux bâtiments exceptionnels. Aujourd’hui, l’architecture traditionnelle japonaise peut suggérer de multiples pistes de réflexion sur la difficile question la relation entre l’homme et la nature.
C’est en voyageant qu’il compris pour la première fois. Il trouve plus important d’apprendre par son propre corps plutôt que dans les livres.
Lorsqu’il a regardé le d’un oeil lointain, il a pris davantage conscience de la culture japonaise de particularités que lorsqu’il se trouvait physiquement au Japon et, tout en étant temps en prise directe avec la culture du pays étranger. Les distances abolies entre le Japon et le pays où il se trouve et de ce fait, les choses intérieures et celles extérieures s’entremêlent et s’enrichissent mutuellement.
Depuis sa plus tendre enfance, Ando TADAO a expérimenté différentes choses avec son propre corps, faisant de cette approche son point de départ. Ayant accumulé les réflexions issues de ces expériences personnelles, il souhaite élaborer une architecture intéressante et stimulante traduisant les attentes et les désirs des gens.
Au sens strict, il désigne le pavillon de thé mais au sens large, il englobe une architecture à grande échelle qui peut tout aussi bien comprendre le Palais Détaché de Katsura, L’église de la lumière, Le temple de l’eau, et Méditation Space Unesco etc.
Tous ces liens ayant notamment en commun de ne pas être des espaces de vie quotidienne et de favoriser recueillement. Dans la période moderne, les Japonais ont apporté une dimension esthétique de concision par une recherche de simplification extrème cette esthétique a donné naissance à un ensemble de bâtiments extraordinaires fondés sur le style SUKIYA.
Celui-ci ne s’adressait pas aux gens ordinaires, mais la conscience esthétique et la sensibilité qui s’en dégageaient se sont largement répandues au sein de la société japonaise. Les principaux aspects en sont en termes architecturaux : l’extrémité de l’avanttoit abaissée et une galerie extérieure en saillie.
L’architecture de style SUKIA transforme un paysage « maléable » en le marquant à l’extrême de l’enceinte de l’homme et en dégageant une composition faite de tension.
On peut dire qu’il symbolise la conscience esthétique japonaise, créant l’attente de ce qui est à venir. Les parties autonomes s’affranchissent grâce à cet intervalle, se superposent pour produire un nouvel événement au sein de la nature.
Cette image que tout Japonais porte en lui se retrouve fondamentalement enracinée dans le rapport à la nature instauré par l’habitat. Autrefois, celui- ci faisait corps avec la nature. L’organisation dirigeait la pensée des habitants à l’extérieur. C’est dans le style SUKIYA qu’un lien entre l’habitatnt et la nature a été le plus consciemment recherché.
En Occident, depuis les temps anciens, la nature a constitué pour les peuples chasseurs qui se déplaçaient en quête de gibier une présence terrible, défiant l’être humain. Cette crainte de la nature et l’organisation même de l’occident en pays voisins et en terres contiguës ont donné naissance à des murs de pierre dont l’épaisseur manifeste le rôle défensif.
A l’inverse, dans l’architecture japonaise, les murs n’existaient pas. De fait, des murs étaient certes utilisés ; mais leur but principal n’était pas d’exprimer la matière, bois, papier, terre ou paille, dans laquelle ils étaient construits. Si l’on se rapporte à la tradition nippone, l’architecture fait constamment corps avec la nature en inscrivant en elle ses changements organiques : elle l’extrait en un point du temps et la fixe.
En d’autres, termes, c’est une architecture réduite à une extrême simplicité et à une esthétique abstraite, dépourvue de l’aspect concret revêtu par la matière, de ses attributs et de son sens, se reliant même au néant. D’autres liens sont entretenus avec la nature par le des subtiles variations nées d’un délicat contraste entre l’ombre et la lumière.
sein de toutes ces corrélations, c’est le mur, rendu aussi léger et mince que possible, qui permet l’espace, ou pluôt l’évoque. Dans les murs des bâtiments de style SUKIA, les ouvertures peuvent être pratiquées n’importe où, conformément aux vues que l’on souhaite avoir de l’intérieur.
Celles-ci permettent deux types de transformations scéniques, en rapport avec le temps : les altérations qui dépendent de l’heure, du jour, du climat et des saisons, et celles qui dépendent des mouvements de l’observateur.
Ce faisant, au stade ultime de la concentration, ils peuvent entendre la voix de la nature et voyager à des distances cosmiques. La perception du temps ainsi que la conscience esthétique particulière au Japon fondent la création d’espaces aussi condensés que ceux des bâtiments de style SUKIYA.
Cependant, bien qu’ils présentent un traitement subtil de leurs différentes parties et de leur interaction, les bâtiments de style SUKIYA ne donnent pas une sensation forte d’unité globale.
La concentration urbaine a détruit sans pitié le monde naturel, et actuellement, la plupart des maisons ne peuvent plus entrer directement en contact avec lui.
Les bâtiments résidentiels ne s’ouvrent plus sur l’extérieur.
De nos jours, pour ressusciter l’esthétique du style SUKIA, il faut recourir à son esprit et pas nécessairement à ses formes, afin de créer une nouvelle théorie de la totalité permettant à l’architecture de s’adapter à son environnement.
Ando TADAO n’hesite pas à expliquer le changement intervenu dans son travail par le regard nouveau qu’il pose sur la tradition : l’adaptation des bâtiments au terrain et le rejet de toute symétrie sont en effet des caractèristiques importantes de l’architecture japonaise et plus particulièrement du style SUKIYA.
C’est ce que l’on retrouve dans les 3 projets pris pour exemple dans le cadre de la présente étude, illustrant notamment la conception particulière de la composition spatiale par Ando TADAO.

Composition spatiale

Pour cristalliser l’architecture, trois éléments semblent nécessaires.
Le premier est une matière authentique. Une matière qui doit contenir une substantialité réelle. Il peut s’agir de béton ou parfois de bois à l’état brut.
Le deuxième est une forme aux lignes pures, ce qui donne à l’architecture une présence réelle, comme un socle, un cadre. Le bâtiment pourra ainsi être une masse géométrique composée d’une ou plusieurs formes platoniques, mais le plus souvent les formes géométriques ne matérialiseront que le cadre structurel.
Enfin, le dernier élément est la nature, non pas telle qu’elle est mais une nature transformée par l’homme.
Face à une nature désordonnée, se trouve un « chaos naturel », une nature ordonnée par l’homme, ou plutôt une notion, symbole d’ordre, issue de la nature : « la lumière rendue abstraite », « le ciel rendu abstrait », « l’eau rendue abstraite ».
Lorsqu’une telle nature est introduite dans un bâtiment composé de matériaux authentiques, d’une forme purement géométrique, l’architecture elle-même devient abstraite par le bais de la nature.
Grâce à la fusion des trois éléments que sont la matière, la géométrie et la nature, l’architecture acquiert du pouvoir et irradie de toute sa force. Ando TADAO aime à penser que l’essence de l’architecture n’est pas la manipulation de formes simples mais la construction d’un espace et par-dessus tout, celle d’un « lieu », fondation de l’espace.
Tout d’abord, il commence par une confrontation avec le site, pour ensuite appréhender l’architecture comme un espace spécifique. L’intérieur et l ‘extérieur de la construction ne sont pas distincts mais forment un lieu unique et continu. Ando TADAO pense que l’architecture doit être regardée comme un domaine clos et articulé qui néanmoins conserve une relation distincte avec son environnement.
Le contact avec la nature, la vie authentique, les rayons du soleil, le passage du vent, le bruit de la pluie, sont autant d’éléments qu’Ando TADAO a toujours refusé de rejeter, considérant qu’ils parlent directement au corps humain et à l’esprit.
A l’intérieur de formes extérieures simples, il construit des labyrinthes, y introduit la nature, et par ce biais, crée un espace de vie où l’on peut réellement ressentir que l’on existe. Cette conception est à resituer dans son contexte historique.
Les années 1970 se caractérisaient en effet par des projets relativement fermés, souvent sans liens réels avec les espaces d’implantation, mais disposant d’un accès à la nature purifiée grâce à une alcôve intérieure ouverte sur le ciel.
Au cours des années 1980, ce sont les formes géométriques et les zones intermédiaires qui permettent d’ancrer les bâtiments dans leur site, les zones intermédiaires servant également à établir un lien avec la nature purifiée.
En 1990, nouvelle évolution : cette fois, Ando TADAO veut que ses bâtiments transcendent leur lieu d’implantation ; il s’approprie le site et crée des édifices qui font office de charnière entre la raison et la nature, entre le ciel et la terre. C’est désormais la spiritualité du lieu qui est exaltée, alors que le bâtiment devient une sorte de sanctuaire d’une nature déifiée.
Les trois projets retenus, L’église de la lumière(1989), Le temple de l’eau (1989-1991), et Méditation Space Unesco (1995), sont ainsi composés de formes géométriques choisies en fonction de leur programme, du relief et des liens souhaités avec le site. Cependant, chacun de ces projets exalte le lien entre la terre et le ciel grâce à une forme dominante évoquant, en quelque sorte, une disposition faite de façon à souligner les particularités du relief alentour.

Le lien entre la nature et le bâtiment des plans d’eau extérieurs et des arbres omniprésents

« Comme vous le savez, nous ne vivons plus dans le Japon traditionnel. L’ancien idéal d’une vie assimilée à la nature est plus proche du mythe que de la réalité. Pararèllement aux changements survenus dans la culture et la civilisation humaines, la nature connaît elle aussi, et au même rythme, un changement qualitatif. Dans un tel contexte, je que la relation entre l’homme et la nature doit inévitablement changer »8.
Conscient de cela, Ando TADAO souhaite créer une architecture favorisant une plus grande indépendance de l’individu sans perdre pour autant le contact étroit qui le lie à la nature.
Dans le choix du type de nature qu’il souhaite réintroduire, il reste cependant dans une certaine logique japonaise et ne cherche pas à confronter ses intérieurs aux espaces verts, mais plutôt à une nature immatérielle.
Dans la philosophie du thé s’exprime la volonté de pousser l’homme à retrouver sa place dans l’univers, non par une vénération de la nature, mais plutôt par la recherche d’un équilibre.
Chez Ando TADAO s’affirme en revanche la volonté d’instaurer une confrontation entre l’homme et son environnement et de transformer l’intérieur de ses architectures en un lieu de vénération de la nature.
Par Kakuzo Okakura « la théisme est un culte basé sur l’adoration du beau parmi les vulgarités de l’existence quotidienne. Il inspire à ses fidèles la pureté et l’harmonie, le mystère de la charité mutuelle, le sens du romantisme de l’ordre social. La philosophie du thé n ‘est pas une simple esthétique sans l’acception ordinaire du terme, car elle nous aide à exprimer conjointement avec l’éthique et la religion, notre conception intégrale de l’homme et de la nature. C’est une hygiène, car elle oblige à la propreté ; c’est une économie, car elle démontre que le bienêtre réside beaucoup plus dans la simplicité que dans la complexité et la dépense ; c’est une géométrie d’ordre moral, car elle définit le sens de notre proportion par rapport à l’univers », cité par NUSSAUME, Yann, « TADAO Ando et la question du milieu », Le moniteur, Paris, 1999, 278 pages.
Dans ses constructions, il tentera ainsi de rendre plus aisément perceptible la nature « immatérielle » en la transformant en une « nature qui a été rendue abstraite » : « de la lumière abstraite », « de l’eau abstraite », « du vent abstrait ».
On y ressent la volonté d’opposer intérieur et extérieur, ainsi qu’un travail intense de théatralisation, le plus souvent grâce à des jeux de lumière.
Par exemple, l’eau est considérée comme un élément de purification. Elle a l’étrange pouvoir de stimuler l’imagination et de nous rendre conscients de toutes les possibilités que la vie recèle. L’eau est une matière achrome, qui semble colorée sans pourtant l’être et qui renferme cependant une palette illimitée de couleurs. De plus, l’eau un miroir et entretient des liens étroits avec l ‘esprit humain.
Les plans des premières réalisations architecturales d’Ando TADAO étaient tous symétriques, comme reflétés par ce miroir d’eau. Petit petit, fil du temps, cette symétrie s’est effondrée et lorsqu’il y repense maintenant, est dû en partie à la profonde influence qu’a exercée sur lui l’architecture japonaise traditionnelle.

Le lien entre la nature et le bâtiment

Les jeux de lumière ; des ouvertures sur des espaces intermédiaires « J’avais 13 ou 14 ans quand mes parents ont décidé d’ajouter un étage à notre maison. J’ai été fortement impressionné lorsque les charpentiers ont enlevé le toit lumière qui s’est soudain engouffrée chez nous. Cela a été une véritable révélation J‘ai compris, à ce moment-là que la lumière est une chose qui peut toucher coeur des hommes et j’essaie, quand je le peux, de recréer cette émotion avec la lumière ». Ando TADAO est convaincu que la lumière confrère une existence aux objets en reliant l’espace et la forme. Un rayon de lumière, isolé au sein du bâtiment, permet de s’attarder sur la surface des objets et de faire naître l’ombre en arrière- plan.
Avec le passage du temps et la succession des saisons, l’intensité de la lumière varie, et dans son sillage les caractérisations des objets. Simultanément, la lumière isolée et happée par les objets est ainsi objectivée et prend forme.
La position de tous les objets est définie par leurs relations les uns par rapport aux autres. Au moment où l’on fixe une relation de ce type, l’ensemble des relations est ainsi déterminé. Par le biais de la lumière changeant au fil du temps, une architecture porteuse d’une relation de réciprocité entre ses parties se constitue. C’est en arrière-plan de cette évolution que se dégage orientale zen, selon laquelle « l’espace n’est que néant, ce quelque chose qui apparaît à la frontière où les objets disparaissent ».
Une personne assise et méditant peut y ressentir une sensation d’espace illimité, par l’interaction de la lumière et de l’obscurité. Conscient de cela, Ando TADAO a su utiliser à merveille les jeux d’ombre et de lumière dans ses lieux de méditation. Il s’agit là d’un élément fondamental pour lui, au vu de la richesse dont l’ombre est porteuse et du sens de la profondeur qu’elle permet d’offrir. La lumière qui entre dans la pièce créant une ombre symbolique pouvant être considérée comme sacrée et donc finalement à forte connotation religieuse ou tout du moins introspectrice.
La lumière met également en scène la beauté ; le vent et la pluie colorent la vie par leur action sur le corps humain. Ainsi, l’architecture est le médium qui rend l’homme capable de sentir la présence de la nature, qui montre chaque jour un visage différent.
Dans ses travaux, Ando TADAO considère toujours la lumière comme un facteur important dans la mise en scène de l’espace.
Chaque jour, la nature montre un visage différent et est le noyau de la quotidienne que l’on retrouve dans l’habitation, par l’introduction dans celle-ci de la perception de la nature par le biais de la lumière, du vent ou de la pluie, perception aujourd’hui de plus en plus dans les villes, au contraires hermétiques à l’environnement les entoure.
Tout en optant pour des constructions fermées au coeur ville, Ando TADAO crée des espaces complexes en introduisant la nature et changements de la lumière dans des formes géométriques simples séparées de leur contexte urbain. Il crée ainsi un espace « extra-ordinaire » et ce faisant, il tente d’inciter gens reconsidérer l’ordinaire.
Dans le monde occidental, il y a type ciel particulier qui doit faire corps avec l’espace architectural. On voit ce quand les lieux fermés rencontrent soudainement les espaces ouverts.
Pour Ando TADAO, l’important n’est pas le volume mais les espaces que la lumière met en couleur. Il construit ces espaces en utilisant la lumière pour les générer. Dans ses travaux en extérieur, la relation ciel est primordiale. La nature devient alors un élément de composition encore, c’est elle que l’on dévoile par la construction.
L’espace possède ce pouvoir mystérieux d’apaiser et de calmer. Une fois entrés dans le monde de la lumière, nos paupières frémissent sous le rayon de cette luminescence onirique et « on sent avec les yeux », ce ressenti est indéminiablement du même ordre dans l’architecture d’Ando TADAO. Ando TADAO considère la pénombre et l’obscurité comme une souce de beauté et de méditation davantage que de trouble, et celles-ci s’inscrivent d’ailleurs dans la continuité d’une tradition japonaise où l’ombre a souvent plus de valeur que la lumière.
« La beauté d’une pièce d’habitation japonaise, produite uniquement par son jeu sur le degré d’opacité de l’ombre, se passe de tout accessoire. » Le Japon en particulier, préfère mettre en avant une symbiose des éléments ; il en découle la création de toute une gamme d’espaces, allant de la lumière pure à son absence totale, matérialisés par l’ombre, la pénombre, etc.
Loin d’être connotés négativement, il s’agit d’abord de lieux de mystères, de questionnements, d’indéfini, chers à la tradition nippone. « Nos ancêtres découvriront un jour le beau au sein de l’ombre, et bientôt ils en vinrent à se servir de l’ombre en d’obtenir des effets esthétiques. » Travailler la lumière comme élément premier de composition met en avant l’importance du temps qui passe. La patine ou l’usure des matériaux, considérés comme un des aspects normaux s’une architecture, évoluant avec le temps, on ne peut que rejoindre le sentiment exprimé par d’autres en ces termes :
« Je suis convaincu qu’un bâtiment réussi doit être capable d’absorber les traces de la vie humaine et qu’il peut acquérir ainsi une richesse particulière. Je pense bien sûr à la patine que l’âge donne aux matériaux , aux petites égratignures, à l’écart terni et écaillé de la laque et aux arêtes polies par l’usure […] Lorsque ferme les yeux et essaie d’oublier ces traces physiques et mes premières associations d’idées, il me reste une autre impression, un sentiment plus profond : la conscience de l’écoulement du temps, la sensation de la vie humaine qui s’accomplit dans lieux dans des espaces qu’elle charge à sa manière ».
C’est ce même sentiment j’ai pu partager dans les trois projets de la présente étude, sous divers aspects, certaines similitudes et des différences remarquables.
L’église fonctionne un peu comme l’intérieur d’une camera obscura. La lumière étant le thème du projet, il était nécessaire de créer une zone sombre car on ne peut obtenir un effet de radiation lumineuse que sur un fond obscur. Ici la nature est stylisée. Elle est limitée à la seule lumière qui semble purifier l’espace architectural.
L’église offre simultanément un contact avec la nature en représentation et une nature abstraite. Une tache de lumière rectiligne se projette sue le sol.
Les matériaux naturels, ceux qui parlent aux sens, sont laissés dans l’obscurité. L’esprit s’élève. Par la lumière également, ce qui nous permet reconnaître les choses au sens le plus basique de notre relation avec la nature.
L’espace est simple mais vivement éclairé, avec les 15cm d’écart entre les murs du toit et le mur intérieur, comme on peut le voir ci-dessous.

La géométrie : l’utilisation par Ando TADAO de l’orientation et sa conception des lieux

Ando TADAO précise comment il imagine le rapport entre les formes géométriques, abstraites, et l’espace humain, figuratif. Il compare ses bâtiments aux oeuvres de Josef ALBERS, particulièrement à l’Hommage au carré (image 1), ainsi qu’aux prisons imaginaires de Piranèse (image 2).
Chez ALBERS, il apprécie surtout le travail effectué, à partir de formes abstraites, sur l’ambiguïté de la perception, tandis que chez Piranèse, il est plus particulièrement sensible aux qualités spatiales et labyrinthiques de ses gravures à l’eau-forte de la série des Prisons. Il place l’esprit de ses projets à la croisée des travaux de ces deux artistes, utilisant des formes géométriques simples à l’intérieur desquelles imbrique un labyrinthe.
Le visiteur effectue ainsi un parcours complexe, grimpe des marches, contourne des murs. Tout au long de ce parcours, il est mis en contact avec des images de la nature. L’intérrêt de tels projets réside dans le passage d’une architecture abstraite fondée sur des formes géométriques rigoureuses à quelque chose de plus représentatif, qui soit marqué de l’empreinte humaine.
« Dans mon architecture, j’utilise des formes simples : des cercles, des carrés. En effet, comme Albers manipulait les carrés par le moyen de couleurs distintes, j’essaye de transgresser les formes et de créer des espaces architecturaux particuliers. Le résultat est le passage d’une architecture abstraite fondée sur des fortes géolétriques rigoureuses à quelque chose de représentatif comportant l’empreinte du corps humain. »

Parcours intérieurs

Le circuit amorcé à l’extérieur se poursuit généralement à l’intérieur des bâtiments où il semble se séparer en plusieurs voies. L’étude des projets d’Ando TADAO trahit ainsi une  architecture parfois peu fonctionnelle, conforme à sa volonté.
Tout le long des différents chemins, fentes de lumière, de fines ouvertures viennent éviter l’impression d’emprisonnement. poussent le visiteur à garder constamment son attention en éveil. Il doit sentir dirigé mais non prisonnier. Cette longue découverte se termine habituellement par fenêtres à travers lesquelles on découvre l’espace intermédiaire.
Il peut s’agir, les cas, d’une cour (dans l’église de la lumière, on passe par exemple par petit village puis on arrive directement sur une cour située entre l’ancien bâtiment et le bâtiment créé par Ando TADAO), une pente de verdure, un long chemin (au temple de l’eau, on marche jusqu’à arriver sur la colline jonchée d’un long mur, on arrive alors à la porte, on doit ensuite marcher jusqu’à l’autre bout où se trouve l’autre mur, et on rencontre enfin l’étang avec les lotus, comme si on descendait nous-mêmes sous l’eau).
Tout est ainsi conçu, qu’il s’agisse des parcours intérieurs ou extérieurs, pour amener le visiteur à emprunter des chemins l’amenant peu à peu à la méditation, ce que l’on peut voir de façon plus détaillée sur les plans et photos des trois projets.
Le parcours intérieur est comme ainsi dire presque inexistant. Ce qui s’explique par l’abstraction faite de l’espace d’habitation, les zones consacrées à l’équilibre mental et spirituel devant occuper une position centrale.
On ne fait en effet que passer dans l’espace méditation, volontairement réduit au minimum en son intérieur, la lumière extérieure filtrant des ouvertures et des écarts de mur produisant sur le visiteur un effet introspectif.
Convaincu que la sérénité et les qualités sprituelles font partie intégrante de la nature d’un bâtiment, Ando TADAO considère que la présence d’espaces générant un tel apaisement est primordiale.
Ainsi, même si, d’un point de vue purement visuel, l’impression laissée par l’espace intérieur au sein du complexe de l’Unesco apparaît moins remplie de merveilles pour les yeux que dans le Temple de l’Eau, l’objectif poursuivi n’en demeure pas moins atteint, à savoir inviter le visiteur au recueillement tout au long de son parcours tant extérieur qu’intérieur.

L’agencement et l’élévation des murs

La présence des murs extérieurs, comme celle des espaces intermédiaires, s’explique par le passage d’une organisation centripète du plan à une organisation centrifuge. On retrouve cela dans la conception des bâtiments traditionnels japonais, permettant ainsi la présence de cours ou de petits jardins. Mais leur réutilisation par Ando TADAO ne pas exactement le même sens.
Dans l’architecture traditionnelle japonaise, cela permet de relativiser entre l’intérieur du bâtiment et la nature et donc de contribuer à l’organisation d’une savante interpénétration des deux.
Si la volonté d’Ando TADAO est certes bien de préserver relation entre l’intérieur et l’extérieur, il conçoit plutôt un espace intérieur souvent fermé qui donne, à travers une vitre, sur l’espace intermédiaire, où le concept de nature est théâtralisé. Autrement dit, il ne s’agit plus d’instaurer une savante continuité l’homme et la nature, entre l’espace d’habitation et le jardin, mais une opposition, afin d’obliger l’homme à prendre conscience de la nature.
On ne ressent plus la façade comme une limite entre l’intérieur et l’extérieur, puisque le mur englobe l’espace intermédiaire extérieur comme s’il s’agissait d’un espace intérieur au bâtiment. Dans « l’église lumière » se trouve par exemple un mur qui vient s’y encastrer selon un angle à degrés avant de l’entourer partiellement.
Tel un érigé dans le désert, le mur n’est pas seulement une barrière protectrice mais aussi tête pont spirituelle ; il impose sa présence dans le flux changeant de la ville et récuse toute idée préconçue de communauté.
Le mur d’enceinte n’est pas simplement un mur défensif mais aussi un mur agressif exprimant la détermination de l’habitant à vivre dans la ville ; il construit en même temps un lieu de vie privée organisé à l’intérieur. Le mur est le point de contact entre la logique de la ville et celle du site ; il est le plus petit régulateur et le plus fondamental de la structure urbaine.
La verticalité donne par ailleurs au pilier une existence symbolique. On peut le voir à la fois dans « L’église de la lumière », « Le temple de l’eau », et le « Méditation Space Unesco.

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Table des matières

Introduction – Exposé de la problématique liée à l’analyse des lieux de méditation 
Logique de démonstration
Ando TADAO : sa vie, ses oeuvres, sa philosophie
Présentation biographique d’Ando TADAO
Présentation des oeuvres d’Ando TADAO
Philosophie d’Ando TADAO
Ando TADAO : sa conception des lieux de méditation, son appréhension du site et ses méthodes de construction
Analyse générale des lieux de méditation d’Ando TADAO 
Présentation de trois lieux de méditation d’Ando TADAO
L’Eglise de la lumière
Le Temple de l’eau
Le Méditation space au sein de l’Unesco
Analyse tranversale des trois lieux de méditation retenus
Le style « Sukiya », conception caractéristique des constructions japonaises ayant influencé Ando TADAO
La conception de la composition spatiale selon Ando TADAO
Le lien entre la nature et le bâtiment : des plans d’eau extérieurs et des arbres omniprésents
Les jeux de lumières : des ouvertures sur des espaces intermédiaires
La géométrie : l’utilisation par Ando TADAO de l’orientation et sa conception des lieux
Les parcours d’accès : de longs chemins destinés à favoriser l’entrée en méditation
L’agencement et l’élévation des murs
L’utilisation essentielle du béton
Les symboles imaginés en osmose avec l’esprit de méditation
Conclusion 
Sources 
Index des illustrations

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