Le langage tambouriné en milieu seereer à travers les devises

Les voyelles : des brèves et des longues

Les voyelles brèves : i – o – e – a – u
– i, comme dans gis (ramasser)
– o, comme dans fop tout)
– e, comme dans pel (bon)
– a, comme dans ram (être sourd)
– u, comme dans ut (déterrer)
Les voyelles longues
Au nombre de cinq, elles ne sont que le dédoublement ou la gémination des voyelles brèves.
– ii, comme dans xa kiid (des années)
– oo, comme dans lool (pleurer)
– ee, comme dans eel (nuage)
– aa, comme dans yaay (la mère)
– uu, comme dans uut (plaie)

Le courage

   Selon Félicité de Genlis dans Les pensées et maximes détachées, (1801), « Le courage est une vertu si nécessaire, qu’il faut s’accoutumer dès l’enfance à en montrer constamment dans toutes les petites choses ainsi que dans les grandes. » cette maxime, les Sérères se l’ont bien approprié et se sont toujours nourris de cette notion de courage. Cette dernière se dessine dans toutes les circonstances vécues de la vie. L’individu use de son attachement à la fermeté pour parvenir à satisfaire ses besoins les plus redoutables. Le courage est perçu dans plusieurs activités de l’homme car on ne nait pas avec la faculté d’affronter le danger mais on l’apprend. Il est donc un acquis que toute personne doit incarner en lui-même parce que renoncer et fuir devant les épreuvres ne peut rien générer et sont perçus comme des signes de lachâceté. L’adage n’en dit pas moins quand il enseigne que : « o saɗar gimatee roog » « le lâche ne croit pas en Dieu ». Ainsi, cette expression du courage est surtout exprimée pendant tout le long du processus de la circoncision. De ce fait, le langage tambouriné aide à dénigrer la peur et permet au personnage visé d’exprimer son ardeur, son zèle dans ses entreprises, tout cela pourrait le pousser à l’action. C’est exactement la raison de la pratique du woong (veillée de danse d’hommes) en milieu seereer sine. A titre illustratif nous avons :
«Yaay tiim,tiim
Yaay tiim, tiim
Yaay tiim, tiim tige ɗom a ɗom
Yaay tiim tige ɗom a ɗom… »
« Mère !du calme !du calme !…
Mère ! du calme ! du calme !…
Mère du calme, du calme…ça fait mal, ça fait mal
Mère ça fait mal, ça fait mal… »
Cette devise illustre le courage du nouveau circoncis face à la douleur de l’opération (l’ablation du prépuce) qu’il a traversé. Par ailleurs cette expression tambourinée est également trouvée à l’occasion des guerres royales dans la société traditionnelle africaine. Ici le héraut à travers son tambour, galvanise et exhorte le héros ou le propriétaire de la devise à se surpasser afin de comparer ses exploits à ceux de ses ancêtres. Voilà somme toute une valeur morale que nous nous proposons d’élucider mais qui ne reste pas la seule en milieu seereer. Certes, nous voyons qu’elle en renferme une grande partie à en croire cette sentence de Mame Madior Diouf : « Le contenu des valeurs morales est certainement un des éléments d’universalité les plus évidents dans les composantes de la civilisation sérère. L’homme idéal y est en effet caractérisé par les vertus d’honnêteté, d’honneur, de courage, de sens de l’effort. O koor, selon les Sérères (o koor kaa sadaa : un homme doit être courageux), a le sens de l’honneur, (o koor kaa jegaa ke ta sedna : un homme doit avoir honte de certaines choses), est honnête (o kiin o paax nee gudaa : l’homme du bien ne vole pas) ».

Le langage tambouriné annonçant une bonne nouvelle

   La société seereer est l’une des sociétés les plus connues dans leur mode de vie très mouvementé des manifestations joyeuses. Ainsi, le tam-tam est l’instrument par excellence qui anime ces festivités. On assistera dès lors à l’occasion de chaque nouveau départ de la vie en société que cela soit en début d’hivernage, après les récoltes, lors d’une cérémonie de circoncision, ou d’un mariage où le tam-tam joue un rôle déterminant. De fait, dans la philosophie des Sérères en particulier ceux du Sine, le tam-tam était considéré comme étant le moyen le plus indiqué pour véhiculer des informations fiables. Paralèllement à l’émission de ces informations, le tam-tam propose une vie salutaire à suivre à travers des devises qui renvoient à la prière. Pour dire que le seereer dans toutes ses activités, accorde une place de premier rang au Tout-Puissant. Cela s’illustre presque dans toutes les devises annonciatrices de bonnes nouvelles, à l’exemple du Naafooj, qui est une devise permettant d’annoncer le début de l’hivernage. Elle rassure les cultivateurs en ce qu’il est favorable ou non d’aller « semer les graines sous terre ». Qu’est-ce-que donc le Naafooj ? C’est une construction sur le mode de la devise et diffusée par le tam-tam du héraut, chaque année, pour saluer la première grande pluie qui arrose la terre communément appelé en seereer : ngam. Selon Amade Faye le Naafooj se définit comme : « Formule rythmique anonyme, héritage sans doute de la culture lamanale (de laman : maître de terres), construite sur le mode de la devise et diffusée par le tam-tam du paar, chaque année, pour saluer la première grosse pluie qui arrose la terre (ngam). Déroulant en trois ou quatre séquences juxtaposées, elle est faite de paroles d’espoir rendant grâce à Dieu (Roog) et proclamant la foi du paysan et sa joie de transférer l’essentiel de ses activités dans l’espace des champs, et d’y vivre, durant tout le temps de l’hivernage, la vérité de cette maxime :
Roog sakee o qonkeer Dieu n’a pas créé d’être qui ne mourra pas
Ndaa a saka o sedkeer ! Mais il a en créé qui n’aura point honte ! »
Partant de cette définition d’Amade Faye, le naafooj est composé d’une superposition de devises dont chacune est constituée de trois ou quatre séquences juxtaposées. Dans l’émission, le héraut commence obligatoirement avec la devise d’ouverture. Cette dernière est faite de paroles d’espoir rendant grâce à Dieu (Roog) en proclamant la foi du paysan et sa joie de transférer l’essentiel de ses activités dans l’espace des champs et d’y vivre durant tout l’hivernage. Dès lors, le Naafooj se fait dans certaines localités du sine comme suit :
« Jam bugum
Jam jegkaa
Roog o yaal pexey
Ngaaf taxu saax a roof
Mbexeyaa mbexey
Mbeec a Roog
ɗax kee tig
Ngaaf taxu saax a roof »
« Je cherche la paix
J’aurai la paix
Dieu Tout Puissant !
Le mil assure l’abondance
Entreprendre sans l’aide de Dieu
Ne servira à rien
A rien
Le mil assure l’abondance ».
C’est justement après ce Naafooj que les paysans rejoignaient les champs pour semer ; et ainsi se familiarisaient avec ces derniers jusqu’à la récolte. Comme la période de semence, la période de récolte aussi était manifestée par des séances rythmées qui exaltaient la bonne récolte dignement acquise à la sueur de leur front. La fête de fin d’hivernage chez les Sérères, marque officiellement la fin des récoltes du mil, de l’arachide, le début de l’an et après tout le moment de remercier Dieu «Roog», pour l’abondance de ses bienfaits. C’était aussi, comme le veut la tradition, le moment de présenter les couples dont le mariage était déjà prévu dans le courant de l’année. Cela marque des moments solennels chez les cultivateurs. Ces temps forts laissent voir autant la valorisation que la revalorisation des exploits champêtres des vaillants paysans qui ont enduré le martyr tout l’hivernage. En effet, quelle est donc la part des devises dans ces manifestations ? Les devises, en effet, y occupent une très grande place. Elles permettent de distinguer tout un chacun dans le sens de galvaniser. Comme le dirait Frédéric Titingha Pacéré, une fois que le tam-tam déclame la devise du propriétaire, ce dernier entre dans un total dépassement, il s’ébranle. Sous l’effet ébranlant du tambour, se dessine le vrai sens de l’honneur des cultivateurs ce qui les poussent à se défier. Ainsi, on pouvait entendre un cultivateur promettre une grande quantité d’épis de mil et il respectait son serment car à l’époque chez les seereer du Sine par exemple « il valait mieux mourir que de renonçer à sa parole ». Par ailleurs, le tambour annonciateur occupe une place très significative dans la circoncision chez les Sérères du Sine. Il intervient dans deux étapes de la circoncision. D’abord la veille de la circoncision où une veillée (woong) est organisée à l’égard des néophytes qui après cette veillée, seront des circoncis. Dans cette veillée, les batteurs déclament le Ndaakin qui, est le tambour des héros. Ce dernier (ndaakin) est une danse de veillée des hommes et futures hommes qui leur font gagner du courage et les galvanisent. Il permet également aux futurs circoncis de surmonter la peur et faire face à ce qui les attend. Une fois que ces néophytes passent à l’acte, on assiste à un nouveau changement d’air du tamtam. Du ndaakin, on passe au ndaamb. En effet, les griots observeront un silence et lorsque viendra l’aube, le kumaakh (le gardien spirituel des circoncis) informera le héraut pour qu’il fasse le ndaamb ou la déclamation de la devise paternelle ou de la devise de la maison suivie de celle annonçant la circoncision. Ces deux devises se suivent l’une après l’autre. Nous avons par l’exemple du ndaamb de mbind jen Saar Mboltoñ (chez Diène Sarr de Mboltogne) :
Yaaya mbaldo!
O mbeet oo mbeet
Um walid a yaaya too jaaøee
Ndikee yaay Seen
Maman, bonjour!
Chaque matin,
Je viens dire bonjour à maman sans recevoir de réponse
Noon waa nguuåun ee!
Fañiig a damangirang
A øisangirang
Njogoy a damong
A øisong!
Hélas, mère chérie,
Les Noon l’ont enlevée !
À l’éléphant tu t’opposes
À l’éléphant tu résistes
Voilà que le lion te capture Voilà qu’il t’emporte !
Il est à souligner que la circoncision en milieu seereer reste toujours une pratique importante où s’exaltent courage, honneur et vertu. Ainsi, le tambour donne vie à cet événement au début et parfois tout au long de la cérémonie. Dans les différentes interventions du tam-tam dans les fêtes ou toutes autres circonstances de la vie en milieu seereer, le mariage est l’un des cérémonies où le tam-tam s’avère être le moteur le plus important de l’événement du début jusqu’à la fin. Aujourd’hui, encore le tam-tam reste l’instrument utilisé pour accueillir la nouvelle mariée chez les Seereer Singandum. Dès lors on assiste à la pratique du maañ qui est rythme ou danse féminine caractéristique du rite matrimonial, exécuté par les griots et presté par les femmes pendant l’accueil dans le foyer conjugal d’une nouvelle mariée, durant l’initiation de celle-ci. Nous citerons l’exemple du maañ, de chez Jen Saar de Mboltoñ :
« ngaaf taxu saax a roof
Ngaaf taxu saax a roof…
Jeen a jega mbind
Jeen a jega mbind
A jega mbind Saar
A jeg ƭiik
Jeen a jeg mbind.
Mbindoo gilgaam o ndooges
Mbindoo gilgaam o ndooges
Gilgaam o ndooges
Mbind oo gilgaam o ndooges »
« Le mil assure l’abondance
Le mil assure l’abondance…
Jen a une maison
Jen a une maison
Il a une maison Saar
Jen a une maison
Il a une maison
oh !famille j’ai épousé celle que j’aime
J’ai épousé celle que j’aime
Oh !famille j’ai épousé celle que j’aime. ».
Il s’agit ici d’une superposition de devise à savoir la devise qui fait allusion au ToutPuissant, ensuite la devise de la maison et enfin la devise annonçant l’accueille de la nouvelle mariée. Ainsi, le tam-tam est le compagnon des femmes au cours de leurs veillées funéraires. Ces dernières se font à travers des mélanges de paroles solennelles, de complaintes et d’allusions coquines, selon les circonstances, reproduites par les tam-tams (souvent deux) des griots batteurs animateurs des différentes phases du rite matrimonial.

Le langage tambouriné annonçant une mauvaise nouvelle

   Ce type de langage est composé d’airs et de paroles rythmés qui interviennent dans les différentes manifestations de la vie humaine. Ces airs rythmés sont présents dans trois étapes de la vie en milieu seereer à l’occasion de funérailles : de vol est commis ou de catastrophe. Dans notre étude, nous pouvons les classer par rapport à leur circonstance ou à leur visée. Nous retenons, entre autres pour ce qui concerne les funérailles : le langage tambouriné annonçant le décès d’un homme et celui de la femme ; pour le vol, on en distingue deux airs : d’abord l’air permettant de donner l’alerte si un étranger parvient à se trouver un asile dans le village et celui donnant l’alerte quand ce dernier commet un vol et enfin le langage tambouriné annonçant une catastrophe surtout en temps de guerre.

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Table des matières

INTRODUCTION GÉNÉRALE
Première partie : Présentation de la société
I. Cadre historique et géographique
1. Origines
2. Localisation
3. Présentation socio-économique et professionnelle
4. La stratification de la société
Deuxième partie : CORPUS
I – Présentation des énoncés représentatifs
1- Les voyelles : des brèves et des longues
1-1- Les voyelles brèves : i – o – e – a – u
1-2- Les voyelles longues :
2- Les consonnes
2-1- Les consonnes qui se lisent comme en français
2-2- Les consonnes qui existent aussi bien en français qu’en seereer mais n’ont pas le même phonème
2-3- Les semi-consonnes
2-4- Les consonnes dites implosives
2-5- Les consonnes pré-nasales
2-6- La dernière lettre de l’alphabet seereer
Troisième partie : Analyse littéraire du corpus
CHAPITRE I : ÉTUDE THÉMATIQUE
I : Étude thématique du corpus
I.1 : La paix
I.2 : Le courage
I.3 : La solidarité
II : Pratiques du langage tambouriné à travers les devises en milieu seereer
II.1: Le langage tambouriné annonçant une bonne nouvelle
II 2: Le langage tambouriné annonçant une mauvaise nouvelle
II.3 : Le décès
II.4 : Le langage tambouriné annonçant un vol (de bétail)
II.5: Catastrophe
III : L’analyse du temps et de l’espace
III.1 : Le temps
III.2 : L’espace
CHAPITRE II : ÉTUDE STYLISTIQUE
IV.1 : L’allusion
IV.2 : La répétition
IV.3 : L’anaphore
IV.4- Les métaphores
IV.5- Les hyperboles
IV.6-Les refrains
CONCLUSION GÉNÉRALE
BIBLIOGRAPHIE GÉNÉRALE

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