Le matériau de l’étude : Polypropylène renforcé avec 40% en fibres de verre (Le PPGF 40)
Le matériau composite utilisé dans le cadre de ces travaux est un polypropylène (PP) chargé en fibres de verre à un taux massique de 40%. Le matériau est obtenu par injection d’un mélange de granulés de polypropylène chargé en fibres de verre courtes d’une longueur ne dépassant pas 1 mm et de granulés de polypropylène pur. Le matériau nous est fourni sous la forme de plaques injectées de dimensions 400 * 320 * 3 mm3 .
La Matrice polypropylène
La phase continue dans un composite est la matrice. Elle assure la fonction majeure de lier les renforts entre eux ce qui permet le transfert des charges sur ces derniers. Sa cohésion avec les renforts constitue un point très important pour la tenue mécanique du matériau. Dans le secteur automobile deux matrices organiques sont les plus utilisées, à savoir : les thermodurcissables et les matrices thermoplastiques (1). Les polymères thermodurcissables sont infusibles et insolubles après la réaction de polymérisation. Dans cette famille de polymères on trouve principalement les polyesters insaturés largement utilisés pour des pièces structurantes automobiles extérieures comme les hayons ou les pare-chocs. Cependant leurs difficultés de mise en œuvre (procédé de compression à chaud, solvant, cycle de polymérisation long et cadence de fabrication limitée) et leurs impossibilités de recyclage fait d’eux des polymères moins avantageux que les thermoplastiques. Effectivement ces derniers présentent plusieurs points positifs (2) :
• Facilité de stockage sous forme de semi-produits à température ambiante (durée de vie quasi infinie)
• Possibilité de recyclage
• Fabrication en grandes séries
• Une meilleure tenue à la fatigue
On pourra les diviser en trois groupes :
• Les polymères de grande diffusion comme le polypropylène
• Les polymères techniques comme les polyamides,
• Les polymères à hautes performances (applications aéronautiques) comme le PEEK, le PPS, le PEI et le PES. (1)
Le polypropylène est un copolymère thermoplastique semi-cristallin de formule chimique (- (CH3-CH-CH2)-)n. Il est composé d’une phase amorphe, où les chaînes moléculaires sont disposées de manière aléatoire, et d’une phase cristalline, où elles sont ordonnées sous forme de lamelles groupées autour d’un centre de germination formant ainsi, des sphérulites (3). Le comportement des polymères semi-cristallins est étroitement lié à la température d’utilisation. Nous parlons ainsi de la température de transition vitreuse (Tg) délimitant le passage du comportement vitreux, au comportement caoutchoutique. En effet au-dessus de la Tg, les chaînes moléculaires constituant la phase amorphe du polymère se retrouvent libérées et présentent une grande mobilité. En continuant de chauffer le matériau, on atteint la température de fusion, à partir de laquelle le matériau se trouve dans un état fluide.
Le Renfort : fibre de verre
Les fibres jouent un rôle essentiel dans le matériau composite en lui conférant une rigidité supérieure à celle de la matrice. Deux grandes familles de fibre sont à distinguer dans les matériaux composites, à savoir les fibres continues et les fibres discontinues. Les fibres de verre sont les renforts les plus utilisés dans l’automobile. Le verre est un matériau vitreux et isotrope. Il possède un comportement élastique pur. Il est composé essentiellement de silice (SiO2), d’un oxyde alcalin (oxyde de sodium) et d’un oxyde alcalino-terreux (oxyde de calcium). Il existe plusieurs types de fibres dont chacun possède des propriétés spécifiques. Nous citons par exemple :
• Le verre R ou S pour les fibres utilisées dans les technologies de pointe qui exigent des performances très élevées. Ces fibres possèdent une meilleure tenue mécanique, chimique et thermique.
• Le verre D: ces fibres se caractérisent par leurs bonnes propriétés diélectriques ; c’est pourquoi elles sont utilisées dans la fabrication des composants électroniques tels que les circuits imprimés.
• Le verre C: ce type de verre est employé dans les industries qui nécessitent une protection anticorrosion grâce à sa bonne tenue chimique.
• Le verre E : ce dernier est le plus couramment utilisé car il possède une grande facilité de fibrage, des propriétés mécaniques et un coût modéré.
Procédé d’injection
Le moulage par injection est largement utilisé dans l’industrie automobile. Avec le moulage par compression, ces deux procédés constituent les principales méthodes de mise en œuvre des matériaux polymères. Contrairement au moulage par compression, le moulage par injection présente l’intérêt de produire des pièces à géométries complexes et à des cadences élevées. La fabrication de matériaux composites thermoplastiques par procédé d’injection est organisée en plusieurs étapes (Figure 1-1). Tout commence par l’introduction de les granulés du polypropylène chargé en fibres de verre dans la trémie d’alimentation. Ils s’écoulent, par gravité, dans la vis d’Archimède et subissent un chauffage progressif, à l’intérieur de celle-ci, jusqu’à l’état fondu. Cette vis d’Archimède permet d’homogénéiser les matériaux par cisaillement et de le diriger vers le moule, toutefois (par l’effet de cisaillement) elle occasionne une rupture des fibres et donc une diminution de leur longueur moyenne. Ensuite, la vis va injecter le mélange ainsi fondu dans le moule à vitesse, température et pression contrôlées. La pression d’injection est maintenue jusqu’à ce que cette dernière soit uniforme dans tout le moule. En phase finale, le matériau est refroidi et la pièce est éjectée en ouvrant le moule. Les pièces obtenues par ce procédé présentent une microstructure dite cœur-peau avec une distribution spatiale de fibre variable en fonction de la géométrie de la pièce, et des paramètres d’injection.
Microstructure cœur-peau
Les pièces moulées par injection possèdent une microstructure particulière dite cœurpeau qui est très largement étudiée. Cette microstructure possède une distribution et une orientation de fibre variable dans l’épaisseur. Plusieurs auteurs se sont basés sur des observations microscopiques et l’ont divisée en 3 couches (4,5), deux couches de peau et une couche de cœur. Nous trouvons également des études plus poussées montrant à l’issue d’observations micro-tomographiques que la distribution des microstructures se fait, dans l’épaisseur, en 5 couches (6–10), deux couches de peau, deux couches intermédiaires et une couche de cœur.
• Les deux couches de peau, directement en contact avec le moule, présentent une orientation aléatoire. À cause de l’effet fontaine et de la vitesse de cristallisation relativement rapide dans cette zone, le matériau perd rapidement en fluidité et les fibres n’ont pas le temps de s’orienter dans le sens d’injection et présentent donc une orientation aléatoire (11–13). De ce fait, l’épaisseur de cette couche, largement inférieure à l’épaisseur des autres couches, dépend étroitement de la vitesse de refroidissement et donc de la température du moule (14).
• Les deux couches intermédiaires sont caractérisées par une orientation majoritaire des fibres dans le sens d’injection. Cela s’explique par la force de cisaillement relativement importante dans cette zone ainsi qu’une vitesse d’écoulement « moyenne ». Les conditions sont donc optimales pour une orientation des fibres dans le sens d’injection (15).
• La couche de cœur a une orientation des fibres perpendiculaire au sens d’injection. Deux facteurs sont responsables de la présence de cette couche, le premier est la présence d’un écoulement à la fois longitudinal et transversal dû à la géométrie divergente (plaque plane rectangulaire) des pièces qui a tendance à orienter les fibres perpendiculairement au sens d’injection. Le deuxième facteur est la force de cisaillement très faible dans cette zone. Le profil de vitesse d’écoulement quasi plat dans cette zone a lui aussi un rôle dans l’existence de cette couche, car il permet de maintenir cette orientation dans toute la pièce sans créer de réorientation (11,12,16) .
Achour et al (17) ont étudié la microstructure du polypropylène chargé à différents taux de fibres de verre, en particulier à 40 % à l’aide d’analyse micro-tomographique (figure 1-3). Ils ont confirmé l’existence de 5 couches et ont pu quantifier le taux de fibres dans ces dernières. Ils ont trouvé que la zone de cœur est plus dense que les autres zones avec une fraction volumique de fibres de 30% alors que dans la zone de peau elle ne dépasse pas les 20%. Ils ont démontré aussi que les zones de peau « réunies » représentent près de 77% de l’épaisseur du matériau.
Effet des paramètres d’injection sur la microstructure
Les pièces et structures composites injectées sont souvent sollicitées dans le sens d’injection, car c’est le sens présentant les meilleures propriétés mécaniques, il s’agit donc d’obtenir des pièces avec une zone cœur beaucoup moins épaisse que les autres. Dans cette perspective, plusieurs études se sont intéressées à l’influence des paramètres d’injection sur la microstructure induite lors du procédé d’injection ; on note par exemple que l’augmentation de la vitesse d’injection engendre une augmentation de la zone cœur (18,19) ; la diminution de la température du moule entraîne une augmentation des couches intermédiaires et donc une réduction de la zone cœur (20). L’augmentation du temps de maintien après injection entraîne une diminution de la zone cœur (21,22). Le taux de fibres a lui aussi une influence sur l’épaisseur de ces couches. Megally et al (23) ont démontré que pour de faibles taux de fibre (inférieurs à 10%), l’effet cœur-peau disparaît. Dans une autre étude rapportée par Sphar et al (24) sur du polypropylène chargé à différents taux de fibres allant de 10% jusqu’à 40%, les chercheurs ont observé une augmentation de la zone cœur avec l’augmentation du taux de fibres. Nous trouvons la même conclusion dans une autre étude menée par Achour et al (17) sur du polypropylène chargé en fibres de verre à des proportions de 30%, 40% et 60 %. Dans cette étude les auteurs ont noté que pour le matériau chargé à 60 %, la zone cœur atteint le tiers de l’épaisseur.
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Table des matières
INTRODUCTION GENERALE
1. CHAPITRE 1: LITTERATURE ET VERROUS
1.1. Le matériau de l’étude : Polypropylène renforcé avec 40% en fibres de verre (Le PPGF 40)
1.1.1. La Matrice polypropylène
1.1.2. Le Renfort : fibre de verre
1.1.3. Procédé d’injection
1.2. Généralités sur le comportement mécanique du matériau
1.2.1. Comportement monotone de la matrice pure
1.2.2. Comportement en traction monotone du PPGF40 – Effet de l’orientation de la microstructure
1.2.3. Effet de la vitesse sur le comportement mécanique du PPGF
1.2.4. Comportement mécanique en fatigue
1.2.5. Mécanismes d’endommagement des thermoplastiques
1.3. Modélisation du comportement mécanique des matériaux composites
1.3.1. L’approche phénoménologique
1.3.2. L’approche multi-échelle
1.3.3. Modèles d’homogénéisation en élasticité linéaire
1.3.4. Modèle d’homogénéisation en mécanique non linéaire
1.3.5. Choix du modèle
1.3.6. Modélisation de l’endommagement en fatigue : hypothèses et considérations générales
2. CHAPITRE 2: MATERIAU ET METHODES
2.1. Matériau de l’étude : Le composite PPGF40
2.1.1. La fibre de verre
2.2. Caractérisation de la microstructure
2.2.1. Caractérisation par ultrasons
2.2.2. Observation microscopique
2.3. Caractérisation physico-chimique
2.3.1. Analyse thermique : Calorimétrie différentielle à balayage (DSC)
2.3.2. Essais dynamiques spectroscopie mécanique (DMTA)
2.4. Caractérisation mécanique
2.4.1. Traction monotone
2.4.2. Essais de charge décharge
2.4.3. Essais de fatigue traction- traction
2.5. Analyse des mécanismes d’endommagement
2.5.2. Fractographie
3. CHAPITRE 3 : CARACTERISATION EXPERIMENTALE
3.1. Caractérisation de la microstructure
3.1.1. Caractérisation par ultrasons
3.1.2. Caractérisation par observation MEB
3.2. Caractérisation physico-chimique
3.2.1. Calorimétrie différentielle à balayage (DSC)
3.2.2. Analyse thermomécanique (DMA)
3.3. Caractérisation mécanique
3.3.1. Comportement monotone quasi-statique
3.3.2. Effet de la vitesse de déformation
3.3.3. Effet de la température
3.3.4. Endommagement et plasticité macroscopique : essais de charge-décharge
3.4. Comportement en fatigue
3.4.1. Courbes de Wöhler – effet de la fréquence – auto-échauffement
3.4.2. Analyse thermomécanique
3.5. Conclusion
4. CHAPITRE 4 : ANALYSE DES MECANISMES D’ENDOMMAGEMENT
4.1. Introduction
4.2. Analyse qualitative des mécanismes d’endommagement
4.2.1. Etat initial et zone d’observation
4.2.2. Analyse qualitative des mécanismes d’endommagement et de plasticité en monotone.
4.2.3. Analyse des mécanismes d’endommagement en fatigue flexion trois points
4.2.4. Comparaison monotone – fatigue par fractographie
4.3. Analyse quantitative de l’endommagement
4.3.1. Eprouvettes sens travers (90°)
4.3.2. Eprouvettes sens long (0°)
4.3.3. Eprouvettes sens (45°)
4.3.4. Analyse des résultats – Paramètre d’endommagement micro
4.4. Analyse multi-échelle de l’endommagement
4.5. Conclusion
5. CHAPITRE 5 : MODELISATION MICROMECANIQUE ET PREDICTION DE LA DUREE DE VIE EN FATIGUE
5.1. Introduction
5.2. Principe de la démarche hybride proposée
5.3. Présentation du modèle micromécanique
5.3.1. Les équations de base
5.3.2. Plasticité de la matrice et méthode des modules sécants
5.3.3. Les différentes étapes du modèle micromécanique
5.4. Résultats
5.4.1. Modélisation de la plasticité seule
5.4.2. Modélisation de l’endommagement à l’interface fibre-matrice
5.4.3. Prévision de la durée de vie en fatigue
5.4.4. Critère de rupture en fatigue
5.5. Conclusion
CONCLUSION GENERALE
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