La tradition orale, selon Raphael Ndiaye, est :
« La somme des données qu’une société juge essentielles, retient et codifie, principalement sous forme orale, afin d’en faciliter la mémorisation, et dont elle assure la diffusion aux générations présentes et a venir » .
Aujourd’hui, cette tradition orale connait un appauvrissement concidérarable. L’acces à la modernité par les populations africaines et la place de plus en plus prépondérante qui est faite à l’écriture et aux média, créent un contexte tout à fait nouveau et défavorable, d’une part, à la tradition orale africaine. Voila ce qui traduit notre grand interet pour la littérature orale en générale et le conte en particulier.
La littérature orale fait parti des ces traditions orales etun bref rappel nous permettra de dire que cette littérature orale laisse apparaitre trois différentes formes qui se subdivisent en plusieurs genres. Il y a les formes longues (épopée, légende, mythe), les formes courtes (conte, devinette) et les formes non verbales (gestuelle, musique). Mais nous allons nous intéresser au conte, qui occupe une place de choix dans la panoplie des genres oraux. C’est un genre ancien de par sa popularité et sa grande richesse. On ne peut trouver une société qui n’a pas produit de conte. C’est un genre universel et sa structure est simple et quelque peu fixe.
Le conte représente véritablement, dans la littérature orale africaine, la permanence et le mouvement. De par sa fonction qui est de recueillir et de transmettre l’héritage culturel du groupe, d’assurer la sauvegarde de cet acquis culturel et de maintenir l’harmonie de l’homme et de son univers, le conte contient nombre d’éléments qui ne souffrent d’aucune variation. C’est par leur invariabilité, leur fixité si l’on veut, qu’ils doivent maintenir l’étroitesse des rapports entre les ancêtres, les générations passées et les vivants. Ces éléments sont soit des thèmes, soit des valeurs morales, philosophiques, religieuses. Ces derniers tendent à l’insertion toujours plus grande de l’individu dans son groupe social et à l’exaltation de l’harmonie créée par la soumission de l’individu à ce groupe.
Aucun genre littéraire ne peut prétendre à une universalité plus grande que celle du conte. On le trouve sous toutes les latitudes, faisant les délices des peuples les plus divers.
En l’absence de l’écriture, la parole portée de bouche à oreille, depuis plusieurs générations, assume en fait une fonction considérable, non seulement dans la vie de l’individu social, mais aussi dans la marche de tout l’appareil communautaire, en d’autres mots, de la tribu, du groupe ethnique. Le héros à la quête de l’épouse dans les contes wolof du kajoorest le choix d’un tel sujet qui traduit notre grand intérêt pour la littérature orale. En effet ce choix n’est pas gratuit puisqu’ il traduit aussi notre souci de voir cet héritage culturel (la tradition orale), qui maintenait l’harmonie de l’homme et de son univers, être sauvegardé. Nous avons choisi le conte parce qu’il n’est plus à démontrer qu’il joue un rôle important dans la régulation de la société. Le sujet que nous avons choisi portant sur « Le héros à la quête de l’épouse dans les contes wolof du kajoor », trouve son originalité dans la mesure où il essaye de camper un genre universel qui est le conte, dans un milieu riche en histoire.
Dans beaucoup de contes Wolof, on voit un schéma narratif ou le héros, pour acquérir une épouse, doit traverser beaucoup de péripéties physiques mais aussi morales. Cette quête, est présente dans plusieurs contes Wolof. Pourquoi cette quête? Quels sont les différents statuts de cette femme-épouse ? Pourquoi la chercher toujours ailleurs ? Questions parmi tant d’autres qui ont suscité notre curiosité et qui nous ont poussés à faire ce choix. Le conte est avant tout au service de la société, dont à l’instar des autres genres, il doit contribuer à l’éducation des enfants. C’est ainsi qu’il n’exalte aucune individualité, qu’il s’adresse toujours au groupe dans sa totalité et qu’il ne prend une résonnance quelque peu personnelle que lorsqu’il adopte un ton humoristique ou qu’il se charge d’intention satirique.
Aperçu historique et contexte de production
APERCU HISTORIQUE
Notre objectif n’est pas de faire œuvre d’histoire,C’est en nous plaçant suivant une perspective ou nous pourrions être lus par un sujet n’appartenant pas au groupe wolof, ou non averti des réalités socio-culturelles de ce milieu, que nous avons estimé judicieux d’inclure cette partie dans ce présent travail. Ainsi en s’y rapportant, ce lecteur, à défaut d’y trouver une étude approfondie sur le milieu wolof, pourra au moins y repérer quelques-uns des référents socio-culturels auxquels notre analyse nous amènera à faire allusion. Et pour rester dans le sillage de notre projet, on s’attachera à travers cette approche à dégager l’origine du groupe wolof ainsi que les organisations sociale et politique et le système religieux du Kajoor.
ORIGINE
Aussi bien dans les sources orales que dans celles écrites, les premières identifications des Wolofs font référence à un Etat (le Jolof) et à une langue (le Wolof) qui serait dérivée du nom de ce même Etat. Mais une autre source rattache la langue wolof à Ndiadiane Ndiaye , ancêtre mythique de l’empire wolof qui aurait fondé successivement le royaume du Waalo puis celui du Jolof. Couvrant la zone correspondant aux actuels départements de Thies, Tivaouane, Kebemer, le Kajoor, en tant qu’Etat, s’est constitué au XVIe siècle sous la conduite de son premier Dammel-teeñ, Amary Ngoné Sobel, qui le délivra du joug du Jolof ; le Jolof étant luimême issu de l’éclatement du Tékrour. En effet l’arrivée des européens sur les côtes sénégambiens à partir du XVe siècle précipita le déclin de cet empire qui se disloqua définitivement au XVIe siècle au profit des anciens vassaux qui sont le Kajoor, le Baol, le Waalo, le Sine et le Saloum fondé par Mbégane Ndour, un prince Guelawar(au XVIe siècle) Apres la dislocation des royaumes du Waalo et du Jolof, les Wolof se sont disséminés un peu partout dans l’espace sénégambien. Ils constituent le groupe le plus représenté au Kajoor.
Les Wolof du Kajoor sont originaires du nord, et dès leur arrivée au Kajoor, ils ont repoussé les Seereer qui y vivaient antérieurement. Ainsi, ils acquièrent une forte puissance et formèrent un grand Etat qui fut le Kajoor avec l’avènement du pouvoir ceddo au XVIIIe siècle dont le précurseur fut Lat Soukabé Fall . Groupe homogène et très complexe, les wolof du Kajoor vivent avec d’autres minorités ethniques dont les Seereer, les Toucouleurs, les maures qui étaient des résidents permanents et les pasteurs peuls. Malgré cette homogénéité, on note l’existence de diversités linguistiques, culturelles, sociales et politiques.
L’ORGANISATION SOCIALE ET POLITIQUE
A l’instar du grand royaume du Jolof, tous les autres qui y sont issus après sa dislocation, présentent la même structure sociale et politique. C’est le cas, notamment du Kajoor qui nous intéresse ici. Au plan social, la société qui prévalait au Kajoor était organisée en ordres hiérarchiques comme le souligne Bassirou Dieng :
« Aucun individu ne pouvait changer de groupe social : chaque groupe étant endogame et ses fonctions sont héréditaires » .
Ce qu’Abdoulaye Bara Diop appelle « la dimension liberté-servilité » , peut nous amener à distinguer deux grands groupes sociaux : le groupe des gor (ou hommes libres) et celui des jaam (esclaves ou captifs).
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Table des matières
Introduction générale
Plan détaillé
Première partie (Corpus)
Le mariage de Kaam
Sala Ndiaye
L’épouse de Golo
LE VOLEUR ET LE SÁKKETKAT
JABAR JABAR
Les deux princes en quête d’épouse
Trois prétendants pour une épouse
Deuxième partie (Aperçu historique et contexte de production)
Chapitre I (Apercu historique)
Chapitre II (Contexte de production)
TROISIEME PARTIE (Analyse du corpus)
Chapitre II : Analyse thématique
BIBLIOGRAPHIE COMMENTEE
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE GENERALE