Le métabolisme (du grec metabolê, changement) représente l’ensemble des réactions de synthèse et de dégradation ayant lieu dans un organisme vivant, réactions dites anaboliques et cataboliques, respectivement. Ces réactions biochimiques reposent sur l’utilisation d’enzymes, des protéines dotées de propriétés catalytiques, permettant de favoriser une réaction dans un sens ou dans un autre. De façon étonnante, la plupart des voies métaboliques fondamentales sont communes à une grande partie des organismes vivants, aussi variés et éloignés soient-ils du point de vue de l’évolution ; on trouve ainsi les acides carboxyliques (intermédiaires du cycle de Krebs, voir section 1.a.ii) chez tous les êtres vivants connus à ce jour (Pace 2001). Ces similitudes laissent à penser que ces voies métaboliques sont apparues tôt au cours de l’évolution des formes de vie et qu’elles ont été conservées en raison de leur efficacité (Ebenhöh et Heinrich 2001). Dans ce manuscrit, nous discuterons du métabolisme énergétique chez le mammifère et en particulier du métabolisme énergétique cérébral, notamment des voies métaboliques cérébrales de synthèse d’énergie. Parmi tous les organes, le cerveau requiert un apport énergétique énorme comparativement à sa masse, en effet, alors qu’il ne représente que 2% de notre masse corporelle, le cerveau humain adulte consomme environ 20% de l’oxygène et du glucose de notre corps (Magistretti et al. 1999), ce qui en fait son principal consommateur (~5.6mg de glucose pour 100g de tissu cérébral par minute (Erbsloh, Bernsmeier, et Hillesheim 1958)). Ainsi, nous développerons ci-après les différents mécanismes biochimiques de synthèse d’énergie prenant place dans le cerveau.
LE GLUCOSE COMME SOURCE D’ENERGIE
Après leur absorption via les aliments que nous consommons, les glucides sont dégradés en glucose grâce à l’action d’enzymes présentes dans la salive et notre tube digestif. Ce glucose passe ensuite dans le sang, d’où il va pouvoir être acheminé jusqu’à nos cellules, muscles et organes. Le glucose est la principale source d’énergie du corps humain, qui par sa dégradation en adénosine tri phosphate (ATP) permet de fournir l’énergie nécessaire au fonctionnement de nos cellules et donc de nos organes. Le glucose est métabolisé en trois étapes (glycolyse, cycle de Krebs, et oxydo-réduction) pour produire de l’ATP, elle-même dégradée en adénosine di-phosphate (ADP) et en phosphate inorganique (Pi), fournissant la majorité de l’énergie nécessaire au cerveau.
La glycolyse se déroule dans le cytoplasme des cellules, où elle produit 2 moles de pyruvate par mole de glucose. Le pyruvate ainsi généré va être transporté dans la mitochondrie où il va alimenter le cycle de Krebs. Le nicotinamide adénine dinucléotide (NADH) et le flavine adénine dinucléotide (FADH2) produits sont convertis en ATP via la chaine respiratoire de la membrane mitochondriale interne.
Glycolyse
La première étape de la production d’ATP se déroule dans le cytoplasme des cellules et constitue une suite de réactions chimiques nommée glycolyse . Elle correspond au premier stade catabolique de la respiration cellulaire aérobie. Cette étape débute avec une molécule de glucose et se termine par la synthèse de 2 molécules de pyruvate, 2 ATP et la régénération de 2 NADH, H+ . (Eq.I.1). L’équation bilan de la glycolyse est le suivant :
?6?12?6 + 2 ??? + 2?? + 2???⁺ → 2?3?6?3 + 2??? + 2???? + 2?⁺ (I.1)
La glycolyse peut être décomposée en 2 phases. Durant la première phase , phase d’investissement d’énergie, des molécules d’ATP sont consommées afin de permettre la phosphorylation du glucose en position C1 et C6. Enfin, les cinq dernières étapes représentent la phase de libération d’énergie aux cours desquelles des molécules d’ATP et de NADH,H+ sont synthétisées.
Cycle de Krebs
Le pyruvate ainsi créé est ensuite transformé en acétyl-coenzyme A (acétylCoA) au sein de la mitochondrie par la pyruvate déshydrogénase (PDH). Cette réaction produit une molécule de NADH, H+ par molécule de pyruvate, qui va alimenter le cycle de Krebs (Krebs 1940), qui correspond à la deuxième étape . Le cycle de Krebs est une succession de 8 réactions enzymatiques. La majorité de l’énergie fournie par les différentes étapes d’oxydation du cycle de Krebs se retrouve stockée sous la forme de coenzymes réduits (3 NADH, H+ et 1 FADH2), pour une molécule d’acétylCoA entrant. Le cycle de Krebs en lui-même ne crée qu’une seule molécule d’ATP à chaque cycle. Ce sont les coenzymes qui vont être utilisées au cours de la chaîne d’électrons afin de produire de l’ATP.
Chaîne de transport d’électrons et phosphorylation oxydative
La phosphorylation oxydative de l’ADP en ATP se déroule dans la matrice mitochondriale . Cependant cette réaction est endergonique, elle nécessite un apport d’énergie pour se produire. Or, si les molécules de NADH,H+ permettent de fournir cet apport énergétique et bien qu’elles puissent passer la membrane mitochondriale externe par diffusion, elles ne peuvent pas traverser la membrane interne. Les molécules de NADH, H+ passent par la « navette glycérol-3-phosphate» (Glycérol- 3P) (Ansell et al. 1997) : la glycérol-3P déshydrogénase (GPDH) va utiliser le NADH,H+ pour réduire le dihydroxyacétone phosphate en glycérol-3P. Ainsi, la GDPH dont est équipée la membrane mitochondriale interne va réaliser la réaction inverse, en se servant cette fois du FAD+ en tant que cofacteur, générant alors une molécule de FADH2. Cette molécule de FADH2 va alors céder ses protons à une molécule d’ubiquinone (Q10) par réduction, créant alors une molécule d’ubiquinol (Q10H2) dans la mitochondrie, qui va alimenter le complexe III de la chaîne respiratoire mitochondriale .
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Table des matières
Introduction générale
Chapitre I : Contexte neurobiologique
I.1. Le glucose comme source d’énergie
I.1.1. Glycolyse
I.1.2. Cycle de Krebs
I.1.3. Chaîne de transport d’électrons et phosphorylation oxydative
I.1.4. Bilan énergétique
I.2. Besoins énergétiques cérébraux
I.2.1. Activité électrique et pompes ATPases
I.2.2. Production de neurotransmetteurs
I.2.3. Cellules gliales
I.2.4. Transporteurs du glucose
I.3. Réserves énergétiques & Homéostasie
I.3.1. Rôle du cerveau dans l’homéostasie du métabolisme du glucose
I.3.2. Glycogène
I.3.3. Acides gras
I.4. Profils métaboliques complémentaires : le couple neurone-astrocyte
I.4.1. Profil métabolique des neurones
I.4.2. Profil métabolique des astrocytes
I.4.3. Signalisation métabolique
Chapitre II : Mesures « conventionnelles » du métabolisme énergétique
II.1. Besoins en imagerie
II.1.1. Un peu d’histoire
II.1.2. Un outil pour le suivi des maladies
II.1.3. Suivre l’évolution de la maladie grâce aux biomarqueurs
II.1.4. Vers des biomarqueurs du métabolisme énergétique
II.2. L’imagerie TEP
II.2.1. Historique et principes TEP
II.2.2. Radiotraceur
II.2.3. Applications
II.3. Spectroscopie RMN
II.3.1. Historique et principes RMN
II.3.2. Excitation et relaxation
II.3.3. Déplacement chimique
II.3.4. Couplage J
II.3.5. Spectroscopie in vivo
II.4. IRM
II.4.1. Localisation du signal
II.4.2. Notion de Séquence IRM
II.4.3. Pondération en diffusion
II.4.4. Séquence RMN
II.5. IRM vs TEP
Chapitre III : Le métabolisme énergétique dans les maladies neurodégénératives
III.1. Neurodégénérescence
III.1.1. Mécanismes généraux
III.1.2. Dégradation des protéines
III.1.3. Mort cellulaire programmée
III.2. Altérations du métabolisme énergétique
III.2.1. Hypométabolisme
III.2.2. Neuro-inflammation
III.2.3. Résistance à l’insuline
III.2.4. Hyperactivité neuronale
III.2.5. Dysfonctionnement mitochondrial
III.2.6. Stress oxydatif
III.3. Apport des outils d’imagerie à l’étude des maladies neurodégénératives
III.3.1. TEP
III.3.2. IRM
Chapitre IV : Imagerie CEST
IV.1. Principe général & conditions d’observation
IV.1.1. Historique de l’imagerie CEST
IV.1.2. Conditions d’observation
IV.2. Transferts de saturation
IV.2.1. Saturation complète
IV.2.2. Approximation de saturation faible
IV.2.3. Solutions en fonction du temps de l’approximation de saturation faible
IV.3. Contributions au signal CEST
IV.3.1. Transferts d’aimantation
IV.3.2. Mesure des effets de saturation
IV.4. CEST endogène
IV.4.1. Amides –NH
IV.4.2. Amines –NH2
IV.4.3. Hydroxyles –OH
Conclusion générale