Le loup dans la littérature de jeunesse

Durant des siècles et dans de nombreuses cultures, le loup a été utilisé de façon symbolique pour faire référence à la peur et au danger. La peur du loup-garou a créé des mythes qui se sont transposées dans les contes traditionnels oraux puis écrits, et encore aujourd’hui le loup est un personnage très convoité dans la littérature de jeunesse. Il est également un « outil » dans l’éducation des enfants : de tout temps, il a été utilisé pour l’éducation par la peur. Au XVIIIème siècle, les thèmes des contes populaires de la tradition orale sont repris pour les transformer en un discours visant à contraindre les enfants à se conformer aux règles du code social prôné par la société d’alors. Néanmoins, même s’il représente le danger et éveille chez les enfants une peur plus ou moins forte, cela n’empêche pas qu’il soit tout autant apprécié. Pour citer Nic Diament, « La littérature de jeunesse de chaque époque reflète assez précisément l’idée que l’on se fait à ce momentlà des besoins des enfants, de leur place dans la société, de l’éducation qu’ils doivent recevoir, de ce qui est bon ou néfaste pour eux et des vertus éventuelles que l’on attribue à l’acte de lecture. »  Si, autrefois, les éducateurs ont tiré profit de l’image du loup pour former les enfants par la peur, quel rôle lui donne-t-on aujourd’hui ? La question qui se pose ici est de savoir si les représentations que l’on a du loup ont évolué, et notamment comment ce personnage est-il perçu par les lecteurs d’aujourd’hui.

Pour tenter de répondre à cette question, la recherche se basera tout d’abord sur une évaluation des représentations initiales des élèves sur le loup, qui se suivra par une mise en réseau autour de ce personnage. Une attention particulière sera portée au choix des albums de littérature de jeunesse pour qu’ils permettent d’apporter une nuance au personnage. Enfin, l’évaluation finale permettra de comparer les représentations des élèves au début et à la fin du réseau littéraire.

Le loup et la littérature de jeunesse

Naissance de la problématique

Dans les deux classes où j’effectue mon stage, c’est-à-dire en PS/MS et GS/CP, les moments de lecture offerte sont très appréciés et attendus par les élèves. C’est également un instant privilégié pour moi pour les observer pendant ma lecture, noter leurs réactions, pour pouvoir ensuite proposer des lectures, des activités et voire même des projets en fonction de leur attitude vis-à-vis d’un livre. Au début de l’année, j’ai choisi de laisser les élèves choisir la lecture du jour dans la bibliothèque de la classe. Ce qui a retenu mon attention, c’est que les élèves redemandaient souvent les mêmes lectures ; mais plus encore, ils redemandaient toujours des livres où le personnage principal était un loup. En partant de ce constat, j’ai été amenée à me demander d’où venait cet intérêt particulier pour ce personnage. Qu’est-ce qui était vecteur de plaisir dans ces histoires ? En observant les élèves pendant la lecture, je notais bien souvent qu’ils avaient peur, ou du moins qu’ils faisaient semblant d’avoir peur, ce qui les faisait rire. En maternelle cela était davantage flagrant : les PS et MS exagéraient leurs réactions au point de théâtraliser leur émotion. Je me suis donc concentrée sur le personnage du loup en tant que symbole de la peur et de la terreur. Le loup est aussi très présent dans la littérature contemporaine, mais loin du stéréotype que l’on connaît. De ce fait, je me demande si cette nouvelle utilisation du loup pourrait permettre aux élèves de dépasser les stéréotypes construits autour de cet animal.

Les différentes apparitions du loup dans la littérature de jeunesse : des mythes à la littérature contemporaine

À la fois aimé et détesté, inspirant peur et admiration, doté de pouvoirs maléfiques ou protecteurs, le loup est un personnage ambigu de la littérature. Le loup a une présence importante dans la littérature de jeunesse en tant que symbole de la peur, de la haine et du mépris. L’image traditionnelle du loup est mauvaise – il est perçu comme un prédateur. Cela est renforcé par son apparition dans le conte traditionnel comme un animal cruel – comme dans Le Petit Chaperon Rouge ou Les Trois Petits Cochons. Il est décrit comme un personnage qui mange des enfants, des personnages âgés, mais aussi des animaux plus faibles que lui. Il est donc utilisé comme un symbole : un danger, tout ce qu’il y a de mauvais.

Dans la mythologie grecque et latine, le loup incarne le mal, la sauvagerie, mais il peut aussi apparaître comme protecteur, voire nourricier, comme la louve allaitant Remus et Romulus. À cette époque déjà, le loup servait à effrayer les enfants pour obtenir obéissance. Les représentations varient chez les poètes et les philosophes également : pour Platon, le loup est un tyran, alors qu’il symbolise des valeurs guerrières chez Homère. Dans les fables d’Esope, le loup permet de pointer la méchanceté de l’homme. Au Moyen-Âge, une œuvre en particulier devient emblématique : le Roman de Renart et le loup Ysengrin. L’image de la bête sauvage continue d’être utilisée dans le roman. Plusieurs caractéristiques du loup ressortent de cet ouvrage, caractéristiques qui n’ont cessé d’apparaître par la suite dans la littérature de jeunesse : l’avidité, le manque de réflexion, ou la bestialité. On en retient que le loup est simplement un animal féroce motivé par ses besoins primaires. Le Bestiaire du Moyen-Âge, aussi appelé « Livre des natures des animaux », utilise cet animal dans ses récits pour chasser la crainte qu’inspirait le loup à cette époque.

Le loup, et le monde des animaux en général, est un moyen de critiquer la société et les hommes. Au XVIIème siècle, plusieurs auteurs exploitent ainsi l’image du loup : Agrippa Aubigné, à travers son poème Les Tragiques (1616) ; La Fontaine, à travers ses fables ; ou encore Charles Perrault et les frères Grimm à travers les contes. Agrippa Aubigné s’en prend à la folie criminelle des hommes représentés par le loup, notamment les rois, les catholiques, le pape, les tyrans et leur armée, en opposition à l’agneau qui symbolise les protestants opprimés. Chez La Fontaine, le loup est plus ambigu. En effet, si dans « Le loup et le Renard » (1678) il revêt l’image du loup fort et malin, dans « Le Loup et le Chien », il est plutôt un symbole de liberté. Le fabuliste utilise différents traits de caractère du personnage en fonction de l’idée qu’il veut faire passer à travers ses écrits. Ainsi, le loup peut être cruel, méchant, naïf, ingrat, avide, spirituel ou philosophe, mais La Fontaine insiste tout de même sur le fait qu’un loup reste à jamais un loup.

C’est à la fin du XVIIème siècle que Le Petit Chaperon Rouge de Charles Perrault voit le jour. Dans cette version du conte, le loup finit par dévorer le Petit Chaperon Rouge, alors que dans la version des frères Grimm un bucheron la sauve. La fin et la morale des deux versions ne s’accordent pas : si l’une se termine de manière tragique avec un avertissement aux jeunes filles quant aux dangers du jeu de séduction, l’autre prend fin avec le châtiment du loup qui paie pour ses fautes.

Tandis qu’au XVIIIème siècle le loup continue d’être associé à la terreur, l’essor des sciences expérimentales des XIXème et XXème siècles permet une vision plus réaliste du monde animal. Ainsi, le loup perd un peu de sa férocité. C’est pendant la révolution industrielle que se développe l’idée d’une supériorité de la nature et l’accent est ainsi mis sur la sincérité des rapports animaux. Aussi, les représentations du loup dans la littérature commencent à changer. Dans Le Livre de la Jungle (1884) de Kipling, Mowgli est élevé par des loups décrit de façon naturelle : ils vivent en meute, ont le sens de la famille et se nourrissent d’autres bêtes mais pas d’humains. Ils obéissent aux règles de la jungle. De la même manière, Jack London, dans Croc-Blanc, peint le loup comme un symbole de la liberté, de la haine de la servitude et de l’esclavage.

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Table des matières

Introduction
1. Cadre théorique
1.1. définition des termes de la problématique
1.2. Ce que dit l’institution
1.2.1. Théâtre
1.2.2. Eveil aux cultures étrangères
1.3. Ce que dit la recherche
1.3.1. Prisca Schmidt et l’approche du Drama
1.3.2. Joëlle Aden et l’apprentissage translangagier
2. Hypothèses, cadre opératoire
2.1. Hypothèses
2.2. Questionnaire
2.3. Préparation de ma séquence
2.3.1. L’école
2.3.2. Ma classe
2.3.3. Ressources de conception de séquence
2.4. Ma séquence d’apprentissage
2.4.1. Compétences et objectifs généraux, modalités, durées, matériel
Conclusion

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